LE MOMENT CHIRAC.
27 septembre 2019
Depuis hier midi, toute la France est à l’unisson, tous les médias n’ont qu’un sujet qu’ils explorent dans le détail, en long, en large et en travers : Jacques Chirac nous a quittés ! Pour une fois, l’ancien président fait l’unanimité que les Français lui ont refusée du temps de son mandat de Président de la République. Et il aura été « Chirac » jusqu’au bout : il a trouvé le moyen de mourir pendant les « French days » !
Comme chaque fois en la circonstance, quand une personnalité importante décède, on assiste à un florilège laudatif, comme si beaucoup de vivants avaient quelque chose à se faire pardonner. Mais là, c’est vraiment le super-bal des hypocrites auquel on assiste dans les médias. Tous ceux qui ont combattu Chirac, qui l’ont traité de « super-menteur », qui l'ont attaqué pour les « affaires » et qui, souvent, ont jugé sa présidence inutile, rivalisent de louanges devant les caméras ou sur les plateaux. Quand c’est Roselyne Bachelot, il n’y a rien à dire, on est dans l’affection bien compréhensible. Quand c’est Serge July ou Jean-François Kahn, pour ne prendre que ces deux-là, il suffirait de rechercher quelques « unes » de leur hebdo pour comprendre qu’on est à cent lieues de ce qu’ils en disaient alors. Je sais que c'est la règle du genre mais je ne m'y habituerai jamais. A moins que ce ne soit un exercice d’exorcisme pour eux. La palme d'or revient à Anne Hidalgo: « Il sera à jamais notre maire » a-t-elle déclaré. On en tomberait sur le cul ! Campagne électorale oblige.
Donc Chirac n’est plus. Emotion évidemment ! Je ne vais pas en rajouter ici sur les détours de sa vie publique depuis près d’un demi-siècle. Vous saurez tout pendant 48 heures, et bien plus que ce que je pourrais vous rappeler. Dire qu’il aura marqué son temps est un euphémisme. Néanmoins, mes sentiments à son égard restent ambivalents. Je lui en ai longtemps voulu d’avoir fait perdre Giscard en 1981 et puis avec le temps, il a bien fallu jeter la rancune à la rivière. Mais pardonner, ce n’est pas oublier. Et évidemment j’ai eu à soutenir sa candidature en 1988 puis dès le premier tour en 1995, . La dissolution de 1997 fut un autre accident de parcours qui m’a laissé amer : obligés à une nouvelle cohabitation, nous dûmes subir cinq ans de Jospin. Le centre-droit partait en déliquescence et en 2002, je me suis donc retrouvé à fonder l’UMP avec Roselyne Bachelot dans notre département.
La volonté chiraquienne de rassembler toute la droite et le centre relevait à la fois du bon sens et de la nécessité. Force est de reconnaître que le quinquennat ne fut pas une partie de plaisir. Sur le terrain, avec des résultats décevants à toutes les élections, malgré les campagnes actives que nous menions, et au national, avec un Président sur la défensive, obligé de reculer sur toutes les réformes qu’il entreprenait. Il eut en plus la malencontreuse idée de vouloir passer par la voir référendaire pour faire approuver la constitution de l’Europe et le « non » l’emporta à l’issue d’une campagne où la démagogie triompha des arguments rationnels, alors qu’il existait une large majorité au parlement pour l’approuver. C’est en président désavoué qu’il termina son mandat. Heureusement Sarkozy perçait … Mais c’est une autre histoire.
Comme toujours, c’est une fois qu’il a été éloigné du pouvoir, que les Français se sont mis à l’apprécier. On peut être, en effet, admiratif de l’homme à bien des égards. Bernadette y a contribué pour beaucoup, forçant le respect par son soutien et son attachement. Les Français sont comme ça. L’émotion populaire est à l’aune de sa puissante stature qui a marqué près d’un demi-siècle de notre vie politique. Qu'il repose en paix.
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