LE POKER MENTEUR GREC
04 mai 2015
Nouvelle échéance, nouveaux acteurs, mais même conte à dormir debout. Après avoir reculé la date limite plusieurs fois en avril pour la conclusion d’un accord, les créanciers de la Grèce espèrent désormais conclure le 11 mai, lors de la réunion de l’Eurogroupe. Mais l’espoir reste très mince, tant l’effort à fournir reste imposant. Les négociations ont repris jeudi dernier entre le « groupe de Bruxelles », (Commission, FMI et BCE), « ex-Troïka », et la nouvelle équipe grecque, considérée par les partenaires financiers comme moins folklorique que celle menée jusque-là par Yanis Varoufakis, l’improbable ministre des Finances. Il semble que ce nouveau départ n’ait pas bouleversé la donne : « Cela avance lentement, mais les positions demeurent distante sur plusieurs fronts », a estimé un officiel européen. Quelques avancées auraient été faites en matière de TVA, mais on reste loin du compte sur les retraites ou la réforme du marché du travail, les dossiers les plus sensibles.
Des négociations pour amuser la galerie.
La délégation grecque chargée de négocier avec ses partenaires créanciers danse le sirtaki depuis le début, avec gesticulations, pas latéraux, fausses sorties, tensions, apaisements et promesses non tenues… « Depuis le début, la stratégie des Grecs a été de jouer la montre. Cela a fonctionné jusqu’à maintenant, mais cela pourrait devenir leur ennemi en mai » commente un négociateur. Le 12 mai, Athènes a en effet une échéance importante de remboursement auprès du FMI, et les caisses se vident. Cela n’empêche pas Yanis Varoufakis de continuer à souffler le chaud et le froid. Samedi dernier, dans une interview, il a décrit ses homologues européens comme « des partenaires gouvernés par la peur». Lui, il est inconscient. Surtout le responsable grec a relancé une ancienne idée fixe de Syriza, mise de côté depuis février, à savoir une réduction de la dette grecque. La Grèce « peut s’en sortir (sans un nouveau prêt). L’une des conditions cependant est une importante restructuration de la dette », a-t-il expliqué. Ben voyons ! Comme ça il est certain de mettre ses interlocuteurs de bonne humeur.
De deux choses l’une, ou « Varoufa-kis-s’y-croit » veut aboutir, et alors il faudra bien qu’il mange son chapeau, ou bien il organise méthodiquement le défaut grec pour aboutir au résultat qu’il recherche : ne pas payer les dettes de son pays. Car il a en face de lui des nordiques qui savent compter et qui, s’ils pratiquent « l’orthodoxie », c’est uniquement en matière de finances ! Néanmoins les Européens se sont donnés jusqu’à la fin juin pour négocier un éventuel nouveau plan d’aides au pays, mais le retard pris pour la conclusion du précédent met en péril cette autre échéance.
Les Grecs sont des escrocs.
S’ils pratiquent de la sorte, alors les Grecs sont des escrocs. Ils ont triché pour entrer dans l’euro et continuent de se comporter comme des brigands sans foi ni loi, ne respectant pas les traités qu’ils ont signés. Le gouvernement Tsipras voudrait inverser les rôles. Il ne respecte pas l’Europe. Son ministre des Finances est un plaisantin incompétent : c’est « Varoufa-kis-la-pète », torse bronzé bodybuildé, qui met un pays en faillite mais qui claque les euros avec une indécence rare. Il se fait photographier par un hebdomadaire connu pour le choc de ses photos sur la terrasse de sa luxueuse villa avec vue sur l’Acropole, devant un buffet pantagruélique, évoquant plus les fêtes de Dyonisos que la misère. La presse a aussi révélé qu’il mettait en location 5 000 euros par semaine, sa villa sur l’île d’Egine, dotée d’une piscine et d’un home cinéma ! Quel crédit peut-il avoir pour venir plaider ensuite « l’asphyxie de liquidités de son pays ». On comprend que Tsipras l’ait sorti de la première ligne des négociations.
