HISTOIRE

COMMENT RECONSTRUIRE UNE EDUCATION NATIONALE EFFICACE .

Ministère_de_l'Éducation_Nationale

Notre système éducatif s’est effondré.

Les efforts pour le restaurer sur des bases nouvelles n’ont donné que des résultats mitigés. Quelques progrès ont été réalisés, notamment dans le primaire, grâce à l’action engagée par Jean-Michel Blanquer, mais celle-ci a été interrompue par son remplacement par Pap Ndiaye. Pour réussir à redresser la barre complètement, il faudrait une action qui s’inscrive dans le temps long et en finir avec tout ce qui sape la finalité du système, la transmission des connaissances et du savoir, qu’il s’agisse de l’idéologie de l’égalitarisme ou des théories pédagogistes, qui ont mené aux résultats que l’on connait.

Il convient de s’interroger sur ce qui faisait la pérennité du système éducatif dont le succès ne s’est pas démenti pendant presque un siècle, assurant l’ascenseur social et contribuant à former des adultes instruits, munis d’un solide esprit critique et formés pour affronter la vie civique, sociale et professionnelle.

De quoi a-t-on besoin ? 

D’objectifs clairs pour les contenus d’enseignement, de méthodes qui prennent en compte les acquis des neurosciences (on sait comment le cerveau apprend), et d’enseignants correctement formés. Jean-Michel Blanquer avait amorcé la tâche : l’accent mis sur les savoirs fondamentaux, la création du Conseil scientifique présidé par Stanislas Dehaene, professeur de neurosciences, et la mise en place du Conseil des Sages de la Laïcité. Nous ne partons pas de rien. Il faudrait aller beaucoup plus loin dans la refondation.

L’écosystème « Education nationale »

On l’ignore souvent, mais notre système éducatif reposait sur tout un écosystème qui en assurait la solidité et la cohésion. Porté par l’universalisme républicain, il avait formé des bataillons d’instituteurs et de professeurs sur un modèle unique, parfaitement en cohérence avec la société qui les entourait. Et le dispositif poussait ses ramifications jusqu’au plus près du terrain. Le principal outil était constitué par les Ecoles normales départementales dans lesquelles on entrait par concours, en seconde et où les « élèves-maîtres » passaient le bac avant de suivre l’année de formation professionnelle. Ils pouvaient alors s’initier aux doctrines pédagogiques et à la psychologie des enfants et des adolescents, découvrir le « code soleil », sorte de bréviaire de l’instit, et s’entraîner dans les classes d’application implantées autour de l’’école. Les élèves-maitres étaient recrutés parmi les élèves des cours complémentaires, plus tard, des collèges, par le biais de classes de troisième spéciales « préparatoires au concours » implantées au moins à raison d’une par canton, de façon à capter le public issu des classes sociales ouvrière et moyennes. Les professeurs des écoles normales étaient eux-mêmes formés à part, par l’Ecole normale supérieur de Saint-Cloud. Des fondations en béton pour l’enseignement primaire, assurant la cohérence du dispositif dans toute la France : des instituteurs avec les mêmes points de repères de Lille à Marseille et de Brest à Strasbourg.

Ce n’est pas par hasard si le système a commencé à dysfonctionner quand on a remplacé les écoles normales par les IUFM confié aux universités. Tragique erreur :  autant de formations différentes que d’universités. En plus des contenus fumeux et plus idéologiques que professionnalisant. Trop de professeurs se retrouvent devant une classe pour la première fois sans avoir jamais fait le moindre stage de formation.

Il ne s’agit pas de revenir au passé.

Mais au moins cherchons à nous en inspirer. J’ai à l’esprit quelques priorités : s’assurer du niveau des connaissances en rapport avec l’enseignement à dispenser au moment du recrutement, sortir la formation des mains des universitaires en recréant des écoles professionnelles où l’on apprend le métier, mettre fin au « prof de la maternelle à l’université » en recrutant à deux niveaux : Bac+ 2 pour maternelle-primaire-collège, Licence pour lycée et classes supérieures. Chacun choisissant son objectif de formation au moment du recrutement.

Une chose est certaine : il faudra du temps, notamment pour former les professeurs de ces écoles professionnelles sur un même modèle, quitte à rétablir l’Ecole normale supérieure de Saint-Cloud.

 


MEDIRE DES CONS EST AUSSI UNE DISCIPLINE OLYMPIQUE

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Dans notre famille, comme chez beaucoup de Français, « médire des cons » est une faculté très développée. C’est bien connu, « on est entouré de cons ».  Et des cons, il y en a de toutes sortes. Comme il se dit doit, « le temps ne fait rien à l’affaire », il n’est pas difficile d’être confronté à de « jeunes cons », on a tous un « gros con » dans le collimateur, on a tous été confrontés au moins une fois « au roi des cons », et les « vieux cons » courent les rues. Evidemment, le corollaire c’est qu’on est forcément le « con » de quelqu’un. Dans le vieux réac que je suis, voisine un vieil anar, ce qui fait de moi un « vieux con patenté » qui peut s’arroger le droit de décerner les titres.  Dans la transmission familiale, nous avons aussi la version "connard", qu'on retrouve dans l'expression :  "dis pas merci, connard !". Cela dit, on ne traite pas quelqu’un de « con » n’importe comment. C’est tout un art et un art ça s’entretient. Voilà pourquoi, quand j’ai vu le bouquin de Luca di Gregorio, j’ai aussitôt sauté dessus. Histoire de se perfectionner ou d’entretenir la forme. Et je n’ai pas été déçu !

Une histoire vieille comme la connerie.

Le « con » émerge du Moyen-Age. C’est un trait culturel français.  Je ne vais pas vous refaire toute l’histoire, achetez plutôt le livre. Vous découvrirez comment le « con » passe de l’eros à l’argot, entre dans la littérature des frères Goncourt à Céline pour émerger au 20ème siècle avec Brassens qui y a consacré plusieurs Chansons. Ah ! Brassens ! J’ai été élevé avec son sirop. C’est pour ça que je suis un fan de Cyrano de Bergerac. Le gascon n’utilise pas le mot, mais il pratique la discipline. Chez lui le « con » est un « bélitre ».  On retrouve dans sa gouaille le complexe français : la médiocrité, c’est le « con », le manque de panache, c’est le « con », l’absence de générosité, c’est le « con »… Le passage  par le polar était inévitable et par l’argot, bien entendu. On arrive alors à Michel Audiard.   Le « con » devient un thème récurrent dans les dialogues au point que les formules deviennent des « citations ». Les cons dont je fais partie n’arrêtent pas de faire des citations d’Audiard, « c’est même à ça qu’on les reconnaît » !  Plus largement, le culte du « con », devient la culture médiatique des trente glorieuses. Traquer les cons devient un sport de copains, largement vulgarisé par les  chansons de Brassens, par la gouaille de Cavanna, par les sentences de Pierre Desproges, par les  provocations du magazine Hara-Kiri, par les qualificatifs de San Antonio… Un âge d’or qui sert encore aujourd’hui de référence, avec son florilège d'expressions cultes du type  :"quand on mettra les  cons  sur orbite, t'as pas fini de tourner !". Ce n’est pas par hasard, si chaque rediffusion des « Tontons Flingueurs » a autant de succès. Car Audiard est aussi servi par des acteurs talentueux qui collent au sujet :   Gabin, Blier, Ventura, Blanche et tant d’autres.

Le con intégral, c’est le « pauvre con ».

C’est Frédéric Dard qui s’est essayé à un classement. C’est ainsi qu’on a les « sales cons » rejetons du roi des cons, les « vieux cons » réticents à accepter le monde réel, et le plus doté, le « pauvre con ». Lui, c’est le peuple. Je ne résiste pas à vous livrer la description qui en est donnée. « Il a des cornes, des traites à payer, des hémorroïdes, une épouse malade ou acariâtre, des gosses anormaux, des grands-mères à élever, des nouilles à tous les repas, des voitures dont le moteur « fait le con », des fausses joies, des vraies misères, une télé en panne les soirs d’Ajax et des tuyaux crevés pour le prochain tiercé. Il dégobille aux noces, habille les morts, débouche les éviers, noie les petits chats, met le pied dans l’unique merde du trottoir, se fait gifler par erreur, casse le manche de son esquimau neuf, ne comprend pas les bonnes histoires, rit aux mauvaises, urine à contre-vent, part à la guerre, n’en revient pas, croit ce qu’on lui dit, dit ce qu’il croit (le  con !), croit croître mais se démultiplie. »

Fermez le ban !                     

Médire des cons, Histoire culturelle d’un snobisme populaire - Luca  Di Gregorio – Editions du Cerf.


WOKISME ET DECIVILISATION

Décivilisation

Le tocsin.

La démission de la présidente de Harvard sonne comme un tocsin pour mobiliser tous ces universitaires, féministes et autres personnes de différentes conditions qui n’en peuvent plus du délire woke. Ils dénoncent, entre autre, la régression des droits féminins qui conduit à avoir des « femmes  à pénis »  dans les prisons pour femmes et les compétions  sportives, la  condescendance du néo-antiracisme à l’égard des Noirs, le refus de la réalité biologique des transsexuels  quand ceux-ci la revendiquent. La  prise de conscience  a  touché des personnalités  de plus en plus  nombreuses, de Barak  Obama à Rishi Sunak, mais le combat ne fait que commencer.

Mondialisation de la bêtise.

Aux Etats-unis, on éduque à l'« antiracisme » et à la théorie du genre dès la naissance, grâce à des albums adaptés (Antiracist Baby, d’Ibram X. Kendi), et, à l’école maternelle, on apprend à parler de « personnes à vulve » et de « personnes à pénis » pour éviter les termes offensants « femme » et « homme ».  Et la France n’échappe pas au phénomène. Notre Planning familial n’a pas voulu être en reste : « Au Planning, on sait que les hommes aussi peuvent être enceints » ! L’autoaffirmation de genre réclamée par les militants est consacrée par la loi du 16 novembre 2018 (autorisant à changer de sexe à l’état civil sur simple déclaration), et l’incitation à la transition sociale dès l’enfance, au mépris du principe de précaution le plus élémentaire, avalisée par la circulaire Blanquer de novembre 2021. Par un renversement ironique, les lois interdisant les thérapies de conversion adoptées sous l’influence des militants (telle celle du 31 janvier 2022 en France) prévoient de sanctionner les psychologues qui prennent en charge le mal-être des adolescents au lieu de les diriger d’emblée vers un traitement hormonal, puis chirurgical ; elles permettent de porter plainte contre les associations, telle la Petite Sirène, qui offrent une information objective aux familles. Devant ces délires, on a envie de crier « aux fous ! ».

Obscurantisme.

On frémit devant le sectarisme de ce mouvement. Le recours à l’intimidation et au harcèlement est proportionnel à l’absurdité des propositions auxquelles il s’agit de convertir les récalcitrants ; ainsi, plusieurs personnes ont subi la mort sociale pour avoir dit que les femmes existaient… Les victimes de cette idéologie sont légion, qui ont perdu leur emploi pour avoir prononcé un mot interdit, avoir vanté la méritocratie à l’école ou la compétence dans l’entreprise, ou, pire encore, avoir osé douter de l’utilité des séminaires de rééducation « diversité et inclusion » - y compris des femmes, des Noirs, des homo et des transsexuels, populations prétendument défendues par cette idéologie. La cabale contre Sylvain Tesson fait partie de cette police de la pensée.

En fait de progressisme, nous sommes face à  un nouvel obscurantisme, à caractère totalitaire qui plus est.  Rien d’étonnant, il obéit en cela  à un tropisme fréquent de la pensée de gauche. Mais le  plus grave est qu’il  contribue au mouvement de « décivilisation » que notre siècle connaît. L’individualisme postmoderne qu’il professe répand l’idée que chacun ne peut être représenté que par lui-même, nous interdisant désormais de dire avec Montaigne : « Chaque homme porte la forme entière de l’humaine condition. » Le postmodernisme wokiste est résolument un antihumanisme.

Décivilisation.

Le signe le plus tangible en est la « non-fête de Noël ».  Le cru 2023 marque un tournant : Noël a beau frôler les 2000 ans d’existence, il a été subrepticement débaptisé - désormais, on l’appellera simplement « fête », comme le souligne Laurence de Charette dans Le Figaro. Le petit guide de la phraséologie de la RATP, diffusé aux agents avant les « fêtes »  en atteste : une nouvelle forme de bienséance - et dans le cas de la RATP, le règlement - interdit de souhaiter un « joyeux Noël », et sont évidemment proscrites toutes allusions à l’Avent, à la crèche, ou, cela tombe sous le sens, à une quelconque naissance.  Merci M. Castex !  On récidive avec l’épiphanie : on se gave de galette « des Rois », parfois « républicaines » (le ridicule ne tue pas), mais il serait malvenu au nom de la pseudo-laïcité, d’évoquer une histoire de rois-mages guidés par une étoile auprès d’un nourrisson qu’ils désirent ardemment glorifier. On touche là à la définition qu’en donnait récemment Philippe de Villiers, à juste titre : le symbole de la crèche consacre la naissance d’une civilisation, la civilisation chrétienne à laquelle nous devons l’universalisme  auquel nos « lumières » se réfèrent. Il faut vraiment beaucoup d’efforts pour ne pas voir combien la tradition nous parle, depuis l’Avent jusqu’à maintenant, d’enfantement, de fécondité, de source de vie…

L’effondrement de notre démographie en témoigne. Non-fête de Noël et non-désir d’enfant nous disent ensemble quelque chose de ce bouleversement anthropologique à l’œuvre. Que l’on soit croyant, agnostique ou athée, ne change rien à l’affaire : en même temps que le déclin de la célébration ancestrale de la Nativité s’opère une rupture civilisationnelle, une sortie de la façon d’être au monde et du mode de relation issus de la chrétienté. Génie du christianisme qui place la venue au monde d’un bébé au cœur de l’espérance et du salut, et fait de chaque naissance une renaissance universelle, une victoire du possible sur l’impossible, de la lumière sur les ténèbres !...

Cette décivilisation ne se traduit pas que par le retour à la barbarie de plus en plus fréquent dans notre société, elle détruit la modernité qui avait tiré son succès de ce que chacun travaillait pour un avenir meilleur, celui de ses enfants. La grave crise qui la traverse tient dans l’effondrement de cette perspective : toute génération puise - quoi qu’en disent les mouvements childfree - sa vitalité dans la suivante ! Ainsi le désenchantement d’un monde qui n’espère plus ses enfants est-il source d’effacements en cascade : effondrement économique et démographique, mais aussi  désaffection pour le travail, rejet des aînés et des aïeux… « Le fil vibrant qui nous relie du passé à l’avenir se perd », tandis que nous marchons vers le néant.

Tout n’est pas  perdu.

Le gérant du fonds d’investissement Pershing Square Capital Management, Bill Ackman, éminent mécène de Harvard, dont il est diplômé, estime que la gestion d’une université de cette envergure - le fonds de dotation de Harvard avoisine les 50 milliards de dollars - devrait revenir à un leader doté de solides compétences managériales plutôt qu’à un membre de la faculté. À ce titre, Ackman suggère que l’université supprime le DEI (département diversité, équité, inclusion) et se dote d’une nouvelle constitution, à l’image de celle proposée par des professeurs de Penn et signée par plus de 1 200 universitaires. Cette initiative propose de renouer avec les valeurs défendues par Benjamin Franklin, fondateur de l’université de Pennsylvanie.

Au militantisme politique et social qui gangrène les institutions d’enseignement, ce projet de constitution universitaire oppose les valeurs des Lumières. Ainsi, il condamne toute nomination, tout avancement ou toute reconduction des personnels académiques et administratifs sur la base de critères tels que le genre, la race, la nationalité, les opinions politiques, l’orientation sexuelle ou les affiliations religieuses, et applique les mêmes principes à l’admission des étudiants. À contre-courant des pratiques dogmatiques du DEI et de son discours qui divise la communauté universitaire entre oppresseurs et opprimés, cette constitution prône l’ouverture d’esprit, la diversité intellectuelle, le respect, la tolérance ainsi que la neutralité institutionnelle et politique. La réforme des campus américains s’annonce ardue, mais les professeurs de Penn à l’initiative du projet de constitution universitaire semblent prêts à ouvrir la voie. Désormais à la croisée des chemins, Harvard ferait bien de s’inspirer de ce projet qui redonne à l’équité et à la diversité leurs lettres de noblesse.

On en finira alors avec cette réécriture partisane des concepts « d’injustice »  et de « discrimination » désignant l’homme blanc hétérosexuel comme un coupable  universel et la « déconstruction » de notre culture, donc de notre civilisation. Car wokisme et décivilisation vont de paire.

 


LE FLEAU TIKTOK

Logo tiktok

 

Comme si il n’y avait pas assez du comeback de Trump l’escroc et de l’obscurantisme wokiste des  universités  américaines qui menacent l’un et l’autre la démocratie  américaine et risquent de la faire sombrer, voici l’effondrement éducatif général constaté par le  classement  Pisa qui met  en évidence une baisse des résultats scolaires qui ne concerne pas que la France. Les pays asiatiques font tous mieux.  En Europe,  les  pays du nord ont en général de meilleures notes.  Cette baisse s’explique par de multiples raisons.  Mais si la  Chine, pour ne citer qu’elle, s’en tire mieux, ce n’est pas un hasard. Rappelons-nous, le Figaro Magazine publiait, il y a un an, un article intitulé : « TikTok : comment la  Chine protège ses enfants et rend les nôtres débiles. » Eh bien, depuis, le mal s’est aggravé et la baisse du niveau de nos élèves en mesure l’impact. 

Le  mal est sérieux !

Michel Desmurget démontre dans son livre « Faites-les lire », l’impact délétère que peuvent avoir les consommations internet non régulées pour nos enfants au point de les rendre débile, surtout si à côté, ils ne lisent pas.  J’y reviendrai  bientôt en détail.  Je viens de terminer son ouvrage  et vous en livrerai les grandes idées. Mais  comment, en parallèle, a-t-on pu laisser un réseau social suivi par  1,7 milliard d’utilisateurs dans le monde, se développer sans entraves alors que Pékin le contraignait à distribuer une version édulcorée et très restreinte à la population chinoise,  pendant que la version débridée a continué d’inonder le reste de la planète. Et le  monde « libre »  laisse  les  citoyens de ses  démocraties consommer sans modération  un média inféodé au Parti communiste. Le  Sénat s’était emparé de la question en lançant une commission d’enquête présidée par Mickaël Vallet (Charente-Maritime, SER) et Claude Malhuret (Allier, LIRT). Les conclusions rendues en juillet dernier sont limpides et reconnaissent des faits d’espionnages de journalistes, des transferts de données d’utilisateurs vers La Chine et des mesures avérées de censure et de désinformation au bénéfice de Pékin et de ses priorités géopolitiques. Peut-être pire encore, les travaux de la commission attestent de la capacité de TikTok à créer des bulles de filtres dangereuses (il suggère par exemple plus de contenus liés aux suicides aux personnes intéressées par la santé mentale) ; reconnaissent que les contrôles d’âge sont inefficaces (40% des 11 ans en France l’utilisent) et admettent que son pouvoir de captation de l’attention est bien plus efficace que les autres réseaux sociaux. « Les constats délivrés par certains praticiens sont préoccupants semble découvrir le législateur français. Impacts en termes de déficit de sommeil, de troubles de l’attention ou encore de sédentarité. » Enfin, les sénateurs exhortent comme « moindre prudence, à nous départir de notre naïveté envers les risques posés aux démocraties par les “guerres hybrides” des dictatures. »

Et il s’aggrave !

En 2022, record pour TikTok et sa société mère ByteDance qui ont enregistré un chiffre d’affaires de 85 milliards de dollars - soit 30% de plus qu’en 2021 - ce qui leur a permis de dépasser les autres géants de la tech chinoise Alibaba et Tencent. Démontrer que ce succès se construit sur la débilisation à grande ampleur des cerveaux n’est pas compliqué : il suffit de regarder les « tendances » qui cartonnent sur ce réseau social. Outre les sempiternels défis souvent idiots et parfois dangereux qui fleurissent régulièrement sur internet, TikTok poursuit son entreprise de déconstruction de l’attention. Comme le rapportait une journaliste, la nouvelle mode consiste à regarder sur son téléphone des films et des séries… mais découpées « à la TikTok », c’est-à-dire réduits en extraits de 90 secondes. Ultime stade de la culture du zapping : on ne regarde même plus une œuvre, on la consomme sous forme de dose comme un drogué avec son crack. Sommé par la Commission européenne de fournir certaines informations et d’instaurer de nouvelles mesures sur des points précis, TikTok n’a rien fait de sérieux pour se conformer aux demandes européennes ou françaises et il faut souligner qu’à bien des égards (modération de contenus illicites, censures), la situation «est encore pire qu’avant».

En France, la  loi dispose déjà d'une interdiction d’utiliser le smartphone à l’école, du primaire au collège - ce qui n’endigue en rien la consommation puisque, selon le Sénat, les utilisateurs de TikTok consultent l’application en moyenne 40 fois par jour et y passent 1 h 47 pour les 4 -18 ans. Des données à corréler, peut-être, avec la chute libre de la France dans le classement Pisa qui évalue le niveau des élèves. Car, au-delà du simple cas TikTok, il y a la question essentielle de la surexposition aux écrans (et aux réseaux sociaux) pour la jeunesse. Là-dessus, une "initiative d’Emmanuel Macron est censée arriver avant Noël".

Espérons que sur ce sujet, le chef de l’État parviendra à donner un cap et à se « départir de naïveté ». En attendant, évitons de mettre sous le sapin  un smartphone ou une tablette en cadeau de Noël à nos enfants. Une pile de livres vaudrait mieux !

 


LIRE REND INTELLIGENT !

Faites les lire

Michel Desmurget est docteur en neurosciences et directeur de recherche à l'Inserm. Le livre qu'il nous propose dont l'article ci-dessous reprend les idées, est solidement documenté et donc à prendre très au sérieux. Et la situation est dramatique. Il y a urgence !

 

Si lire rend intelligent, le contraire est vrai aussi : ne plus lire rend bête.

Il faut lire le dernier livre de Michel Desmurget « Faites-les lire !», si vous n’êtes pas convaincu. Il  n’est pas abusif  d’affirmer que  le déclin de notre  pays  dans les classements internationaux, surtout  par rapport aux pays asiatiques  et les quelques  exceptions ailleurs dans le monde, est lié à l’effondrement de  la  « lecture loisir »  au profit des autres  divertissements au premier rang desquels  on trouve les « écrans »  qui nous fabriquent des « crétins numériques ».

Une place centrale  pour la lecture.

Rétrospectivement, je  m’enorgueillis d’avoir fabriqué  des générations de vrais lecteurs et lectrices par  l’attachement que  j’apportais à la pratique de la lecture  dans mon enseignement. C’est d’ailleurs  confirmé par les  anciens élèves que  je rencontre.  A plusieurs reprises j’ai eu la bonne surprise de m’entendre dire  « vous  m’avez donné le goût de  la lecture ! »  venant surtout d’élèves féminines je dois l’avouer. Mais qu’on en juge !  Dans une semaine de cours de français pour une classe  de  6ème/5ème, la lecture occupait  une place de premier rang : l’heure de lecture expliquée qui permettait de  prendre un texte d’auteur et de le décortiquer pour en extraire la « substantifique moelle » ; l’heure de lecture suivie et dirigée qui  constituait chaque semaine un point d’étape dans la lecture d’une œuvre au programme, généralement un roman, avec  questions sur le ou  les chapitres lus d’une semaine sur l’autre ; l’heure de travaux pratiques consacrée chaque quinzaine au « laboratoire de lecture » qui consistait à choisir une fiche  dans  une boîte où  elles étaient classées   par niveau  avec étalonnage et  possibilité de progresser ;  le moment pris sur l’emploi du temps en français pour choisir un livre dans  la bibliothèque de  la classe que j’avais aménagée et la  présentation d’un ouvrage lu par un élève, en plus de l’offre du CDI ; sans compter avec  l’heure d’orthographe dont le support était toujours un texte d’auteur choisi pour son intérêt littéraire autant qu’orthographique ou grammatical… Et l’heure de rédaction, ou « composition française » qui s’appuyait souvent sur des récits étudiés en amont. Bref, la  lecture occupait une place centrale. Et j’avais en face de moi, des élèves lecteurs : telle  élève avait  lu la  plupart des   pièces de Molière, telle autre m’apostropha en me demandant si j’avais lu la « Fée carabine » de Pennac … Il faut dire  qu’à cette époque-là, les classes bénéficiaient de 6 h de français par semaine et parfois avec une heure dédoublée. Je doute que  la  génération actuelle des  profs ait autant de motivation pour faire lire leurs élèves. D’ailleurs, lisent-ils eux-mêmes ? J’entends déjà la parade : je devais enseigner dans un de ces établissements privilégié à la clientèle choisie.  Que nenni, j’ai passé 30 années dans un collège de zup, dans le quartier de la  Roseraie à Angers.

La lecture, vecteur essentiel de développement.

