QUAND « L’ART DU DEAL » TROUVE SES LIMITES !
19 mai 2025
Un signal alarmant pour l’économie américaine.
Le verdict est sans appel : les États-Unis perdent leur sacro-saint triple A. Désormais, ils sont notés AA1 par Moody’s. La confiance dans la solidité financière de l’Oncle Sam s’effrite. Et ce n’est pas une surprise. Trop de dettes, pas assez de recettes fiscales. Une dette publique qui s’envole à 36 000 milliards de dollars, un déficit budgétaire abyssal, et une classe politique incapable de remettre de l’ordre dans les finances. Le message adressé par Moody's au Congrès ne pouvait pas être plus explicite. Quelques heures plus tôt, plusieurs élus républicains ont fait capoter au Congrès un vote clé sur l'avancement d'un mégaprojet de loi, vu comme la pièce maîtresse du programme du président Donald Trump. Malgré les exhortations de celui-ci sur son réseau Truth Social, cinq élus républicains se sont alliés aux démocrates pour rejeter le texte devant la Commission du budget de la Chambre des représentants. Pour Scott Bessent, le nouveau secrétaire au Trésor, ce n’est qu’un « indicateur à retardement ». Ce serait donc la faute de l’équipe Biden. Tellement facile ! Mais pas crédible. Moody’s tape là où ça fait mal : d’ici 2035, les déficits fédéraux pourraient grimper à 9% du PIB, contre 6,4% aujourd’hui. L’agence ne fait qu’entériner les désordres et les déboires causés par la politique erratique de Trump.
Face à Xi Jinping, Trump s’est cassé les dents.
Beaucoup d’esbrouf pour rien. Les Chinois ont été les plus malins. Rappelons-nous, Trump, candidat à l'élection présidentielle américaine de 2024 promet des droits de douane de 60 % sur les produits chinois et de 10 % venant du reste du monde. Et remporte l'élection le 5 novembre. Le 1er février, il signe un décret relevant de 10% les tarifs sur les produits chinois qui atteignent alors 20 %. Le 4 février, jour de son entrée en vigueur, Pékin répond par une série de taxes sur des importations de produits américains et une enquête contre Google. Le 4 mars, la Maison blanche double la mise contre la Chine à 20 %. Pékin réplique aussitôt, avec des droits de 15 % sur le poulet, le porc, le boeuf, le soja, et des contrôles sur des firmes américaines. La partie commence vraiment le 2 avril, avec la scène où Donald Trump présente les « tables de la loi commerciale » - des tarifs « réciproques », avec un plancher de 10 % et des taux par pays qui vont jusqu'à 50 % pour le pauvre Lesotho. La Chine écope de 34 % supplémentaires. Dans toutes les capitales, les gouvernants sont tétanisés. Toutes, sauf une : Pékin répond deux jours plus tard avec un taux identique de 34 % sur toutes les importations venant des Etats-Unis. Washington menace alors de porter les droits totaux sur les marchandises chinoises à 104 %. Et suspend les droits « réciproques » sur les autres pays pour rassurer les consommateurs américains et les marchés. La Chine est désormais sa seule cible. Et le jeu continue : Le 9 avril, Xi monte à 84%, Trump va à 125 % et précise le lendemain qu'il faut rajouter 20 % de pénalité fentanyl, ce qui porte le taux à 145 %. Le 11 avril, Pékin pousse ses droits à 125 %. Comme dans une partie de poker où la Chine bluffe … Le 12 avril, Trump recule : il décide une exemption sur l’électronique comme s’il découvrait les dégâts. Puis le président américain affirme que Pékin demande l'ouverture de négociations, ce que la Chine dément. Il faut toujours qu’il mente quand il perd la face.
Une fin de partie pitoyable.
Elle se déroule à Genève les 11 et 12 mai, où se tiennent finalement des négociations. Le vice-Premier ministre chinois, He Lifeng, et le secrétaire américain au Trésor, Scott Bessent, annoncent une suspension des droits de 115 points pendant trois mois. Les produits chinois seront donc taxés à 30 %, les produits américains à 10 %, comme si la folle séquence entamée le 2 avril n'avait pas existé. Dans la bataille, les Etats-Unis n'ont rien obtenu du pays qu'ils avaient décidé d'attaquer : pas d'ouverture de marchés, pas de réévaluation du renminbi, pas de promesse d'acheter des produits américains contrairement à la fin du premier mandat Trump. Et les droits de douane sur la Chine sont inférieurs de moitié à ce qui avait été promis pendant la campagne. On connait désormais la capacité de résilience de Donald Trump avant de reculer : une semaine. Bon à savoir. C'est que la Chine a réalisé un sans-faute dans sa stratégie. Elle a répliqué systématiquement aux mesures américaines. Elle a savamment gradué la riposte, en tapant le plus souvent un peu moins fort que Trump pour prouver sa modération. Et Trump n’a rien gagné, sauf à ruiner un peu plus son pays en semant le chaos. Quel winner ! Trump devrait dire à Donald : « you are fired ! » La fin est déjà connue : la Chine sortira renforcée.
En attendant, Le Congrès, pourtant à majorité républicaine, bloque son grand projet de loi budgétaire. Le « Big Beautiful Bill », censé prolonger ses baisses d’impôts de 2017. Coût estimé : près de 5 000 milliards de dollars sur 10 ans. Rien que ça. Encore plus de déficits et moins de recettes. La communication extravagante sur les milliards signés dans les pays du golfe ne feront même pas illusion, d’autant plus que le cadeau du Boeing fait par le Qatar vient pourrir le débat. On attend désormais la réaction de Wall Street cet après-midi sur les actions et le dollar américain. Et aussi le coup de téléphone à Poutine pour mettre fin à la guerre en Ukraine. Faut-il craindre le pire ?
Quand on élit un clown, faut pas s’étonner que ce soit le cirque !
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