Avec ses amis, au lieu d’accuser l’Europe, il devrait commencer par la remercier de tout ce qu’elle a fait pour eux. La vérité c’est que le gouvernement d’extrême gauche a dû en rabattre sur son rêve de changer à lui seul la donne en Europe. Il a commis l’erreur d’attaquer avec violence les européens rendus responsables de tous les maux de la Grèce, et il a cru que l’Allemagne était seule à lui être hostile. Il s’est retrouvé isolé et confronté à un front uni des 18 autres pays de la zone euro, et n’a entraîné dans son sillage aucun des autres pays méditerranéens qui, à force d’efforts commencent à récolter les fruits de leurs sacrifices.
Alexis Tsipras qui se prend pour le Che, mais version « feta », n’a pas hésité à s’allier avec la droite nationaliste, comme si en France, Mélenchon et Marine Le Pen se pacsaient. Il espère que dans des pays comme l’Espagne, les prochaines élections porteront au pouvoir des « Podemos », mais le pari est plus qu’incertain. C’est pourquoi le gouvernement Tsipras pratique la stratégie du faible au fort : il parie que les européens préfèreront céder en gardant la « brebis galeuse » pour éviter à la zone euro une crise que sa sortie provoquerait. Mais le temps joue contre lui. Il sait depuis le mois de février qu’annuler la dette grecque est impossible. Donc il s’agit plutôt de se servir des négociations pour provoquer sciemment une faillite de l’Etat grec, et sortir de l’euro en faisant porter le chapeau aux méchants créanciers. Le contribuable français doit savoir qu’au passage, il en sera pour 68 milliards d’euros de sa poche. Une véritable escroquerie.
Le « Grexit » serait une catastrophe pour les Grecs, pas pour l’Europe, bien au contraire.
76% des Grecs veulent rester dans l’euro, mais ils veulent le beurre et l’argent du beurre, et en plus se taper la fermière. Les 18 partenaires de la Grèce ont certes des engagements vis-à-vis de celle-ci de l’ordre de 300 à 400 milliards d’euros. Cependant il ne faut pas oublier que l’Union monétaire s’est considérablement renforcée et que les effets d’une contagion n’ont guère lieu d’être aujourd’hui. Hormis les banques grecques, aucun investisseur privé ne détient de titres à Athènes. Ce sont les Etats européens qui devraient faire face, eux qui sont exposés à hauteur de 2 à 4% de leur PIB au risque grec. Un risque qui n’est pas négligeable mais encore supportable. Au demeurant, la zone euro, à l’inverse de ce que d’aucuns voudraient croire, pourrait en sortir renforcée, car il serait alors possible, plus facilement, de resserrer les liens d’une union budgétaire et politique. Donc, si les Grecs font le pari que la troïka finira par céder pour éviter une sortie de l’euro, ils se trompent lourdement.
Le leader de Syriza serait plus utile à son pays s’il s’attaquait à le transformer sérieusement en le dotant de tous les outils modernes de gestion qui lui font cruellement défaut comme un cadastre et une comptabilité publique sérieuse, en luttant contre la corruption, le travail au noir et l’évasion fiscale, au lieu de s’accrocher à des promesses démagogiques intenables comme l’augmentation des salaires et des retraites ou l’embauche de fonctionnaires. En aidant financièrement la Grèce, la communauté européenne a prouvé sa solidarité. Mais si celle-ci décide de ne pas appliquer le programme de réformes convenu avec ses créanciers, elle devra en supporter toutes les conséquences. En attendant, la BCE a de nouveau relevé le plafond du financement d’urgence qu’elle accorde aux banques grecques. Cette enveloppe a été augmentée de 1,4 milliards d’euros à 76,9 milliards d’euros. Jusqu’à quand ? La réouverture de la télé publique avec la réintégration de plus de 1500 employés n’est pas un bon signe envoyé par Athènes.
Si l’Europe a à perdre en cas d’échec des négociations, les Grecs encore plus : depuis l’arrivée de Syriza au pouvoir, les capitaux ont fui, la croissance s’est effondrée, les caisses publiques se sont vidées, les impôts ne rentrent plus, bref, le pays est revenu à une situation plus grave qu’au moment de la crise qui a conduit au premier abandon d’une partie de sa dette et à son rééchelonnement. Sauf que sans l’Europe, ils se retrouveront sans filet de protection. A défaut d’austérité qu’ils ont refusée, ils auront la faillite et la misère. Même au soleil, la pauvreté fait souffrir !
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