Michel Desmurget l’affirme : depuis l’émergence du langage, l’humanité n’a rien inventé de mieux que la lecture  pour structurer  la pensée, organiser le développement du cerveau et civiliser notre rapport au monde.  Le  livre construit littéralement l’enfant dans la triple  composante intellectuelle, émotionnelle et sociale. En affirmant l’importance essentielle de la lecture pour le  développement de l’enfant et en soulignant combien ce dernier a besoin d’un étayage familial solide pour devenir lecteur, il ne s’agit nullement de stigmatiser les parents, encore  moins de les critiquer. Il s’agit seulement de leur fournir les éléments de choix et ce faisant de nourrir leur liberté éducative. Et inutile de se lamenter, il n’est jamais trop tard pour  bien faire. Par chance, au royaume des livres, rien n’est jamais perdu : quel que soit l’âge, le sexe, les réticences potentielles ou l’embarras scolaire, l’accès aux bénéfices (et plaisirs) de la lecture reste toujours ouvert.

Lire commence très tôt.

Le goût  de la lecture n’a rien d’inné.  Il s’inculque et se transmet lentement.  Pour les parents, il  est important de  lire avec son enfant, dès le plus jeune âge, mais aussi après, même à  l’adolescence. La  plupart des enfants croisent des livres bien avant de savoir lire.  Les  formes sont multiples : la lecture partagée, le  jeu symbolique quand l’enfant fait semblant de lire, la manipulation d’ouvrages  graphiques tels les imagiers et albums sans textes… Elles posent les bases des usages ultérieurs en inscrivant  le livre et la lecture dans le champ des habitudes quotidiennes. Les enfants aiment qu’on leur lise des histoires. Même les adolescents affectionnent la pratique dans des proportions surprenantes.  Aussi est-il important, pour  les parents de continuer la lecture partagée bien au-delà de l’apprentissage de la lecture. Et quand ils l’abandonnent, en fait ils renoncent à superviser et encourager les activités livresques de leur progéniture, au moment où la tentation de la « récréation numérique » est la plus forte. Il est  démontré que plus les membres du foyer sont exposés aux écrans récréatifs, moins le temps offert aux échanges intrafamiliaux, dont la lecture, est significatif. D’autant plus que l’expérience montre que le fait de cesser de lire des histoires aux enfants  pour favoriser leur autonomie et stimuler leur pratique personnelle est une fausse bonne idée.  C’est le contraire qui est vrai : loin de s’amputer l’une l’autre, les consommations solitaires et partagées ont tendance à se soutenir  et s’additionner. Plus l’enfant est exposé à la lecture  partagée, plus il a tendance  à lire seul. Conclusion : si vous voulez que vos enfants lisent seuls, lisez-leur des histoires quel que soit leur âge, et même (surtout) lorsqu’ils  approchent de l’adolescence.

Fermez les  écrans, ouvrez les livres !

La  concurrence de la télé s’est avérée être la cause la plus évidente du déclin de la lecture. Il a été démontré que la fréquence de la  lecture diminue lorsque les enfants ont un accès accru aux outils numériques, même lorsque ces outils sont dotés de fonctions e-reading (livres numériques).  Les écrans récréatifs sont un ennemi féroce et ancestral  de la lecture. Ainsi, la Région des Pays de la Loire qui croit bien faire en distribuant des  ordinateurs  à tous  les lycéens pour réduire la « fracture numérique », a tout faux, car elle contribue parallèlement à faire régresser drastiquement la  lecture. L’expérience  montre en effet que les applications ludiques  l’emportent massivement dans  l’utilisation de ces ordinateurs au détriment notamment du temps passé  à lire. Si nos ados offraient chaque jour à la lecture la moitié du temps qu’ils consacrent à  leurs jeux vidéo et contenus audiovisuels, ils pourraient lire chaque année autour de cent vingt romans moyens ou une grosse cinquantaine de pavés tels Germinal, le Capitaine Fracasse ou Notre-Dame de Paris.

De plus en plus de livres et de moins en moins de lecteurs.

Pour celui qui voudrait lire, il n’y a pas d’excuses. Notre époque offre de véritables temples voués aux livres, en plus des  librairies dites « spécialisées ». Il suffit de parcourir les magasins Cultura ou FNAC, ou d’aller sur Amazon pour les inconditionnels d’internet, pour se trouver face à  l’embarras du choix. Et il m’arrive  encore d’y trouver un ouvrage que je n’avais pas  prévu d’acheter. Abondance et profusion, donc, mais pour qui ? Si l’on en croit les  statistiques sérieusement établies, le  nombre des lecteurs diminue. L’affaissement brutal de cette activité  au sein des nouvelles générations constitue un véritable désastre pour la fertilité collective de notre société  et ce d’autant plus que la disparition de la lecture s’effectue au profit d’une culture numérique récréative dont le caractère abêtissant est aujourd’hui irrévocablement démontré par un vaste ensemble d’études scientifiques. Les influences négatives  sont avérées  sur le langage, la concentration, l’impulsivité, l’obésité, le sommeil, l’anxiété et la réussite scolaire. Après on s’étonne de la violence …

Allez, vite  un livre !

 


LA LETTRE DE LA HONTE

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Un comportement vieux comme le monde

Le harcèlement entre enfants, qu’ils soient écoliers, collégiens ou lycéens, est vieux comme le monde. A croire qu’il fait partie de la nature humaine. Il est difficile à combattre par les enseignants car  il est généralement couvert par la loi d’airain de l’omerta. Il est rarement apparent en classe, en tout cas difficile à déceler, je peux en témoigner. Mais dès lors  qu’il est connu ou dénoncé par les parents, par exemple, il doit être combattu et sévèrement réprimé par l’ensemble de la communauté éducative.

Bouc émissaire et « tête de Turc ».

L’école est hélas une source d’angoisse pour beaucoup d’enfants isolés, incompris, écartés des « bandes ». À chaque âge, l’être social est confronté à l’hostilité du milieu et ne doit montrer aucune fragilité. Les réseaux sociaux  ajoutent une amplification néfaste et offrent un espace supplémentaire aux adeptes du harcèlement,  méthode cynique pour détourner l’attention du groupe vers un bouc émissaire ou un individu à stigmatiser sous des motifs variés, aspect physique, trait de caractère,… L’apprentissage du respect de l’autre et de la bienveillance mutuelle pour être efficace doit s’accompagner d’une grande vigilance de  la part du corps enseignant sur  les  comportements des élèves. Encore faut-il que les  personnels aient reçu une formation adéquate pour les déceler, ce qui est loin d’être le cas.  

Les carences de l’institution.

Depuis quelque temps, le nombre des suicides d’adolescents va s’accélérant. Et l’on est obligé de constater que le système éducatif ne semble pas à la hauteur. Le cas de Nicolas est emblématique et a  enfin provoqué  une réaction que l’on voudrait salutaire. En mai dernier, les parents de l’adolescent avaient adressé une lettre indignée et sévère à la direction de son établissement, inquiets de la réaction insuffisante des personnels concernés pour mettre fin à une situation qui n’évoluait  pas. Le  jeune de 15 ans, rendu profondément dépressif par le harcèlement qu’il subissait, a fini par se suicider. Le  comble a été atteint avec la lettre du Rectorat qui a été envoyée aux parents : l’administration a voulu voir dans leur requête un comportement agressif et excessif, allant jusqu’à  mettre en doute la réalité des faits. Pire, elle a dénoncé un libellé indigne et les a menacés de poursuites judiciaires graves. On reste glacé par le déni et la froideur d’un texte cautionné par le Rectorat. Ce qui en dit long sur le chemin à parcourir.

Une honte !

Le ministre de l’Éducation, Gabriel Attal, a aussitôt déclaré que la lettre de l’Académie était une « honte ». Réflexe largement partagé par l’opinion. De toute évidence, les dirigeants de l’Académie semblent n’avoir eu qu’une préoccupation : protéger l’ordre établi et se protéger eux-mêmes,  abandonnant la victime à son triste sort. D’insensibles technocrates dans toute leur splendeur. A quelque chose, malheur est bon !  Le Ministre de l’Education  semble décidé à engager une réforme profonde pour mettre les  harceleurs hors d’état de nuire, et leurs familles face à  leurs responsabilités. Il se devait de réagir à ce qui est apparu comme l’absence de toute compassion, le refus d’enquêter sur l’affaire, la négligence répandue qui permet de masquer les différends au moyen des consignes réglementaires.

Un travail de longue haleine.

Gabriel Attal a manifesté sa volonté de créer un électrochoc en convoquant tous les Recteurs et en annonçant des sanctions, en même temps qu’il faisait des propositions qui devraient protéger les plus fragiles des écoliers, collégiens et lycéens et apporter un peu d’assurance et de répit aux parents d’élèves. Cependant, il s’agit d’un travail de longue haleine qui nécessitera un effort considérable et en profondeur, et qui ne débouchera pas toujours sur un succès, tant sont nombreuses les agressions du groupe sur un individu isolé, qu’il s’agisse du harcèlement, du bizutage ou de toute forme de mise à l’écart et de stigmatisation. On l’a vu avec le suicide récent de Marie dont les parents mettent en cause le réseau « Tik Tok » contre  lequel ils ont porté plainte. C’est une question qui mériterait un débat national, car dans la société d’aujourd’hui, les atteintes à la personne sont fréquentes et  multiples, et l’autorité trop souvent remise en cause : que penser quand des élèves convoqués  par un chef d'établissement ressortent de son bureau en se marrant ouvertement (vécu). Les réponses  doivent prendre des formes multiples : formation des personnels, de vraies punitions contre les harceleurs, interdiction de l’usage des réseaux sociaux avant 18 ans (les Chinois le font bien), port de l’uniforme qui apaiserait les relations entre adolescents car il effacerait les différences…

Il n’en reste pas moins que dans le cas de Nicolas, l’Institution s’est couverte de honte et le prix payé reste inacceptable. 

 

 

 


SI J’ETAIS MINISTRE DE L’EDUCATION…

école de la république

 

Vous allez dire : « pour qui se prend-il ? ».

Quand on voit dans quel état se trouve notre système éducatif et la tâche qu’il faudrait accomplir pour le remettre debout, je n’ai pas de scrupules à me dire que  je  pourrais faire mieux que tous ceux qui ont occupé la  place rue de Grenelle. Nul  doute que Gabriel Attal c’est mieux que Pap N’Diaye et  les quelques  mesures qu’il a prises à son arrivée  augurent  d’un début sur de meilleures bases. Mais la  tâche est immense, et le gaillard a beau être habile et savoir écouter, avoir  la  caution du « château », je parie que la machine ne tardera  pas à la broyer. L’étage des Inpecteurs généraux est redoutable …

C’est que tout est à reconstruire. 

Je ne vais  pas passer en revue tous les problèmes et toutes les insuffisances  de la machine éducative : chacun les connaît,  qu’il s’agisse des performances en lecture ou en mathématiques ou en sciences, l’augmentation du nombre des illettrés que les performances mirifiques aux bacs n’arrivent pas à cacher, sans  parler des inégalités qui vont croissant avec près de 80 000 jeunes qui sortent chaque année sans aucune qualification. Du côté des enseignants, ça n’est guère réjouissant : attractivité du métier en berne, démissions galopantes et recrutement quasi en panne. Et quand on pense que plus de 300 000 enseignants partiront en retraite d’ici 2030, c’est-à-dire demain, on mesure l’ampleur de la tâche !

Une tâche gigantesque mais  pas impossible. 

D’abord  parce que les  moyens sont là : un budget de 64,2 milliards d’€ pour  12 millions d’élèves, une dépense qui a progressé de 7% du PIB depuis les  années 80, largement au-dessus de la  moyenne de l’OCDE. Alors, que faut-il faire ? 

La première chose c’est de sortir du déni.

Se soucier d’interdire le port de l’abaya et réfléchir à l’instauration d’un uniforme pour les scolaires, c’est nécessaire, mais on n’est pas sur l’essentiel. Il ne faudrait pas que notre Ministre se contente d’agir sur ce qui est « périphérique ». Je ne suis pas  certain qu’il soit sorti du déni sur  l’amplitude de l’effondrement  du système. Tout est à reprendre de fond en comble et le plus vite sera le mieux, avec deux priorité  en tête :  exclure le  « wokisme »  de  la machine et faire barrage à l’islam politique dont l’abaya est l’arbre qui cache la  forêt,  les  deux  constituant un frein redoutable à la transmission des connaissances indispensables à la formation de citoyens libres et responsables.

Deux réformes profondes s’imposent qu’il faut  mener en parallèle. 

Débureaucratiser et dépyramidaliser un système figé au centralisme asphyxiant,  dévoreur de moyens au détriment de la qualité de l’enseignement ; entreprendre immédiatement une refonte de  la formation des   enseignants par la fin du concept unique « prof de la maternelle à l’université » qui a montré son inefficacité et son ineptie pour un coût qu’on ne retrouve pas dans les compétences.  

Le système éducatif selon mes vœux est d’abord décentralisé auprès des régions avec une large autonomie des établissements, l’Etat gardant la maîtrise des contenus et du contrôle des personnels par l’évaluation fréquente pour assurer la cohérence des carrières et des enseignements. Dans la réorganisation, un soin particulier doit  être apporté  à  la maîtrise des savoirs fondamentaux, lecture, écriture et  mathématiques, grâce au relèvement des heures qui leur sont consacrés, avec un effort ciblé sur le primaire.

Des personnels bien formés.

Qualité de  l’enseignement et primat de la connaissance nécessitent des personnels bien formés et bien encadrés grâce  à une formation continue tout au long de la carrière. Ces deux exigences  passent par  une réhabilitation  matérielle et  morale du métier.  L’effort financier qui vient d’être engagé sur les rémunérations devra  être  poursuivi et s’accompagner d’une gestion dynamisée des carrières rendue possible par la déconcentration et la débureaucratisation. Pendant plus d’un siècle, les « élèves-maîtres » ont appris, dans les écoles normales  d’instituteurs à servir  la nation.  Il faut renouer avec  cet esprit-là. Pour l’avoir vécu, j’atteste aujourd’hui qu’il est  légitime d’en avoir la nostalgie. Dans chaque département, les  écoles normales  de filles et  de garçons  fournissaient un corps d’élite sorti du peuple par son recrutement au service du peuple  dans sa mission.  Au début, on a parlé des « hussards noirs » à cause de  leur costume uniforme, gage de sérieux,  sur  l’ensemble  du territoire. 

Les  écoles  des  « arts  pédagogiques »

Aujourd’hui, il faut réintroduire cette dimension dans la formation des professeurs en mettant en place  dans chaque département, des  « écoles des arts pédagogiques », recrutant à  bac +2 pour les écoles primaires et les collèges, et la licence pour les lycées, des élèves-professeurs à qui on  proposera l’étude des disciplines nécessaires pour enseigner :  conduite de projet, animation d’équipe, gestion des situations conflictuelles, connaissances sur le fonctionnement du cerveau établi par les neurosciences, épistémologie des sciences éducatives, sociologie, sensibilisation aux différentes sortes de handicaps, utilisation et place de l’intelligence artificielle… en plus des  connaissances indispensables dans chaque discipline ou spécialité garanties par le diplôme  de départ. La formation s’étalerait sur deux ans. La première année consacrée à l’étude théoriques des savoirs et techniques, la seconde à des stages en classes d’application,  le tout étant validé  par un certificat final d’aptitude et de compétences pédagogiques. A notre  époque, nous avons besoin de professionnels hybrides autant enseignants que « développeurs sociaux ». L’encadrement dans ces « écoles des  arts pédagogiques » devra faire appel à un personnel trié sur le volet  et reconnu pour ses compétences : l’idéal serait qu’il sorte lui-même d’une « école nationale supérieure des arts pédagogiques » centrée sur les valeurs de la République laïque, une et indivisible, comme  les professeurs des écoles normales sortaient eux-mêmes de «  l’Ecole normale supérieure de Saint-Cloud ». On évitera ainsi les discordances qui existent aujourd’hui entre les Inspe selon l’université à laquelle ils sont rattachés.

Les méthodes du futur.

On ne redessinera pas l’école du futur  en l’appuyant sur les méthodes et inspirations de l’éducation (dite) nouvelle, issues du siècle dernier, type Freinet, Montessori et Cie , d’ailleurs condamnées par les  neurosciences comme improductives en matière d’apprentissage par  le cerveau. Cette école,  centrée sur la réussite scolaire devra  mettre l’accent sur le développement de  la personnalité de chaque élèves et sa capacité à donner du sens à ses apprentissages, à développer sa confiance en lui en même temps qu’elle lui donne les enseignements fondamentaux et lui transmets les  concepts de vie en société fondé sur la citoyenneté et le civisme.

De ce point de vue, l’enseignement professionnel, que le gouvernement souhaite revaloriser, ne saurait se limiter aux incantations habituelles, et se focaliser sur l’exigence d’une meilleure articulation entre la théorie et l’expérience, entre l’esprit et la main, en irriguant l’ensemble du système éducatif parce qu’en fait, cela concerne l’ensemble des enfants, quels que soient leur milieu social et leurs ambitions. De même, il faudra revoir le fonctionnement du collège qui perpétue de fait l’école à deux vitesses faute de pouvoir pratiquer la pédagogie différenciée.

On aura alors une chance de construire un système éducatif  de  l’épanouissement de la  personne et de la démocratie locale, partant de la démocratie tout court.

 


DESOLE Sandrine ! IL N’Y A QUE DEUX SEXES

Genres

 

Les constats scientifiques.

Déjà on sait par les neurosciences et les avancées dans la connaissance du fonctionnement de notre cerveau et du corps humain que les sexes sont bien différenciés dès la naissance et que toutes les cellules  portent le marqueur génétique du sexe en plus des sécrétions spécifiques à chaque genre. Un nouvel ouvrage : « C’est votre sexe qui fait la différence» de Claudine Junien et  Nicole Priollaud apportent des éléments complémentaires incontournables à cette certitude. Utiliser de rares anomalies chromosomiques pour nier ou diluer la réalité binaire du sexe ne relève pas de la science  mais de la théorie, autrement dit d’élucubrations intellectuelles qui ne peuvent  pas être sans graves conséquences. La réalité biologique du sexe  n’est pas ambiguë et vouloir imposer l’idée contraire en rejetant ceux qui la conteste dans l’intolérance, c’est ni plus ni moins sombrer dans l’obscurantisme.

Les différences entre les sexes.

Ce qui revient à dire que déconstruire les stéréotypes de genre entre les hommes et les femmes  ne doit pas revenir à nier les différences qui existent entre les sexes, comme la tendance du moment qui tend à faire de plus en plus de place à la neutralité sexuelle voudrait l’imposer. La différence entre les sexes va bien au-delà de la perception. Les neuroscientifiques vont de découvertes en découvertes. Ainsi la meilleure connaissance de la différence entre les sexes permet d’amener à une meilleure prise en charge de nombreuses pathologies. Ainsi, on sait que le mécanisme de la douleur n’est pas le même chez les deux sexes.  La  dissymétrie des chromosomes sexuels chez les hommes qui sont doté de chromosomes XY quand les filles ont deux X,  fait que les filles font moins pipi au lit ou se lèvent moins  la nuit pour  aller aux toilettes grâce à leurs deux chromosomes X, de même que ceux-ci les protègent mieux des infections courantes. A contrario, en étant mieux armées contre les infections courantes, les femmes sont  plus sensibles aux maladies inflammatoires… Bref, la différence entre les sexes ne se limite pas à la reproduction. On nait avec un corps sexué formant un ensemble  complet : la science nous dit que le cerveau forme un tout avec le corps.  Faire croire qu’on peut naître  dans un corps qui n’est pas le bon ne peut  être qu’une construction intellectuelle, donc une fable.

L’idéologie se substitue à la réalité pour s’imposer.

On comprend qu’une cohorte de scientifiques et d’intellectuels se soient élevés récemment  dans une lettre envoyée au Ministre de la Santé pour que cesse à la CAF la  diffusion d’un document qui « organisait l’accompagnement des enfants atteints de dysphorie de genre ». Dans le  film « Un homme heureux », Catherine Frot incarne une femme qui veut devenir un homme à plus de cinquante ans et doit pour cela se shooter  à  la  testostérone pour avoir une pilosité mâle et se muscler avec un coach pour devenir virile…  sans compter qu’elle ne peut rien changer à sa morphologie sinon s’aplatir les seins mais bien obligée de faire avec son bassin de femme.  La démonstration de propagande transgenre est tournée en dérision et se fait comédie comique tant on peine à croire à la farce de la dysphorie, sur fond de carnaval (ce n’est pas anodin)  où tout le monde se travestit. Par contre, on découvre avec horreur les dégâts provoqués par la guerre idéologique alimentée par les théories fumeuses et délirantes sur le genre, sur des centaines d’enfants pris en charge par une clinique anglaise, aboutissant à des traitements systématiques aux hormones et à des opérations de changement de sexe irréversibles, par des praticiens sans expérience et négligents. Des traitements administrés à des enfants parfois dès l’âge de dix ans, souvent lourds de conséquences…. Faisant de la dysphorie une généralité alors qu’elle  ne devrait être qu’une infime exception.

Et ne pas oublier l’inné !

La soi-disant assignation arbitraire du sexe à la naissance, par laquelle la société enserre le poupon dans ses catégories et l’inscrit dans une socialisation qui l’enfermera dans un genre est encore contredite par l’observation du comportement des enfants en Suède où les jouets sont dégenrés et où pourtant les garçons continuent de préférer les outils et les filles les  poupées, et le  même  constat  est fait par Frans De Waal, un primatologue de renommée mondiale sur le comportement des chimpanzés et  tous les autres primates dans le  comportement des femelles qui ont tendance à jouer avec des poupées…. Il faut donc faire une place à  l’inné. L’éducation non sexuée des enfants est une erreur : il y a certaines compétences que les  jeunes femmes et les jeunes hommes doivent acquérir pour leur vie future et nous avons le devoir de les leur fournir.  

Le combat pour l’égalité.

Nous vivons une époque bien compliquée. Les idéologies obscurantistes, au sens où elles nient l’histoire et la science, quitte à les déconstruire pour avoir le champ libre, progressent dans les  milieux intellectuels de gauche et gagnent du terrain en se servant sans vergogne des places que ses tenants occupent dans les administrations, l’enseignement, la communication. Les partisans des Lumières et de la science et de  leur universalisme sont aujourd’hui assiégés. L’égalité des sexes n’a rien à voir avec le genre. On ne réglera pas le problème des inégalités homme-femme par une éducation neutre, comme si le genre était le problème, alors que  le problème c’est l’inégalité. Nous ferions mieux de nous concentrer sur la justice, l’équité et l’égalité.

Va-t-on vers une nouvelle  défaite de la pensée ?

 

Lire : « C’est votre sexe qui fait la différence » de Claudine Junien et Nicole Priollaud – Plon

          « Différents, le  genre vu par un primatologue » de Frans de Waal  - Ed. Les liens qui libèrent

 


POURQUOI LA DICTEE EST-ELLE NECESSAIRE ?

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Pour sortir un peu des sujets habituels, je vous propose aujourd'hui un texte d'une agrégée de  philosophie qui explique pourquoi dans l'apprentissage de l'orthographe, la  dictée est nécessaire. Ses  arguments  rencontrent  mon  plein accord, et recoupent les motivations qui m'ont amenées à faire des dictées jusqu'à la  fin de  ma carrière, de la 6ème à la  3ème, en précisant que ce n'était pas le seul  moyen d'apprendre l'orthographe, évidemment. Mais je trouve ce texte si  lumineux que je ne résiste pas au  plaisir de  vous le  proposer.

« La dictée, un art du raisonnement, un exercice de recueillement et d’attention »

Par Emma Carenini professeur agrégé de philosophie.

Le ministre de l’Éducation nationale, Pap Ndiaye, a annoncé vouloir encourager la dictée quotidienne à l’école primaire. Le professeur agrégé de philosophie, Emma Carenini, qui, lorsqu’elle enseignait dans un lycée difficile de banlieue, terminait chacun de ses cours par un quart d’heure de dictée, recommande et défend les vertus de cet exercice.

Nous avons tous un souvenir de dictée.

Le plus souvent, c’est un souvenir pénible. Le grand écrivain de l’enfance, Marcel Pagnol, se souvient: «Vers le 10 août, les vacances furent interrompues, pendant tout un après-midi, par un orage, qui engendra, comme c’était à craindre, une dictée.» Dans un monde d’enfants, la dictée est une idée d’adultes. Et dans un monde heureux, la dictée ne devrait être qu’une idée tout court.

On a du mal à imaginer un monde où les enfants demanderaient instamment à faire des dictées.

Et pourtant, ce monde existe. Lorsque j’étais professeur de philosophie dans un lycée difficile de la banlieue parisienne, les élèves de terminale avaient l’habitude de me demander de leur faire faire des dictées. Pourquoi souhaitaient-ils donc ce que personne ne souhaitait? D’abord, c’était la honte ; la honte de ne pas maîtriser la langue française, qu’ils utilisaient pourtant à l’oral au quotidien. Ils ne le montraient pas explicitement, mais je voyais bien qu’ils souffraient un peu de ne pas être capables de rédiger une phrase sans faire de faute d’orthographe. Ils savaient que certains recruteurs en font parfois la première étape des entretiens d’embauche en stage, et ils savaient aussi qu’ils ne la passeraient pas.

