LE REVEIL DE LA JEUNESSE ESPAGNOLE
30 mai 2011
On connaissait surtout de la jeunesse espagnole sa capacité à descendre dans la rue, seulement les fins de semaine, pour des beuveries en groupe à l'origine du phénomène des «botellons» (« grandes bouteilles ») ou pour célébrer en masse les succès de la « Roja », l'équipe nationale de football, lors des dernières Coupes d'Europe (2008) et du monde (2010). Elle affichait jusque- là pour le reste de son environnement une apparente indifférence.
Avec le mouvement des « Indignados », né le 15 mai dernier sur la Puerta del Sol, en plein coeur de Madrid, avant de s'étendre aux grandes places d'une soixantaine de villes du pays, 1'Espagne découvre subitement une nouvelle facette de sa jeunesse ! Sera-t-elle le premier pays d’Europe où explose la révolte de sa jeunesse, annonçant le début d’un printemps des jeunes dans nos pays de vieux ?
Ce n’est pas un hasard. L’Espagne est l’un des pays les plus meurtris par la crise et le tableau n’est pas reluisant : 45% des moins de 30 ans sont au chômage, exclus de l’économie et de la vie autonome, l'un des taux les plus importants d'Europe. Sans parler de la marginalisation d'un certain nombre d'entre eux, surnommés les « ni-ni » (« ni travailleurs, ni étudiants »), condamnés à des CDD ou au travail au noir, qui ont souvent été contraints de retourner vivre chez leurs parents. Ce serait le cas d'une petite moitié des hommes âgés de moins de trente ans.
Victime de la gestion erratique de José Luis Rodriguez Zapatero, le président du gouvernement socialiste qui a longtemps affirmé que la crise allait épargner son pays, l'Espagne ne voit toujours pas le bout du tunnel. La situation n'est pas près de s'améliorer, son économie ne devrait afficher qu'une croissance de 0,9 % cette année et de 1,6 % en 2012, selon l'OCD.
Un populisme désespéré ?
On comprend alors que les jeunes se lancent dans un populisme désespéré. En Espagne, peut-être plus encore qu’en France, les plus âgés pénalisent les plus jeunes de trois façons : par la ségrégation à l’emploi, par une école inadéquate et par les dettes accumulées sur leur dos. Elle illustre jusqu’à la caricature la dualité du marché du travail : emplois temporaires et interim pour les jeunes, emplois sécurisés pour les moins jeunes.
Il y a aussi un gouffre entre l’école et l’emploi. Les besoins du marché du travail n’entrent en aucune façon dans les préoccupations des enseignants et le système d’orientation fait défaut. Le patronat rivalise de conservatisme avec les syndicats qui, étroitement liés au PSOE au pouvoir, se sont contentés ces dernières années de défendre les droits acquis de ceux qui avaient du travail alors que le chômage ne cessait de grimper pour toucher aujourd'hui près de 5 millions de personnes.
De fait, les « élites » espagnoles n'ont pas vu venir le mouvement. Elles sont toutes surprises que la jeunesse espagnole se sente laissée-pour-compte et que ses revendications aillent au-delà de la simple amélioration matérielle de sa situation... En réclamant un changement de système politique, social et économique avec à la clef une réforme électorale, une véritable lutte contre la corruption, une séparation effective des pouvoirs et la création d'un contrôle citoyen, les « Indignados » veulent avoir désormais pleinement voix au chapitre.
Un mouvement qui pourrait faire tache d’huile en Europe ! Il serait grand temps que nos élus se mobilisent pour trouver des solutions autres que le bricolage et le replâtrage de nos systèmes sclérosés.
"Un jeune, une solution, pas de laissés pour compte !" . URGENT !