RESEAUX SOCIAUX, LA DICTATURE DES MINORITES.
14 août 2025
La censure par le Conseil Constitutionnel de l’article de la loi Duplomb sur l’acétamipride nous donne un bon exemple du dévoiement de notre démocratie par l’intrusion des réseaux sociaux et leur capacité à contrecarrer une loi pourtant votée par le Parlement, lieu d’expression de la vraie démocratie, la démocratie représentative, la seule qui vaille.
Ils étaient deux millions.
Deux millions de pétitionnaires ont souhaité maintenir l'interdiction de l'acétamipride en France, un insecticide autorisé dans les autres pays de l'Union européenne sur la base d'expertises toxicologiques toutes aussi sérieuses qu'en France. Mais il ne faut pas se laisser impressionner par ce nombre. Deux millions, c’est beaucoup mais c’est bien peu par rapport au nombre des électeurs. Que des militants expriment leur point de vue n’est pas condamnable, ce qui l’est, par contre, c’est qu’on en fasse la justification d’une interdiction qui méritait au moins un débat. Car cette position intransigeante exprimée par le biais des réseaux sociaux va à l'encontre d'une harmonisation de notre réglementation sur l’usage européen pour permettre à notre agriculture de survivre face à la concurrence intra ou extra-européenne. Maintenant que cet insecticide est uniquement interdit en France, il va falloir en assumer les conséquences de manière cohérente : comme nous sommes dans l’obligation de respecter la libre circulation des marchandises dans le cadre des traités européens, notre pays ne pourra pas bloquer l'importation des produits issus directement ou indirectement de cultures utilisant l'acétamipride. Ce qui implique que le consommateur français ne sera pas protégé, aucun label ne pouvant discriminer ces produits importés. Par contre nos agriculteurs seront obligés d'arrêter certaines productions et devront se contenter de voir passer sous leur nez les camions assurant la distribution dans les magasins de ces produits traités avec un insecticide qui leur est interdit. Beau résultat en vérité et quelle victoire pour ceux qui revendiquent le « produire localement » !
L’acétomipride, bouc émissaire.
Cet insecticide comme tout produit phytosanitaire ou médicament a un rapport bénéfice-risque positif, sinon les autres pays européens ne l'auraient pas autorisé. Il présente une toxicité avérée sur les abeilles et les apiculteurs avisés veillent à installer leurs ruches loin des zones d'utilisation de ces phytosanitaires et il ne présente pas de toxicité chez les humains aux doses utilisées pour traiter les cultures. Dans le souci d'avoir une agriculture plus « pure » que les autres, notre pays s'éloigne trop souvent de la raison pour se réfugier dans l'émotion, au point que les dialogues et les échanges deviennent impossibles. Comme trop souvent, la France se veut plus royaliste que le Roi et impose à nos agriculteurs, entre autres, des normes et des réglementations plus sévères que chez nos partenaires. Au-delà du cas de l'acétamipride, il serait logique que l'utilisation des produits phytosanitaires fasse l'objet d'une régulation fondée sur des analyses scientifiques venant de plusieurs pays pour garder un cadre cohérent et raisonnable. Il en va du maintien d'une agriculture qui doit assurer l'indépendance alimentaire de notre pays et dont la qualité du travail est loin d'être reconnue par de nombreux adeptes des réseaux sociaux. De fait, le monde agricole français souffre du manque de connaissance de la majorité des urbains sur les pratiques de l'agriculture moderne et aussi du mépris ouvertement affiché d'une partie de la classe politique. Ces derniers feront-ils la loi en se servant des réseaux sociaux dont on connaît les inclinations néfastes au détriment de la démocratie élective et de la raison ? Vraiment nos exploitants méritent mieux en matière de reconnaissance !
Les thèmes de pétitions ne manquent pas.
Il y aurait beaucoup de sujets pour s’exprimer sur les réseaux sociaux et dénoncer ce qui ne va pas. Si on peut comprendre que l’aversion contre les produits phytosanitaires puisse mobiliser un public, on s’étonnera qu’aucune pétition d'ampleur n'ait été organisée pour dénoncer les lourds dégâts médicaux et sociaux dus à l’usage croissant dans notre pays des drogues qui circulent avec plus de facilité que les produits phytosanitaires. Une partie de notre société ne voit-elle que certains dangers ?
A moins qu’il ne s’agisse d’un biais idéologique… On sait, en effet, que certains partis savent se servir habilement des facilités offertes par internet pour subvertir l’opinion public, tant les « fake news » une fois lâchées sont difficiles à combattre, surtout avec des arguments qui font appel à la raison. Voilà pourquoi les réseaux sociaux sont devenus le meilleur terrain d’expression de minorités peu regardantes avec la vérité. Craignons qu’ils ne finissent pas par en imposer leur dictature. Voilà pourquoi l’appel à bloquer le pays au mois de septembre est inquiétant : rien de plus terrible que le citoyen lambda qui se prend pour Jupiter !
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