Lorsqu’on a monté tous les échelons de l’école française jusqu’en terminale, il est parfois difficile de se confronter à ses lacunes sur les compétences «de base» ; car on ne parle pas ici de fautes bénignes, auxquelles même nos plus grands écrivains ne peuvent échapper - celles qu’on commet par inadvertance ou sur un mot compliqué. On parle plutôt des fautes d’accord ou de conjugaison, qui traduisaient une méconnaissance du fonctionnement de la langue française et de ses structures grammaticales.

L’orthographe n’est pas qu’une question de correction du langage et de l’écrit. C’est aussi la première marche nécessaire à la capacité d’articuler des pensées.

Une langue française mal maîtrisée, ce sont des raisonnements impossibles à mener. Quand on confond les connecteurs logiques, les pronoms, les conjugaisons, on n’a pas seulement du mal à écrire, on a du mal à réfléchir, et ensuite à convaincre et à communiquer. Corriger sa langue, dans ce cas, devient un exercice fastidieux et décourageant. Ainsi la demande d’une dictée était une sorte de cri du cœur, le cri de la «dernière chance». Alors les élèves «dictophiles» se sont acheté un cahier petit format sans carreaux, comme les écoliers de primaire consciencieux qu’ils auraient voulu être. Le dernier quart d’heure du cours de philosophie était consacré à: la dictée.

Mais il y a autre chose qui rend la dictée si précieuse.

Une dictée est l’un des rares moments où l’on prend vraiment le temps, à l’école, d’écouter un texte dans tous ses détails, comme un tableau qu’on scruterait à la loupe. On en pèse chaque mot, on le savoure, parce qu’il ne faut pas aller trop vite. Quand le professeur dicte, il laisse au texte le temps de se déployer. Les élèves notent tous en même temps, concentrés. C’est l’un des rares moments de silence et d’attention complète dans une classe ; seule la littérature parle, chacun l’écoute, et s’éveille dans un même mouvement à ce qui fait la sonorité des mots, la musique du langage, sa relation avec les formes écrites du texte. Et ce faisant, les élèves apprennent une chose essentielle, qu’on ne leur dit pas assez autrement: c’est que la forme compte. Ils y aspirent sans parfois le savoir. Ils apprennent que l’orthographe et la syntaxe sont le bel habillage d’un texte, et que ce bel habillage est indispensable pour en jouir.

Ils apprennent aussi que bien écrire, comme bien parler, est extrêmement important dans la société.

On peut bien leur expliquer que c’est arbitraire, que c’est une construction sociale ; il n’empêche que ça existe, et qu’ils ont besoin de le savoir pour respecter ces règles ou, s’ils le souhaitent ensuite, s’en libérer en connaissance de cause. De la correction d’une dictée à l’art de savoir se comporter en société, il n’y a finalement pas si loin. Je leur disais toujours: “Viendriez-vous en tongs à un entretien d’embauche ou à un enterrement? Vous ne savez pas pourquoi «ça-ne-se-fait-pas» mais vous le faites sans vous poser de questions.”

L’orthographe, c’est la même chose. Il y a peu d’exercices comme la dictée qui unissent ainsi le recueillement, l’attention aux sons, l’attention aux signes, et l’art du raisonnement. Alors ne refusons pas aux élèves ce plaisir et ce soutien. Car nos élèves ont la passion des mots: mirliflore, sylphide, florilège et filigrane, autant de mots qu’ils notaient diligemment dans leur cahier comme des collectionneurs attentifs aux sons et aux images. Et peut-être que la dictée, en encourageant la lenteur, en louant les sons, pourrait encourager cette petite manie bien utile.

A la recherche de la dictée perdue.

Cette expérience avec les élèves m’a rappelé qu’on ne comprend parfois le sens d’une chose qu’en la perdant. C’est d’ailleurs pourquoi l’essence d’une époque n’apparaît jamais bien clairement à ses contemporains ; c’est pourquoi aussi nous avons parfois de la nostalgie pour nos années passées. Et pour me rappeler que même les exercices pénibles ont un sens, peut-être fallait-il ces quelques élèves à la recherche de la dictée perdue.

 

 


L’EDUCATION NATIONALE A RATE LE VIRAGE DU NUMERIQUE

Informatique 2

On avait l’habitude de comparer  l’Education nationale à l’armée rouge pour la  coloration de son personnel  mais aussi pour sa lourdeur, le  « mammouth », et sa lenteur à manœuvrer. Je  suis bien placé pour affirmer qu’en son temps elle a raté le virage de l’audiovisuel : il a fallu un temps fou pour  obtenir des salles de classes  équipées d’autres choses que le tableau noir et les bâtons de  craie.  Ce  n’est que dans les dix dernières années de ma carrière que le rétroprojecteur s’est installé au milieu des  élèves et si mes  cours ont fait appel  au magnétophone et à des illustrations audio, c’est   parce  que j’apportais mon  matériel personnel, magnétocassette et lecteur cd.  Je ne doute  pas qu’avec  la décentralisation, les départements aient équipé les  collèges en ordinateurs et  en tableaux interactifs. Mais pour autant, l’Education nationale n’a pas, que je sache, apporté une formation professionnelle à la hauteur sur l’utilisation du numérique et des ressources  nouvelles que cette  technologie est capable d’apporter. Je m’en aperçois à travers le travail scolaire de  mes   petits enfants.

L’intelligence artificielle fait irruption.

Mais voilà que ChatGPT vient tout bousculer. Ce robot conversationnel d’Open AI, accessible à tous avec le moindre smartphone, est capable de rédiger un devoir ou de résumer un livre en quelques minutes avec un niveau de crédibilité qui pourrait paraître époustouflant. Pour les  petits malins, il  offre  un moyen efficace de réaliser le travail demandé sans faire le moindre effort, surtout si c’est en devoir « à la maison ». Gain de temps mais quid de l’effort intellectuel et des connaissances acquises. Face à cette intrusion dans l’univers  des études, nos enseignants sont désarmés. Lesquels seront en mesure de détecter la supercherie ?  La multiplication de devoirs stéréotypés mettra la puce à l’oreille, mais après ? Ce type de logiciel oblige désormais à faire exécuter les travaux en classe sans l’accès aux écrans et sous surveillance.  C’est  forcément une complication qui va diminuer les occasions  de confronter les élèves à des exercices et à des recherches en complément du temps passé  en classe. Le  premier réflexe est donc d’interdire son utilisation ou de limiter son accès.  Il  faut  dire que l’univers  scolaire est plutôt « à la bourre » en matière de numérique. La  possibilité  d’accès aux basses de données telles Google et aux « tutos » de toutes sortes n’a qu’à peine modifié les méthodes pédagogiques. Le rapport d’octobre 2021 sur la pratique informatique du CP à la sixième souligne les insuffisances d’un programme qui existe mais dont les heures ne sont pas précisées. L’inspection générale relève que, à l’école primaire, les équipements sont insuffisants et les enseignants réticents estimant qu’ils ont déjà beaucoup à faire avec les maths et le français ;  au collège, les enseignements sont assurés par les profs de mathématique et de technologie qui ont chacun leurs langages et se parlent peu. Surtout, le rapport souligne un manque de formation aux concepts de l’informatique, notamment à la démarche algorithmique, assorti d’une pensée informatique insuffisamment présente. Après avoir  privilégié  l’aspect bureautique, aujourd’hui on se focalise sur le codage. Mais il est à craindre que cette manière d’aborder le numérique  soit dépassée. D’abord parce que les outils s’utilisent sans codage et que probablement, plus personne ne fera du codage  d’ici peu de temps : écrire du code sans savoir ce qu’est  un algorithme, c’est comme construire un bâtiment sans  plan.

Le renforcement des compétences numériques.

C’est l’objectif que fixe le ministre  comme une des priorités de la transformation des classes de cinquième, quatrième et troisième. L’objectif est de permettre aux élèves de comprendre le fonctionnement des outils et dispositifs numériques, algorithmes, intelligence artificielle,…   et savoir les utiliser de manière responsable et disposer de  premières compétences en codage. Evidemment, les  professeurs seront davantage formés à l’algorithme et à la programmation sans écran   et les équipements seront renforcés. Tout cela est bienvenu et urgent.  Il est  même grand temps de s’en préoccuper.  Mais connaissant l’inertie d’un corps qui aurait l’agilité de  l’actuelle  armée russe  pour  manoeuvrer et atteindre ses objectifs, on peut se préparer à attendre de longues années avant de voir intégrer les robots tels ChatGPT dans les stratégies pédagogiques d’apprentissage. Je crains qu’en matière de maniement des outils, les élèves restent  pour longtemps en avance sur leurs profs.

Le défi est immense.

Pour le relever, il faudrait plus d’heures de temps scolaire.  Quand on constate  les dégâts de la  diminution des heures d’enseignement du français, on se  dit que l’enseignement du numérique nécessaire à sa maîtrise ne peut se faire au détriment des autres savoirs fondamentaux. Mais comment y parvenir dans une période où l’on vante plus la paresse que le travail et où les élèves sont souvent plus habiles que leurs maîtres pour manipuler les nouveaux outils. Et le fait que ceux-ci puissent favoriser la facilité n’arrange rien. Dans les programmes de l’Education nationale le terme « informatique » n’est jamais  utilisé. On lui préfère le mot « numérique » qui permet d’aborder le sujet sans rien en dire. Or « l’informatique » est une façon de penser. Contrairement à la physique qui étudie la matière, l’énergie et les ondes, l’informatique n’étudie qu’une seule chose :  l’information. C’est le cœur du sujet.  L’IA n’est pas infaillible. Le robot peut être source de fake news.  L’enjeu est  donc de former les  jeunes pour appréhender les informations recueillies avec suffisamment de sens critique.  Car  l’algorithme n’a pas de  conscience logique. Chat GPT n’est qu’un système automatisé  adossé à une énorme base de données,  mais ce qu’il  délivre  est une parole de mainate mécanisée. A de nombreux endroits, le système a été modifié par la main de l’homme, et optimisé par des annotateurs humains chargés de classer plusieurs réponses alternatives. Bref, il faut bien comprendre que derrière la machine, il y a des hommes et que ses réponses ne sont pas le fait du hasard,  mais dépendent d’eux et de leurs points de vue.

Le crétin numérique.

Il y a certainement une utilisation pédagogique de cet outil qui pourrait apporter, probablement, une aide décisive  aux enseignants, tant la  parole du robot  paraît magique, les  expériences ayant montré que les enfants suivent davantage les instructions de l’intelligence artificielle que celle de l’humain.  Rien d’étonnant, les adultes eux-mêmes s’y laissent prendre. Pour cela il faut s’atteler à déjouer tous les pièges tendus par l’intelligence artificielle : jusqu’à maintenant, plus on a investi dans les « TICE » plus les résultats des élèves ont chuté. Et notamment empêcher le « cambriolage » de notre cerveau par les écrans qui en exploitent toutes les failles créant addictions et troubles de l’attention, langage amputé, relations humaines mutilées  … A moins de faire comme pour les enfants de Google et de la Silicon Valley : supprimer tous les  écrans pendant l’apprentissage et revenir aux livres et à l’écriture. Et/ou  faire  comme les Chinois qui ont décidé de réduire drastiquement le temps d’accès aux écrans !

 

 


LES FRANÇAIS RECOLTENT CE QU’ILS SEMENT !

Retraites

Trop peu de travail.

C’est un constat, globalement, les Français travaillent trop peu. Les chiffres sont accablants : la  France est le pays où l’on travaille le moins. Ceux donnés par  l’OCDE ne sont pas  susceptibles  d’être discutés : le nombre d’heures travaillées était de 41 milliards en 2019, soit 610 heures  par habitant, ce qui  était déjà beaucoup plus faible que chez tous nos voisins (entre 700 et 900 heures). Et depuis   la crise sanitaire, la tendance est chez nous à la baisse alors  que c’est l’inverse autour de  nous.  Les heures travaillées par habitant donnent d’autres  éléments d’analyse : elles ont une répercussion sur le PIB qui est le résultat du nombre d’heurs travaillées et de la  productivité. Comment produire  plus de  richesse quand  les deux déclinent en même temps : moins d’heures elles-mêmes moins productives. La productivité diminue du fait, notamment de la baisse des compétences elle-même résultat de la crise de notre système  éducatif. On oublie tout bêtement que les heures  travaillées, au-delà du PIB, sont surtout à  l’origine des  milles biens et  services que tous  consomment  et  apprécient. Bref,  si nous  continuons  à faire le choix collectif de continuer à moins travailler, il ne faut pas espérer conserver tous les avantages  que l’on retire du travail des autres. Vu sous cet angle, on comprend bien pourquoi ils sont  maintenus grâce à un endettement massif.

Les salaires insuffisants.

Les  salaires sont figés en France depuis  trop longtemps et ont fini  par paraître insuffisants au point d’en être  démotivants.  C’est la résultante de plusieurs causes qui fonctionnent en cercle vicieux :  depuis les 35  heures, le pays s’est mis à moins travailler et donc à créer moins de richesse, la  croissance du PIB sur le temps long  est tombée  à 1% en moyenne par  an, entraînant une baisse  de la richesse par habitant qui classe notre pays dans les derniers de l’Europe ; la  dégradation de notre  système  éducatif malgré les  moyens qui lui sont consacrés a fini par  entraîner une baisse des  compétences et une inadéquation grandissante au marché du travail bousculé par  la digitalisation et la crise sanitaire ; l’Etat a dû compenser par un assistanat toujours plus présent et  pesant  à la fois sur son budget et  sur la compétitivité des entreprises en rognant leurs  marges de  manœuvres… Le  résultat est catastrophique : un Français sur deux n’arrive pas à sortir d’un bas salaire, soit en-dessous de 1 310€  nets  mensuels. Le redémarrage de l’inflation contribue à tendre la situation et  à nuire à l’activité, de quoi rebuter certains à reprendre un emploi.

La flemme plutôt  que l’effort.

Comment demander aux Français d’être optimistes  quand les épreuves pour le pays s’enchaînent. La France est traumatisée par le terrorisme, le choc du covid qui l’a mise à l’arrêt ; elle a été marquée par la révolte des « gilets jaunes », le tout sur fond de dérèglement climatique et d’innovations mondialisées dont elle tire peu de bénéfices ; le pays du « meilleur système  de santé au monde » voit son hôpital s’effondrer, le pays du nucléaire risque les coupures  d’électricité,  le pays de l’éducation gratuite et obligatoire découvre qu’elle ne tient plus sa promesse d’émancipation républicaine  et de transmission du savoir… On peut trouver logique que le  peuple français soit moralement épuisé et fatigué. Les  années covid, dont nous ne sommes pas  complètement sortis, laissent une trace bien plus profonde  qu’on ne  pouvait l’imaginer. Elles ne font qu’accélérer des  mutations à l’œuvre dans la société française. Ainsi 45% des Français disent être touchés par des épisodes  de « flemme » les  dissuadant de sortir de chez eux, et on peut  faire un  parallèle avec une relation plus distendue avec le travail. En 1990, 60% estimaient que  leur travail était « très important » dans leur vie, la  proportion est passée à 24% ! Aucune autre valeur n’a chuté autant.
En même temps, le rôle des  loisirs a  grimpé en flèche. On voit le mal que les RTT et le « ministère du temps libre », relayés aujourd’hui par le « droit  à la paresse » de Sandrine Rousseau, ont fait à la « valeur travail ». Désormais,  le travail doit trouver, pour beaucoup, sa place dans les interstices de la vie personnelle. Plus grave, il ne fait plus consensus : c’est une valeur de droite puisque 4 sympathisants LFI et verts sur 10 se définissent comme  « peu ou pas travailleurs ». On a  envie de crier « Travailleuses, travailleurs, Arlette, reviens ! ».  Le « Droit  au travail » de Fabien Roussel se  heurte  au « droit à la paresse »,  encouragé, il est vrai par des prestation sociales généreuses. Et, ce qui n’a pas arrangé les choses,  l’inactivité  forcée des confinements a donné le goût du canapé à ceux qui ne l’avaient pas découvert.

Le progrès est pourtant là.

Condorcet imaginait le progrès comme une  mécanique où le progrès scientifique entraînait le progrès économique qui entraînait le progrès social puis le progrès moral. Et ça a marché pendant près de deux siècles et demi. Aujourd’hui,  la technologie permet d’imaginer  bien des solutions à nos problèmes  comme un  avion sans carbone ou un  médicament contre le cancer. Mais pour  s’en apercevoir, il faut que nous commencions par défaire le bandeau qui nous rend aveugles : celui de l’égalitarisme qui conduit au nivellement  par le bas. Le bon chemin c’est  celui de la justice. Cela nous évitera de penser de travers en croyant, par exemple, qu’il faut taxer les superprofits au lieu de réfléchir sur la nécessité pour nos entreprises d’entreprendre des investissements coûteux dans le numérique ou sur le moyen de renforcer l’actionnariat salarié pour que les  Français perçoivent davantage de dividendes. Ce qui serait un bon  moyen de répondre à la demande « de sens ou de vision »,  réclamée par toute une classe  d’âge pour s’investir dans  le travail.  Mais la réflexion économique est plus difficile à conduire que la morale égalitariste  à proclamer. Et il faut aussi faire face aux discours dangereux des écologistes politiques : la nature nous  sauverait contre  la technologie. C’est terriblement contre-productif. C’est l’inverse qui est vrai. Ainsi, la solution, ce n’est pas abandonner l’usage de l’avion, c’est décarboner son usage. Ce qui est  déjà en train de se faire !

Nous avons les  moyens de faire face aux défis de notre temps.  Pour  cela il faut renouer avec la foi dans le  progrès, comme nous devons continuer de manifester notre attachement au principe « d’universalité » qui reste indépassable  pour  assurer le  « vivre  ensemble » !

Il est temps de retrouver les bonnes semences !

 


DEUX PERILS EXISTENTIELS POUR LA FRANCE

Le modèle de croissance à crédit que Macron a poussé  dans ses dernières extrémités n’est pas le seul  péril qui pourrait provoquer l’effondrement  de notre pays.

Le récent colloque sur la « déconstruction » qui s’est tenu à la Sorbonne, comme une riposte à ce qu’on appelle désormais la  « révolution woke »,  met en lumière un  véritable enjeu civilisationnel. 

Un autre danger, tout autant périlleux, est mis en avant dans le livre posthume de Jean Daniel « Réconcilier la France, une histoire vécue de la nation », dans lequel le fondateur du « Nouvel Obs » constatait la faillite de notre politique d’immigration et d’intégration et s’inquiétait des problèmes posés par l’Islam à la laïcité, soulignant « l’islamisation de la vie quotidienne dont l’expansion est inquiétante ».

Ces deux problématiques, la lutte contre le wokisme et la communautarisation croissante des musulmans, devraient constituer des débats majeurs de la campagne présidentielle, tant elles mettent en cause l’identité même de la France.

 

Universite

LE WOKISME, LA NOUVELLE TENTATION TOTALITAIRE.

L’impasse intellectuelle de la  « déconstruction ».

« Après la déconstruction, reconstruire les  sciences et la culture », tel était le titre du colloque qui s’est tenu la semaine dernière à la Sorbonne. Sa préparation  a confirmé, s’il en était besoin, les  craintes quant aux menaces qui pèsent depuis quelques années sur la liberté académique : menaces et pressions, pour empêcher sa tenue ont conduit nombre d’intellectuels et d’universitaires à renoncer à y participer de crainte de voir leur carrière brisée, d’autres  se  sont désistés pour ménager leur réputation. La « déconstruction » qui regroupe une diversité de courants, de la pensée décoloniale à la théorie des genres en passant par l’écoféminisme, dont le wokisme n’est qu’un des aspects,  ne voit le réel que comme lieu de domination et d’oppression : des femmes par des hommes, du Sud  par le  Nord occidental, des « racisés » par les Blancs, etc... Depuis deux ans,  il ne se passe pas une journée sans que des annonces de conférences, de colloques ou de postes à pourvoir soient publiés dans les termes de cette idéologie sous l’impulsion de potentats qui agissent en toute impunité, sans aucun contrôle, appliquant par exemple l’écriture inclusive en dépit des consignes officielles, avec comme conséquence de voir des champs disciplinaires entiers remplacés  par des études culturelles transversales qui ne reposent pas sur un savoir validé mais sur des préjugés militants. Doit-on y voir un effet pervers de l’autonomie des universités ? Parallèlement, l’Université a connu, ces derniers temps, trop d’annulations de conférences pour qu’on ne s’inquiète  pas de la situation de la liberté de recherche, des critiques et des pressions qui s’y exercent. Les tenants de l’idéologie woke veulent imposer une sorte de totalitarisme considérant que leurs dogmes ne se discutent pas, réinventant l’obscurantisme face à la tradition universaliste éclairée de l’université française. Le « déconstructionnisme », qui en vient à confondre la recherche et le militantisme, la vérité et la morale, la  science et l’idéologie, et parce qu’il ne saurait tolérer aucune contradiction, est une impasse intellectuelle., mais aussi une formidable machine à détruire notre République que le pouvoir actuel combat mollement.

Imposer le débat.

L’Etat devrait donc veiller à ce que les pratiques universitaires demeurent conforme à la déontologie, ce qu’il ne fait pas, comme en témoigne l’attitude du Ministère de l’Enseignement supérieur face au cas de l’IEP de Grenoble, ou quand on enseigne aux futurs enseignants dans un INSPE des contenus contraires aux directives ministérielles. Que les tribunes contre l’islamo-gauchisme publiées à l’automne dernier aient suscité en réponse des pétitions comptant des centaines de signatures, dit assez la force de ces courants  militants. Il n’est donc  pas superflu de les combattre car  ils sont objectivement dangereux ! C’est au nom de cette tradition humaniste et universaliste héritée des « Lumières » que le but du colloque était d’ouvrir le débat, pas de le clore. Un débat qui ne se réduit pas  à un affrontement entre la gauche et la droite, comme les  wokistes voudraient le laisser croire en hurlant par avance « au fascisme », tragique inversion  des rôles dont ils ont l’habitude. Car on trouve beaucoup de représentants de la gauche « républicaine » pour s’opposer à eux, et mobilisés à cette occasion. Ce  colloque est considéré comme une première riposte. Il n’est pas inutile, non plus,  de redire à quoi servent les établissements d’enseignement supérieur. La « reconstruction » passe par le rappel des frontières entre la recherche et le militantisme, par la transmission de savoirs et l’apprentissage de la rigueur scientifique.  Il s’agit d’éduquer les étudiants à faire usage de distance critique et de liberté d’esprit, tout en les habituant à se confronter à des idées différentes des leurs, là où le wokisme leur propose une seule grille de lecture toute faite :  tout est domination. Il s’agit tout bonnement de sauver l’esprit critique. Est en jeu une définition communautariste et essentialisée de la citoyenneté, que certains  voudraient imposer à rebours des valeurs de l’universalisme républicain dont notre pays est  dépositaire depuis la Révolution française. Le débat est essentiel car il touche aux fondements intellectuels des valeurs sur lesquelles est fondée notre République : Liberté, Egalité, Fraternité, ne sont concevables que dans le cadre de l’universalisme laïc.

Autant il serait déplacé d’instaurer un contrôle du savoir par l’Etat, autant, il ne serait pas inutile, comme le suggère Pierre-Henri Tavoillot, Président du Collège de Philosophie, que soient instituées au sein des universités, des missions « Liberté », pour veiller au respect de la liberté académique. Ce serait déjà ça.

 


PEUT-ON SAUVER L’EDUCATION ?

école de la république

 

Ils sont devenus fous !

La vague de « dégenrage » des cours de récré, un rapport parlementaire sur les stéréotypes de genre et les propos du ministre Jean-Michel Blanquer montrent que l’Éducation nationale pourrait bien être devenue le ministère de la ré-éducation nationale.

Une circulaire sur les enfants « transgenres ».

Le ministère a diffusé le 30 septembre dernier  une circulaire selon laquelle: « la transidentité est un fait qui concerne l’institution scolaire. Celle-ci est en effet confrontée, à l’instar de leur famille, à des situations d’enfants – parfois dès l’école primaire – ou d’adolescents qui se questionnent sur leur identité de genre ».  Cette circulaire vise donc à donner des lignes directrices aux personnels d’établissements qui « peuvent se trouver légitimement déstabilisés par ces demandes et, en tout état de cause, se trouvent confrontés à des questions très pratiques (…) auxquelles les réponses apportées sont aujourd’hui disparates et souvent improvisées ». L’école, le collège et le lycée sont  donc invités à accompagner un phénomène de société tel que la « transidentité » !  

