MACRON, ENTRE MACHIAVEL ET RASTIGNAC
04 janvier 2017
Emmanuel Macron est aujourd’hui la coqueluche des médias. Il a fini l’année en faisant l’actualité, profitant du vide créé par la fin de la primaire de la droite et la trêve des confiseurs qui a rendu inaudible les candidats à celle de la gauche socialiste. Derrière ce fringant quadragénaire, à la mécanique intellectuelle brillante, qui se cache vraiment ? Machiavel ? Rastignac ? Les deux à la fois ? Manipulateur et sans scrupule comme le premier, arriviste comme le second, il veut brûler les étapes et voudrait déjà se voir à la magistrature suprême.
Candidat antisystème, c’est d’abord un pur produit du système.
Sa carte de visite est éloquente. Lycée Henri IV, Sciences-po, Ena dont il sort inspecteur des finances, il a le parcours classique qui débouche un jour sur la politique. Il passe par la case Rothschild où il découvre la banque d’affaires. Il quitte la banque pour devenir Secrétaire général adjoint à l’Elysée en 2012. Son milieu comme son discours est ambivalent, mélange de monde enseignant qui le fait adhérer aux idées de gauche, et de professions libérales (médecine) qui lui permettent d’approcher des milieux plus diversifiés. Il est notamment proche d’Henri Hermand, milliardaire de la gauche rocardienne qui l’a poussé à entrer en politique et lui a mis dans la tête le projet présidentiel. Celui-ci vient de décéder. Il a pour parrains Jacques Attali, Alain Minc, Jean-Pierre Jouyet.. Surdoué, c’est aussi un virtuose du piano, mais l’histoire ne dit pas encore s’il est le spécialiste de la polka (trois pas en avant, deux en arrière). Il a pratiqué aussi la boxe, ce qui lui confère un certain art de l’esquive qu’il a pratiquée à merveille depuis sa sortie du gouvernement. Premier des techno-ministres de la gauche, son palmarès pourrait faire de lui un extra-terrestre… Pourtant son bilan est plutôt maigre : la loi Macron n’est pas considérée comme une réussite, il a inspiré le "choc fiscal" et le CICE, cette usine à gaz technocratique.
Il pratique l’ambiguïté comme son ancien maitre
Tout prédisposait Emmanuel Macron à l’ambivalence. C’est le principal trait de caractère du personnage. S’il ose aborder les sujets tabous, il franchit rarement le Rubicon, ou revient en arrière quand il a le sentiment d’être allé trop loin. Il voudrait se faire passer pour un néophyte de la politique refusant tout ce qui est politicien. C’est là sa faille : sa contradiction permanente entre celui qui veut être fidèle à son camp, la gauche, et la fidélité à ses idées modernes, plus libérales. Cela le conduit à utiliser les bonnes vieilles ficelles que n’aurait pas renié un radical-socialiste. Il a pu apparaître comme socialiste au gouvernement, complice des banquiers dont il connait les secrets, libéral avec le patronat, d’un jacobinisme rassurant avec les syndicats et cœur à conquérir pour toutes les femmes. Il a l’empathie facile et tous ceux qu’il rencontre ont droit à son clin d’oeil complice et peut se croire son ami. Mais dans la réalité ça donne : Je ne touche pas aux 35 heures, voyez ma gauche, je laisse les entreprises décider du temps de travail, voyez ma droite… Est-ce compatible et viable ?
Son programme n’est pas clair.
