« OSONS L’EUROPE… DES NATIONS »
27 avril 2018
Le livre de Christian Saint-Etienne est « the book to read » pour tous ceux qui s’intéressent à l’échéance européenne de 2019 : tout y est ! Une analyse lucide et clairvoyante par un européen convaincu qui ne pourra pas être taxé d’européiste !
De l’Europe espérance à l’Europe en panne.
En 200 pages, l’auteur réussit l’exploit d’exposer clairement la construction européenne depuis ses origines, comment la machine s’est grippée pour arriver au constat d’aujourd’hui : depuis Maastricht et parce qu’on n’a pas voté la constitution européenne, l’Union européenne est devenue une zone qui s’autodétruit par la concurrence fiscale et sociale. Il dissèque les erreurs grossières qui ont été commises, les bévues des dirigeants sans compter avec le moteur franco-allemand tombé en panne, la France affaiblie par sa dette, ses déficits et son manque de compétitivité, l’Allemagne occupée à digérer sa réunification. Pour ajouter à la complication, l’Europe a décidé de s’élargir aux ex-pays de l’Est au lieu de s’approfondir. Il aurait fallu de l’harmonisation, elle est rendue impossible par la règle de unanimité. Dès lors, c’est la règle du chacun pour soi, les égoïsmes favorisant la désunion. Il ne faut pas chercher plus loin l’origine des déséquilibres : les pays ayant les lois les moins contraignantes ont attiré mécaniquement les capitaux et les individus les plus doués… Pour aboutir à une absurdité absolue : la zone euro où des pays partagent une même monnaie sans gouvernement économique ni monétaire.
L’idée européenne est une idée française.
Il ne faut pas être grand clercs pour voir alors l’écrasante responsabilité de notre pays dans cette situation. Les politiques économiques menées depuis la fin des années 90 nous ont discrédité aux yeux de nos voisins, nous conduisant à une perte d’influence réelle, encore mesurable aujourd’hui dans la réticence opposée aux projets de relance d’Emmanuel Macron. Avec le Brexit est apparue une autre faille : avec l’acte unique, il n’aurait pas fallu accepter les « dérogations ». L’union n’apportant plus la prospérité espérée, avec son caractère trop technocratique, elle récolte le rejet des peuples.
La croisée des chemins.
Aujourd’hui, l’Europe est à la croisée des chemins : elle doit choisir entre deux conceptions. La britannique qui nous conduit au désastre d’un continent de nains chamailleurs incapables d’exister face aux grand Etats, instaurant une compétition, non entre les produits du marché, mais entre les règles du marché. L’autre, celle que devrait imposer le bon sens, resserrée autour des pays dits « carolingiens » (Christian Saint-Etienne en voit neuf ; France, Allemagne, Autriche, Benelux, Italie, Espagne, Portugal) qui se doteraient de règle fiscales et sociales communes, comprises dans une fourchette raisonnable. Voilà une confédération qui pourrait se doter d’une politique de puissance susceptible d’exister face aux géants américains et chinois. La subtilité de la proposition de l’auteur tient dans la faisabilité : organisée par un traité intergouvernemental, en dehors du traité de Rome, elle n’abolirait pas l’Europe du libre-échange. Elle pourrait même s’ouvrir progressivement aux autres pays qui le souhaiteraient sous conditions d’adopter les règles communes. L’Euro de cette nouvelle entité serait enfin garanti.
La fée carolingienne.
Cette solution aussi audacieuse qu’originale, reprenant l’idée d’Europa de Giscard, en la détaillant, de fonder une « fédération économique européenne », dite « Fée » carolingienne, permettrait de renouer avec une politique de puissance seule capable d’enrayer notre colonisation industrielle et numérique par la Chine et les Etats-Unis. Mais le temps presse. C’est demain qu’il faut agir. L’élection de 2019 est une opportunité qu’il faut saisir. A condition de sortir des vœux pieux et déconnectés de toute réalité consensuelle du discours de la Sorbonne et de nous en donner les moyens par une politique enfin sérieuse de réduction des déficits, de notre dette, sans quoi rien ne sera possible. La relance de l’Europe, seule la France peut la provoquer, mais l’auteur nous prévient : « la France d’Emmanuel Macron n’a que très partiellement emprunté la voie des réformes nécessaires… Compte tenu de l’accélération de la nouvelle révolution industrielle, l’Europe sera politiquement dépassée et stratégiquement morte en 2024 ! »
Ce n’est évidemment qu’une synthèse. Il faut lire le livre qui offre en plus une dimension didactique qui le met à la portée de tous.
« Osons l’Europe des nations » - Christian Saint-Etienne – Editions de l’observatoire.
Commentaires