Nous pensions que l’école souffrait d’un problème de qualité de l’enseignement. Grave erreur, c’est au problème d’inégalité entre les sexes qu’il faut s’attaquer. M. Blanquer admet en effet que l’école a une politique de genre qui se donne pour « objectif primordial » l’égalité entre les filles et les garçons, ainsi que « la lutte contre les stéréotypes, la lutte contre les discriminations, celle contre les violences sexistes et sexuelles, le respect du droit du corps, l’égalité professionnelle et salariale, le travail sur la confiance en soi ». Il suit en cela les préconisations du rapport de Gaël Le Bohec, député LREM et Karine Lebon, députée elle-aussi, sur les stéréotypes de genre à l’école, qui se résume en une dénonciation généralisée du masculin. Passons sur les détails, l’école n’est plus le lieu de l’éducation conçue comme un transfert de connaissances entre un maître et des élèves, mais comme un lieu de rééducation du peuple par l’État, tenu de s’ouvrir aux mouvements LGBTQ.

L’école, enjeu idéologique.

Ce phénomène qui  investit l’école  à tous les étages, comme en témoigne une récente enquête publiée dans Le Figaro, c’est la traduction de la révolution « woke » qui ne cache pas son désir d’anéantissement de la civilisation occidentale avec la  « cancel culture ». Et l’école  est un champ de bataille essentiel parce que notre culture comporte des anticorps qui la rendent particulièrement résistante à ses théories fumeuses et obscurantistes : l’universalisme, la rationalité,  la  laïcité,  l’antiracisme  authentique.  C’est donc une bataille intellectuelle aussi intense que celle qui eut lieu contre le totalitarisme  marxiste qui commence.

Il  est tout de même curieux de voir notre Ministre, après avoir publié une circulaire qui introduit le loup dans la bergerie, s’unir avec le Ministre du Québec dans un combat commun contre  cette « culture de l’effacement et de la déconstruction ». Ensemble ils  veulent promouvoir une résistance  et  marquer  leur  opposition à ce qu’ils appellent avec raison ce nouvel obscurantisme. Un « en même temps » qui ne manque pas d’intriguer.

Quelles armes avons-nous pour lutter ?

C’est à l’école que se fabrique la France, à travers la transmission des savoirs et de notre histoire. Elle doit donner à chaque enfant  sa chance et pour cela, il est urgent de remettre les fondamentaux au cœur de son action, à commencer par  lire, écrire et compter. Aujourd’hui, force est de constater qu’elle ne remplit plus correctement cette mission : le niveau baisse, les inégalités se creusent, et beaucoup d’enfants quittent l’école primaire sans savoir ni lire correctement, ni compter. Le mal est aggravé par la crise des vocations d’enseignants. Face à cette situation, la reprise en main vers ces objectifs exigera une action vigoureuse, d’autant plus que les personnels  actuels sont « travaillés »  par les courants communautaristes et  multiculturalistes.

Il faudra agir simultanément sur :

. Les programmes : remettre  à l’ordre du jour la transmission des connaissances dans toutes les disciplines, notamment en histoire, en mettant en valeur le « récit national ».

. La formation des professeurs : sortir de l’actuelle formation universitaire et remplacer les instituts de formation par  des écoles  professionnelles d’arts pédagogiques mettant l’accent sur l’apprentissage concret du métier dans des  classes d’application,  encadrées par des personnels chevronnés et triés sur le volet.

. L’inspection : renforcer  le corps des inspecteurs est une nécessité.  Si l’on veut que les personnels appliquent les programmes et respectent les circulaires ministérielles, notamment en ce qui concerne le cadre laïque de  l’enseignement, le contrôle de l’inspection devrait intervenir tous les trois ans  et non tous les dix ans comme c’est le cas généralement.

. L’enseignement privé : rétablir une saine concurrence entre le public et le privé  pour donner réellement  le choix aux parents. Il faut supprimer le plafond des 20% qui limite le recrutement des établissements  sous contrat. En cas de dérive « wokiste » constatée, les parents doivent avoir la possibilité d’y échapper.

. La liberté et l’autonomie : donner aux établissements, sous la responsabilités des chefs d’établissement, la possibilité de réaliser des innovations pédagogiques, la liberté de recruter des professeurs, dans le cadre d’un contrat  passé avec le ministère qui en précise les contours et  les engagements.

Ce ne sont évidemment que des pistes qu’il serait trop long de développer ici. L’éducation devrait être le thème au premier plan de la campagne présidentielle. Il s’agit de prendre le peuple à témoin pour contre-attaquer face au nouveau totalitarisme qui a commencé à envahir notre société, les médias, l’université et l’école, en imposant ses idéaux et interdisant tout débat. Il faut se donner pour objectif de reconnecter les jeunes générations à leur patrimoine culturel et intégrer les élèves issus de l’émigration, en visant l’assimilation et en leur permettant d’acquérir l’esprit critique et la pensée rationnelle. Un combat qu’on aurait tort d’esquiver.

 


LA CHUTE DU SAVOIR

Crétin

L'occident est en déclin. L'obscurantisme progresse partout  au lieu du savoir, et   pourtant, " le temps de cerveau disponible" pour apprendre n'a jamais été  aussi important. Alors  pourquoi  ?

L'article ci-dessous propose une observation et une analyse très éclairantes. Je ne peux qu'y souscrire. Elles recoupent les attendus énoncés par Gérald Bronner dans son ouvrage, "Apocalypse cognitive" dont je vous entretiendrai bientôt. 

" Un ingénieur français travaillant dans l’intelligence artificielle dans la Silicone Valley remarquait cette semaine qu’il y avait de moins en moins d’ingénieurs américains dans son équipe et de plus en plus d’Indiens, de Chinois, de Coréens. Il y voyait une explication : depuis leur plus jeune âge les Américains sont encouragés par le pédagogisme ambiant - « tu es merveilleux mon fils » - même s’ils sont nuls. Arrivés à l’âge adulte ils sont encouragés à l’Université - « ce que tu fais est formidable » - même si leur production est insignifiante. Entrés dans l’entreprise on les encourage encore en leur disant que ce qu’ils font est « exceptionnel ». Et un jour le couperet tombe : on les vire car on s’est rendu compte qu’ils étaient très mauvais et que leur insuffisance remontait à l’acquisition des savoirs fondamentaux. Et on les remplace par des Indiens.

En France, nous en sommes au même point. Les résultats annuels de l’étude Pisa sont sans appel : en mathématiques les 5% des meilleurs élèves d’aujourd’hui sont à peine au niveau des élèves moyens d’il y a 30 ans, et les élèves moyens au niveau des plus mauvais d’hier. En sciences de la vie, idem. En français et en philo, n’en parlons pas. Et pourtant les résultats au bac sont exceptionnels… Cherchez l’erreur : elle tient à la même cause qu’aux USA, le pédagogisme qui veut faire de chaque enfant depuis 40 ans un être exceptionnel qui a droit à toute la bienveillance de ses aînés même si son savoir et son intelligence sont des plus mauvais. Arrivé à l’âge adulte, cet être exceptionnel, paré de son inculture n’a jamais été confronté à l’échec.
 
Investi des pouvoirs formidables que lui donnent les réseaux sociaux, cet imbécile patenté et encensé par l’Education Nationale se croit investi d’une mission : donner son avis sur les avancées les plus prodigieuses de la science, remettre en cause les études des plus grands chercheurs, défier la communauté scientifique. Il n’a, bien entendu, pas le début du commencement de la moindre compétence dans aucun domaine, à commencer par la médecine, ni le bagage théorique minimal pour comprendre ce qu’est une série statistique ou une probabilité.
 
Ajouter à cela une méconnaissance complète des grands mouvements de l’Histoire, il s’autorise à se comparer à un résistant, ou à voir dans nos gouvernants des apprentis dictateurs. Son civisme et sa moralité, pour autant qu’il en ait jamais eu, ont été systématiquement démolis depuis 30 ans par le droit des minorités qui tend à s’imposer à la majorité et il se vit désormais en héros révolutionnaire. Parce que « sa voix compte ». Parce qu’il a « quelque chose à dire ». Même une énorme connerie.
 
L’inculture générale règne. Chaque année 600 000 bacheliers sortent de l’enseignement secondaire. Ils n’ont qu’une très vague idée de qui est Jean Moulin, de ce pourquoi il est mort. Ils ne savent pas comment fonctionnent une cellule animale et comment y pénètre un virus. Ils n’ont aucune idée de ce qu’est une loi de distribution normale… Toutes choses qui sont pourtant au programme et qu’ils n’ont jamais apprises. Mais on leur a dit qu’ils étaient « formidables ». Alors Ils parlent, ils postent leur tweets vengeurs et ils refusent de se faire vacciner « parce qu’on n’a pas assez de recul ». Ils refusent le pass sanitaire parce « qu’on vit en dictature » et plus ils parlent, plus on les écoute parce que « la parole de chacun est précieuse ».
 
Notre pays a été à l’origine de l’esprit des lumières, des plus grandes avancées de la science et de la médecine. Nous avons longtemps été à la pointe de l’innovation. Nous sommes désormais à la queue des classements internationaux. Le mouvement antivax, la révolte contre le pass sanitaire ne sont pas des accidents de l’Histoire. Ils sont le symptôme d’un spectaculaire basculement de notre pays dans l’ignorance."
 
Marc Wluczka, médecin de santé publique

 


LES REGRESSISTES (3)

Je continue à publier les articles qui argumentent sur le néogauchisme.  Voici une nouvelle tribune publiée par Le Figaro récemment.

Philippe d’Iribarne: «La folie “woke” et décoloniale, fille de l’utopie de l’égalité parfaite propre à l’Occident»

Iribarne

Figure importante du paysage intellectuel français Philippe d’Iribarne est auteur de nombreux ouvrages dont plusieurs sont des classiques dont La Logique de l’honneur. Gestion des entreprises et traditions nationales (Seuil, 1989) et L’Étrangeté française (Seuil, 2006).

TRIBUNE - Le sociologue, X-Mines, directeur de recherche au CNRS analyse avec une exceptionnelle clarté les racines du mouvement «woke» et décolonial, né dans les universités américaines et qui progresse de façon fulgurante en France. Les pays occidentaux sont victimes de leurs intentions élevées et des objectifs écrasants et utopiques qu’ils s’assignent, explique le penseur.

La fracture de l’opinion provoquée par l’émergence du mouvement «woke» aux États-Unis et du mouvement décolonial en France paraît radicale. Les débats provoqués en France, jusqu’au sein de la majorité, par la loi «confortant le respect des principes de la République» en témoignent. L’université offre maintenant un terrain de choix à la manifestation de cette fracture. Entre ceux qui, tels nos ministres de la Recherche et de l’Enseignement supérieur ou de l’Éducation, dénoncent l’islamo-gauchisme qui y sévit et ceux qui, telle la Conférence des présidents d’université, défendent bec et ongles les orientations ainsi mises en cause, tout dialogue paraît impossible. Cette radicalité est intimement liée à la mutation qu’a connue la promesse d’égalité au cours du dernier demi-siècle.

Dans l’élan premier des Lumières, l’égalité des peuples, des cultures, était vue comme un horizon qui ne pourrait être atteint que grâce à une action intense de civilisation, d’éducation, menée par le monde occidental en faveur des peuples les moins «avancés». Le Pacte de la Société des nations de 1919 témoigne de cette vision. Ainsi son article 22 évoque les territoires «habités par des peuples non encore capables de se diriger eux-mêmes dans les conditions particulièrement difficiles du monde moderne». Il affirme que «le bien-être et le développement de ces peuples forment une mission sacrée de civilisation», et que «la meilleure méthode de réaliser pratiquement ce principe est de confier la tutelle de ces peuples aux nations développées qui (…) sont le mieux à même d’assumer cette responsabilité».

Cette vision est encore présente dans la Charte des Nations unies de 1945, bien que celle-ci mette en avant, d’emblée, le «principe de l’égalité de droits des peuples» et affirme de manière réitérée le refus des «distinctions de race, de sexe, de langue ou de religion» (articles 1, 13, 76). Son chapitre «Déclaration relative aux territoires non autonomes» invite encore (art. 73) à aider les populations «dans le développement progressif de leurs libres institutions politiques, dans la mesure appropriée aux conditions particulières de chaque territoire et de ses populations et à leurs degrés variables de développement ».

De nos jours, cette vision inégalitaire fait scandale. Il est hautement affirmé que tous les peuples, toutes les cultures, toutes les religions, toutes les manières de vivre, se valent tels qu’ils sont ; que, certes, il peut exister dans chaque société des individus qui diffèrent, pour reprendre les termes de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, par «leurs vertus et leurs talents», mais que ces qualités se retrouvent également distribuées dans tous les peuples et, au sein d’un peuple, dans toutes ses composantes ethniques ou religieuses. Affirmer le contraire relève de préjugés racistes qui méritent la condamnation la plus vive.

Or, en dépit de cette affirmation solennelle, de grandes disparités demeurent, entre les peuples et au sein de chaque peuple, dans les sorts réservés à ceux qui diffèrent par leur culture, leur religion ou leur couleur de peau. Ainsi, dans les universités américaines, les Noirs réussissent nettement moins bien et les Asiatiques beaucoup mieux que les Blancs. En France, ceux qui ont un prénom musulman ont plus de mal à trouver un emploi que ceux qui ont un prénom chrétien. La promesse d’égalité parfaite et immédiate se révèle mensongère et rien ne laisse présager qu’elle cessera bientôt de l’être.

Il est absurde de regarder comme monstrueuses certaines actions si elles sont le fait de Blancs et comme vertueuses si elles sont le fait de non-Blancs

Comment donner sens à ce hiatus ? Logiquement deux interprétations paraissent possibles. L’une, qui relève du réalisme sociologique, est que l’on n’efface pas en un jour les effets de l’histoire ; qu’à chaque époque il a existé des civilisations plus brillantes que d’autres ; qu’il faut distinguer la reconnaissance de l’égale dignité de tous les êtres humains, qui va de soi, de l’objectif d’égalité immédiate entre tous les peuples, toutes les cultures, tous les groupes humains, qui relève de l’utopie. Mais une telle interprétation ne peut être vue que comme un retour intolérable à des temps définitivement révolus.

L’autre interprétation part du caractère sacré de la promesse, fondement de l’appartenance à une humanité commune de ceux et ceux seuls qui la respectent. Mais reste alors à expliquer pourquoi elle n’a pas plus de prise sur le monde réel.

Le mouvement «woke» et le courant décolonial apportent une réponse radicale. Pour eux, si la promesse n’a pas été tenue, c’est du seul fait de la résistance de dominants attachés à leurs privilèges. Affirmer que certains groupes humains ou certains individus membres de ces groupes sont responsables de leur situation défavorable n’a pour objet que de permettre à ces dominants de jeter un voile sur leurs menées. Les coupables sont clairement identifiés: ce sont les Blancs racistes, esclavagistes, colonisateurs, qui ont mis la planète en coupe réglée. Cette vision a un caractère transcendantal (qui est connu a priori et non pas fondé sur l’expérience, NDLR), au-delà de tout besoin de confirmation ou de possibilité d’infirmation reposant sur des données de fait.

Cette mise en avant de l’infinie culpabilité des Blancs alimente une représentation totale de la vie sociale portée par tout un vocabulaire: privilège blanc, racisme systémique, appropriation culturelle, etc. Ainsi, si certains «racisés» ont du mal à trouver un emploi, il est impensable d’envisager que les employeurs cherchent simplement à embaucher ceux dont le profil laisse augurer qu’ils sont les plus à même de contribuer à la bonne marche de leur entreprise. Il va de soi que la prospérité économique de l’Occident est fondée sur l’exploitation du travail des esclaves noirs et il est indécent de l’attribuer au génie inventif et à la capacité d’organisation dont l’Occident a fait preuve. Si les figures de l’art, de la pensée et de la science célébrées dans le monde occidental, et bien au-delà, tels Kant, Pascal, Rembrandt, Bach, Shakespeare, Dante, Dostoïevski, Cervantès ou Einstein, sont essentiellement blanches, c’est l’effet d’un complot des Blancs conduit à dissimuler les figures non blanches. Etc.

Entre croyants (ceux qui sont engagés dans le mouvement «woke», les tenants d’une approche décoloniale) et incroyants il n’existe pas de terrain commun au sein duquel échanger des arguments.

Pour les incroyants, ce mouvement est sans doute explicable par la souffrance de ceux qui se sentent victimes d’une promesse trahie mais n’est pas intellectuellement respectable. Il est absurde de regarder comme monstrueuses certaines actions si elles sont le fait de Blancs et comme vertueuses si elles sont le fait de non-Blancs ; par exemple de déclarer la colonisation blanche crime contre l’humanité et de porter au pinacle la colonisation arabe, notamment en Espagne ; ou encore de dénoncer une «appropriation culturelle» quand des Blancs se permettent d’interpréter une musique «noire» mais de parler de manque de diversité à fondement raciste quand les Blancs dominent au sein des orchestres symphoniques voués à une musique «blanche». Il échappe à toute logique de considérer comme monstrueux l'esclavage perpétré par les Blancs alors que, perpétré par des Arabes ou des Noirs il ne mérite aucune attention. Et comment accepter que l’histoire de l’Occident soit réécrite à la manière d’une histoire de la Révolution française qui serait centrée sur la Terreur, les massacres de Septembre, et le génocide vendéen, pendant qu’une approche hagiographique prévaut quand il s’agit d’autres civilisations?

De plus, les incroyants ne se privent pas de souligner ce qui leur paraît le plus outré dans l’approche décoloniale. L’affirmation selon laquelle les Blancs devraient toute leur pensée aux Grecs qui eux-mêmes devraient tout aux Égyptiens, lesquels étaient noirs, et qu’ils doivent donc toute leur pensée aux Noirs leur paraît une pure fable. Ils ne peuvent croire que si, dans les expressions «idées noires», «âme noire», «noirs desseins», etc., le terme noir a une connotation négative, la source en est l’association du mot noir à l’esclavage que les Noirs ont subi du fait des Blancs et non une opposition entre la lumière et les ténèbres. Et quand, pour écarter toute objection, la réponse (que l’on trouve par exemple dans une vidéo célèbre concernant l’université américaine d’Evergreen) est que l’appel à l’objectivité, l’attention aux faits, est une invention perverse de Blancs, les incroyants se voient conforter dans la conviction que ce courant de pensée est bien peu sérieux.

Par ailleurs, la place que tient la cancel culture, la création de safe spaces où les croyants sont mis à l’abri de pans entiers de la réalité, apparaît aux incroyants comme liées au besoin de ces derniers d’être protégés de ce qui pourrait faire éclater la bulle de certitudes qu’ils habitent.

On sait que la dérive d’un milieu de recherche sous l’influence d’intérêts ou d’une idéologie n’est pas l’apanage de la « science prolétarienne » de jadis

Mais, pour les croyants, tout cela n’est qu’arguties qui ne tiennent pas face au scandale que représente la radicalité du privilège blanc qui, avec sa dimension raciste, viole les principes les plus sacrés qui doivent inspirer la vie de l’humanité. Ces arguties se trouvent disqualifiées par le fait qu’elles légitiment le maintien d’un tel privilège et il est hors de question de leur accorder quelque valeur que ce soit. Ceux qui en font usage ne méritent pas d’être écoutés et les interdire de parole, comme l’implique la cancel culture, relève de l’objectif vertueux d’empêcher de nuire des représentants du mal. Leur donner la parole, débattre avec eux, reviendrait à accorder au mal un statut égal à celui du bien.

C’est dans ce contexte que prennent sens les affrontements actuels portant sur le monde de la recherche, la place qu’y tient l’islamo-gauchisme, les mérites des courants décoloniaux, la dénonciation par les étudiants d’enseignants déclarés racistes ou islamophobes et l’autocensure de ceux qui craignent d’être regardés comme tels. La vision décoloniale, affirme ses croyants, s’appuie sur des travaux de recherche menés dans des institutions prestigieuses et conduisant à des publications savantes dont seuls les tenants d’une forme de suprématisme blanc peuvent contester la pertinence. Ce n’est pas, affirment-ils, l’idéologie «woke» qui a perverti le monde de la recherche, mais le résultat de recherches de qualité qui alimente les convictions correspondantes. Mais cette affirmation laisse ouverte la question de portée générale de la scientificité des travaux académiques et de la qualité du contrôle de cette scientificité.

On sait que la dérive d’un milieu de recherche sous l’influence d’intérêts ou d’une idéologie n’est pas l’apanage de la «science prolétarienne» de jadis. Les recherches tendant à démontrer l’absence de nocivité du tabac ou des perturbateurs endocriniens ont été marquées par de telles dérives, y compris quand elles étaient réalisées au sein des universités. On peut penser aussi aux travaux d’économistes de renom qui ont légitimé les pratiques, tels les subprimes, au cœur de la crise financière de 2008. De manière générale, il n’est pas difficile de biaiser les résultats d’une recherche tout en sauvant les apparences. Il suffit de sélectionner les données dont il est fait état et de les interpréter en fonction de ce que l’on souhaite démontrer.

Prenons, à titre d’exemple, la manière dont la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) s’y prend pour démontrer que la société française est islamophobe. Le parti adopté est d’écarter tout élément permettant de rattacher des réactions négatives à l’égard de l’islam à la réalité de celui-ci, ce qui permet de mettre ces réactions au passif de la population majoritaire. Ainsi, le rapport mentionne bien «un conflit de valeurs, considérant la religion musulmane et ses pratiques en contradiction avec le principe de laïcité et avec les droits des femmes et des minorités sexuelles». Mais, et c’est là que la pensée glisse, loin de considérer que ce conflit est à la source de réserves légitimes envers l’islam, il affirme que ceux qui le mettent en avant sont coupables d’«inverser la causalité et de rejeter la responsabilité du racisme sur ceux qui en sont les victimes». La manière même dont sont libellées les questions dont le rapport fait usage relève de cette stratégie. Ainsi, il n’est pas demandé si certains comportements associés à l’islam sont incompatibles avec les valeurs républicaines, mais si «certains comportements peuvent parfois justifier des réactions racistes». Du coup, une majorité des personnes interrogées n’a pas d’autre choix que de déclarer que des comportements «racistes» sont justifiés, ce qu’il s’agissait justement de démontrer.

Que nous réserve l’avenir ?

On peut douter que cet affrontement idéologique soit moins pérenne que celui qui s’est noué autour du rêve communiste. Un retour au réel impliquerait que ce qui relève d’une fausse science soit scruté avec la même rigueur que celle qui est déployée quand il s’agit d’impostures scientifiques au service d’intérêts privés. Mais cette rigueur ne paraît pas pour demain. Et qui est prêt à admettre que la folie «woke» est un enfant monstrueux de promesses radicales propres à l’Occident, promesses impossibles à tenir à l’échelle d’une ou deux générations et qui méritent d’être reconsidérées avec plus de réalisme ?

 


CETTE ULTRA GAUCHE INTOUCHABLE QUI SE CROIT TOUT PERMIS.

Vidal-islamogauchisme-universite

Islamo-gauchisme : le débat secoue les facultés et fait la une des médias avec la demande d’enquête formulée  par Frédérique Vidal, Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Cet article propose de faire  le point sur ce qu’il en est vraiment : pourquoi c’est une réalité, à quel point les universités sont touchées, la farce du discours victimaire de ceux qui se sentent accusés, et ce qu’il en est vraiment des pseudos sciences importées du monde anglo-saxon.

Vous avez dit « nauséabond » ? 

D’abord, il y a des mots qu’il ne faut pas prononcer sans qu’aussitôt on ne déchaîne les orgues de la bien-pensance : « islamo-gauchisme » en fait partie. Pensez donc, un vocable qui aurait son origine à l’extrême-droite, ne peut être que « nauséabond », et aussitôt les références les plus outrancières sont brandies pour dénoncer l’abject.  Les personnes visées par ce vocable seraient ni plus ni moins, victimes d’une chasse aux sorcières comme les  communistes à l’époque de Mac Carthy, rien que ça. Défense bien connue des gauchistes, celle de crier à l’intolérance qu’ils pratiquent eux-mêmes sans vergogne et souvent manu military. Mais…  circulez, il n’y a rien à voir. On l’a bien vu l’autre soir, à « C à vous », avec le sieur Blanchard, chercheur en Histoire, que le décolonialisme n’effraie pas, trouvant en Jean-Michel Apathie et Patrick Cohen des journalistes bien compatibles.  L’amicale des « islamo-gauchistes » touche tous les milieux : politiques, journalistiques, universitaires, éducatifs.

Islamo-gauchisme : une réalité.

