BENALLA, OH, LA, LA …
26 juillet 2018
Voilà une histoire tellement ubuesque qu’on a bien du mal à y croire.
Je vais vous la conter telle que Monsieur Toutlemonde a pu la comprendre. D’abord le feuilleton commence par un coup de théâtre : le 19 juillet, le journal Le Monde, ça n’est pas rien, publie un article qui relate les exploits d’un Superman, venu à l’aide de la police lors des manifestations du 1er mai. Mais on a réussi à mettre un nom sur le superman : Alexandre Benalla, garde du corps (parait-il que non) et « ami » du président de la République. Et tourne alors en boucle sur les réseaux sociaux une vidéo où il apparaît casqué et muni d’un brassard de la police, en train de molester un homme puis une femme…. On est quand même deux mois et demi après les faits. Aussitôt la classe politique s’enflamme, mais ça c’est une autre histoire.
Revenons à nos moutons.
Voilà donc un membre du cabinet de l’Elysée qui se trouve avec les forces de l’ordre, place de la Contrescarpe. Déjà on peut se demander ce qu’il fait là. On nous dit qu’il a été invité pour observer. Soit. Première anomalie : à un moment donné il se précipite sur des personnes qui jettent des projectiles sur les CRS. Je résume : il contribue à interpeller deux personnes au comportement violent, c’est indiscutable. Il les moleste au passage sans qu’on en voie l’utilité. Deuxième anomalie : les deux personnes ne sont pas déférées, comme cela aurait dû se faire normalement. C’est que, troisième anomalie, il aurait fallu faire mention de l’intervention « inappropriée » de M. Benalla qui n’avait pas le pouvoir d’intervenir et expliquer, quatrième anomalie, pourquoi il portait un brassard de la police, un casque de CRS et était muni d’une radio. Pour éviter que l’affaire s’ébruite, est donc la réponse à cette deuxième anomalie. D’ailleurs, le Procureur de la République, M. Mollins demande aujourd’hui officiellement des explications sur cette absence de défèrement de ces deux personnes aux forces de polices concernées.
Je continue.
Forcément, les policiers mécontents ont fait remonter l’incident à l’employeur du superman. Comme ça n’est pas bien, il sera puni. Va-t-on le dénoncer et le présenter à la justice ? Que nenni, un membre du cabinet, ça ferait désordre : il sera mis à pied deux semaines sans salaire (qui apprend-on, n’a pas été retenu), sanction jugée proportionnée. C'est déjà scandaleux au regard du simple flic qui est mis en examen pour un coup de matraque. Et la vie a repris, tranquille comme Baptiste. On a pu voir à nouveau dans le sillage de Jupiter le sieur Benalla au Panthéon pour la cérémonie Veil, au 14 juillet, dans le car des bleus… Pendant deux mois et demi, le grand public a été tenu à l’écart de l’incident, mais aussi la justice. Tout a été fait pour enterrer cette histoire, ce qui est scandaleux de la part de gens qui prêchent la « République exemplaire ». "Enorme" crierait Fabrice. A l’Elysée, on peut croire l’affaire oubliée et la vie a repris comme si de rien pour l’intéressé : attribution d’un logement de fonction, voiture de fonction équipée « police », … Un puni qui se porte bien, quoi ! Les vacances approchent, et il semblerait qu’on lui ait confié la sécurité du Président au fort de Brégançon. Est-ce la goutte qui a fait déborder le vase ? Toujours est-il que quelqu’un de bien intentionné a pris soin de faire parvenir la vidéo compromettante dûment commentée pour son interprétation au journal Le Monde.
Et voilà le scandale qui éclate.
L’Assemblée nationale s’enflamme, la majorité En Marche est à l’arrêt, comme tétanisée (il faudra attendre que Macron appuie sur le bouton « reset » pour qu’elle redémarre), Le Président pourtant très bavard se mure dans le silence… La suite vous la connaissez, et elle n’est pas triste, avec les auditions par les parlementaires, l’ouverture généralisée des parapluies par les (hauts) fonctionnaires, les contradictions, les trous de mémoire … On n’a pas fini d’en entendre parler.
Que va dire l’ordinateur de Benalla ? Sur quoi va déboucher la procédure judiciaire ? L’affaire de l’été est bien une affaire d’Etat quoi qu’en disent les partisans de M. Macron : un Président qui soustrait un justiciable à l'action de la justice, c'est inqualifiable. Et j’imagine Alexis Kohler lui téléphonant : « On est mal patron, on est mal ! ».
Moi, j’ai envie de chanter : « Oh lé, lé, Oh la, la, Quand il faut y aller, Benalla est là … »
Et du coup, on en a même oublié qu’on était champions du monde ! Incroyable !
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