LE BLUES DU PRESIDENT
14 avril 2014
Ce qui est étonnant dans la distorsion du niveau de popularité de Hollande et de Valls traduite par les chiffres du baromètre Ifop, c’est que personne n’a su en traduire la signification. Pour le locataire de l’Elysée, bien entendu. On peut gloser autant qu’on veut sur l’aspect historique d’une situation inédite mesurée par 40 points d’écart en faveur de Matignon, les tensions supposées que cela peut créer, l’avantage que pourrait en tirer le Premier Ministre…. Personne n’a osé dire la vérité : avec un tel désaveu de l’opinion publique, et une courbe, qui comme celle du chômage refuse de s’inverser, les Français signifient à l’intéressé qu’ils ne veulent plus de lui ! Et qu’il serait bien inspiré d’en tirer les conséquences.
Jusqu’où ira-t-il pour nous faire prendre des vessies pour des lanternes ?
La nomination de Manuel Valls sent le Joker pour un Président en survie. Le gouvernement de combat qu’il a nommé, apparait surtout constitué de soldats en ordre de bataille pour combattre… le Premier Ministre.
Autre détail inquiétant : l’équipe gouvernementale souffre du syndrome de Stockolm. Avez-vous remarqué, depuis la débâcle des municipales et la déferlante bleue, comme le bleu est à l’honneur chez les ministres : robes, cravates, chemises…. Au point que les électeurs vont en perdre leur latin. Il n’y a guère que Sapin qui a résisté avec ses chaussettes … roses, mais on ne les voit pas. A croire que le rose et le rouge, autrefois si prisés à gauche sont devenues des couleurs porteuses de poisse.
Il en faudra plus pour redresser le pays.
Justement, trois économistes réputés proches de la gauche viennent de publier un bouquin qui s’intitule : « changer de modèle ». C’est peut-être ça l’explication de la couleur des cravates. Le portrait qu’ils font de la situation de la France est alarmant : baisse du PIB par habitant de 5 points, de notre balance courante de 2 points de PIB, taux de marge des entreprises, taux d’emploi, … tout y passe avec cette conclusion alarmante : « La France apparaît donc comme un des pays les moins capables de contrôler la dynamique de sa dette publique, malgré un niveau de prélèvement parmi les plus élevés, sinon désormais le plus élevé ! »
Tout ça on le savait. Ce qui est original, pour des économistes de gauche, c’est qu’ils font ensuite un procès en règle du « keynésianisme » qui constitue le bréviaire de la « gauche gestionnaire ». C’est Montebourg, pourtant notre ministre de l’Economie qui en prend plein son kilt ! La cause de nos maux c’est cette croyance dans l’intervention de l’Etat pour relancer la demande par l’accroissement des dépenses publiques, et la préférence pour la réduction des déficits par l’impôt plutôt que par des économies. Ils détruisent aussi l’idée fétiche de notre gauche française que la fiscalité est la seule arme pour combattre les inégalités et ce théorème sorti de nulle part selon lequel le capital productif devait être imposé comme le travail.
Leur stratégie alternative, plus en accord avec l’état économique du monde contemporain va à l’encontre de ces idées fausses et repose sur l’économie de l’offre avec laquelle tant de nos socialistes ont un blocage. Tout est clair : concurrence, mobilité sur le marché du travail, développement de l’économie du savoir, réduction des déficits et de la dette publique. Mais aussi : réforme de l’Etat, allègement des effectifs de fonctionnaires, formation professionnelle efficace, code du travail revu, et, cerise sur le gâteau : transfert des charges sociales sur la TVA ! Crise d’urticaire garantie et pour le coup, la rougeur avec.
Il faudra bien y venir. Les « pactes » hollandais ne sont que l’amorce de ce qu’il faut faire. Voilà pourquoi l’Europe serait bien inspirée de refuser à la France de nouveaux délais pour rentrer dans les clous de l’Euro. Ce serait autoriser une nouvelle fuite en avant dans les dépenses, qui transparaît dans le « pacte de solidarité ». De l’argent à crédit distribué en pure perte. Seule la contrainte obligera nos gouvernants à entreprendre les réformes nécessaires. Car notre pays est désormais le plus exposé et le plus vulnérable à une attaque sur sa dette qui relancerait la crise de la zone euro, car son montant de 1925 milliards d’euros excède les capacités du mécanisme européen de solidarité (950 milliards, dont 450 déjà engagés). D’ailleurs, le « risque français » est le principal frein à une stratégie européenne plus favorable à la croissance et à l’emploi.
Mais ceux qui sont au pouvoir sont-ils les mieux placés pour mener une telle politique, qui heurte tant leurs convictions ? Bah, ils se sont bien habitués aux cravates bleues …
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