L’expression a été popularisée en France par les travaux d’un directeur de recherche du CNRS, Pierre-André Taguieff, dès 2002 dans un ouvrage sur « l’intifada », et sur laquelle il revient dans une tribune publiée dans Libération le 26 octobre 2020 : « Aux sources de  l’islamo-gauchisme ». Il y décrit la convergence de fait entre certains groupes d’extrême-gauche et des mouvances islamistes. Elle n’est nullement un « concept venu de l’extrême droite », comme l’ânonnent les ignorants, les imbéciles et les gens de mauvaise foi. A  l’université, cette convergence donne lieu à une bataille idéologique qui secoue le monde  académique, surtout depuis les propos de Jean-Michel Blanquer, tenus après l’assassinat de Samuel Paty. Il avait nommé et pointé « l’islamo-gauchisme » qui sévit dans les facs et dénonçait « une matrice intellectuelle venue des universités américaines et des thèses intersectionnelles qui veulent essentialiser les communautés et les identités et propager une vision du monde qui converge avec les intérêts des islamistes ». Une réalité qui, de fait, a gangréné une grande partie de nos sciences sociales. Mais « l’islamo-gauchisme » n’est qu’une facette du « nouveau dogme universitaire » qui partout dans le monde occidental, dénature l’enseignement supérieur.  Ce sont surtout les départements de sciences sociales qui se retrouvent « idéologisés » de part en part. Il s’agit d’une guerre idéologique beaucoup plus large menée sous couvert de rigueur universitaire,  qui installe l’obsession de la race, du genre, de l’identité, des laboratoires de recherche jusque sur les plateaux de nos médias publics, en passant par les syndicats étudiants tels l’Unef, la Ligue des droits de l’Homme, la FCPE, les présidences d’universités, et évidemment le personnel politique dont Jean-Luc Mélenchon est le porte-drapeau. L’islamo-gauchisme n’est que le symptôme d’un mal qui ronge la société dans son ensemble, d’autant plus que l’effondrement du PS et de la sociale-démocratie laisse une place béante, aggravée par le « en même temps » macronien.

Frédérique Vidal a posé le doigt où ça fait mal.

Dans l’université, nombre de professeurs s’inquiètent de la pression grandissante des théories décoloniales et racialistes. La Ministre n’a fait que son devoir en s’inquiétant d’un mal qui s’attaque à nos valeurs universalistes et à nos traditions universitaires fondées sur la confrontation sereine des idées et des opinions.  Car point de liberté pour les ennemis de la nouvelle  « doxa » : syndicats et enseignants montent la garde. On ne compte plus les entraves faites aux intellectuels qui ne pensent pas droit. Bernard Rougier a dû se tourner vers la  Région Ile-de-France pour financer ses travaux sur l’Islamisme que son UFR lui refusait ; Sylviane Agacinski, Alain Finkielkraut se sont vu refuser des conférences ; ce ne sont que quelques exemples emblématiques des pratiques en usage. Les réunions non mixtes, interdites aux blancs, un prosélytisme islamiste comme à Sorbonne Paris Nord, des phénomènes de censure, d’intimidation, de discrimination ont été instaurés et menacent la liberté académique et  même la liberté de pensée en obligeant à un alignement idéologique. Des chercheurs militants, confondant propagande et recherche, ont investi le monde universitaire et procèdent à une occupation systématique des postes-clés : élections de présidents et des conseils universitaires, commission de recrutements pour la cooptation des jeunes maîtres de conférence … L’étape de la vérification de la qualité des travaux des candidats par le Conseil National des Université est supprimée et les  recrutements directs des professeurs sont autorisés, ce qui a permis un entrisme encore plus large. Les militants du décolonialisme et de l’intersectionnalité sont dorénavant libres de poursuivre leur entreprise d’accaparement de l’institution au gré des politiques universitaires locales. Il y a de quoi émouvoir la Ministre de tutelle !  D’autant plus qu’après l’assassinat de Samuel Paty, cent universitaires ont signé un « appel » qui critiquait le déni de  l’islamisme dans nos universités et constatait la montée des idéologies indigéniste, racialiste et décoloniale.

La farce du loup devenu agneau.

On peut s’interroger sur le choix de Frédérique Vidal de demander au CNRS d’enquêter sur le sujet.  C’est comme demander à un tricheur au poker de dévoiler sa méthode ou à Al Capone de rechercher les trafiquants. Car le CNRS, dont on peut douter que ce soit sa mission de mener des enquêtes sur l’université, est devenu depuis quelques années un pôle avancé de ces idéologies. Les travaux sur le genre, la race, entre autres, sont très encouragés par le CNRS qui pratique d’ailleurs l’écriture inclusive systématiquement. Mais c’est le génie de  la gauche quand elle est le loup de se faire  passer pour l’agneau. La Ministre a trouvé le moyen de donner un statut de victime à ceux qui pratiquent l’exclusion et l’ostracisme. Sans surprise, la « nomenklatura »  académique s’est braquée contre elle en l’accusant d’employer un concept forgé par « l’extrême-droite ». Ce qui est un mensonge, mais un mensonge censé avilir. Une manoeuvre convenue qui devrait prêter à rire, tant cette technique de l’épouvante ne bluffe plus personne. Le CNRS, comme la conférence des Présidents d'Universités ont réagi par le déni et les réflexes corporatistes bien connus. Ils dénoncent vigoureusement un danger extérieur qui planerait sur les libertés académiques, en gardant le silence sur les pressions internes qui entravent les mêmes libertés. Dans la foulée, pour faire contrepoids au « manifeste des cent », ils se sont trouvés à « six cents universitaires »  pour interpeller Frédérique Vidal. L’amicale gauchiste  montre ainsi son implantation. On l’a vue aussi à l’œuvre quand il a s’agi de déstabiliser  Didier Lemaire, le prof de Trappes, en venant au secours du maire Génération.S, Ali Rabeh. Ils appellent à la démission de la Ministre ! Au-delà, c’est toute la gauche, pour une fois unie, qui dénonce l’intrusion et le procès, à quelques rares voix près comme celles de Manuel Valls ou de Julien Dray, qui appelle les universitaires à ne pas se laisser faire. Cocasse, Mélenchon précise, inversant les rôles : « Si vous laissez exercer la  police de la pensée, nous sommes perdus ! ». Quant à Oliver Faure, toujours aussi nul, il avoue ne pas savoir ce que veut dire « islamo-gauchiste ». Avec un chef comme ça, le PS n’est pas  prêt de se reconstruire.

Une opinion qui se déguise en science.

L’université est donc bien l’otage des idéologues radicaux. Le CNRS se fourvoie lui aussi quand il tente de disqualifier la proposition de la ministre en expliquant que le concept d’islamo-gauchisme n’est pas « scientifique ». Une réplique loufoque pour le moins, de la part de gens qui affirment la légitimité des concepts issus des études « postcoloniales » comme le « racisme systémique »,  le « privilège blanc », la « culture du viol » ou la « fluidité identitaire »… Ces disciplines en « toc » qui troquent le savoir pour la subjectivité victimaire engendrent un savoir frelaté. C’est au nom de la science que ces gens décrètent sérieusement l’inexistence de l’homme et de la femme, relégués au placard au nom de la fluidité de l’identité de genre. Et surtout n’allez pas affirmer que la biologie est une science ! Elle est  disqualifiée pour cause de son caractère patriarcal et viriliste. Le « trans »  ou le « queer » au genre « fluide » sont les nouveaux héros alors que la masculinité est toujours toxique. On crée ainsi de nouvelles spécialités universitaires sur le modèle des « studies » anglo-saxonnes. La multiplication des canulars qui en proviennent a confirmé à quel point la validation par les pairs relevait de la tartufferie intellectuelle. Ces gens sont de grands farceurs ou de grands fraudeurs, et les deux sont possibles. Dans tout ça,  le coupable, lui, est aisé à trouver : le mâle blanc, occidental, hétérosexuel. L’islamo-gauchisme n’est qu’un versant de cette bêtise sophistiquée.  Le grand péril que ces idéologues nous font courir tient dans l’atrophie de l’intelligence, l’effacement de la culture, pour aboutir selon la formule d’Alain Bloom, à des « âmes désarmées ».

Frédérique Vidal veut savoir ce qu’il en est. Il est un moyen facile de le savoir. Il suffit qu’elle se fasse remettre la liste des sujets d’études proposés aux étudiants lors de ces cinq ou dix dernières années,  dans les  établissements ou départements universitaires concernés. Mais il faut réagir vite, à l’université  comme au CNRS, car  il est grand temps de ne plus confondre les prises de parti militantes et les vérités scientifiques. Ce qui s’accélère est  l’arrivée rapide chez nous des théories qui sont en train de détruire les universités  américaines. Ce serait une catastrophe pour la France, mère de la pensée rationnelle et universelle. Ne comptez pas sur la majorité pour défendre sa Ministre, elle n'a  pas d'avis sur la question. Ou plutôt, comme d'habitude, c'est du "en même temps", selon les intervenants, le grand écart entre Aurore Bergé et Gabriel Attal...

 

 


NOTRE CULTURE PREND L’EAU DE TOUTES PARTS !

Académie française

Au moment où le  Royaume-Uni quitte l’Europe, les 27 pays de l’Union, en toute logique, devraient abandonner  la langue anglaise comme langue de communication, et, pourquoi pas, permettre au  français de prendre le relais. Mais le « globish » anglo-maniaque n’a jamais été aussi fleurissant et s’est imposé comme une soi-disant évidence dans les échanges intra-européens parce qu’il serait plus pratique. Que s’est-il  donc passé chez nous depuis  une vingtaine d’années pour que nous arrivions à un avachissement généralisé qui nous conduit tout droit à la relégation intellectuelle, alors que la France a longtemps pu, à juste titre, s’enorgueillir de sa langue et de sa culture ? Sans prétendre retrouver le XVIIIe siècle, époque où notre langue était celle des cours européennes , et même de la cour russe, on peut s’étonner de ce que la langue anglaise, dans sa version la plus pauvre, ait définitivement pris le pouvoir dans une Europe qui avait pour ambition de réunir les peuples et non de céder à cet impérialisme linguistique. En octobre dernier, encore, le parquet européen a ainsi choisi d’adopter l’anglais comme unique langue de travail,  un comble !

La furie féministe sape le génie de la langue.

Le français a aussi ses ennemis de l’intérieur. Depuis son apparition, l’écriture inclusive qui se  manifeste  par l’usage du point médian et la mention systématique du genre féminin, a tendance à se répandre en dépit des interdictions officielles, notamment  dans nos universités. Cette pratique est une insulte au génie de notre langue et conduit directement à un appauvrissement intellectuel.  Elle rend l’oralité de la langue impossible. Essayez de lire à haute voix : « Cher.e.s étudiant.e.s vous êtes convoqué.e.s  pour venir rencontrer vos interlocuteur.trices … ». Faut-il « oraliser » les  points ? On mesure le ridicule. Mais c’est une véritable oppression qui s’est mise en place pour imposer ce langage stupide. Dans certains cas, ce sont les professeurs qui l’imposent à leurs étudiants dans leurs devoirs ou dans leur messagerie, sous peine de ne pas corriger ou répondre, ce sont les organisations syndicales qui l’imposent aux administrations, quand ce sont les administrations elles-mêmes…  Les opposants à cette nouvelle forme d’écriture sont alors qualifiés de réactionnaires ou de conservateurs,  ce qui est pour moi un compliment.  Certains enseignants ont vu leur conférence annulée quand le thème était jugé « inapproprié » tel Jean Szlamowicz, auteur du livre « le sexe et la langue » (qui ne parle pas du cunnilingus), qui devait exposer dans le cadre d’un séminaire linguistique, « l’écriture inclusive à l’épreuve de la grammaire ». Ses collègues avaient fait pression sur le doyen pour empêcher la conférence d’avoir lieu. Et le cas n’est pas isolé. 

Voilà l’université française qui pratique l’ostracisme. Le résultat est préoccupant, car la réflexion scientifique est étouffée par l’idéologie. L’Académie française y a vu un « péril mortel ». Cette pratique est un bras d’honneur aux instituions gardiennes de la langue française. L’écriture inclusive part d’une idée fausse qui voudrait que le masculin dans la langue «  invisibilise » (admirez le néologisme) les femmes. C’est une croyance qui ne repose sur aucun fondement sérieux : faire du masculin un genre qui ne prend pas en compte le féminin, c’est faire comme si les mots n’étaient jamais utilisés dans un contexte qui en éclaire le sens : ainsi, quand je parle des « habitants de ma ville», je pars du principe que c’est un ensemble qui comprend des hommes et des femmes. Il est urgent que l’usage de cette écriture soit réellement proscrit à l’école, elle est un danger pour l’apprentissage de notre langue car elle génère de l’insécurité  linguistique en rendant le français moins accessible, elle éloigne les gens qui ont des difficultés avec la langue. Un député s’est saisi du problème et prépare une proposition de loi allant dans ce sens. Espérons qu’il soit suivi.

Nous fabriquons des infirmes de la jouissance littéraire !

Un autre mal ronge notre culture : la  castration littéraire.  C’est un inquiétant symptôme de ce nivellement généralisé qui, dans le sillage de ce qu’on appelle la « culture de l’effacement » ou «cancel culture», est en train de bâillonner l’imaginaire en éteignant la saveur des mots. Désormais, il faut éviter  toute complexité et renoncer à la richesse de la langue dans les textes à destination des jeunes. Ainsi un éditeur transforme, lors d’une réédition, une phrase telle que «Le soleil disparut dans un flamboiement d’incendie et le lac refléta de merveilleux tons de pourpre et d’or» en la phrase amaigrie «Le soleil disparaît derrière les sommets alpins et le lac prend des reflets dorés». C’est ce qu’a fait Casterman en rééditant « Le Club des cinq et le Cirque de l’étoile ». De la même façon on  renonce au passé simple au profit d’un présent aplati, ce qui supprime la différenciation féconde  que nous faisions entre l’action factuelle intervenue à un  moment précis du passé et celle qui a une durée, exprimée par le passé simple ou l’imparfait. Pour Alain Duault, on prive nos enfants « de la pulsation gourmande d’une langue riche et charnue pour en faire une sorte de prose végane ». 

Le désapprentissage de la langue dans son épaisseur et sa complexité se fait au profit de sa seule valeur d’échange. L’argument de la simplification induit donc la réduction : il faut aplatir les textes destinés aux enfants, pour les préparer à « être en phase avec leur époque », ainsi que le dit la directrice de Casterman jeunesse. Un seul chemin : l’utile, le pratique, ou l’échangeable, voire le jetable. La poésie ne leur est plus nécessaire, pas plus que la musique ou que la peinture, pas plus que tout ce qui crée un langage propre à élever l’esprit, à questionner le monde, à en révéler la beauté et la multiplicité.  Bientôt on simplifiera Chateaubriand qui fait des  phrases trop  longues, si on l’étudie encore, et on « allégera » la neuvième de Beethoven aux orchestrations trop capiteuses. Bah,  le rap est bien plus accessible et il n’est pas produit par des « vieillards blancs, hétérosexuels, suppôts du patriarcat ». Ne cédons pas à tous ces alignements devant le politiquement correct de soi-disant progressistes, qui fait réécrire des titres, déboulonner des statues, étouffer des œuvres, débaptiser des écoles, défigurer la graphie de la langue avec la pratique de l’écriture inclusive, réduire toute expression à la pensée unique du moment.

Les néo-totalitaires nous imposent leur censure castratrice.

L’accumulation de ces atteintes anticulturelles cible les jeunes, les enfants même, qui, si l’on accepte de laisser cette action rongeuse se poursuivre, n’auront bientôt plus de mémoire pour se défendre, plus d’images pour rêver, plus de mots pour dire la beauté, l’amour, la vie. Il faut en finir avec cette maltraitance récurrente de ce qui constitue la matière de notre culture et qui se traduit par une langue décharnée plutôt que savoureuse et colorée, un imaginaire censuré plutôt qu’une ouverture au rêve, une aseptisation des contenus plutôt qu’un apprentissage des différences et de la mise en perspective historique. L’uniformisation du style, du son, de la perception conduit à une robotisation des consciences à un langage unique comme l’est la pensée. Insupportable ! Qui ne mesure la régression quand la langue qui est notre première identité doit se modeler à la dictature de la facilitation du discours, au nom d’une aberration intellectuelle ?

 

 


AUDIOVISUEL PUBLIC : LA MISE AU PAS EN MARCHE !

Archibald en colère

 

Delphine Ernotte a annoncé la couleur en prenant la tête de France Télévisions : elle consacrera l’essentiel de son temps  à « promouvoir la diversité ». Et effectivement  on commence à voir  le « progressisme » à  l’œuvre : Drucker enfin débarqué, Patrick Sébastien viré, et quelques autres têtes de gondole. Il ne fait pas bon être un mâle blanc par les temps qui courent. Plus insidieusement on commence à voir disparaître des émissions, le Cabaret de Patrick Sébastien, par exemple.… Ce n’est pas  pour des raisons d’audience, elles sont plutôt bonnes.  Elles coûteraient trop chères est-il avancé …  mais personne ne croit vraiment à ce genre d’argument.

Une télé diversitaire.

Delphine Ernotte  prétend donc faire entrer la télévision française publique dans les canons des intellectuels progressistes à la  mode. Une télé qui prend en compte la théorie du genre dont l’auteur a pourtant avoué qu’elle était entièrement inventée, et offre une meilleure représentativité aux « racisés ».  Il s’agit d’effacer la télévision « réactionnaire » « d’hommes blancs  de  plus de 50 ans ». Donc la règle est désormais : on ne finance pas un projet quand la diversité n’est pas représentée. Autrement dit France Télévisions devient l’organe exécutif d’une idéologie, avec nos redevances.  Mais quand on est  persuadé qu’on agit pour répondre aux exigences du sens de l’Histoire, on ne se pose même pas la question.

Ainsi, puisque 25% de la société française serait non blanche (là, les statistiques ethniques sont autorisées), le régime diversitaire doit s’imposer. Il est tellement facile de présenter, comme le faisait Françoise Nyssen, l’ex-falote ministre de la Culture « le pays des lumières, sur le sujet de la diversité, comme hautement réactionnaire ». Donc, la théorie de la représentativité va s’appliquer avec sa sociologie bancale, qui compartimente toujours plus étroitement la société en identités claniques. Il va falloir faire en distinguant  les hommes des femmes et des « non-binaires » qui refusent d’entrer dans une de ces deux catégories. Inutile d’invoquer la biologie, c’est « réac ». Il y aura les bien portants, les handicapés, et en plus il faudra trier tout le monde en groupes raciaux, séparant évidemment les « méchants blancs »  des minorités  opprimées.

Il ne fera pas bon être un mâle blanc, hétérosexuel, de surcroît un peu âgé donc susceptible d’être « colonialiste ». J’exagère à peine. Et encore, il y a tant d’autres catégories. Une production selon Ernotte doit donc refléter fidèlement ce saucissonnage nous présentant un monde sous la forme d’une série d’échantillons représentatifs… en espérant que chaque téléspectateur ou téléspectatrice (téléspecta.teur.trice, en inclusif) se trouvera représenté par un membre du groupe auquel  la bureaucratie médiatique diversitaire l’aura assigné. Et si ça n’est pas le cas, cela sera interprété comme une discrimination ! Notre culture nationale  universaliste, est condamnée à disparaître pour laisser  la place au monde « racisé »  et « multiculturaliste »,  machine à concasser l’idée même de nation.

Lavage de cerveau.

Est-ce  la mission du service public de se faire  propagandiste zélé d’une idéologie,  car  la « promotion de la diversité », vue sous ce prisme catégorisant est tout sauf un progrès. Et il ne s’agit plus d’éducation des consciences mais  de  lavage de cerveau, puisque la diversité des points de vue sur le sujet n’est même pas discutable. L’universalisme dont nous nous réclamons et qui met tous les êtres humains sur un pied d’égalité fait partie des opinions du vieux monde véhiculant des préjugés  à déconstruire pour faire place à la société inclusive. Avec à la clé des comportements comme ceux en action à France Inter qui tient la liste des intellectuels à bannir, comme Zemmour ou Onfray, meilleur moyen de liquider les « réactionnaires ». On comprend bien que les problèmes de santé de Michel Drucker sont tombés au bon moment, on apprend que « Mongeville » ne serait pas continué et que « La maison France 5 » ne sera pas renouvelée à partir de 2021. Le ménage est en cours. Ce sont pourtant des émissions qui ont leur public. Mais voilà : trop blanc, pas assez de couleur, pas  assez « genré »,  trop réactionnaire.

De l’audio-visuel aux universités.

Et le mal ne sévit pas que sur le service public audiovisuel. Il gangrène aussi nos universités et il ne fait pas bon,  par les temps qui courent, dénoncer  les islamo-fascistes, déconstructionnistes et diversitaires. Après le secondaire, où il est solidement installé, l’islamo-gauchisme s’est attaqué à l’enseignement supérieur où des courants très puissants sont à la manœuvre. On y voit la  montée des idéologies hostiles aux valeurs de la République qui menacent explicitement et directement les piliers de notre vie démocratique. Elles se manifestent, sous prétexte d’être les victimes d’une chasse aux sorcières et en hurlant au maccarthysme, par les pressions multiples et variées pour empêcher des conférences ou des interventions  d’avoir lieu, comme celles de Mohamed Sifaoui sur la prévention de la radicalisation ou de Sylviane Agacinski. Alain Finkielkraut y est interdit de séjour, ce qui est un comble pour un académicien. Je me demande ce qu’en pense sa chère collègue Danielle Sallenave. Bernard Rougier  et ses collaborateurs sont l’objet de menaces récurrentes pour avoir commis le livre « Les territoires conquis de l’islamisme ». Il s’agit d’une inversion des rôles incroyable, très pratiquée par le gauchisme. Menaces, actions militantes, pressions,  tout est bon pour transformer  l’enseignement supérieur en chasse gardée  sans que le monde académique ne se mobilise. L’objectivité du savoir est remise en cause  et on ne respecte plus la diversité des opinions.

Islamo-gauchisme et idéologie diversitaire, même combat.

Pour éclairer le débat, car c’est le même combat qu’il faut livrer dans l’audio-visuel et l’enseignement supérieur, il est utile de définir ce qu’on entend par islamo-gauchisme. Il se fonde sur trois idées. Il considère d’abord, l’islam comme « la religion des opprimés »,  ce qui permet à ces agitateurs athées d’oublier leur aversion du religieux. Il s’agit de substituer « la révolte islamiste » à celle du prolétariat européen devenu trop réactionnaire (surtout quand il vote RN). Il faut donc, deuxième principe, importer un prolétariat actif et révolutionnaire  en maintenant le plus possible les frontières ouvertes, donc surtout pas de frein à l’immigration. C’est avec ces nouveaux « damnés de la Terre » que les islamo-gauchistes espèrent détruire la  sociale-démocratie libérale et l’affreux système capitaliste. Enfin, troisième principe fondateur, «  l’islamisme » n’est qu’une simple réaction de défense (légitime) contre l’impérialisme néocolonial occidental  qui se servirait de l’idéologie « des droits de l’Homme » dans le  monde entier, à coup de canons !  Vous comprenez  maintenant l’embarras de M. Mélenchon quand il  lui faut dénoncer  le crime contre Samuel Paty. Et d’ailleurs, ce gauchisme sait utiliser toutes sortes de gradations pour imposer progressivement son idéologie, du déni à la « mauvaise conscience » (il ne faut pas stigmatiser, pas d’amalgame), en passant par le « pas-de-vaguisme » et si ce n’est pas suffisant, culpabiliser ou utiliser la peur. La somme de toutes ces petites trahisons conduit directement à une sorte de soumission à ses thèses.

Quel rapport entre l’idéologie diversitaire d’une Delphine Ernotte et l’islamo-gauchisme d’un Jean-Luc Mélenchon : une complémentarité qui conduit à mettre « hors d’état de nuire » notre culture de l’universel, fondée sur les Droits de l’Homme, l’esprit critique et le savoir.  Mais en se servant des thèses obscurantistes, venues des Etats-Unis ou véhiculées par une religion fondamentaliste, ils jouent un jeu dangereux. Ils mettent en danger notre civilisation et notre art de vivre.

 


CONTRE LA BARBARIE, L’HISTOIRE !

HISTOIRE

 

A hauteur de l’Histoire, les événements que nous vivons, telle la multiplication des « attaques au couteau », correspond à une entreprise de terreur pour sidérer les Français.  Et l’attaque de  Vienne, montre, s’il  en était besoin, qu’il s’agit bien d’un choc de civilisation. La France, comme  l’Autriche, comme tous les pays de l’Union européenne, incarnent un modèle de civilisation qui représente une résistance objective à la conquête islamiste. C’est donc l’Europe qui est attaquée, quel que soit son visage, qu’elle soit catholique, protestante, juive ou athée. Ce choc de civilisation qu’Erdogan cherche à amplifier en le transformant en guerre d’agression, est plus violent sur le territoire de la France par le fait que notre pays y ajoute le principe de laïcité, mortel pour les obscurantistes qui nous combattent. Car la laïcité, c’est l’autre nom de « l’universalisme », ce nom savant pour proclamer l’unité de l’espèce humaine.

Le rôle de la connaissance de l’Histoire.

Le modèle de civilisation dans lequel nous vivons ne va évidemment pas de soi.  Il suffit de regarder le monde autour de nous pour constater qu’il est assez unique sur la Terre.  Même les Etats-Unis d’Amérique présentent des traits d’obscurantisme, ne serait-ce qu’en enseignant à partir des thèses du « créationnisme », et leur société communautarisée montre au moment de l’élection du Président des limites inquiétantes par les violences qu’elle entretient.

