LA FRANCE EST SEULE RESPONSABLE DE SES MAUX
06 février 2019
La Cour des Comptes vient de rappeler au gouvernement et au Président de la République l’extrême fragilité de nos finances et s’inquiète de la dégradation qui s’annonce pour 2019. Une mise en garde utile au moment où l’exécutif cherche des moyens pour sortir de la crise des Gilets Jaunes, avec des chèques en bois. Mais si notre pays cumule tant de problèmes, il ne le doit qu’aux politiques qui ont été menées et ne peut pas rejeter la responsabilité sur le dos de la libéralisation mondiale ou du « néolibéralisme » imposé par l’Europe.
La croissance financée par l’Etat : erreur.
Ce sont bien les politiques menées depuis plus de vingt ans qui nous ont menés au gouffre et personne ne nous a obligés à faire les choix qui ont été faits. Voici des faits pour éclairer ces affirmations. Ce sont des constats indiscutables*. Depuis l’an 2 000, la progression du pouvoir d’achat a été plus rapide que la croissance (en moyenne 1,3%) et les gains de productivité (en moyenne 0,7%). Ces gains de pouvoir d’achat ont été financés par l’endettement. Rappelons que celui-ci était de 20% du PIB en 1980 et atteint 100% en 2018.
La redistribution massive : erreur.
Parallèlement, la France a financé à crédit une politique sociale très généreuse. La population en-dessous du seuil de pauvreté (13,8%) est l’une des plus faibles du monde développé. Cela s’accompagne d’inégalités de revenus elles aussi les plus faibles du monde. Cela se mesure avec l’indicateur « gini » qui est à 0,259. Il était à 0,337 en 1970. Le rapport entre les revenus les plus élevés et les plus faibles est de 1 à 22 avant « redistribution » et de 1 à 5,6 après. L’effet redistributif est obtenu particulièrement avec l’impôt sur le revenu que seulement 43% des Français paient, avec une progressivité confiscatoire puisque 2% des ménages paient 40% des 78 milliards prélevés. Le rouleau compresseur fiscal est efficace, mais il est un frein énorme à l’investissement. L’Europe ne nous impose pas d’infliger à nos entreprises des charges supérieures de 8 points à la moyenne de ce que pratiquent nos partenaires de l’Union. Notre pays accumule ainsi de nombreux retards en innovation, en robotisation, donc en emplois non créés.
Fuite en avant par l’impôt et l’emprunt : erreur.
Du coup le chômage de masse s’est installé : autour de 9% depuis trop longtemps. Il explique que dans les dix dernières années l’écart de richesse par habitant avec l’Allemagne s’est creusé de 13,6%. Pour financer sa politique dispendieuse et décourageante pour le travail, les dépenses publiques atteignent 57% du PIB, et les prélèvements ne suffisent pas : il manque près de 10 points de PIB, ce qui explique le déficit et l’accroissement de la dette. Cela se fait au détriment des classes moyennes. Ainsi depuis 2011, 60 milliards d’euros de prélèvements supplémentaires se sont réalisés à 90% sur les ménages. Parallèlement, les charges pesant sur les entreprises, ont peu évolué, conduisant au quasi gel des salaires. La conséquence, c’est qu’aujourd’hui, le revenu des retraités est en moyenne de 5% supérieur à celui des actifs. C’est anormal, mais ce qui est en cause c’est la faiblesse des salaires, pas les retraites acquises. Ce phénomène est aggravé par le déclin de la mobilité sociale à mettre en relation avec le déclin de la qualité des services publics, notamment dans la France des territoires.
L’emploi public pour compenser l’emploi privé : erreur.
Cerise sur le gâteau, nous avons une fonction publique pléthorique : la hausse du nombre des fonctionnaires dont le nombre avoisine les 6 millions, a augmenté de 47% depuis 1980 quand la population a augmenté de 24% dans le même temps. Deux fois plus vite : nous sommes donc sur-administrés. La « décentralisation » qui devait nous faire économiser a été souvent prétexte à embauches supplémentaires, mais pas que. L’Etat a souvent pratiqué la politique de l’emploi public pour freiner la hausse du chômage.
Pour bien mesurer le caractère insoutenable de notre modèle économique et social, ce palmarès finira de vous édifier : nous représentons 1% de la population mondiale, notre production participe pour 3% du PIB mondial et nos aides sociales pèsent à elles-seules 15% des aides sociales mondiales. Cherchez l’erreur ! Après on s’étonne que notre dette soit à 100% du PIB.
L’Europe bouc émissaire : erreur.
Dans cette affaire, l’Europe n’est en rien responsable de nos choix et de nos dérives. Elle aurait même plutôt servi de garde-fous par les contraintes que les traités nous imposent et que nous ne respectons pas toujours en matière de finances publiques. Affirmer que nous serions victimes du néolibéralisme européen est une escroquerie intellectuelle, alors qu’à bien des égards, notre pays présente tous les traits d’un pays fortement socialisé pour ne pas dire socialiste, car il faudrait rajouter tous les avantages mis "sous conditions de ressources". Ce qui est en cause c’est la politique keynésienne complètement inadaptée au contexte du monde contemporain que nos gouvernants mènent, sous l’influence d’une technocratie incapable de changer de modèle. La preuve, ils cherchent encore à augmenter les impôts.
Ce n’est pas le modèle néolibéral qui est en cause, comme l’affirme Michel Onfray, c’est le modèle keynésien qui est périmé. Dites-le à Bruno Le Maire si vous le rencontrez dans un débat.
*La plupart des chiffres sont fournis par Nicolas Baverez.
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