LE GRAND MALENTENDU
21 septembre 2017
Christophe Béchu vient de se fendre d’une longue lettre aux grands électeurs du département de Maine-et-Loire pour tenter de justifier son choix de soutenir une liste de la majorité présidentielle à la tête de laquelle il a mis son principal féal, Emmanuel Capus, à défaut de se représenter lui-même. La démonstration est rigoureuse et intellectuellement du niveau qu’on pouvait attendre de lui. Elle repose sur deux arguments principaux : il faut empêcher l’échec du Premier Ministre et du Président de la République en soutenant l’action réformatrice qu’ils mènent, pour éviter de se retrouver avec une confrontation FN-Insoumis d’une part, il faut soutenir la recomposition politique qui nous conduit à « transcender » les clivages politiques, d’autre part. Son raisonnement est aussi bâti sur un procès d’intention qui consiste à diaboliser Laurent Wauquiez avant même que l’élection à la tête des républicains ait eu lieu. Je prends à dessein cet exemple car il est assez représentatif de la scène politique nationale et emblématique du jeu d’Emmanuel Macron et des « constructifs ».
Soutenir quelle politique ?
Selon Christophe Béchu, nous n’aurions d’autre choix que de soutenir la politique de l’exécutif. Mais pour faire quoi ? On ne le voit pas clairement : mon décryptage me conduit à voir dans l’action menée, des gages verbaux en direction de la droite mais des décisions largement inspirées par le « think tank » gaucho bobo Terra Nova dans les faits. Qui, à droite, pourrait se retrouver dans la politique fiscale, la transformation de l’ISF en IFI (impôt sur la fortune immobilière), sans parler des projets sociétaux ou de la mollesse face au communautarisme. On peut avoir voté Macron sans pour autant avoir cautionné son programme. Et c’est là tout le malentendu. Personne ne conteste la légalité de son élection, mais sa légitimité est faible car elle ne repose en fait que sur les 24% d’électeurs du premier tour. Ceux qui ont voté pour lui par défaut n’ont pas perdu pour autant leur droit à la contestation de son action. Et c’est ce qui se passe. Quant aux gens de droite au gouvernement, à commencer par Edouard Philippe, ils sont des otages : ils sont le miroir aux alouettes pour faire avaliser le « droite et gauche ». C’est une arnaque, car au passage, ils ont abandonné leurs propres idées pour se mettre au service de celles du Président. Le meilleur exemple est celui donné par Bruno Le Maire qui défendait la baisse de la CSG dans son programme et qui met en oeuvre aujourd’hui exactement l’inverse ! De la même façon mettre un candidat de droite à la tête d’une liste de gauche pour les sénatoriales constitue une belle arnaque, que les « marcheurs » authentiques ont bien vu.
La recomposition est un fantasme.
Le second argument du maire d’Angers ne vaut pas mieux : la présidentielle a donné une large majorité à « La République En Marche », broyant du même coup par la logique électorale, les autres partis. Mais cela ne constitue en rien une « recomposition » durable. Chaque jour, le caractère hétéroclite de la majorité présidentielle apparaît un peu plus et la domination de la gauche à l’intérieur n’est pas un mirage. Macron n’a pas fait exploser le PS : il était déjà en miette avec les frondeurs avant l’élection présidentielle, il a simplement préempté largement les socialistes modérés, et il n’a pas réussi à dynamiter complètement la droite républicaine malgré le ralliement de quelques transfuges au gouvernement. Oui, la recomposition est un fantasme. Elle n’existe pas dans la tête des Français. Ceux-ci ont pu être un moment lassés des guéguerres intestines des uns et des autres et certains être tentés par le « dégagisme ». Mais on voit bien aujourd’hui que si tel était le cas, l’exécutif jouirait d’une cote d’opinion bien plus favorable que celle qu’on observe. La réalité est que la situation du gouvernement et de ses soutiens est celle d’un centrisme intenable, fut-il un habillage.
Il faut affaiblir la droite.
Dans ce contexte, tout le jeu du Président consiste à affaiblir la droite pour n’avoir plus en face de lui que Mélenchon. Ne parlons plus du FN, il vient d’entrer dans une période de turbulences comme seule l’extrême-droite en a la recette, et sa présidente, par le spectacle qu’elle a donné lors du débat, s’est décrédibilisée à jamais pour occuper la magistrature suprême. N’avoir que les « Insoumis » comme adversaire, voilà la facilité. Mais, le problème, c’est que la « droite » n’a pas dit son dernier mot. Alors, il faut l’affaiblir en l’empêchant de fédérer en son sein les sensibilités de la droite et du centre, et c’est à cette mission que les « constructifs », faute de mieux, sont en train de s’activer, avec deux objectifs qu’on perçoit dans la lettre de Christophe Béchu : caricaturer d’avance l’opposition des Républicains en la qualifiant de « frontale » et présenter Laurent Wauquiez comme un extrémiste borné, tenter ensuite et en conséquence de faire grossir leur effectif maigrelet en ralliant à eux des modérés qui ont jusque-là refusé de quitter leur parti.
Une vraie opposition est nécessaire.
Si on veut que le quinquennat d’Emmanuel Macron n’échoue pas totalement, il faut une opposition républicaine à droite pour l’obliger à corriger son programme. Une opposition qui soutient et propose ses amendements, chaque fois que ça va dans le bon sens, comme la loi « travail ». Si on veut me faire dire que le Ministre de l’Education fait du bon boulot : pas de problème. Mais je n’en dirai pas autant de l’action d’autres ministres. Il faut donc une opposition qui combatte ce qui lui paraît inadéquat comme l’augmentation de la CSG sur le seul dos des retraités ou la suppression de la taxe d’habitation pour 80% des assujettis, une opposition qui reste vigilante et entende peser pour que la lutte contre l’islamisme soit effective sur notre territoire, enfin une opposition qui ait son mot à dire pour que l’exécutif n’ait pas les mains libres quand il s’agira de toucher à nos institutions. Une opposition claire, qui coopère chaque fois que l’action parait utile à notre pays et qui propose d’autres choix quand ce n’est pas le cas. Une opposition qui soit en capacité d’être une alternance : c’est ça qui nous évitera les extrêmes. Les « constructifs » qui tentent aujourd’hui par une tribune dans la presse d’obtenir sur la loi « travail » ce que la majorité LR au Sénat n’a pas réussi à faire passer, seraient bien mieux à l’intérieur des Républicains où ils ont toute leur place. C’est ça, pour moi, être à la hauteur des événements ! Christophe Béchu sait bien tout cela, alors quel dessein qui nous échappe poursuit-il pour prendre le risque de piétiner ainsi tous ceux qui se sont battus pour lui, et qui ont sué sang et eau pour qu’il soit élu à toutes les étapes de son parcours ?
Dimanche 24, les grands électeurs du Maine-et-Loire ne seront pas en peine de choix, avec neuf listes. Chacun pourra choisir selon sa sensibilité, mais il n’y a qu’une liste qui représente la droite et le centre et qui allie ouverture d’esprit et expérience, c’est celle emmenée par Catherine Deroche et Stéphane Piednoir !