Il  est donc essentiel d’enseigner l’Histoire à nos enfants qui arrivent dans un monde plus vieux qu’eux et dont elle seule peut leur donner les clés de compréhension. Il importe de refaire avec eux, quelle que soit leur origine, le chemin qui a mené à la République, à la proclamation des Droits de l’Homme puis au principe de séparation. Comme  l’énonçait Charles Péguy, « laïcité, République et France sont une seule et même chose ».  La laïcité, c’est l’unité dans la séparation, celle de l’église et de l’Etat, entre le religieux et la conscience basée sur la raison. Cette séparation a pour présupposé l’unité de l’Esprit humain, l’idée qu’il y a un Esprit universel à l’image de l’intelligence humaine. Et c’est la grandeur de la République d’avoir proclamé ce principe valable  pour tous les temps, tous les pays,  toutes les civilisations, toutes les religions.  C’est ainsi que notre coin de terre est devenu la patrie de l’Universel. Principe rappelé par des intellectuels de renom dans un manifeste publié dans le Journal du Dimanche le 25 octobre dernier.

C’est le principe de séparation qui permet le libre-arbitre, la liberté de croire ou de ne pas croire, la  liberté d’expression … et qui nous a permis une fois pour toute de sortir des guerres de religion (encore l’Histoire). Et c’est pour le défendre, que des Boualem Sansal, Kamel Daoud, Zhineb El Rhazaoui, Jeannette Bougrab, et tant d’autres pas particulièrement gaulois…  risquent leur vie au nom de la liberté.  En même temps, c’est aussi pour nous qu’ils se battent !

L’Histoire pour combattre les contre-vérités.

A Nice, c’est  la France chrétienne qui était visée. Même si beaucoup parmi nous rejettent désormais cet ancrage, pour les musulmans, elle est une « terre chrétienne ». Et pour ceux qui l’attaquent elle est encore le pays des croisés, des colonisateurs. On retrouve là deux mensonges historiques qui font partie de leur rhétorique. D’abord les arabes avaient totalement oublié les Croisades jusqu’au XIXème siècle. Ensuite, il n’y a pas de continuité historique entre les Croisades et la colonisation : leurs buts étaient totalement différents. Enfin  il n’y avait pas de collusion entre les colonisateurs et les missionnaires, sauf peut-être en Algérie, car la plupart du temps  ces derniers étaient plutôt considérés comme des gêneurs qu’il fallait parfois expulser. L’enseignement de l’Histoire peut rétablir la réalité des faits dans leur chronologie et leurs motivations. Il est utile aussi de faire la part d’ombre et de lumière de ces périodes qui ont permis bien des échanges entre l’Orient et l’Occident. Ce n’est pas  un hasard si nous comptons avec des chiffres arabes. Quant à affirmer que la France est encore aujourd’hui un pays impérialiste, c’est un mirage que des esprits nostalgiques ou malintentionnés essaient d’entretenir.

L’Histoire et la spécificité de l’Islam.

Il est bon de faire découvrir aussi, sous l’angle historique, ce qui fait la nature des trois grandes religions monothéistes. Elles ont la même origine, sont toutes les trois « abrahamiques », sont parties du même concept de Dieu unique qu’on ne nomme pas (Yahvé, Dieu, Allah) et ont d’abord prospéré au Moyen-Orient avec Jérusalem comme point d’ancrage. La religion hébraÏque est la plus ancienne, le christianisme est venu près de 2000  ans plus tard et l’Islam encore plus de six siècles après. L’islam méprise depuis le début le christianisme qu’il accuse d’avoir trahi le message d’Issâ (Jésus) qui aurait trafiqué l’Evangile pour en effacer l’annonce de la venue de Mahomet, et aussi d’être une religion qui associe au Dieu unique deux créatures : Jésus et Marie. De même que pour les chrétiens, le juif a longtemps été « perfide » à cause de Juda,  pour les Musulmans, l’Islam est la seule vraie religion  et il  convient de convaincre tous les autres  croyants de s’y soumettre. L’affrontement d’aujourd’hui perdure depuis les origines  entre deux systèmes de normes, deux lois divines : l’une cherchée  par la raison et la conscience, créées  par Dieu ou de manière plus moderne par la raison, l’autre dictée par Dieu dans un livre, le Coran, et dans la conduite de Mahomet, qui l’a reçu sans rien y ajouter ou en retrancher. Cependant, l’Histoire nous montre qu’à plusieurs époques et en différents lieux, elles ont pu cohabiter pacifiquement.

Le christianisme a dû s’adapter.

Les musulmans peuvent croire que la République les stigmatise et ne s’en prend qu’à eux. Ils comprendraient mieux ce qu’est la séparation de la religion avec l’Etat si l’Histoire leur enseignait qu’avant eux,  les  chrétiens ont du se résigner à la laïcité et ça ne s’est pas fait sans mal. Les  républicains n’ont pas hésité à utiliser des méthodes brutales : en 1880, Jules  Ferry expulse près de 6 000 jésuites des établissements scolaires, en 1904,  sous le  Ministère Combe, 30 000 religieux sont interdits d’enseignement. On nous objecte que l’Islam est un système politico-religieux d’une seule pièce, incompatible avec la seule  pratique d’une foi personnelle. C’est ce qu’on prétendait naguère du catholicisme.  Pourtant, à  l’issue de l’affrontement, la  laïcité a triomphé et avec elle la paix des esprits et des consciences.  Il faut donc créer les conditions pour que l’Islam devienne compatible avec la démocratie, en évitant, si possible, les violences que la République a fait subir au catholicisme.

L’Islamophobie, ce mauvais prétexte.

Bien des musulmans, installés  depuis  longtemps sont sincèrement républicains. Mais pour de multiples raisons, les islamistes ont marqué des points dans la jeunesse. Si bien qu’aujourd’hui, il existe une « zone grise » composée d’une  majorité d’hésitants et de nouveaux venus qui n’approuvent pas le terrorisme mais sont tentés par le « communautarisme ». Il nous revient de faire le nécessaire pour les convaincre d’adhérer aux règles du jeu de notre société. Encore faut-il leur en montrer l’intérêt intellectuel. Après tout, la vérité qui affirme que la Terre est plate arrive à coexister avec la réalité sphérique ! Encore faut-il faire en sorte que notre société leur ouvre les bras : le chemin serait plus facile si le décalage entre l’affirmation d’égalité et la réalité sur le terrain était réduit. C’est pourquoi  les partisans d’une « laïcité ouverte », qui ont abandonné l’universalisme  au profit des communautarismes rivaux, ne sont que les tristes organisateurs des guerres civiles qui ne manqueraient pas de se produire si on les laissait faire. L’islamo-gauchisme d’un certain nombre d’intellectuels, minoritaires mais très puissants dans les médias, a paralysé toute reconquête républicaine en l’assimilant à de l’islamophobie, qui identifie l’islam à une race et toute résistance à l’islamisme, à du racisme. La rhétorique du « pas d’amalgame » d’Edwy Plenel et de Jean-Luc Mélenchon ne convainc plus personne. Seule la vraie laïcité peut instaurer la coexistence organique de toutes les familles de pensée, de toutes les religions, même de celles qui ne croient pas en elle.

Nous sommes dans une lutte pour la liberté de l’esprit, et le rôle de l’éducation est essentiel, avec  au premier rang l’enseignement de l’Histoire et de l’Education civique. Cette lutte ne concerne pas que les Français de confession musulmane. L’Etat doit soutenir inconditionnellement tous ses professeurs.   L’école a besoin, pour briser le huis clos familial, du « colloque singulier de l’enseignant et de l’enseigné », comme l’énonce si bien Jacques Julliard. Ce n’est pas aux parents de dire ce que l’on doit enseigner à leurs enfants. Ecrivant cela, je ne peux m’empêcher d’avoir une pensée  pour Samuel Paty.

 


TU L’AS DIT BOUFFI !

Archibald en colère

 

Quoi qu’il en coûte.

Il en coûte toujours quelque chose. Les générations futures paieront la note héritée de Macron. La Caisse d’amortissement  de la dette sociale (Cades)  a été prolongée cet été jusqu’en 2033 et pourrait être étendue jusqu’en 2045,  portant sa durée de vie totale à un demi-siècle…

La dette publique s’envole.

Après de 2 640 milliards d’euros au deuxième trimestre, l’endettement de la France représente désormais un peu plus de 114% de la richesse nationale. La dette  a  grimpé de 200 milliards sur le seul  12ème trimestre 2020.  Explosion des dépenses publiques et effondrement des recettes liées aux reports et aux exonérations de cotisations et d’impôts.

Le déficit de la sécu explose.

Un record  à 53 milliards contre 5,1 attendu initialement, avant la crise. Retour dans le rouge de l’ensemble  des branches : 21 milliards pour l’assurance-maladie, 17 milliards pour les retraites, 3 milliards pour la famille…

Economie et emplois « zombies ».

Les taux d’intérêt quasi nuls prodigués  par les  banques centrales et les aides d’Etat ont mis sous perfusion des dizaines de milliers de sociétés petites  ou grandes dont on ne sait pas si elles retrouveront un jour une activité normale. Le danger est d’entretenir une population de canards  boîteux qui serait préjudiciable pour le pays tout entier. Mais le problème se pose de  la  même façon pour les  emplois préservés temporairement grâce au chômage partiel financé par l’Etat qui prend en charge de 60 à 100% des salaires. Il y aurait en France  près de 2 millions de jobs « zombies ». Et faute d’une reconversion professionnelle de leurs titulaires, ces « emplois zombies » ne seront qu’un cache-misère statistique permettant de dégonfler artificiellement les chiffres su chômage. Il s’agit du problème social le plus douloureux que nous aurons à affronter !

Purge.

La purge des  emplois provoquée par la crise du Covid  est déjà à l’œuvre mais largement invisible. Elle touche les intérimaires, les salariés en CDD, les indépendants sans mission… auxquels il faut ajouter le gel des   plans d’embauche, notamment des jeunes diplômés. Par exemple, l’intérim affiche toujours un déficit de 150 000 emplois sur un an, soit une purge de 20% par rapport à la rentrée 2019. Et encore, on n’a rien vu. Le gros des plans sociaux est attendu pour début  20121.  La recrudescence de l’épidémie n’arrange rien.

Education en crise.

Selon la commission européenne, la France est le  pays d’Europe occidentale qui rémunère le plus mal ses enseignants, à l’exception de l’Italie.  Et pourtant le rôle  de  l’école dans l’éducation est parait-il  primordial.  Un professeur qui enseignait pour la première  fois en 2018-19 a perçu un salaire brut de 26 329  €.  La  même année un instituteur allemand touchait quasiment 50 209 €, et un Suisse  71917 € (ça fait rêver !).  Après on s’étonne qu’on ne trouve plus dans le recrutement de nos enseignants, le « haut du panier » (pour rester correct).

Darmaninbus  gros menteur.

Darmanin a déclaré dans le Figaro : «  Il vaut  mieux que les élèves apprennent l’arabe avec des enseignants français que dans les mosquées ».  C’est un gros  mensonge. La France n’a pas d’enseignants français capables d'enseigner l'arabe et au  mois d’avril dernier elle a passé un accord  avec la Tunisie  pour qu’elle fournisse les professeurs nécessaires. Je trouve  que c’est un peu gros !

Covid et Neandertal.

Les  facteurs génétiques entreraient en ligne de cause pour expliquer les formes graves du coronavirus. Une équipe internationale a identifié sur le chromosome n°3 un groupe de gènes jouant un rôle clé. L’un des variants de cette séquence d’ADN serait à l’origine d’un risque trois fois plus élevé de développer une forme  grave  nécessitant  une ventilation artificielle. Or on a retrouvé cette séquence à risque dans l’ADN fossilisé d’un homme de Néandertal qui vivait il y a 50 000 ans et l’aurait donc transmis à certains d’entre nous. Peut-être que Tump en fait partie. Pas certain que  les créationnistes  américains acceptent cette explication.

 


III - Réflexions pour aujourd'hui - Un (tout petit) peu de prospective (6)

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L'ECOLE S'INVENTE TOUS LES JOURS

Un (tout petit) peu de prospective.

« Alors que leurs prédécesseurs se réunissaient dans des classes ou des amphis homogènes culturellement, ils étudient au sein d’un collectif où se côtoient désormais plusieurs religions, langues, provenances et mœurs. Pour eux et leurs enseignants, le multiculturalisme est la règle… ».  Voici en quelques lignes ce que serait l’enseignement pour « Petite Poucette », tel que nous le décrit Michel Serres. Il nous projette dans la révolution numérique qui plonge les enfants d’aujourd’hui dans le  monde virtuel et planétaire où ils vivent déjà. Et d’après lui, ils n’ont déjà plus la même tête que nous : ils peuvent manipuler plusieurs informations à la fois, ils ne connaissent, ni n’intègrent, ni ne synthétisent comme nous sommes habitués. Par la toile ils accèdent à tout le savoir et ils ne parlent déjà plus la même langue que nous… Et voilà ces jeunes auxquels « nous prétendons dispenser   de l’enseignement, au sein de cadres datant d’un âge qu’ils ne reconnaissent plus : bâtiments, cours de récréation, salles  de classe, amphithéâtres, campus, bibliothèques, laboratoires, savoirs même… cadres datant d’un âge et adaptés à une ère où les hommes et le monde étaient ce qu’ils ne sont plus. »

Mais le savoir reste à transmettre !

Le nouveau monde dans lequel Michel Serres se projette va-t-il se passer du pédagogue ? De tout temps le savoir avait pour support le savant ou le « sachant » comme on dirait en « novlangue ». Au temps de la tradition orale, il était aède ou griot. Puis vint l’écriture pour le fixer sur les  supports antiques : tablettes d’argile, rouleaux, parchemins. Des moines passaient leur vie à le copier pour le diffuser. A la Renaissance, l’imprimerie fait du livre  le principal support de diffusion. On construit des bibliothèques pour le rassembler, à la Sorbonne et ailleurs. Même le moindre collège est conçu autour de ce centre vital : le CDI (Centre de Documentation et d’Information).  Mais aujourd’hui, ces supports sont devenus obsolètes,  c’est la toile qui est devenue le  principal support de messages et d’information. Dans mon bureau, il y a une éternité que je n’ai pas ouvert mon « Grand Larousse encyclopédique » ni un volume de  mon « encyclopedia universalis ». Démodés,  poussiéreux, dépassés, ils sont devenus un décor d’érudit. Un simple décor. Ils ont été détrônés par « Google » ou ses équivalents. Il suffit de taper quelques lettres et la réponse jaillit, immédiate. Désormais, le savoir est partout, sur la toile, disponible. Il suffit de se baisser  pour le ramasser. Encore faut-il se baisser ! Encore faut-il,  surtout, qu’il soit vérifié ! Car en même temps, il faut bien l’admettre,  l’ignorance  progresse.

A qui le transmettre, s’interroge alors le philosophe ? A tous ! Désormais le savoir est accessible à tous ! Avec l’accès aux personnes, par le téléphone, en tous lieux, l’accès au savoir est ouvert : d’une certaine manière il est toujours et partout déjà transmis. Soit !

Mais si on voit bien ce que ce constat génère comme conséquences matérielles : plus besoin de lieux concentrés, plus d’enseignant énonçant le  savoir à un groupe silencieux à l’écoute attentive, l’apprentissage interactif peut se faire entre des personnes dispersées dans l’espace planétaire dès lors qu’elles sont connectées. Ce n’est pas sans poser au moins deux problèmes : quoi mettre dans la tête, et à quelle(s) source(s) de savoir se référer ?

La tête bien faite.

Michel Serres utilise la métaphore de la légende de Saint-Denis pour illustrer le fait que nous avons dorénavant la tête à côté du corps, autrement dit un cerveau bis dans la main qui contient tout le savoir dont on peut avoir besoin. A-t-on pour autant de manière innée, le mode d’emploi pour l’utiliser ?  Montaigne préconisa une tête bien faite plutôt qu’une tête bien pleine, parce qu’il prenait en compte le formidable progrès apporté par le stockage de la connaissance dans les livres. Inutile donc  comme les anciens de se remplir la tête : la méthode devenait  aussi importante que le contenu. N’oublions pas qu’il ajoutait : « qu’on y requiert les  deux ! » Et cela nécessitait d’apprendre et d’apprendre à apprendre. Ce que curieusement, Michel Serres oublie.

La tête de nos enfants mute une nouvelle fois : ils ont les fonctions cognitives qui permettent d’assimiler le savoir ainsi distribué,  puisque ces fonctions se transforment avec le support et par lui. La pédagogie change donc totalement avec les nouvelles technologies. Tout reste à inventer ! Mais… j’ajoute un « mais ». Je pense malgré tout qu’il y a un commencement nécessaire à la transformation de la tête bien faite en tête numérique,  qui s’appelle  « apprentissage de l’écriture » –peu importe laquelle, cryptage, encodage, - et de « la lecture ». Car sans ces deux apprentissages il n’y aura point de formation de l’esprit critique, absolument indispensable à l’utilisation et à l’interprétation de toute information si on veut qu’elle devienne « connaissance ». Sinon, le cerveau bis, dont on lui imposera le contenu, pensera à sa place. D’ailleurs si l’on en croit Michel Desmurget (« La fabrique du crétin digital »), le cerveau mutant que décrit Michel Serre n’existe pas, études scientifiques à l’appui.

La  vérification du savoir.

Michel Serres nous dit : « N’ayant plus à travailler dur pour apprendre le savoir, puisque le voici, jeté là, devant elle, objectif, collecté, collectif, connecté,  accessible à loisir, dix fois déjà revu et contrôlé … ». Objectif et contrôlé : peut-on en être certain ? Et par qui ? Peut-on faire confiance au collectif ? Chacun sait que tous les moteurs de recherche ne sont pas exempts d’erreurs, et même  nombreuses.   Wikipédia, déjà citée, cette encyclopédie collective est une collection d’articles souvent fort bien documentés, mais à l’initiative de contributeurs pas toujours complètement objectifs.

Allons plus loin. 

Le monde est dominé aujourd’hui par un géant des données d’information : « Google ». Mais qui le contrôle ?  Qui nous garantit le savoir qu’il dispense. Questions de béotien probablement,  mais quand on voit tout ce qui circule sur internet, où  le vrai côtoie très souvent le « fake »,  il convient d’être  méfiant. Certes Petite Poucette  ne lit ni ne désire plus « ouïr l’écrit dit » (l’expression est de Michel Serres : en gros, la transmission orale par le prof),  parce que le  savoir annoncé, tout le monde l’a déjà, et en entier, sous la main. Alors ce nouveau savoir qui ne sort  plus du livre  où  il  était stocké, quel est–il ? « C’est une offre sans demande » nous répond le philosophe. C’est la fin des experts et un retournement de la pédagogie. Petite Poucette cherche et trouve le savoir dans sa machine. Mais celle-ci ne fait que compiler le savoir sorti des livres dont on a bien voulu la nourrir et c’est elle qui choisit ce qu’elle va afficher (Gaspard Koenig, « la fin de l’individu »). Et alors comment Petite Poucette discernera-t-elle le bon savoir de l’obscurantisme qui sait lui aussi se glisser dans les algorithmes de la connaissance ? Car, comme nous le montre Gaspard Koenig, les banques de données ne sont rien d’autre que du savoir compilé. Alors, le savoir « discuté » sera-t-il capable de faire face ? D’autant plus que l’intelligence artificielle va aussi s’en mêler. Et quand la machine  tombera en panne, quelle solution ?... Mon esprit cartésien me pousse à la  méfiance.

La compétition avec l’Intelligence Artificielle.

Aujourd’hui, c’est l’Intelligence Artificielle qui mène la danse. Elle est capable de battre des champions du monde d’échec. Elle progresse à une vitesse exponentielle et elle s’auto-éduque autant qu’elle  se programme nous prévient Laurent Alexandre (La guerre des intelligences – JC Lattès). En 2020, les ordinateurs traiteront 1 milliard de milliards d’opérations toutes les secondes, tandis que l’humanité produira 1 000 milliards de milliards de data chaque semaine, une masse de données et d’informations que le cerveau humain sera   incapable de digérer sans le recours à l’Intelligence Artificielle  dans tous les domaines de la vie humaine. Ce tsunami numérique,  dont il est déjà impossible de se passer et qui va impacter tous les métiers, exigera de  la part des humains une intelligence naturelle plus développée, au risque sinon que l’IA les  dépasse.  En effet, quelle va être la place de l’homme face à  ce qu’on appelle l’Intelligence Artificielle faible, déjà opérationnelle,  sans parler de l’Intelligence Artificielle forte dotée de conscience et d’émotions qui pourrait émerger plus tard, bien qu’on en soit encore très loin ?

Les algorithmes : des crétins performants.

Dans sa quête mondiale sur l’Intelligence Artificielle, Gaspard Koenig nous rassure tout en nous montrant les multiples biais dangereux qui peuvent conduire à la fin de l’individu. Du « Turc mécanique », ce joueur d’échec hongrois automatique du Baron Von Kempelen inventé en  1769, aux supercalculateurs de Google,  l’IA, qui se résume en fait à la somme de nos connaissances compilées en informatique, est une illusion seulement capable de reproduire un résultat et non un processus.  Mais c’est une illusion convaincante. Pour faire simple, la dernière génération d’algorithmes est capable de fouiller dans une masse de données, de manière plus ou moins autonome, pour en extraire des régularités et des prédictions. Mais sans données, pas d’IA, qu’elle soit « machine learning », « reinforcement learning » ou « deep learning ». Les technologies d’IA sont maintenant capables d’anticiper et d’orienter les comportements individuels grâce à la puissance de personnalisation et d’optimisation fournie par le traitement des « data ». La collecte de ces « data » est donc essentielle. Ce sont des milliers de personnes qui s’y emploient mais aussi chacun d’entre nous grâce à tous les « cookies » et « conditions d’utilisation »  que nous téléchargeons quotidiennement. Pourtant, la « super intelligence » est un mythe, car le bon sens est la chose du monde la moins partagée par les robots. Aucun algorithme ne peut concevoir une interprétation globale du monde et des hommes qui le peuplent : comme  l’affirmait Spinoza, « le  cerveau et le corps sont dans le  même bain  et  produisent l’esprit de  manière conjointe », ce  que Antonio Damasio, neuroscientifique de renommée mondiale, explique par  « l’homéostasie » : on pense autant avec ses doigts de pieds qu’avec son cerveau ! Et aucune IA n’est capable  d’imiter nos doigts de pied.  Avec en plus nos « sentiments », au coeur du processus homéostatique, qui sont seuls à produire du sens. Sans corps,  pas  de sens commun, mais  pas d’humour non plus. Cela n’empêche pas  l’IA de menacer l’humain.

Le « nudge » : une nounou souterraine.

Commençons par le mot lui-même, qui, en anglais, signifie «coup de pouce». C’est en 2008 que la théorie du Nudge a été popularisée par deux américains : Richard Thaler, un économiste et théoricien de la finance comportementale et Cass Sunstein, professeur à l’Université de droit d’Harvard. Son principe est simple: influencer nos comportements dans notre propre intérêt. Elle part du principe que les individus ne sont pas des êtres rationnels et que leurs prises de décisions sont sous l’influence de l’environnement, des émotions et des instincts, les biais cognitifs. Ainsi, ce « coup de pouce » serait ce qu’il y a de plus efficace pour aider les individus à faire des choix : par exemple, une grande surface avait augmenté de 30% en 3 mois ses ventes de poissons frais en diffusant des bruits de mouettes et des odeurs de marée. Issu de la  psychologie comportementale, le  principe du « nudge » a été intégré dans  les algorithmes. Pour aller à l’essentiel, l’idée qu’avance l'auteur, c’est que nous vivons dans un monde où nos libertés seraient de toute part menacées notamment par les Gafa, mais aussi par des entreprises, par des gourous et des partis politiques qui tentent de nous faire aller dans telle ou telle direction, non par une méthode autoritaire, mais en nous incitant doucement, par micro-messages publicitaires ou autres, à choisir telle option d’achat, de vote, de spectacle, etc… Influencer sans contraindre, et pour le bien. Autant de formes de soumission aux algorithmes. Avec  le danger évident, celui d’agir pas seulement pour notre bien mais surtout pour la communauté,  variable selon le développeur de l’appli. Derrière le « nudge », il y a toujours une forme d’allégeance à un communautarisme qui se profile,  soit par utilitarisme (cas américain) soit par idéologie collectiviste (cas chinois). L’individu perd  alors sa liberté de jugement. On imagine assez facilement ce que le « nudge » appliqué à des logiciels pédagogiques pourrait provoquer comme orientation des apprentissages…

Le libre arbitre en danger.

Les stratégies  développées par  les créateurs d’applications mettent en effet nos facultés de choix personnel « libre et par soi-même » à rude épreuve par le confort qu’elles nous apportent. Et les  exemples dans notre vie quotidienne ne manquent pas : « Waze » qui nous guide en nous promettant  le meilleur temps de parcours, c’est tellement plus facile  que de déplier une carte routière ; nos messageries nous proposent des réponses toutes faites sans que nous ayons à  faire  l’effort de rédiger ou de chercher un mot  plus précis… Des petits riens qui font de nous, petit à petit des zombies décérébrés : interrogez un chauffeur parisien d’Uber sur la ville qu’il traverse chaque jour, et vous serez surpris du vide ;  et ne cherchez pas pourquoi vos enfants, sinon vous-mêmes, avez  perdu votre vocabulaire  et votre syntaxe !  A force d’économiser nos fonctions cérébrales,  Gaspard Koenig explique que l’humain perd pour de bon l’habitude de prendre ses propres décisions et sa liberté de choisir.  Les algorithmes agissent comme une drogue. Grâce aux délibérations « tellement logiques » servies sur un plateau, chacun acceptera d’être accompagné par une IA dans les choix les plus importants de son existence. C’est déjà ce qui se passe avec les sites de « rencontres ». C’est la fin de l’individu autonome et responsable par le triomphe du « bien-être » !

