NOME : A QUOI JOUE-T-ON ?
15 avril 2011
On parle d’un nouveau report au 1er janvier 2012 de l’application de la loi NOME, initialement prévue au 1er juillet 2011, c’est-à-dire à trois mois des Présidentielles. Autant dire qu’on veut l’enterrer !!
De quoi s’agit-il ? La loi NOME permet de se mettre en conformité avec Bruxelles en permettant la concurrence sur le marché de l’électricité notamment par l’obligation qui est faite à EDF de vendre à ses concurrents à un prix raisonnable un volume limité d’électricité produite par ses centrales nucléaires. Les opposants à la concurrence, CGT en tête, ont tout fait pour faire croire aux Français qu’il faut y voir la cause de l’augmentation des prix de l’électricité, ce qui relève du mensonge. Mais Henri Proglio n’est pas innocent dans cette affaire, et en la matière il est en train de jouer le rôle du mauvais génie auprès du Président. On comprend qu’il défende les intérêts de son entreprise, mais il est inacceptable qu’il se dresse contre la loi votée par le Parlement, contre la réglementation européenne qui pourrait infliger à la France de lourdes pénalités et contre l’intérêt du consommateur.
Reculer la date de mise en application de cette loi c’est courir plusieurs risques : en premier de déclencher les poursuites de Bruxelles qui a accepté un compromis qui ne serait plus respecté, ensuite c’est enterrer la concurrence car les fournisseurs concurrents d’EDF ne pourront survivre et mettront la clé sous la porte, enfin c’est désavouer la volonté qui s’est exprimée par le vote des députés et des sénateurs.
Les prix de l’énergie vont augmenter et sans que la concurrence n’y soit pour quelque chose. C’est là une vérité inéluctable et il faudra bien qu’elle éclate un jour. il convient d’arrêter de mentir aux consommateurs en le prenant, qui plus est, pour des irresponsables : empêcher la concurrence de jouer c’est se priver du meilleur moyen pour freiner cette augmentation.
Les prix de l’énergie augmenteront dans tous les cas de figure (prise en compte des coûts de sécurisation du nucléaire depuis Fukushima mais surtout en raison de l’augmentation des prix du pétrole). On sait qu’Henri Proglio voudrait faire payer par les clients les investissements qu’EDF va devoir affronter du fait du vieillissement de son parc de production nucléaire, alors que cet effort doit revenir en priorité à ses actionnaires, par autofinancement, endettement ou cession d’actifs. En cas de renoncement à la loi NOME, les citoyens-consommateurs seront dans tous les cas les pigeons : ils paieront avec leurs impôts les millions (les milliards) d’euros d’amendes infligés par Bruxelles, ils paieront encore pour des investissements qui sont des charges indues pour eux pendant que les actionnaires toucheront des dividendes, ils paieront pour le défaut de concurrence qui laissera le champ libre à un seul fournisseur. Les tarifs régulés ne pourront faire longtemps illusion, alors bonjour la facture !
Le seul moyen de limiter les effets de cette hausse est d’offrir aux consommateurs des offres alternatives en permettant à une véritable concurrence, par les prix mais également en termes d’innovations technologiques et de services, d’exister. Si jamais la mise en œuvre de la loi NOME, initialement prévue au 1er juillet 2011, devait être décalée, la concurrence en France notamment sur les marchés de masse ne se développera pas et ses bienfaits pour les consommateurs ne se produiront jamais.
Et s’il y a report, c’est peut-être pour permettre à EDF de sortir son audit sur la sécurisation des centrales nucléaires qui « démontrera forcément » que la loi NOME n’est plus d’actualité, permettant alors au gouvernement de reporter sine die son application. Une supercherie !
Si, comme on le pense, le Président prenait cette décision, cédant aux sirènes de son « ami » Proglio au mépris du vote du Parlement, il commettrait une grave et double erreur : stratégique sur le plan du développement du marché de l’énergie et tactique car il enverra alors un signal de renoncement que beaucoup interpréteront comme une lâcheté. Ce serait une réelle déception.
Commentaires