ET SI L’INDEPENDANCE ETAIT UNE IMPASSE ?
03 avril 2023
Un parti de gouvernement, vraiment ?
Les Républicains défendent une ligne d’indépendance et entendent cultiver leur opposition au macronisme. On peut comprendre le raisonnement : c’est vrai, la soixantaine d’élus qu’ils ont réussi à conserver l’ont été sur un discours et un projet d’opposition à Macron. Vouloir honorer ce contrat est tout à leur honneur. Mais à l’usage et à bien y regarder, cette ligne d’opposition ressemble de plus en plus à un oxymore. Le contexte du moment, les projets qui arrivent à l’examen de l’Assemblée nationale, conduisent de plus en plus à mettre leurs pas dans ceux de la majorité. Vouloir le faire sans se renier est compliqué à expliquer au plus grand nombre et devient même illisible. Le risque est grand de voir le RN récupérer les dividendes de cette rigueur qui consiste à respecter ses convictions en soutenant les projets gouvernementaux qui les recoupent. Encore faudrait-il que cette cohérence soit accompagnée de la cohésion du groupe parlementaire et la dissidence de 19 députés au moment de voter la censure a créé une confusion regrettable et donné l’image du désordre plus que de la respectabilité sur un projet aussi emblématique que celui de la réforme du financement des retraites. Ce qui aurait dû être une démonstration de puissance s’est perdu dans les méandres de petits calculs politiciens. Dans ces conditions, la volonté d’incarner un parti de gouvernement est partie en fumée.
L’indépendance, planche de salut.
Le parti et ses principaux responsables, Gérard Larcher en tête, défendent le maintien de leur autonomie comme garantie d’un espace politique qu’ils refusent de voir réduit à une dualité mortifère entre les partis radicaux Nupes et RN. Le fait qu’il existe de profondes divergences avec le Président de la République est réel et pousse à camper sur la ligne de l’indépendance, tout en négociant des accords texte par texte quand il s’agit de l’intérêt général du pays selon la vision qu’ils en ont. Ils ne voient pas non plus comment dans la crise actuelle, ils pourraient s’associer à un pouvoir qu’ils jugent responsable des désordres dans toutes leurs dimensions, politique, économique et sociale ; et ils pensent que les partis associés au pouvoir paieront la facture à la fin du quinquennat, Edouard Philippe en tête. Aussi Bruno Retailleau martèle-t-il qu’il n’est pas macroniste, Olivier Marleix reste persuadé que le chef de l’Etat cherche plus les débauchages individuels qu’une véritable alliance qui l’obligerait à gouverner avec la droite, et Eric Ciotti fort d’avoir fait trancher la question par les instances du parti à plusieurs reprises continue d’estimer que rien ne peut modifier l’équation d’une droite qui s’est définie et qui a résisté au séisme des législatives en cultivant sa spécificité. Mais la solidité de cette ligne n’est-elle pas qu’une apparence ? Car, avec les frondeurs du 49-3, les partisans certes minoritaires d’un contrat de gouvernement, le parti donne l’image d’une machine fragile avançant sur une ligne de crête d’autant plus étroite que la société est en ébullition. Le risque grandit chaque jour que la planche de salut ne devienne un radeau de la méduse.
La coalition peut être une bonne solution.
Le sentiment général est que le pays ne pourra pas tenir comme ça jusqu’à la fin du quinquennat. Le gouvernement est constamment fragilisé par les troubles, les actions violentes de groupes organisés, les discours incendiaires des Insoumis, les divisions perceptibles à l’intérieur d’une majorité paralysée par ses divergences. Une clarification est nécessaire. Face au spectre d’une explosion sociale qui enfoncerait le pays un peu plus dans la crise, le scénario de la dissolution s’impose chaque jour un peu plus. Je ne donne pas cher, alors, de la peau de nos candidats républicains si cela arrivait. Nul doute que le RN se taillerait la part du lion dans des législatives sur fond de guerre civile. Je suis persuadé que le peuple de droite, au sens large du terme, aspire à un gouvernement stable. Je ne suis toujours pas devenu macroniste, loin de là, mais force est de constater que cela ne pourrait advenir qu’avec le renfort des députés du groupe LR à l’Assemblée nationale. Au nom du salut public et de l’intérêt national. C’est ce que défendent déjà Nicolas Sarkozy, Rachida Dati, Jean-François Copé et à l’intérieur du parti Alexandre Vincendet. Ils soutiennent l’idée qu’un accord politique avec la majorité serait le meilleur moyen de redresser le pays. Comme le pratique Nicolas Forissier, député de l’Indre, qui se rallie à la collaboration républicaine chaque fois qu’il considère que l’intérêt supérieur de la France l’exige, il ne s’agit pas, évidemment, d’effacer la singularité LR. Mais pour cela, il faudrait une véritable négociation au fond, avec des garanties et des contre-parties concrètes sur le programme et la composition du gouvernement.
Les Républicains auraient tout à y gagner : appliquer une partie de leurs projets qui leur tient le plus à cœur, apparaître comme les sauveurs de la démocratie par le retour à un fonctionnement normal de l’Assemblée nationale, participer au redressement de la France qui ne manquerait pas de se produire, renouer avec la partie des électeurs qui les ont déjà quittés. Avec, en plus, pour les nombreux talents qu’il recèle, l’opportunité d’accroître leur audience et faire valoir leur efficacité. Car les places sont à prendre et les prétendants sont presque tous dans leurs rangs. Et je suis certain que notre électorat du centre et de la droite modérée, leur manifesterait sa gratitude dans les urnes, le moment venu.
Encore faudrait-il que Macron joue le jeu. La consigne confiée à la Première Ministre "d'élargir la majorité" n'est pas suffisante. Pour l’instant, des deux côtés, c’est « je t’aime, moi non plus » et ce n’est pas raisonnable.
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