L’individu n’a pas dit son dernier mot.

On observe déjà  les nombreuses transformations  dans la société, générées  par la fin du libre arbitre. Ce sont les ordinateurs qui échappent au monde financier, c’est  l’art sans artiste, la science sans causalité, la théorie, fruit de la réflexion humaine rendue obsolète par les data, et sans libre arbitre,  fini le marché : la prédiction de nos comportements suffit déjà à ajuster l’offre à la demande dans bien des  cas.  Pour échapper à tous ces dérèglements, c’est à l’individu de reprendre la main  en commençant par ne plus fournir gratuitement  ses données,  en définissant ses  propres normes  pour les imposer aux algorithmes et tant pis  si elles ne sont pas « optimales » pour  le  groupe.  Chacun devrait pouvoir  imposer  son propre nudge, de manière consciente et volontaire.  C’est le  principe de  la  « Prime Directive », que Gaspard Koenig sort  de la  série Star Trek, pour en faire  une règle supérieure d’ordre moral.  Cela remettrait de l’humain dans l’IA et surtout lui redonnerait du sens.

L’Etat français à la manœuvre.

Notre  pays présente des prédispositions pour exploiter  le  filon du « nudge » et utiliser les algorithmes à son profit. Il est centralisé et hypertechnocratisé, deux caractères facilitateurs. Le système fiscal  mis en place  avec  le  prélèvement à la source en est un bon exemple : le  « nudge » ici consiste à soulager le contribuable  de toutes les démarches déclaratives, il n’a plu qu’à  payer, et encore, le prélèvement  a lieu sans même son consentement. Une autre application est en train de se mettre en place : Bercy a glissé dans le  projet de loi de finances une disposition qui lui donnerait  le droit de collecter et d’exploiter, au moyen de traitements informatisés,  les contenus librement accessibles publiés sur internet.  Un « ciblage de  la fraude et valorisations des requêtes », pour définir un traitement automatisé des données collectées consistant à appliquer des  « méthodes statistiques innovantes ». En clair  il  s’agit de conjecturer qui va frauder dans le futur en fonction de  données personnelles (vraies ou fausses)  publiées par soi-même  ou  par des tiers…  Le  « data mining »  est  en plein dans le sujet puisqu’il est  censé permettre de prédire les  comportements et de prévenir le délit. Et on envisage maintenant d’utiliser la « reconnaissance faciale » pour la sécurité. Espérons qu’on ne suivra pas le modèle chinois. Big Brother est  déjà  là !

Il  ne s’agit  pas pour autant de devenir technophobe. Le particularisme de l’Europe, par rapport au reste du monde, c’est sa culture spécifique à l’origine de l’individu libre et responsable.  L’Europe  a  tout son rôle à  jouer pour proposer des régulations intelligentes conciliant prospérité et libertés. L’important est que, là  aussi, les  algorithmes n’enterrent pas nos « Lumières ». Comme le dit Gasparov dans le livre, à  propos de « Deep blue » qui l'a battu aux échecs : «  il n’est  pas plus intelligent qu’un réveil-matin programmable ! »

Plus que jamais, l’éducation aura un rôle primordial.

Dans ce contexte, l’une des grandes questions qui sera au cœur des préoccupations sera celle de l’éducation : quelles compétences et quelles connaissances transmettre à nos enfants et petits-enfants pour qu’ils ne deviennent pas les esclaves de l’Intelligence Artificielle, des personnes ayant perdu leur libre-arbitre, et qui fera qu’ils ne seront pas facilement manipulables par les médias où le virtuel peut si facilement remplacer le réel, par le  monde économique, toujours preneur de mains-d’œuvre dociles, sans parler du politique  où  le mensonge peut façonner l’opinion plus facilement qu’autrefois (cf. la campagne sur le Brexit au Royaume-Uni) ?

Déjà les métiers tels que la  médecine, la radiologie et la chirurgie sont envahis par elle. Il n’y aura bientôt plus d’agences bancaires parce que la  plupart des opérations sont traitées sans intervention humaine… L’avenir est donc dans les activités qui font appel à l’esprit d’entreprise dans les métiers de la robotique, les biotechnologies,  les nanotechnologies.  Il sera aussi  dans toutes celles qui peuvent donner un sens à la vie : l’enseignement évidemment, la recherche bien sûr,  mais aussi le droit,  les loisirs, les services  à la  personne, la sécurité, et  forcément la politique dont il vaudrait mieux qu’elle ne soit pas exercée par des robots !

Il est impératif  que l’économie de la connaissance prenne rapidement en compte les personnes qui ont des capacités moyennes ou modestes, puisque dans le même temps l’Intelligence Artificielle va avancer de  plus en plus vite. Celles que l’on commence à former seront encore sur le marché de l’emploi en 2070.  Qu’en fera-t-on quand elles seront dépassées  par les progrès de  l’Intelligence Artificielle ? L’auteur de « La guerre des intelligences » préconise : l’école a un rôle à jouer, à condition que, lorsqu’on investit dans l’éducation, cela ne profite pas qu’aux élèves qui ont un QI élevé. En effet, partout dans le monde, l’éducation ne marche vraiment bien que sur ces derniers, toutes les études internationales le montrent. Cela  passe par une modernisation des moyens et un nouveau type de recrutement des enseignants. 

Investir dans la recherche pédagogique.

Il faut réfléchir à une pédagogie qui améliore  les capacités des gens à QI modeste et qui leur permette d’apprendre : c’est le seul moyen d’éviter le  pire scénario qui consisterait à avoir d’un côté l’élite et de l’autres  les inutiles. Laurent Alexandre, déjà cité  plus haut, stipule que nos cerveaux pourraient être modifiés par la  science pour augmenter notre quotient intellectuel afin de résister à la concurrence de  l’Intelligence Artificielle. Une montée en puissance radicale en utilisant tout le potentiel  des nanotechnologies, biotechnologies, informatique et sciences cognitives. Il  plaide encore  pour une école « transhumaniste » qui trouvera normal de transformer le cerveau des élèves, pour favoriser une démocratisation de l’intelligence. Nombre d’intellectuels humanistes y verront une dérive qui rappelle le « Meilleur des Mondes » d’Aldous Huxley,  mais l’essayiste a des arguments qu’il faut savoir entendre, sans qu’ils soient décisifs.

On a lancé la société de la  connaissance, du big data, et l’industrialisation de l’Intelligence Artificielle sans se préoccuper de l’intelligence biologique. Laurent Alexandre dénonce, à juste titre  des élites qui n’ont même pas commencé à réfléchir à l’avenir des gens moins doués, alors  que les inégalités de quotient intellectuel sont les principales sources des inégalités sociales et économiques. Or le quotient intellectuel mesure notre capacité à résister à l’Intelligence Artificielle puisqu’il synthétise notre plasticité neuronale et donc notre adaptabilité intellectuelle. En ce sens, la prise  en compte  par  l’école de cette nécessité évidente  d’égalisation des chances, impose des investissements lourds dans la recherche pédagogique au moins autant que les  géants du numérique américains et chinois investissent dans l’éducation des cerveaux de silicium.

Nous avons en France, une « mission sur l’intelligence artificielle » pour la développer dans notre pays et en Europe. Elle a défini six pistes de  réflexion : politique industrielle, enjeu des données, impact  sur l’emploi, écologie, éthique et recherche. Rien sur la formation et l’évolution de la pédagogie ! En retard sur le développement de l’Intelligence Artificielle, nous ne prenons pas en compte son impact sur l’humain. Peut-on se contenter d’une vision qui réduit l’Intelligence Artificielle à débarrasser l’humain de ce qui est répétitif pour se concentrer sur le stratégique et l’empathique qui font de nous des humains ? Voilà une vision un  peu trop réduite du rôle de l’Intelligence Artificielle. Le  débat est donc loin d’être clos. 

Les écrans ne sont pas la solution.

L’ouvrage de Michel Desmurget qui a mis trois ans à rassembler la littérature scientifique concernant le sujet est sans appel. Dans « la fabrique du crétin numérique », il démontre avec une grande précision les dégâts provoqués par le temps passé de nos chères têtes blondes devant les écrans. Toutes les études montrent un affaissement majeur des compétences cognitives de ces jeunes, depuis le langage jusqu’aux capacités attentionnelles en passant par les savoirs culturels et fondamentaux les plus basiques. La numérisation de l’école ne fait qu’aggraver les choses, on le sait, entre autre, par les études PISA. Le miracle que décrit Michel Serres  n‘a pas eu lieu : homo numericus n’est pas advenu. Ce prodige évolutif que d’aucuns nomment « millenial, digital native, e-generation,… » n’existe que dans la tête des propagandistes de la consommation d’écrans. L’enfant mutant du numérique, que son aptitude à taquiner le smartphone aurait transformé en omnipraticien des nouvelles technologies, qui grâce aux jeux vidéo aurait vu son cerveau prendre force et volume, cet enfant n’est qu’une légende. De même la performance des élèves chute d’autant plus que les investissements dans les technologies de l’information et de la communication (TICE) augmentent. Alors que nombre d’études ont démontré l’importance de la lecture dans les livres pour enrichir et développer le langage et son influence positive sur les résultats scolaires. L’enfant n’a besoin pour développer son verbe ni de vidéos ni d’applications mobiles, il  faut qu’on lui parle, qu’on sollicite ses mots, qu’on l’encourage à nommer les objets. Il a besoin d’interaction humaine. Le cerveau humain s’avère, quel que soit son âge, bien moins sensible à une représentation vidéo qu’à une présence humaine effective.  C’est pour cette raison que la puissance pédagogique d’un être de chair et d’os surpasse irrévocablement celle de la machine.

Donc, le professeur solidement formé reste la meilleure solution. Un écran ne peut pas sourire, accompagner, guider, stimuler, encourager, rassurer, émouvoir, faire preuve d’empathie … qui sont des éléments essentiels de la transmission et de l’envie d’apprendre.

Les écrans ont d’autres effets négatifs qu’il serait dangereux de sous-estimer : leur utilisation abusive affecte lourdement le sommeil, augmente fortement la sédentarité en diminuant d’autant le niveau d’activité physique, effets auxquels il faudrait ajouter les contenus « à risque » de tous ordres ( sexuels, tabagiques, alcooliques, alimentaires, violents …) qui saturent l’espace numérique. Maîtriser l’utilisation des écrans s’avère donc une nécessité si l’on veut préserver les performances scolaires, le développement intellectuel et la santé des enfants.

D’autres enjeux tout aussi cruciaux.

La France a aussi pris du retard dans toutes les problématiques d’accueil des enfants « différents » : tous les « dys.. », précoces, autistes.  Ce sont des défis que les autres  pays relèvent. Et dans le domaine de la pédagogie, voilà un des rares domaines où les outils numériques peuvent être d’une grande utilité pour faciliter l’insertion de ces enfants, le  plus souvent possible, en milieu « ordinaire », c’est-à-dire les scolariser.

Ainsi, prenons le cas des enfants autistes. En France,  80% des enfants autistes ne sont pas scolarisés. Leur prise en charge devient indispensable,  d’autant plus que la Haute Autorité de Santé estime à 1 nouveau-né sur 150 concerné par l’autisme, taux que les spécialistes estiment largement sous-estimé et plutôt  à 1 sur 100. Ils seront donc de plus en plus nombreux. A la rentrée 2019, ce sont plus de 4 000 enfants de 3 ans qui n’ont pas pu intégrer l’école maternelle. 

L’imagerie cérébrale montre que le cerveau des autistes fonctionne différemment de celui des « neurotypiques » (gens dits « normaux »). Ce ne sont pas les mêmes zones du cerveau qui s’activent chez les uns et chez les autres, ce qui suggère qu’aux différences constatées au niveau des processus cognitifs répondraient des connexions  entre régions cérébrales elles-mêmes différentes. Un chercheur californien a établi que le développement important du cortex préfrontal, siège des fonctions cognitives supérieures,  comme le langage et le raisonnement, résultait d’un nombre anormalement élevé de neurones dans cette région, de 67 % supérieure à celui des enfants non autistes. Ainsi, si les autistes ont tant de difficultés pour apprendre à parler, ce serait peut-être en raison d’un excès de neurones à la naissance.  Ces  observations ont permis dans d’autres pays de  mettre en place des stratégies d’apprentissage adaptées. L’apport des neurosciences pourrait être décisif pour adapter  les  modèles d’enseignement. Il existe des méthodes qui sont mises en œuvre dans d’autres  pays, qui fonctionnent et qui permettent de sortir la  plupart des enfants autistes du milieu hospitalier. Ce sont soit des classes spécialisées, de moins de 12 élèves, soient des classes  ordinaires avec accompagnant formé. Au Canada, on pratique « l’autorégulation ». Les cas d’autisme étant très variés, les enfants sont insérés dans des classes ordinaires et en cas de « crise » dirigés  vers un « sas » médico-social associé à l’établissement. L’important étant d’assurer la  prise en charge en continu de la maternelle à l’école élémentaire et au collège. Cela suppose de former les  personnels à ce type d’encadrement. L’expérience démontre que tout le  monde bénéficie de cette démarche : les autres élèves acquièrent une connaissance de ces enfants et s’habituent à eux, les  accompagnants spécialisés profitent aussi aux élèves dits « normaux » mais en difficultés. Et les outils pédagogiques sont déjà familiers. Le  problème des autistes étant souvent un défaut de verbalisation, l’i-pad permet, grâce à des logiciels de pictogrammes, de contourner ce défaut et de rétablir la communication. Il existe évidemment d’autres contraintes correspondant à la sensibilité particulière de ces enfants, comme privilégier le visuel, qui peuvent être gérées.  Il  ne s’agit pas ici d’entrer dans le détail. Le « plan autisme » du gouvernement vise en priorité la précocité du diagnostic, avant 2 ans, ce qui voudrait signifier  une entrée en maternelle à 3 ans, en 2021. Restera à convaincre le ministère de l’Education nationale et à former les  enseignants et les accompagnants, ce qui imposera un gros effort financier.

Pour faire court, je suis persuadé que les outils numériques, utilisés avec des programmes très précis et adaptés, associés  à des stratégies pédagogiques spécialisées mises en œuvre par des enseignants dûment formés, permettraient de répondre aux cas des élèves  précoces,  si mal  pris en compte dans  les classes  ordinaires, et de tous ceux qui présentent des troubles de dyslexie, dysphasie, dyspraxie… Toujours avec le même  objectif : leur faire suivre autant que faire se peut une scolarité en milieu ordinaire. Espérons que comme d’habitude, nous ne prenions pas un train de retard. Car il faut compter avec les forces conservatrices du système que sont les syndicats de gauche comme le Snuipp-FSU, qui continueront de défendre l’indéfendable. Il serait temps que les sciences, et surtout les neurosciences, qui sont autrement plus fiables que la psycho-sociologie des pédagogistes, soient prises  réellement en compte en ce qu’elles apportent des éléments de connaissance sur l’activité cérébrale. C’est   ainsi que le professeur Dehaene, spécialiste de psychologie cognitive  a  démontré, imagerie cérébrale à l’appui, l’inefficacité de la méthode globale pure expérimentée dans les années 80. Et de fait, il estime que le « décodage » doit tenir une place importante en CP dans l’apprentissage de la lecture.  De quoi faire se dresser tous les experts en « sciences de l’éducation » de la rue de Grenelle !

Le pédagogue a encore un rôle à jouer.

Je vois bien que lorsque mon imagination me projette dans un enseignement avec des élèves bardés d’outils électroniques, en adaptant mes recettes et un  renversement des rôles - les élèves qui énoncent ce qu’ils ont trouvé et le  prof qui écoute et fait le tri, réoriente ou valide- je ne suis qu’une relique du 20ème  siècle qui ferait cours avec  les schémas de « l’ancien monde ». Evidemment, les cours du 21ème siècle s’annoncent complètement différents et l’on peine à les imaginer à travers les évolutions qu’envisage Michel Serres, assez surréalistes d’ailleurs. Pourtant je reste persuadé que malgré tout, il faudra continuer d’apprendre à lire  et  à écrire parce que c’est par là que tout a commencé et continuera de commencer. Luc Ferry nous prévient : il ne croit pas  au recours aux « sciences de l’éducation » ou « neurosciences », il doute, en effet, qu’une meilleure connaissance du fonctionnement du cerveau d’un élève par un enseignant rendra forcément ce dernier meilleur pédagogue, sinon comment expliquer que de merveilleux professeurs aient pu tout ignorer des neurosciences ! Il a en partie raison s’il veut dire par là que la relation pédagogique restera essentielle. Sauf que l’amélioration des facultés cognitives est  possible et requiert des méthodes adaptées, utilisant tout le potentiel des sciences du cerveau. Une meilleure connaissance du fonctionnement de notre matière grise ne peut qu’aider  le  pédagogue à imaginer ses stratégies d’apprentissage, comme  je l’ai fait  en découvrant les travaux de La  Garanderie.

Pédagogue ou « médiateur » ?

Il n’y aura peut-être plus de pédagogue dans un rôle tel qu’on le conçoit aujourd’hui encore, néanmoins je reste  persuadé qu’un « médiateur » du savoir sera toujours indispensable,  sous quelle forme et comment… cela reste à inventer. La solution pourrait être dans la recherche des complémentarités entre le cerveau humain et  celui de silicium, grâce à une cartographie de l’intelligence artificielle qui permettrait d’en identifier les zones de  compétences. Ainsi, il y aura des endroits où l’on va être moins bons que l’Intelligence Artificielle mais que l’on pourra reprendre par de la formation,  par  du travail de groupe,  par de nouvelles  approches intellectuelles… Une guerre de  mouvement passionnante et du pain sur la planche pour  les futurs pédagogues qui devront se remettre sans cesse en cause.  Il reste que les livres de  Laurent Alexandre, de Michel Serres, de Gaspard Koenig, de Michel Desmurget, soumettent à la réflexion de ceux qui ont en charge les destinées du système   éducatif, des pistes de réflexions qui rendent leur lecture indispensable par nos intellectuels et nos politiques s’ils veulent appréhender les enjeux du monde qui vient, et  qui est déjà là pour partie. Avec toutefois une constante : le geste d’enseigner, quel que soit le contexte, se situera toujours au-delà des réformes et des circulaires, car il est d’abord une relation qui se  construit avec autrui, en l’occurrence entre le pédagogue et un élève ou un étudiant.

 


ALERTE : LES ECRANS VONT FAIRE DE NOS ENFANTS DES CRETINS !

La fabrique du crétin digital001

 

« La consommation récréative du numérique sous toutes ses formes (smartphones, tablettes, télévision, etc…) par les nouvelles générations est absolument astronomique… Entre 8 et 12 ans, ils passent à peu près 4h45 (chaque jour). Entre 13 et 18 ans, ils effleurent les 6h45. » 

C’est sur ce constat que débute le livre de Michel Desmurget « LA FABRIQUE DU CRETIN NUMERIQUE ». L’auteur est directeur de recherche en neurosciences à l’Inserm. Il a passé trois ans à éplucher toute la littérature scientifique qui existe sur le sujet et son constat est sans appel : on court à la catastrophe. La consommation actuelle de nos jeunes, et souvent dès deux ans, saborde tous les piliers de notre intelligence avec comme résultat un affaissement du QI et de nombreux autres effets nocifs. L’article que je vous propose est un peu long, mais la matière est dense (400 pages), même synthétisée. Et je n'ai fait qu'effleurer le sujet...

Rétablir la vérité.

Le chercheur se fixe comme premier objectif de démolir toute la propagande véhiculée par les pseudos experts médiatiques qui semblent se féliciter de la situation et selon lesquels nous aurions changé d’ère et le monde appartiendrait désormais aux « digital natives » dont le cerveau aurait muté. Un cerveau plus rapide, plus réactif, plus apte aux traitements parallèles, plus compétent à synthétiser d’immenses flux d’informations, plus adapté au travail collaboratif. Et ces évolutions représenteraient une chance extraordinaire pour l’école, pour refonder l’enseignement, terrasser l’échec scolaire…  La réalité est toute autre. Les études scientifiques viennent malheureusement infirmer le discours des charlatans du numérique. La recherche met en lumière une longue liste d’influences délétères chez l’enfant et l’adolescent. C’est pourquoi Michel Desmurget s’attache d’abord, preuves à l’appui,  à démonter tous les discours offerts au grand public pour le rassurer et le pousser à consommer de l’écran. Car la partie n’est pas gagnée. Il faut d’abord en finir avec « l’enfant mutant » : « si vous voulez voir à sapiens un successeur, revenez dans quelques millions d’années ». Il faut combattre ceux qui sèment le doute en présentant les savants comme des « alarmistes digitaux ». Il faut expliquer que science et opinion ne se valent pas…

Le mythe : homo mediaticus.

La première partie de l’ouvrage est consacrée au démontage précis et méthodique de la construction du mythe. Comment il s’est répandu  en faisant croire à l’émergence d’une génération différente, possédant un cerveau plus développé, et vantant le caractère formidable des écrans. Ces « contes et légendes »  ne tiennent pas. L’enfant mutant du numérique, de la confrérie X, Y, Z, lol, zappien ou C, que son aptitude à taquiner le smartphone aurait transformé en omnipraticien des nouvelles technologies, qui grâce aux jeux vidéo aurait vu son cerveau prendre force et volume, cet enfant n’est qu’une légende. Aucune étude scientifique ne valide une telle évolution. Le problème n’est pas résolu pour autant. Son image continue à hanter les croyances collectives. Comme pour les industriels, le problème est tout de même sérieux, ils dépêchent sur le terrain  et dans les médias les « experts ». Il faut alors dénoncer les conflits d’intérêts, combattre les verbiages creux et les réponses fumeuses, et s’attaquer à tous ceux qui entretiennent le doute. Le constat est sans appel : « nombre d’experts médiatiques parmi les plus importants présentent une stupéfiante capacité à collectionner les âneries, sornettes, revirements, approximations et contrevérités » nous dit Michel Desmurget. Pour le citoyen lambda il est très difficile d’isoler les sources compétentes des foyers impropres et lobbyistes. Et au bout du compte les petits soldats du numérique, psychiatres, psychologues, médecins, universitaires, continuent, sous couvert d’expertise, sans jamais avoir à expliquer leurs sujétions industrielles, à emplir l’espace collectif de leur affligeante propagande. Ainsi des études boiteuses à la méthodologie coupable,  font croire que les loisirs numériques n’affectent pas les performances scolaires, que les jeux vidéos améliorent les résultats scolaires, et même qu’il y aurait moins de crimes grâce aux jeux vidéos violents. Toutes ces errances se combinent pour installer un mythe bien éloigné des dures réalités scientifiques.

Homo numericus : la réalité est loin du mythe.

La génération contemporaine est bien « la plus bête ». Les écrans sont mauvais pour le développement cérébral. Les nouvelles technologies mettent le cerveau dans une situation permanente de multitâche pour laquelle il n’est pas conçu… Bien plus grave encore le numérique à l’école est un désastre, un canular à 60 milliards de dollars qui n’améliore pas les résultats des élèves. Ce qui explique que les fameux « geeks » soient nombreux à inscrire leur descendance dans de coûteuses écoles privées dépourvues d’écrans, comme l’admet l’un de ces visionnaires de la Silicon Valley. Michel Desmurget analyse le problème en le prenant à la racine : le constat des usages abusifs trop répandus.

L’imprégnation se fait dès l’enfance alors que les premières années d’existence sont fondamentales en matière d’apprentissage et de maturation cérébrale, amputant l’enfant d’un certain nombre de stimulations et expériences essentielles très difficiles à rattraper.

Suit la période 8-12 ans de l’amplification : le temps passé aux activités numériques, essentiellement des jeux et des vidéos, dépasse quotidiennement les 4h30. La généralisation des smartphones entraîne une vraie submersion au moment de l’adolescence poussant la consommation au-delà de 6h30/jour… 40% du temps normal de veille. Sur une année, les écrans absorbent autant de temps qu’il y a d’heures cumulées d’enseignement du français, des maths et des SVT durant tout le secondaire. Ces chiffres ne sont que des moyennes d’usage. Il est évident qu’avoir plusieurs télés, consoles, smartphones ou tablettes à la maison favorise la consommation, et ce d’autant plus que la chambre est concernée.

Le milieu familial devrait au contraire limiter l’accès et donner l’exemple. La consommation n’est pas inéluctable : les études démontrent que fixer des règles ça marche, à condition de réorienter les activités. D’autant plus que l’impact préjudiciable des écrans récréatifs sur la santé et le développement cognitif surgit bien en deça des seuils d’usages moyens observés.

Ecrans et résultats scolaires ne font pas bon ménage. 

