POUR REFLECHIR ET POUR COMPRENDRE …..
26 février 2009
A
l'occasion du trentième anniversaire du magazine Mieux Vivre Votre Argent, deux
de ses anciens rédacteurs en chef livrent leur analyse de la crise financière
actuelle. Je les trouve très intéressants tous les deux et vous les livre pour
alimenter votre réflexion personnelle.
Jean-Marc Sylvestre
Rédacteur en chef de Mieux Vivre Votre Argent de 1981
à 1983. Aujourd'hui, directeur adjoint de l'information de TF1 et LCI.
“Le retour au bon sens”
« Cette crise ramènera le monde au bon sens. Avec trois choses élémentaires
pour aborder l'avenir avec plus de sérénité et de sécurité.
La première porte sur
les rendements. Ils ne peuvent être durablement supérieurs au taux de
croissance des richesses produites. Certes, un investissement peut – sur un
secteur particulier et pendant un laps de temps court – délivrer une
rentabilité de rêve à plus de 15 %. Mais croire que ce rendement peut être
durable relève de la naïveté ou, plus grave, de la complicité d'escroquerie.
La deuxième chose
élémentaire, ce sont les limites de la gestion collective. Quand il s'est agi
de produits simples et transparents, l'épargnant n'avait pas de raison de
s'inquiéter. Mais quand on a commencé à lui proposer des «Sicav dynamiques au rendement supérieur grâce à une gestion de risque
maîtrisée», il aurait dû s'émouvoir... La gestion collective a mis au point
des produits hypersophistiqués dont le seul but était d'amortir et de dissimuler
les risques. Elle a inventé d'appétissants mille-feuilles, mais qui ont conduit
les fonds à la faillite et l'épargnant à la ruine. La gestion collective va
devoir retrouver ses bases, sa simplicité, ses règles de prudence.
La troisième chose
revient à ménager la responsabilité individuelle de l'épargnant. C'est à lui de
mesurer ses risques en permanence. Il ne peut pas déléguer cette fonction à un
opérateur dans lequel il n'a de toute façon plus confiance. Mais pour mesurer
ses risques, il doit en être capable. Ce qui n'est pas garanti. Si l'épargnant
se méfie à juste titre des produits collectifs, il va devoir se regrouper au
sein d'associations de défense de l'épargnant. Les financiers de New York ou de
Londres ont disjoncté parce qu'ils savaient contourner la réglementation,
l'utiliser et même ils savaient déjouer les contrôles internes. Mais ils
n'avaient aucun contre-pouvoir à l'extérieur de leur établissement. Le seul
contre-pouvoir, c'est celui de l'épargnant. C'est d'ailleurs à lui de demander
que les gendarmes des marchés fassent leur métier.
Le système financier
n'a pas à faire de morale, il doit être performant et efficace, tandis que ses
acteurs doivent avoir des comportements moraux et éthiques. Il faudra plus de
bon sens, plus de régulation, moins de risques et plus de transparence. Un peu
de morale en plus ne fera de mal à personne. »
François De Witt
Rédacteur en
chef de Mieux Vivre Votre Argent de 1996 à 2003. Chroniqueur de France Info
jusqu'en décembre dernier. Aujourd'hui, administrateur de l'Afer et président
de l'association Finansol.
“Professionnalisez-vous !”
« En dehors d'une aversion sans doute historique au risque, que
restera-t-il de la crise financière, puis de la tempête économique que nous
traversons ? On nous dit, comme d'habitude dans de telles circonstances, que «rien ne sera plus comme avant», que les
marchés fous des «dérivés» devront
être encadrés... La crise pousse aussi à l'autocritique. N'a-t-on pas été «trop loin» (sous-entendu dans la voie
de la spéculation) ? Les moralistes (qui abhorrent le risque) prennent leur
revanche sur les cupides. Pour combien de temps, tout est là, car la cupidité
est ancrée au fond de la psyché humaine.
Autant dire que le
rebond aura lieu. Même si tous les placements à risques sont aujourd'hui
vulnérables et sans visibilité. C'est vrai des actions, mais aussi des
obligations, comme l'illustrent les taux d'intérêt astronomiques des émetteurs
privés. C'est vrai aussi de l'immobilier, à ceci près que l'effondrement de la
pierre papier n'est que le signe annonciateur de la lente baisse des prix de
l'immobilier physique qui ne fait que commencer. C'est vrai, enfin, des
matières premières, dont l'effondrement des cours a précédé la récession.
Alors que faire ? Il
convient plus que jamais de répondre à la question de base : «Quel montant de mon patrimoine – 10, 20,
50 % – suis-je prêt à risquer en investissant sur des supports dont je ne
connais pas d'avance la performance ?» Ensuite, il faut opérer un
tri : d'un côté, les placements sans risque – livrets, épargne-logement,
assurance vie en euros – et, de l'autre, tout ce qui reste. Y compris
l'immobilier. Mais il faut éviter à tout prix de mélanger les genres comme le
font les fonds à capital garanti ou les «profils»
des contrats d'assurance vie. Troisième étape : identifier le type de
risque qui convient à notre tempérament : notre appât du gain nous
porte-t-il plutôt vers les obligations, vers les actions, vers les matières
premières, vers l'immobilier ? Si aucun de ces «supports» ne vous ressemble,
alors, de grâce, évitez tout placement à risques. Et, dans le cas contraire,
professionnalisez-vous ! Vous n'en commettrez pas moins des erreurs, mais vous
aurez aussi la satisfaction d'avoir fait quelques bons choix en toute
connaissance de cause. »
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