LES ELECTEURS CENTRISTES EXISTENT-ILS ENCORE ?
11 octobre 2011
Il en est des électorats comme de la vie : ils sont mortels. Ainsi, l’électorat du parti communiste s’est réduit à peau de chagrin avec la disparition des « cols bleus », c’est-à-dire de la classe ouvrière dans notre société robotisée. N’ayant pas su s’adapter à temps, il n’a pas su capter la partie des « cols blancs » qui constituent la base des employés du tertiaire.
Du MRP au CDS et à l'UDF.
On peut imaginer qu’il en est de même pour l’électorat dit du « Centre ». Ses gros bataillons étaient historiquement composés des électeurs catholiques qui se retrouvaient au sein du MRP au lendemain de la 2ème guerre mondiale. Ils alimentaient le scénario de la « troisième voie » entre la gauche socialiste et communiste et la droite conservatrice et gaulliste. Il survécut sous la Vème République avec le parti démocrate-chrétien qui changea plusieurs fois d’appellation, et évolua en « démocratie sociale » avec le CDS. Le projet de « personnalisme communautaire », inspiré d’Emmanuel Mounier, restait imprégné de philosophie chrétienne : c’était le parti de jean Lecanuet. Mais déjà son influence déclinait en potentiel de voix, c’est ce qui conduisit Giscard à fédérer les différents courants modérés qui se situaient entre la gauche et la droite pour tenter de consolider un bloc central au sein de l’UDF.
"chaque fois que je vais à l’enterrement, je perds un électeur".
Le drame, c’est que les églises se vidant, et les électeurs centristes mortels, cet électorat a fondu. Il a longtemps résisté dans l’ouest catholique, mais, comme disait Hubert Grimault, « chaque fois que je vais à l’enterrement, je perds un électeur ». la déchristianisation n’a pas permis de le remplacer. La création de l’UMP s’est en partie appuyée sur ce constat. La persistance de François Bayrou à vouloir le maintenir en vie a surtout contribué à faire battre les candidats UMP avec un discours radical d’opposition, dès les régionales de 2004, sans en tirer vraiment profit pour lui-même. La création du Modem et son score de 2007 sont des trompe-l’œil. Les leaders charismatiques de l’ex-UDF ont fui son « hypercentrisme », contribuant à éclater l’offre politique centriste en une mosaïque de groupuscules illisibles, véritable coup de grâce pour un électorat déjà réduit. D’autant plus que François Bayrou avait bénéficié d’un report de voix de gens de gauche qui ne voulaient pas voter pour Ségolène Royal ; la présidentielle terminée, ils sont retournés à leur vote traditionnel sur les candidats du PS. Ainsi s’expliquent les mauvais résultats du Modem aux dernières élections. Ainsi s’explique aussi l’échec de Jean-Louis Borloo et de son ARES.
Mais alors où sont passés les centristes ?
Il est facile de constater que les partis qui subsistent : Parti Radical, Nouveau Centre, alliance centriste, Parti Démocrate-Chrétien de Christine Boutin, Modem, Cap 21, ne captent qu’une frange minime des électeurs et rassemblent des effectifs d’adhérents bien maigres. Ils n’existent que par la volonté de quelques notables. Les électeurs sont donc allés ailleurs : beaucoup ont été captés par les mouvements écologistes et l’erreur des verts est d’avoir choisi la voie du repli sectaire avec Eva Joly. D’autres ont été tentés par la gauche gestionnaire, notamment dans nos villes. De fait, le PS est devenu un parti de notables bobos dont l’électorat modéré constitue un élément du socle.
Le centre de conviction a fait place à un vote de posture.
Le positionnement au centre est donc devenu plus une posture conjoncturelle qu’un vrai choix politique reposant sur une vision philosophique ou sociétale. Il est possible que si le candidat de gauche est obligé de se gauchir davantage à cause du poids de Montebourg dans la primaire, et les Verts adoptant des positions plus gauchistes qu’écologiques, s’ouvre à nouveau un boulevard à François Bayrou, qui gagnerait encore une fois son pari. Et sa "compatibilité" avec Manuel Valls n'est pas un hasard : il s'agit de capter les orphelins du 1er tour de la primaire. Ce serait quand même un score obtenu plus par dépit que par adhésion et qui serait, comme en 2007, sans lendemain, et probablement sans en atteindre les mêmes sommets.
Raison de plus pour l’UMP de s’organiser pour élargir son offre vers le centre.
Ce constat de perte d'électeur à chaque enterrement ne se vérifie pas en Corse où selon la tradition , les morts continuent de voter !
J'ai connu une femme, veuve depuis 15 ans et qui ralait après son défunt mari parce qu'il n'était pas venu l'embrasser après avoir été voter...
Rédigé par : jibe124 | 12 octobre 2011 à 08:02