Il est présenté souvent comme un « social-libéral ». C’est une erreur. Ce classement vient de gens qui considèrent comme libéral (voire ultra-libéral) tout ce qui échappe à la doxa socialiste. Emmanuel Macron est un social-démocrate. Il appartient clairement à cette « deuxième gauche » qui a toujours été minoritaire en France, incarnée par Michel Rocard. Ses parrains politiques tels Gérard Colomb, en témoignent. Le problème c’est que la social-démocratie est en crise dans toute l’Europe et qu’elle n’arrive pas à se renouveler, en panne désespérément d’idées nouvelles et d’intellectuels. Les bribes que l’on connait de son programme en sont le reflet. Premier exemple : il propose de supprimer les cotisations salariales finançant l’Unedic et de relever de 1,7 point le taux de la CSG. C’est une double erreur. D’une part, en fiscalisant le financement du chômage il en modifie profondément la logique remplaçant le principe de l’assurance par la solidarité par l’impôt avec au final une diminution généralisée des indemnisations, les cadres en première ligne, pour pouvoir financer ses propositions coûteuses. D’autre part, Le choix de l’augmentation de la CSG est un mauvais choix. Plutôt que de fiscaliser l’assurance-chômage, il vaudrait mieux baisser les charges qui pèsent sur le travail en retirant celles qui ne lui sont pas liées comme le financement de la politique familiale, et en faisant le choix du transfert vers la TVA. Je ne reviens pas sur la démonstration faite en son temps par Jean Arthuis qui nommait l’opération « TVA-sociale ou anti-délocalisation ». Si Macron fait le choix de la CSG, c’est parce qu’il est sous la pression intellectuelle de la gauche qui interdit de toucher à la TVA, cet impôt « injuste », ce qui reste à démontrer quand il ne s’agit pas des produits de première nécessité. N’en déplaise, il ne fait que renforcer l’Etat-providence avec l’idée que la protection sociale est un droit garanti par l’Etat, payé par l’impôt. On est loin d’une « libéralisation » de l’économie. Second exemple : il se veut le chantre de la nouvelle économie. Il a d’ailleurs dans son fan club Xaviel Niel (Free), Marc Simoncini (Meetic) et la galaxie des start-upers, qui l’aident à lever des fonds, aussi bien aux Etats-Unis qu’à Londres et en France. Mais que propose-t-il pour la financer ? Si nous avons beaucoup de « starts », les « upers » vont se développer ailleurs, faute de capitaux disponibles en France. Sur le sujet, on trouve peu de choses. Il est improbable, comme le réclame Christian Saint-Etienne, économiste proche des centristes, qu’il mette toute la fiscalité sur le capital et sur les sociétés à 25% (aujourd'hui à 60%), ce qui permettrait de financer « l’iconomie » qui a déjà modifié 40% de notre économie.
Son positionnement est avant tout une posture de marketing.
Ce grand jeune homme au désir souverain a choisi d’être "le syndic de faillite du PS". Le mouvement En Marche, aux adhésions gratuites, lui a permis de rester à distance de la guérilla qui est en train de broyer le PS, et au-delà, disloquer la gauche. Il n’avait que ses chaînes à perdre… Avec un risque nul, le pari était gagnant à tous les coups. Il lui restait à occuper le « centre » : c’est pertinent sur le plan idéologique, parce que c’est dans l’air du temps, et inconfortable sur le plan politique. Le problème, c’est que la bipolarisation imposée par les institutions, présidentielle et parlementaire, si elle est troublée par l’irruption de l’extrême-droite populiste, n’a encore jamais permis à un tiers parti de tirer son épingle du jeu. Le centre n’existe que quand il penche à droite. Comme le disait Pierre Méhaignerie après l’expérience Rocard, avec la gauche on est toujours cocu, « elle prend et ne rend pas ». D’où les tiraillements vécus aujourd’hui par l’UDI et le Modem. Or Macron fait le même choix que Lecanuet, Poher, JJSS ou Bayrou : celui de l’équidistance entre la droite et la gauche. Depuis 1962, ça n’a jamais marché. Macron a certes une petite carte à jouer, sa capacité d’empathie peut aider, mais les forces traditionnelles de la politique française ont encore une capacité de résistance comme l’a démontré la primaire de la droite, surtout en présence d’une forte droitisation de la société. Mais voilà, c’est le seul créneau qu’il puisse occuper. A gauche c’est l’encombrement et la droite s’est reconstruite en opposition à Hollande. Reste un centre un peu éparpillé comme seul espace en mal de leadership. Le choix n’est pas de conviction, il est de stratégie. Le marketing est conçu pour dégager la place.
Emmanuel Macron est donc un « client » qu’il ne faut pas négliger. Sa popularité repose pour l’instant sur « une majorité de papier », mais elle pourrait se fortifier dans les urnes si à droite on lui laisse trop d’espace et si à gauche, on se déchire. Il y a entre un quart et un tiers de l’électorat qui est en déshérence, avec les déçus du hollandisme, les idolâtres de Sarkozy, les juppéistes amers et tous les laisser pour compte du quinquennat. De quoi faire basculer un scrutin. Encore faut-il ne pas se fier aux discours flous et attrape-tout. Pour l’instant, c’est la tactique choisie par Emmanuel Macron.
On aura encore l’occasion de revenir sur le sujet, le personnage n’ayant pas fini de faire parler de lui.
Je ne m'inquiète absolument pas mais après leur Juppéolatrie, la Macronmania des merdias, m'exaspère ! Cela m'énerve et me casse les oreilles de les entendre coasser tels "Les grenouilles 🐸 réclament un Roi 👑 "
https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Les_Grenouilles_qui_demandent_un_Roi
Clin d'œil à un Giscardien, un certain Daniel Houlle, qui s'exaspérait en son tempd en plein conseil national du PR de la barrolatrie de l'UDF ...
Gardons notre calme car on sait comment l'histoire s'est terminée !
Rédigé par : LAMERIE | 08 janvier 2017 à 20:59