UNE SITUATION SURREALISTE.
21 janvier 2021
C’est certain, ça va repartir. Tous les ingrédients d’une reprise forte s’accumulent. Le problème c’est quand. Car avec cette pandémie qui n’en finit pas et dont on ne voit pas le bout, avec les multiples complications apportées par les « variants », bien malin celui qui peut le dire.
2020 : une année hors-normes.
En attendant, nous vivons une période atypique pour ne pas dire surréaliste. L’exercice économique 2020 aura été hors normes. Qui peut comprendre que la production nationale, le PIB, ait baissé de 10% et qu’en même temps les revenus français se soient maintenus, le pouvoir d’achat aurait progressé de 0,3% en moyenne selon la Banque de France. L’activité tourne à un rythme inférieur de 10% à celui de janvier 2020 et pourtant le chômage n’a pratiquement pas augmenté et les faillites d’entreprises ont été moins nombreuses qu’en 2019. On saisit alors que nous sommes en plein dans l’artificiel. Ces paradoxes ont une explication : la crise sanitaire a été largement « surfinancée ». Si la chute de production subie a entraîné une perte de 240 milliards l’année dernière, les pouvoirs publics ont injecté 400 milliards entre les plans d’urgence et de relance. Ce déluge d’argent public soit déboursé dans le chômage partiel, soit prêté aux entreprises sous des formes multiples garanties par l’Etat a permis jusqu’à maintenant d’éviter ce qui aurait dû être la conséquence de la crise sanitaire, une dépression qui aurait été bien plus terrible que celle de 1930.
Le miracle pourra-t-il continuer en 2021 ?
Ce serait surprenant. La sagesse serait de se préparer à la fin de « l’argent hélicoptère » déversé par la Banque Centrale Européenne. Les difficultés sont forcément devant nous. Elles vont surgir aussi bien à l’échelle européenne que chez nous, au moment où nous allons entrer dans la campagne électorale de 2022, dont les enjeux vont du même coup se trouver exacerber. Certes Emmanuel Macron peut se glorifier des avancées de l’Union européenne qui a réussi à concevoir un plan de relance collectif et massif de 750 milliards d’euros avec un endettement commun. Mais si l’Europe nous protège, il ne faut pas oublier qu’elle reste, et c’est heureux, un espace de concurrence. Elle financera les dettes publiques jusqu’en mars 2022 puis ses béquilles seront amenées à être retirées. Les divergences Nord-Sud reviendront au premier plan. Comment alors, résorber les déficits qui resteront béants une fois l’épidémie vaincue, et qui seront autant de handicaps ? Voilà une question hautement politique. Il ne suffira pas d’affirmer : « pas d’impôts Covid », comme l’assure pour l’instant Bruno Le Maire. Nous, nous savons qu’il n’a pas de baguette magique, et que son « quoi qu’il en coûte » a été financé par la générosité de la BCE. Certains on pu croire à la magie, la réalité s’imposera durement une fois la source tarie.
Une année marquée par l’incertitude.
Elle risque même d’être chaotique. Elle démarre mal avec une stratégie vaccinale illisible et incompréhensible. Les pierres d’achoppement s’additionnent : gestion sanitaire approximative, croissance économique insaisissable, chômage aux contours inquiétants, finances de l’Etat transformées en corne d’abondance, restructurations de secteurs entiers, autant de sujets qui vont mettre l’exécutif à bout de souffle face à une opinion publique éruptive. « Peut-être que je devrai faire des choses dures dans la dernière année », s’interrogeai le Président lors de son interview sur le site Brut. Il peut en effet s’y préparer, car il va devoir faire des arbitrages hautement politiques, et notamment trouver la recette qui lui permettra de mettre fin au torrent des dépenses publiques qui agit sur les Français comme une drogue. On sait alors que le plus difficile c’est quand il faut commencer à s’en passer. L’autre écueil c’est la tentation d’augmenter les prélèvements dans un pays qui est pourtant au plafond en la matière. Mais c’est incontournable : nos incorrigibles PS proposent un prélèvement exceptionnel de « solidarité » (élémentaire) sur les en-cours d’assurance-vie supérieurs à 30 000 euros, avec en prolongement, le retour de l’ISF. De son côté, le Comité de suivi des retraites recommande une mesure de sous-indexation des pensions visant toute la population des retraités, au prétexte qu’elles ont été épargnées par la crise. Pendant ce temps-là, les épargnants thésaurisent les billets de banque. Un phénomène qui inquiète les autorités bancaires : rien qu’en France, ce serait 33 milliards d’euros qui seraient stockés sous les matelats, manifestation d’une méfiance d’autant plus paradoxale que l’on paie de moins en moins en billets. Ce trésor caché est une façon d’échapper à d’éventuelles hausses d’impôts.
Le flou est partout.
La paralysie du pouvoir est patente. Le quinquennat entre dans sa phase terminale et finalement le bilan des réformes sera bien maigre. Il reste peu de temps utile et tant de choses à faire : réforme des retraites, de la décentralisation, du droit du travail, de la constitution, sans parler du referendum sur le climat. Avec un calendrier parlementaire déjà bien encombré. Les incertitudes politiques s’y ajoutent : quel calendrier pour les élections, quels candidats pour s’y présenter, quels champions pour les familles politiques qui constituent l’offre électorale. Autant de domaines pour lesquels les Français aimeraient avoir des réponses et n’ont qu’un théâtre d’ombres à se mettre sous la dent. Une certitude commence à se faire jour : encore un quinquennat pour rien. Le déclassement de la France va continuer.
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