BIENVENUE CHEZ LES ZADISTES : « PROBLEMOS ! »
31 mai 2017
Un peu de distraction, tout en restant dans la politique.
Comme Notre-Dame-Des-Landes revient dans l’actualité, si vous voulez avoir une petite idée de la manière dont on vit dans une ZAD, allez donc voir « Problemos ». Détente assurée ! Pour une fois qu’on peut rire de ces zozos, il ne faut surtout pas se priver. Cette satire hilarante de la faune zadiste démonte avec une ironie acérée le vide de la pensée altermondialiste et son gauchisme pitoyable.
Quand le monde réel n’est pas loin.
C’est une comédie d’Eric Judor (mais si, le « Eric » de Ramzy). « Problemos ! » réinterprète à sa manière l’utopie altermondialiste en forme de coup de pied dans la fourmilière ce qui permet à l’auteur de passer en revue tous les poncifs qui ont dû agiter les cerveaux des « nuits debout » parisiens. Nous allons donc découvrir une « zone à défendre », occupée pour la protéger contre un vague projet d’aménagement censé menacer ce joli coin de nature français, qui ressemble à s’y méprendre à des paysages ardéchois. Le prétexte est simple : Jeanne et Victor (Célia Rosich et Eric Judor), accompagnés de leur fille, un couple « normal » vient rendre visite à un ami. Celui-ci, ancien prof’ de yoga de Jeanne, s’avère être le maître à penser des lieux et de la « tribu » qui y vit. On assiste alors à une plongée de deux candides dans un monde dont ils ignorent tous les codes, et ils sont amenés à passer en revue tous les délires d’un milieu qui prétend vivre en autarcie économique, qui se révèle rapidement être surtout intellectuelle. Le ridicule ne tue pas, mais il nous fait bien rire, de la phobie de la technologie au droit prioritaire des animaux sur les humains, en passant par une incursion dans la « théorie du genre » qui nous produit ici un bel exemple de refus des « stéréotypes », jusqu’à l’absurde. Tout y passe évidemment et on assiste à la démonstration subtile, comme sait le faire Eric Judor, merveilleux de naïveté, que le refus des normes habituelles aboutit à des stéréotypes inverses, assis sur un discours dont l’assurance verbeuse cache mal une vacuité aussi prodigieuse que comique.
Quand les slogans tiennent lieu de pensée.
Et rien ne nous est épargné, à commencer par la galerie des personnages, comme sortis d’une bande dessinée, croqués finement : de la catho en rupture, convertie au militantisme Femen, prête à exhiber ses seins (très jolis) au moindre prétexte en uniforme ou pas, au gentil garçon qui cache en fait un ancien djihadiste, sans oublier la « facho de gauche » toujours prête à soupçonner les autres de turpitudes cachées en se dédouanant des siennes sur le système capitaliste responsable (forcément) de tous les maux. Et j’en passe ! Vous, par contre, vous passerez un joyeux moment de rhétorique ubuesque avec « l’enfant », je ne vous en dis pas plus. La comédie tourne un peu au vaudeville avec l’intrusion du monde extérieur qui rebat les cartes : une pandémie foudroyante les a épargnés. Forcément quand on mange les meilleurs carottes du monde… ! Vaste programme : nos zadistes se retrouvent seuls au monde et toute la société est à reconstruire. On sent le prétexte de l’auteur du film pour amener les personnages à leurs propres contradictions. Cette occasion rêvée de faire triompher leurs principes altermondialistes va-t-elle être saisie ? On s’en doute, chassez le naturel, il revient au galop.
Une satire du gauchisme culturel.
Conscient sans doute du caractère détonant de cette satire du gauchisme qui évoque irrémédiablement ce que Finkielkraut avait appelé « le monde révolutionnaire sous cloche », Eric Judor a cru bon de prendre quelques précautions. Il prend soin de préciser que « ce sont les excès de ces idéologies que le film condamne, pas les idéologies elles-mêmes »… il n’en reste pas moins qu’il s’emploie tout au long de l’histoire qu’il raconte à nous montrer des personnages parfois attachants tellement ils sont ingénus, mais complètement plongés dans une utopie qui se révèle être une fumisterie invivable quand elle n’est pas dramatique. Un comique qui confine au sadisme joyeusement ridicule, quand, par un dernier clin d‘œil, c’est la culture américaine la plus caractéristique (je vous laisse découvrir) en matière de retour au monde sauvage qui fait une intrusion inattendue.
Vous avez dit « Problemos » ? Si, « Problemos ! »
A voir absolument.