LA COURSE EN TETE
22 mai 2009
Le vote
sanction est à la mode. C’est l’apanage de tous les scrutins dits « secondaires »
par rapport au deux primordiaux que sont (encore) les législatives et la
Présidentielle. L’élection au parlement européen n’échappe pas à la règle. Mais
curieusement l’UMP semble quand même tirer son épingle du jeu. Sauf surprise,
au terme d’une campagne qui, si elle n’est pas Waterloo, est quand même « morne
plaine », le parti présidentiel arrivera largement en tête devant toutes
les autres listes : il est généralement crédité de scores qui oscillent
entre 27 et 33%. Un atout dans un scrutin proportionnel à un tour. L’union lui
profite, même s’il ne faut pas surestimer l’apport centriste du « Nouveau
Centre » ou de centre gauche de la « Gauche Moderne ».
C’est que
la multiplicité des listes qui proposent un vote sanction les conduit à l’émiettement
des voix, et les sondeurs nous indiquent que seulement 39% des Français sont prêts
à utiliser leur bulletin de vote à cette fin. Il y a donc une neutralisation
des divers votes sanctions. Le PS et le Modem sont sur la même ligne pour
instruire le procès des deux ans de Sarkozy, mais ils campent sur un électorat
qui se recoupe en partie. Et la ressemblance des discours, y compris sur l’Europe
n’est pas faite pour aider l’électeur à s’y retrouver. Le vote protestataire
est morcelé aussi bien à droite qu’à gauche. Le FN doit partager ses voix avec
des listes dissidentes, et si la récession apporte un stimulant à l’extrême
gauche (14 à 15,5% des voix), les listes qui s’en réclament sont pléthores. Même
chez les souverainistes les choses se compliquent puisque De Villiers avec « Libertas »
est concurrencé par Dupont Aignan. Pour résumer, on voit bien deux attitudes
chez les électeurs, toutes deux nées de la crise : il y a ceux qui ont
pris conscience du rôle que l’Europe peut jouer, en grande partie grâce aux six
mois de présidence Sarkozy, qui sont tentés de voter UMP, et ceux qui mettent
tout sur le dos du capitalisme et qui voteront à gauche de la gauche. Entre les
deux, c’est un peu le marais où les idées s’enlisent.
Même la
faible mobilisation des électeurs profite au parti majoritaire, puisque sur la
moitié des Français sûrs de voter, c’est le vote des plus de 60 ans (63% de
votants) qui l’emporte sur celui des jeunes (30% des moins de 35 ans). La
sociologie de l’électorat qui va se déplacer le 7 juin est donc plutôt
favorable à la droite.
L’autre
caractéristique de ce scrutin, c’est le manque de passion du débat. Les sujets
qui attisaient les passions sont derrière nous, et même la problématique de l’adhésion
de la Turquie n’arrive pas à réveiller une campagne paisible. Personne ne s’intéresse
plus au fédéralisme pour en faire un étendard (même BAYROU, c’est tout dire), il
n’y a même plus de cabris pour sauter en criant « Europe », « Europe »,
comme brocardait le Général. Jean-Pierre Chevènement en est réduit à appeler au
vote blanc, c’est dire si celui qui était naguère l’un des plus critiques sur
la construction européenne est absent de la campagne. Quant aux souverainistes,
ils sont aussi en perte de vitesse et sont promis à des scores en retrait par
rapport à la précédente édition. Avec la crise, leur discours suscite la
méfiance au moment où un certain nombre d’électeurs ont compris que l’isolement
pourrait être fatal. L’attitude des Français à l’égard de l’Europe est assez en
phase avec ce débat apaisé : seuls 21% d’entre eux ont une image « négative »
de l’Europe, alors que 46% en ont une image « positive ». Mais 45% ne font pas confiance à l’Union Européenne
comme institution. Comme on le voit, ce n’est pas vraiment l’enthousiasme. C’est
bien l’indifférence que l’on ressent.
Enfin, le score de l’UMP ne doit pas nous faire rêver non plus. Si on peut s’en satisfaire dans un scrutin proportionnel qui éparpille les voix, le problème est posé pour les autres élections : dans un scrutin majoritaire à deux tours, le danger pourrait venir de la coalition des mécontents. Il faudra que, d’ici là, l’UMP trouve l’apport de voix complémentaire pour franchir la barre des 50%.... à commencer par 2010 aux Régionales.
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