PUISQU’ON VOUS DIT QU’IL N’Y A PAS D’ACHARNEMENT !
03 juillet 2014
L’ancien président de la république mis en examen pour corruption active et trafic d’influence. Une réalité qui dépasse la fiction. Avec ses démêlés judiciaires, il y a de quoi écrire un roman. Car avec la mise bout à bout des affaires dans lesquelles la justice veut l’impliquer, on a l’impression de sombrer dans une histoire directement issue du cerveau d’un écrivain. On y trouverait à souhait des juges partisans en connivence avec un pouvoir politique avide de vengeance, des procédés inavouables, des procédures au tempo soigneusement calculé, et, évidemment des supputations sans preuves. Un but : empêcher le retour en politique d’un citoyen redevenu « ordinaire » après avoir exercé les plus hautes fonctions.
Je vais donc me faire conteur pour vous relater cette sombre histoire. Il s’agit évidemment d’une fiction. Toute ressemblance avec une situation existante serait pure coïncidence.
« En garde à vue ! Vous allez répondre de vos actes ».
15 heures d’interrogatoire. De quel criminel s’agit-il ? D’un ancien président à qui jusqu’à présent on n’a rien trouvé à reprocher. Garde à vue quand même ! Il doit être traité comme n’importe quel justiciable. Logique, non ? Comme dans un roman il faut forcer le trait, on va lui infliger un régime judiciaire bien corsé pour mettre l’eau à la bouche du lecteur. Les médias en profitent pour ressortir des placards toutes les affaires dans lesquelles son nom est cité, ne serait-ce qu’à la marge, même celles où il a été disculpé.
« Si les juges agissent ainsi, c’est qu’ils ont entre leurs mains du lourd ! »
Alors tant pis pour la présomption d’innocence, le secret de l’instruction. Dans la vraie vie on n’en fait pas cas, alors, pensez, dans une fiction. Que lui reproche-t-on ? Bien des choses apprises par des écoutes téléphoniques. Ah, les enregistrements de conversations et les écoutes : voilà des filons inépuisables de possibles procédures. Déjà l’affaire de la richissime milliardaire, aujourd’hui éteinte, avait commencé par des révélations tirées d’enregistrements clandestins effectués par son majordome. Et on avait réussi à extrapoler une possible implication de notre homme jusqu’à le mettre en examen pour finalement aboutir à un non-lieu. Palpitant, non ?
Où en est-on ? Figurez-vous que son avocat, homme compétent et avisé avait cherché à connaître l’évolution des enquêtes concernant son client et autres renseignements utiles pour la défense. C’est l’usage dans la profession, mais là, non. Interdit d’être ami avec un juge qui pourrait donner des indications. C’est là que les écoutes téléphoniques interviennent : au mépris des règles ordinaires de l’instruction, pendant de longs mois (on est dans un roman) l’avocat et son client sont espionnés par des policiers qui se relaient 24H sur 24. Les droits de la défense sont bafoués : vous êtes certain ? On ne trouve rien de ce qu’on cherche. Il s’agit d’un financement occulte lointain qu’un site de journalistes a dévoilé et pour lequel on cherche des preuves. On ira jusqu’à perquisitionner chez l’avocat, fouiller son lave-linge, démonter sa bibliothèque… vous allez me dire que j’exagère, que ça fait pas réel ! Dans un roman les faits doivent rester plausibles.
Alors, on met sur écoutes…
Intéressantes les écoutes, parce qu’elles vont permettre de trouver un prétexte pour une nouvelle implication de ce personnage qui échappe sans cesse à ses poursuiteurs. Peu importe que les faits ne soient pas constitués. Avec un peu de mauvaise foi, on va mettre en relation ce qui peut constituer un grave délit de trafic d’influence. L’essentiel n’est pas de condamner, mais de poursuivre. Car dans son cas, le soupçon est aussi destructeur que l’acte délictueux établi. Et peu importe que la procédure débouche à nouveau sur une impasse ou un non-lieu. Alors on organise un tourbillon judiciaire : rumeur, accumulation, mensonges. Et de l’accumulation nait la présomption d’une culpabilité puisqu’un honnête citoyen ne serait pas ainsi incriminé dans autant d’affaires. Il est forcément coupable de quelque chose : « il n’y a pas de fumée sans feu ! »
De l’instruction à l’instrumentalisation.
Le roman ne serait pas complet s’il n’y avait pas une dimension politique. Et bien sûr, le pouvoir politique est impliqué : il est tenu informé. Il n’a pas besoin de donner des consignes. La connivence idéologique et l’envie de faire sa fête à l’intéressé en tiennent lieu et place. Ce n’est pas par hasard si ce sont ces juges-là qui instruisent, ils ont été nommés pour ça. On peut alors mettre en avant le principe de la séparation des pouvoirs et de la présomption d’innocence, en sachant fort bien que ni l’un ni l’autre ne sont respectés. Pour faire bonne mesure, on met dans le scénario un ministre pris en flagrant délit de mensonge en plein JT de 20H et une haute personnalité qui se livre à des confidences dans ses réceptions : il sait tout ce que fait l’énergumène en question. Voilà du romanesque !
Et le roman se termine comment ? Attendez, on n’est pas au bout : la victime va se débattre et va chercher à en découdre avec ses adversaires. Et on peut s’attendre à des rebondissements, car son tempérament ne l’encline pas à l’abattement, et ses atouts sont nombreux.
Une petite idée de la suite : cherchez à qui profite le crime…
Mais enfin, laissez la justice faire sereinement son travail, puisqu’on vous dit qu’il n’y a pas d’acharnement !
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