LE PIEGE DE L’IMMIGRATION
25 juin 2018
Un sommet incomplet pour rien.
Bien que le mini sommet ait été boudé par la Pologne, la Tchéquie, la Slovaquie et la Hongrie, la crise déclenchée par l’Aquarius n’a pas trouvé de remède unanime à Bruxelles. La diplomatie française, à cette occasion, n’a pas fait montre d’une grande efficacité entre faux pas de déclarations inopportunes, petits pas de deux avec l’Allemagne et arrogance. Le résultat était prévisible : l’Italie, en première ligne, n’a pas cédé un pouce de sa volonté de mettre le holà à une situation qui n’a que trop durée pour les Italiens. En effet l’Italie a accueilli au moins 700 000 migrants en quatre ans. Les européens ont laissé l’Italie se débrouiller seule jusqu’à présent. Elle s’est donc donné un gouvernement qui veut un mettre un terme à « l’invasion ». Le refus de Mrs. Conte et Salvini d’accepter « l’Aquarius » était une manière de placer le problème dans les mains de leurs partenaires.
Un révélateur.
Le refus d’accueillir le bateau de réfugiés, qui a finalement trouvé refuge en Espagne à Valence, traduit le durcissement général des politiques migratoires européennes. Car l’Italie n’est pas seule. On connait les positions fermes des Hongrois, slovaques, tchèques et polonais. À Berlin, Mme Merkel est confrontée à la « fronde » de son ministre de l’Intérieur, Horst Seehofer, chef de la CSU, parti plus à droite que la CDU de la chancelière. Ce dernier a donné deux semaines à Mme Merkel pour changer sa politique migratoire. Or le gouvernement repose sur une coalition fragile et une scission entre CDU et CSU lui serait fatale. Emmanuel Macron a reçu à Paris Giuseppe Conte, président du Conseil italien et a tenté quelque peu d’apaiser les relations franco-italiennes, qui s’étaient tendues après divers incidents, et que l’affaire de « l’Aquarius » a contribué à endommager un peu plus. On a vu que les tapes sur l’épaule et les sourires de façade ne faisaient pas avancer la solution. Il faut dire que notre pays où les deux tiers de la population sont opposés à l’accueil des immigrés, n’a pas une grande marge de manœuvre.
Une menace pour toute l’Europe.
L’immigration, clandestine ou non, est en train de déstabiliser les démocraties européennes. Les gouvernements qui souhaitent trouver un compromis entre leur respect des droits de l’homme et le réalisme sont bousculés non seulement par les oppositions de droite mais aussi par celles qui se manifestent jusqu’au sein même des partis qui les composent. Dans ces conditions, la France n’a rien gagné à hausser le ton contre l’Italie par la voix de son Président, quand elle a refusé l’accès à ses ports de « l’Aquarius », tout en faisant la même chose ensuite. Il a bien compris que le succès croissant des mouvements identitaires en Europe accompagnait une évolution des opinions fortement défavorables aux migrants. Et la tendance à prendre des mesures nationales, sans concertation avec l’Europe, se développe. L’Espagne de M. Sanchez, le socialiste qui a remplacé Mariano Rajoy, a mis un point d’honneur à proposer que « l’Aquarius » soit accueilli chez elle. Mais c’est une posture politicienne : il a voulu montrer que son pays ripostait à l’intransigeance italienne en ouvrant les bras aux damnés de la Méditerranée. L’histoire nous dira si le peuple espagnol était d’accord.
Et si on arrêtait la politique stupide des quotas ?
Chaque pays européen veut être maitre de qui il accueille chez lui, c’est logique, et refuse de se voir imposer par Bruxelles ou Strasbourg, des quotas à respecter. Car les capacités d’accueil que chacun est susceptible d’offrir sont variables : elles doivent prendre en compte des variables comme la démographie et la situation financière. On voit bien que rien que sur ces deux critères, il sera difficile de mettre d’accord la France et l’Allemagne. On devrait permettre à chaque Etat de l’Union de définir le nombre d’immigrants qu’il souhaite recevoir et lesquels, politique définie par un vote du parlement national. Il faut que l’Europe rassure les pays, comme l’Autriche ou la Hongrie, qui ont érigé des murs ou des barricades à leurs frontières. Mais comme les migrants ne sont pas dissuadés par les mesures coercitives, il appartient à L’Union de mettre en place les dispositifs nécessaires à la régulation du flux. Là, il faut une politique commune. Sur cette base, je gage que tous les partenaires, y compris les plus réticents seraient prêts à participer. C’est l’Europe en mutualisant ses moyens qui pourra arrêter le trafic, car il s’agit d’un trafic ! On connaît le rôle funeste de la Libye qui ne fait rien pour arrêter les passeurs et transforme les migrants en esclaves avant de les laisser partir quand ils ont enfin les moyens de payer leur voyage. Il ne peut y avoir de résolution de la crise migratoire qui ne soit pas à l’échelle de l’Union européenne. Cependant, les associations et les ONG de tous les pays, qui claironnent leur vocation à tout-va et jouent les boutte-feu, sans se soucier le moins du monde de la colère populaire contre l’immigration, doivent aussi accepter des politiques équilibrées s’efforçant de tarir les flux migratoires tout en traitant les migrants avec humanité.
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