DE SAMUEL PATY A MASHA AMINI…
16 octobre 2022
Faisons en sorte que leur mort n’ait pas été inutile.
C’était le 16 octobre 2020.
Il y a deux ans. Samuel Paty était assassiné par un fanatique islamiste pour avoir enseigné la Laïcité. Ce crime atroce fut un choc pour nous tous. Et il fut aussi un avertissement pour notre République, défiée au cœur de ses valeurs et de son École. C’était le résultat d’un passé fait de trop de complaisance, trop d’accommodements. Samuel Paty en fut la victime. Victime du « pas de vagues », mais surtout victime de ceux qui instrumentalisent la foi pour délégitimer nos lois et de ceux qui les tolèrent au nom d’une conception dévoyée de la liberté individuelle.
Aujourd’hui, on aimerait pouvoir dire que Samuel Paty a gagné la bataille des valeurs !
Malheureusement, le terrorisme est loin de s’avouer vaincu et les intégristes continuent leur pression sur l’école et la société. Après le burkini, voici qu’on constate une augmentation des vêtements islamiques dans nos collèges et lycées. C’est une atteinte à leur neutralité religieuse, et donc une atteinte à la laïcité. Mais surtout, à travers ces atteintes dont le vêtement devient plus que jamais un champ de bataille identitaire, il faut voir un rejet des mœurs françaises et une prise de possession territoriale et culturelle, avec un antisémitisme sous-jacent quand il n’est pas clairement exprimé. Ainsi, un enseignant du Lycée Georges Brassens, dans l’Essonne, a été menacé de mort, parce qu’il était juif.
Contre tous ceux-là, la République doit être implacable.
Avec fermeté et fierté, elle doit défendre ses valeurs. Celle de la Liberté de penser, la vraie, et de s’exprimer. Celle de l’égalité, notamment entre les femmes et les hommes. Celle de la Fraternité, dont la Laïcité est l’un des socles. Notre nation rassemble et respecte chacune et chacun dans ses différences physiques, philosophiques ou religieuses. C’est son projet et ce projet doit être défendu, sans complexe et sans faiblesse. Il est temps que les fanatiques, les antisémites, sentent sur eux la poigne de la République. Exhortons le gouvernement à la plus grande fermeté ! Mais en a-t-il les moyens alors que le Président a nommé un ministre pour le moins discutable à l’Education, tant ses propos et ses convictions sur la laïcité sont ambiguës. Depuis deux ans, peu de choses ont changé. Quant à nos jeunes, ils doivent savoir que la laïcité n’est pas l’adversaire des religions mais une liberté pour tous les citoyens et pour tous les cultes qui respectent la loi. Ils doivent aussi être conscients qu’il existe des prêcheurs de haine qui cherchent à les utiliser pour, un jour, les museler et museler notre société.
Ni muselière, ni obscurantisme. Liberté ! C’était le message de Samuel Paty, et on aimerait que ce soit celui de tous nos enseignants.
La révolte des Iraniennes.
Et c’est aussi le cri de toutes ces Iraniennes qui se révoltent pour ne plus être traitées comme des fantômes. Les manifestations qui secouent l’Iran encore ce week-end ont trouvé leur origine dans la mort de Masha Amini, une jeune femme arrêtée dans la rue par la police des mœurs de la République des Mollahs pour une mèche de cheveu un peu trop décollée de son tchador. Elle avait reçu vingt et un coups sur le crâne. Depuis, le pays tout entier s’est enflammé et le régime qui répond par une répression sanglante, on en est à près de 200 morts, doit faire face à une révolte qui se mène avec de nombreux hommes à leurs côtés. Depuis Khomeyni, le port du voile est obligatoire et inscrit dans la constitution iranienne. Il voulait en faire un étendard de l’islam politique et de la lutte contre l’influence occidentale. Chez nous, les islamistes ont su en tirer parti en profitant de notre éthique de la tolérance pour en faire une vitrine. Mais l’exemple de ces jeunes femmes à qui il est égal de se faire arrêter, voire pire, pourrait bien changer la donne. Ce n’est pas contre un objet cultuel qu’elles se battent, c’est contre le voile politique, instrument de l’oppression du régime en place, signifiant, au-delà des interprétations du Coran, le caractère passéiste et profondément rétrograde de ce symbole qui a été plus ou moins figé dans les sociétés musulmanes. Elles se dressent d’abord contre le régime théocratique des mollahs. Elles prennent acte de leur émancipation au péril de leur vie. Ce sont des jeunes filles anodines, issues de tous les milieux, qui deviennent modèles pour toutes les autres. 40 ans après, quel terrible échec pour les Mollahs !
Il y a de quoi être en colère contre la gauche en France, qui s’enferme dans le déni sans se rendre compte qu’elle livre les Français musulmans aux plus radicaux. On aimerait entendre un peu plus Clémentine Autain et Sandrine Rousseau si virulente contre le patriarcat blanc occidental, à propos de la répression sanglante que subissent les femmes en Iran. L’islamophobie, même fantasmée, a des limites, non ?
De Samuel Paty à Masha Amini, ces deux visages nous obligent à ne rien oublier et à ne rien céder.
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