L’auteur aborde ensuite les répercussions sur la réussite scolaire pour souligner le danger. La littérature scientifique démontre de façon claire et convergente un effet délétère significatif des écrans domestiques sur la réussite scolaire, indépendamment du sexe, de l’âge, du milieu d’origine. A cet égard, le « smartphone » se révèle être le Graal des suceurs de cerveaux et de la décérébration : plus ses applications deviennent intelligentes, plus elles se substituent à notre réflexion et plus elles nous conduisent à devenir idiots.

L’utilisation du numérique à l’école, n’est guère plus convaincante. Pour faire court, la technologie peut permettre d’optimiser un enseignement de qualité, mais elle ne pourra jamais pallier un enseignement de piètre qualité. On comprend pourquoi toutes les expériences de « classes sans profs » ont échoué. Il est infiniment plus astreignant d’apprendre avec un MOOC qu’avec un enseignant qualifié, sans parler du danger que présentent les algorithmes qui se soucient comme d’une guigne de la validité des résultats, incapables qu’ils sont de s’interroger sur la rigueur factuelle des contenus identifiés. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : plus les Etats investissent dans les TICE, plus la performance des élèves chute. A la différence d’un prof, un ordinateur ne peut pas sourire, accompagner, guider, encourager, stimuler, rassurer, émouvoir ou faire preuve d’empathie, qui sont les éléments essentiels de la transmission et de l’envie d’apprendre.

Une intelligence entravée.

Les résultats scolaires ne sont que la partie visible de l’iceberg des effets néfastes. Ce qui est atteint c’est l’essence même de l’édifice humain en développement, depuis le langage jusqu’à la concentration en passant par le mémoire, le QI, la sociabilité et le contrôle des émotions. Une véritable agression silencieuse. Les écrans mutilent les interactions humaines si importantes au cours de l’enfance et de l’adolescence notamment pour la réussite scolaire, la stabilité émotionnelle et la prévention des conduites à risque. Une étude récente montre l’action négative du temps global d’écran sur le développement moteur, social et cognitif. Le langage est amputé ; il demande bien plus que des paroles pour assurer son déploiement : il demande des livres. L’attention est saccagée. Sur ce point les résultats sont accablants. Un exemple : la pratique de la télé ou des jeux vidéos, le matin, avant l’école, altère durablement les capacités de concentration et par suite la performance intellectuelle.

Une santé menacée.

Les médias électroniques doivent être reconnus comme un problème majeur de santé publique, souligne la communauté scientifique. La liste des champs touchés paraît sans fin : obésité, anorexie ou boulimie, tabagisme, alcoolisme, toxicomanie, violence, sexualité non protégée, dépression, sédentarité… Bref, les écrans sont les pires faiseurs de maladies de notre temps.

Le sommeil est brutalement mis à mal, oubliant que pendant que nous dormons, notre cerveau travaille. Or, le manque de sommeil perturbe la réactivité et la connectivité des circuits cérébraux impliqués dans la gestion des émotions. Et les écrans portent une large part de responsabilité : ils retardent l’heure du coucher, augmentent la latence d’endormissement, interrompent souvent la continuité de nos nuits, et altèrent la qualité du sommeil par les contenus excitants, stressants ou anxiogènes. Ainsi les scientifiques ont établi un lien étroit, au sein des jeunes générations, entre consommation numérique et souffrance psychique (dépression, anxiété, mal-être, suicide…).

La sédentarité que la consommation d’écrans engendre a aussi son cortège d’effets dévastateurs. Chez les enfants, une heure quotidienne d’écran suffit à perturber le système cardio-vasculaire. Des indices convergents indiquent des risques plus inquiétants sur le long terme. Ainsi, l’augmentation impressionnante du nombre d’accidents vasculaires cérébraux (AVC) depuis une trentaine d’années chez le jeune adulte. Je passe sur le lien avec le développement des addictions : tabagisme et alcoolisme. Un quart de nos lycéens de 16 ans boivent régulièrement et se saoulent une fois par mois au moins.

Pour en sortir : 7 règles essentielles.

1 - Avant 6 ans : pas d’écrans.

2 - Après 6 ans : pas plus de 30 mn à une heure par jour, tout compris.

3 - Pas d’écran dans la chambre.

4 - Pas de contenus inadaptés.

5 - Pas le matin avant l’école.

6 -  Pas le soir avant de dormir.

7 - Un écran à la fois.

Moins d’écrans, c’est plus de vie : c’est toute l’écologie familiale qu’il faut réorganiser. Parler, échanger, dormir, faire du sport, jouer d’un instrument de musique, dessiner, peindre, sculpter, danser, chanter, prendre des cours de théâtre, et surtout lire.

A vous de jouer, vous ne pourrez plus dire que vous ne saviez pas !

Bon courage.

Une satisfaction, l’info commence à sortir : « Le Point » traite du sujet, c’est déjà ça !

La fabrique du crétin numérique - Michel Desmurget - Editions du Seuil.

 


III - Réflexions pour aujourd'hui - La place des parents (5)

Une vraie et juste place pour les parents.

 

Je n’ai guère évoqué mes relations avec les parents de mes élèves au cours de ma carrière. C’est tout simplement parce que, sauf quelques rares exceptions, ils n’ont pas fait partie de mes  « bonheurs ». Je n’ai pourtant pas entretenu de mauvaises relations ni n’ai gardé de mauvais souvenirs, mais  il faut croire que jouant leur rôle  à leur place, ils ont peu interféré dans ma pratique d’enseignant.

J’ai commencé ma carrière à une époque où les parents étaient tenus à l’écart de l’institution et les conseils de professeurs étaient souverains. Progressivement, les relations avec les parents d’élèves se sont institutionnalisées et ceux-ci, par le biais de leurs associations représentatives ont pu participer aux conseils de classes. Mais l’inspiration « robespierriste » du service public, réactualisée peu ou prou par Vincent Peillon puis par Najat Vallaud-Belkcem, dont la méfiance vis-à-vis des parents provient, ne s’est jamais vraiment éteinte.  L’école a bien sûr évolué et a accordé aux familles toujours plus d’importance, au moins officiellement. Pourtant je n’ai guère vu d’évolution. Au conseil de classe, le parent-délégué ne représentait souvent que lui-même et venait surtout pour s’intéresser au cas de sa progéniture.  Il apportait rarement des informations utiles sur les cas des autres élèves, présentés et discutés au cours du conseil. Je garde dans l’ensemble le souvenir de relations plutôt cordiales et, dans mon dernier poste, que j’ai occupé pendant près de trente ans, je pense même avoir souvent bénéficié de leur sympathie en raison des multiples projets que nous menions dans  l’établissement, sans qu’ils y soient vraiment associés. Je le mesurais au succès que rencontrait le  besoin de me voir  lors des traditionnelles rencontres parents-prof. A cette époque-là, nous n’avions pas recours aux « parents-accompagnateurs » pour sortir du collège. Parmi les quelques petits bonheurs, j’ai en mémoire quelques liens exceptionnels tissés avec certains d’entre eux à l’occasion des spectacles. Il y a bien aussi un « grenadier magnifique » pour frapper les « trois coups » au moment de la représentation d’une pièce de théâtre, fabriqué et offert par un parent, technicien au théâtre municipal. Je l’ai gardé précieusement. ... 

Lire l'article complet, dans la colonne ci-jointe à gauche, dans "L'Ecole s'invente tous les jours", chapitre : "III - Réflexions pour aujourd'hui : la place des parents" (5). Tout en bas.

 

 


III - Réflexions pour aujourd'hui - La formation professionnelle des enseignants (4)

 

Celui qui n’est jamais allé dans une salle des profs peut encore  penser que  les sciences éducatives, ça existe. En fait, c’est une grave erreur. Si l’éducation était une science, alors il y aurait une « meilleure façon d’enseigner » et  il  serait possible d’évaluer les  méthodes mises en œuvre. Mais voilà, ce qui fonctionne ici, ne marche pas là. Telle pratique est appliquée avec succès dans un établissement et échoue dans celui d’à côté  …

Tout simplement parce que l’éducation est d’abord affaire d’humain. D’une école à l’autre, d’un collège à l’autre,  les élèves ne sont pas les mêmes, les enseignants non plus. Le contexte joue un rôle primordial.  Comme je l’ai montré dans un chapitre précédent, la pédagogie nait de l’interaction entre le prof et ses élèves, et il y a une infinité de rapports  possibles. La pédagogie relève du domaine des arts, tant elle est en rapport avec la  « sensibilité » d’un maître et celle de  son public. Mais c’est de la compétence que naît la bonne pédagogie, et non l’inverse. Derrière ce mot se cachent plusieurs exigences : celle du savoir (au sens posséder les connaissances) vient en premier, celle des « savoir-faire » vient ensuite, suivie de celle du « savoir être ». L’enseignement  ne peut pas  être un métier que l’on exerce « par défaut »,  mais si possible  par vocation, même si le mot est un peu fort....

Lire la suite dans "L'Ecole s'invente tous les jours", Chapitre III : "Réflexions pour aujourd'hui - La formation professionnelle des enseignants (4)" dans la colonne à gauche, en bas. (il suffit de cliquer sur le titre du chapitre  choisi).

 


III - Réflexions pour aujourd'hui - Le collège, ce maillon faible (3)

Le collège, ce maillon faible.

 

Dans le système éducatif, le collège unique a été un pas historique d’ouverture à tous de la scolarité jusqu’à 16 ans mais il est devenu le maillon faible du système car il est le plus exposé aux problèmes de l’intégration, et, disant cela, je ne pense pas qu’aux élèves d’origine étrangère. D’abord parce qu’il est censé accueillir tout le monde, y compris les élèves en difficulté et en retard scolaire, ensuite parce que les élèves qu’il reçoit sont à l’âge où se façonne la personnalité. Cette quête du moi des adolescents et la mixité sociale qu’ils vivent devraient être deux atouts pour les guider vers une bonne intégration dans la société. Mais beaucoup d’établissements concentrent une trop  grande hétérogénéité des élèves et trop de types de difficultés pour faire face efficacement à l’une d’entre elles : celle des élèves abandonnés à eux-mêmes, à cause de difficultés sociales, de traumatismes affectifs, du gavage vidéo-télévisuel et numérique ou sous l’emprise d’une culture obscurantiste…

Lire  le chapitre complet dans "l'Ecole s'invente tous les jours" , en cliquant sur : "III. Réflexions pour aujourd'hui - Le collège, ce maillon faible (23" dans la colonne ci-contre, à gauche, tout en bas.


III - Réflexions pour aujourd'hui - Les remèdes (2)

Les remèdes.

 

Une tâche de longue haleine.

Une fois qu’on a dit tout ça, avec les progrès importants des sciences cognitives et grâce à l’aide que pourrait apporter l’intelligence artificielle (IA), il est possible de  mieux définir ce qui est efficace et ce qui ne l’est pas en pédagogie, et même en matière d’organisation. Il y a des établissements pionniers, il existe des méthodes alternatives, des outils qui ont fait leurs preuves. Dans son livre « Apprendre », Stanislas Dehaene énonce les chemins que balisent ses expériences scientifiques sur le fonctionnement du cerveau. Les pratiques qui fonctionnent peuvent être la source des réformes indispensables, en ne perdant pas de vue que la restauration de la confiance de la société  dans son école  est une priorité.

Remettre la machine sur le chemin des performances sera néanmoins une tâche de longue haleine. Et d’abord, tant pis pour les cénacles progressistes qui crieront à la « réaction », mais il est urgent de renouer avec l’humanisme pédagogique. Il  ne s’agit pas de se  tourner vers le monde d’hier, mais plutôt d’examiner en quoi le  passé peut nous aider en essayant de ne pas confondre « l’école d’hier » avec « l’école de toujours », une école qui ne devrait jamais perdre de vue que la  culture peut vraiment  être transmise pour ce qu’elle est : le patrimoine de l’humanité  à travers la diversité des œuvres de l’esprit à toutes les époques. C’est la Culture partagée qui rassemble, qui fait lien entre les individus.  Commençons donc par arrêter de charger l’école  de tous les problèmes du moment pour la laisser se concentrer sur sa seule et unique mission : la transmission du savoir.

L’objectif.

Il est simple : transmettre à chaque enfant le meilleur de la culture dont il est, d’où qu’il vienne, un légitime  héritier. Mais il n’y a pas de culture sans savoir et de savoir sans instruction....

Lire  le chapitre complet dans "l'Ecole s'invente tous les jours" , en cliquant sur : "III. Réflexions pour aujourd'hui - Les remèdes (2)" dans la colonne ci-contre, à gauche, tout en bas.

 


PARLONS FRANÇAIS !

Académie française

 

Halte à la colonisation culturelle !

L’anglo-américain s’insinue partout, sous la forme du franglais le plus souvent, ou même comme seconde langue de communication entre les Français. Les enseignes commerciales, l’univers audio-visuel, quand ce ne sont pas les équipements publics –ainsi Angers a son « ice-park » (une patinoire)-, sont gangrénés par ce qui est devenu plus qu’une mode : une véritable colonisation culturelle. Pourtant, tous les sondages montrent que nos compatriotes sont attachés à leur langue, d’autant plus qu’elle est la seconde langue internationale, utilisée sur tous les continents, sans parler de l’Afrique et de sa francophonie. Mais malgré le foisonnement d’associations de défense du français, le mal se répand.

Le « globish » hante tous les milieux.

Il est devenu « in » de glisser des mots anglais dans les phrases au milieu de mots français, et de conjuguer des verbes improbables : ainsi le verbe « timer » cité en exemple samedi dernier par Barbara Lefèbvre, pour dire plus ou moins « programmé » ou « arrivé à l’heure » … Les premiers défenseurs de notre langue devraient être les femmes et hommes politiques. Las, ils sont loin d’être exemplaires. Anne Hidalgo est très active pour introduire le franglais dans la communication de la mairie de la capitale: « Made for sharing ! » vantant les JO de 2024 est inscrit en grand sur la Tour Eiffel, inscription contraire à la loi et aux dispositions olympiques, un comble ! Et Metz a son « Lorraine Airport », une décision du Conseil Régional qui s’est cru probablement très original. Nous ne sommes pas les derniers avec notre « Loire Valley »… Notre président « manager » n’est pas en reste avec sa « start-up nation », ses « clusters de compétences » sous les applaudissements des représentants de la « French Tech » pour mettre en avant la « French touch »…

L’univers de l’entreprise est particulièrement exposé. Le franglais en inonde les moindres recoins, de « calls » en « meetings » dans « l’open space ». On y fait du « benchmark », on engage des « process », on attend le « feedback »… Ce sont les nouveaux codes du « corporate ». Ainsi va la novlangue du bureau. Plus on fait « Silicon Valley », plus on est certain de paraître performant, critère inversement proportionnel au niveau de compréhension du vulgum. J’ai passé sous silence « job » trop connu et « mail » pour courriel, trop usé, que « courriel » n’a pas vraiment réussi à remplacer.

Mais ce n’est pas fini. Le cancer a gagné la vie quotidienne. Désormais, on quitte son « job » pour aller boire un « drink » dans un « afterwork ».  Autrefois on pratiquait le culturisme, remplacé désormais par le « bodybuilding », dans des salles de sport ? non, de « fitness », les pieds dans des baskets pour faire du « running ». En sortant tardivement il n’y aura plus qu’à se consacrer au « souping » (le « must ») : c’est l’art de manger la soupe. On ne rit pas !  Mais notre univers culturel est aussi envahi par « Facebook », ses « followers », ses « likes »…  Nous n’utilisons pas un téléphone multifonctions, mais un « smartphone » qui nous permet de faire des « selfies » et d’agrémenter nos messages de « gifs » sur « Whatsapp ». On regarde « the Voice », on organise un « brunch », on fait ses courses à « Carrefour City ». L’envahisseur anglais est partout. Le sabir est devenu un incontournable des conversations du quotidien.

Allons enfants …

Ne me faites pas dire que cette évolution est inévitable et que c’est la vie ! Rappelons que dans la salle de presse de la Commission européenne à Bruxelles, il est d’usage de parler français. Pourtant, on assiste à une accélération de la soumission universitaire, intellectuelle et populaire à l’impérialisme linguistique de la langue anglaise. Elle s’impose d’autant plus facilement que ceux qui l’adoptent, le font soit par naïveté pour faire moderne, soit sous l’effet d’une globalisation mal comprise. C’est renoncer, en réalité, à notre empire intellectuel : cette anglicisation souterraine marque le déclin des intellectuels français qui croient pouvoir renverser leur marginalisation en adoptant la langue dominante, à laquelle ils ont si longtemps résisté. Il est bon de rappeler ici la richesse de notre langue et que cette évolution est d’autant plus inacceptable qu’elle constitue un appauvrissement. N’acceptons pas cette lente dégringolade dans le sous-développement culturel. Ce n’est pas rien de parler et d’écrire la langue de Racine, Voltaire, Chateaubriand, Hugo, que le monde admire et même nous envie. Car ne nous y trompons pas, perdre la maîtrise de notre langue, c’est aussi perdre notre identité. Ce sont les idées qu’elle véhicule qui vont disparaître et perdre de leur influence, ce que Jean-Marie Rouart dénomme « l’âme française », « ce message si original d’esthétique et d’éthique façonné par les siècles ». Le globish n’est la langue de personne, il fait même injure à la langue anglaise, c’est un mythe de modernité qui a surtout la faveur des publicitaires et des « branchés ». Et la langue française a tous les outils pour résister, il suffit d’en convaincre ses usagers. Commençons par respecter la loi qui la défend. Justement nous fêtons les 25 ans de la loi Toubon.

 


III - Réflexions pour aujourd'hui - Les maux du système éducatif (1)

Ces maux dont souffre l'Education nationale.

Triste constat.

Le recul des performances éducatives de la France dans les classements internationaux n’est que l’effet visible d’une dégradation profonde du système éducatif qui vient de loin. Le dernier classement Pisa en est encore le reflet même s’il semble montrer une certaine stabilisation par rapport au précédent. Tout de même, il paraît difficile de s’en satisfaire : la France, 7ème puissance mondiale, le pays de l’éducation gratuite et obligatoire, en 22ème position en lecture, 25ème en mathématique, 24ème en sciences…  Le Ministre Jean-Michel Blanquer a raison quand il dit que le redressement sera une tâche de longue haleine et qu’il faudrait le même ministre pendant au moins dix ans ! Ce classement consacre, malgré les efforts récents, l’échec d’un système et de ses pédagogies hasardeuses incapables d’affronter correctement l’enseignement de masse. Il suffit de regarder comment font les pays qui font réussir leurs enfants : priorité aux fondamentaux, enseignants solidement formés, évalués, et surtout valorisés. Le pire, c’est qu’avec une idéologie égalitariste largement partagée par le corps professoral, on arrive à un système champion de la reproduction des inégalités sociales qu’il prétend combattre. Souhaitons bon courage au ministre actuel qui en est bien conscient !... 

Lire  le chapitre complet dans "l'Ecole s'invente tous les jours" , en cliquant sur : "III. Réflexions pour aujourd'hui - Ces maux dont souffre l'Education nationale (1)" dans la colonne ci-contre, à gauche.

 


L'école s'invente tous les jours !

Après le "bref regard sur une carrière" et la "radioscopie d'une expérience", j'aborde le 3ème chapitre, tourné davantage sur le présent et l'avenir du système éducatif.

Plus que jamais, je reste persuadé que "l'école s'invente tous les jours" !

 

III - Réflexions pour aujourd'hui 

« L’unité de tout cela, Monsieur l’Inspecteur, c’est la vie, la  qualité de tous ces textes, la résonance qu’ils provoquent chez les  élèves  … »

                                                      Philipe  Delerm

 

C’est comme Obélix tombé dans la marmite de potion magique : l’enseignement, une fois qu’on est tombé dedans, il arrive très souvent qu’on ne s’en défasse plus jamais. C’est pourquoi je ne peux m’empêcher de continuer à cogiter en suivant les convulsions et évolutions de notre système éducatif.

 

Deux constats préliminaires

L’ignorance gagne du terrain.

De manière générale, je suis effaré de constater qu'à mesure que le progrès scientifique accumule un savoir de plus en plus exact, on observe à travers le monde une lente montée de l'ignorance. Chaque jour la science nous apporte de nouvelles découvertes et pourtant jamais l'ignorance n'a gagné autant de terrain. En France, les chiffres sont là : nous comptons 6 % d'illettrés, c'est-à-dire environ 3 millions de personnes. Si on additionne les personnes analphabètes qui ont des difficultés à lire et à écrire le français, on arrive à près de 10 % de la population. C’est énorme pour un pays où l’enseignement est gratuit et obligatoire !

Mais ce phénomène concerne le monde entier. Selon une récente projection de l'ONU, en 2020, le monde arabe comptera 25 % d'analphabètes. Ce monde arabe qui a publié plus de livres entre le VIIIe et le XIIe siècle qu'aujourd'hui. Que penser de ces prédicateurs saoudiens qui apprennent à leurs étudiants que la Terre est plate, et dernièrement, à l'Université de Sfax en Tunisie, qui est pourtant l'un des pays arabes parmi les plus avancés, une chercheuse voulait démontrer aussi que la Terre était plate et qu'elle ne tournait pas autour du Soleil. Il y a quarante-cinq ans, quand j’enseignais au Maroc, je rencontrais le  même problème avec le professeur de l’enseignement religieux  mais cela ne semblait pas perturber les élèves qui s’accommodaient des deux vérités. Cette progression du fondamentalisme  existe aussi aux États-Unis où 46 % des Américains (effarant, non ?) pensent que la Terre a moins de 10 000 ans. Parmi eux, il y a ceux qu'on appelle les « créationnistes » et ceux-ci commencent à prendre pied en France, en Angleterre, et même en Turquie où, parait-il, ils sont déjà très nombreux. Cette montée de l'ignorance favorise  l’obscurantisme, phénomène à mettre en corrélation avec la montée de l'islamisme politique.

Faut-il admettre que nous sommes en pleine régression intellectuelle dans le monde ?

La surinformation favorise l’ignorance.

Certains établissent aussi un lien avec la révolution numérique. Selon eux c’est dans les années 2000 qu’on a commencé à assister à une surinformation qui a conduit à l'ignorance. J’avais commencé à faire ce constat, juste avant de  prendre ma retraite, en 2003. Aujourd’hui, trop de 15-29 ans ne lisent plus de livres. En revanche, ils lisent davantage sur les réseaux sociaux, les blogs... D'après une étude de l'Université de Yale, la lecture sur le réseau internet n'est pas la même : les informations se superposent les unes aux autres alors que la lecture d'un livre permet de pénétrer les pensées de l'auteur et de structurer les informations. D'autres études sont à mettre en corrélation avec ce constat inquiétant : les Français auraient perdu 4 points de QI entre 1989 et 2009, phénomène mesuré aussi en Angleterre ou aux États-Unis.

Wikipédia est le plus bel exemple des effets pervers de l'Internet. Si dans le domaine scientifique, les notices sont rédigées par des experts, dans le domaine de la littérature et en histoire, c'est un agrégat de données nivelées par le plus grand nombre. On est loin du concept des « encyclopédies », véritables réceptacles du savoir vérifié. Ce qui est grave c’est que l’absence de hiérarchisation du savoir conduit au relativisme culturel où tout se vaut. La page d’une star de la chanson  est bientôt  plus fournie que celle de Victor Hugo, et Homère y passe pour un galopin.

 

Il n’y a qu’une seule façon de réagir à cela : rétablir le pouvoir  du savoir et de l’intelligence par l’école ! Il faut absolument replacer la culture générale et l'histoire au centre de nos préoccupations. Avec des enseignants aux connaissances indiscutables, de préférence !

A suivre : "Les maux dont souffrent le système éducatif".


Les catalyseurs de pédagogie - (2) Les voyages

Le voyage,

cet autre adjuvant pédagogique…

(et machine à fabriquer les « petits bonheurs »).

 

Les voyages scolaires sont, dans la  deuxième moitié de ma carrière, les compléments indissociables des spectacles, dans la mesure où beaucoup d’entre eux ont donné lieu à une représentation devant un public. Ce fut d’abord un compte-rendu sous forme de diaporama audio-visuel, un peu à la manière de ce que présentaient les voyageurs de « Connaissance du monde »,  puis ce furent des spectacles de plus en plus élaborés, comme je l’ai évoqué dans le chapitre précédent.

Entendons-nous, un voyage, ce n’est pas la simple sortie locale. C’est un déplacement plus ou moins lointain qui nécessite au minimum une journée entière, voire plus. Il faut distinguer deux types de voyages.

Les échanges linguistiques.

D’abord, il y avait les voyages organisés dans le cadre des échanges linguistiques. Enseignant le français et  l’histoire-géographie, je n’étais pas concerné au premier chef, mais  les collègues d’allemand ou d’espagnol me sollicitaient comme  accompagnateur. C’est ainsi que je fis plusieurs fois les séjours de Brême et de Grenade....

Lire la suite dans la colonne ci-contre : "L'Ecole s'invente tous les jours" en cliquant sur "Les catalyseurs de la pédagogie (2) Les voyages."