HISTOIRE
LA CORDEE BARNIER SE RENFORCE
LA FIN DU "QUOI QU'IL EN COÛTE" ?

INFLATION : NI SURPRENANTE, NI EPHEMERE !

étau des taux

 

Tout augmente. La flambée des prix concerne l’énergie, les denrées alimentaires, les biens durables.  On voudrait nous faire croire que la hausse est provisoire, pour nous rassurer. En fait c’est illusoire !

Energie.

Le baril de pétrole continue à progresser. Il a atteint les 80$. Une première depuis la crise du Covid. Rappelons qu'il s'était totalement effondré au début de la pandémie, avec des cours qui avaient même été négatifs pendant quelques heures. Voilà une flambée des prix malgré la hausse de la production décidée par l'OPEP +.  Et cela n’est  pas une surprise : les  producteurs étranglés pendant la  pandémie ont besoin de  se refaire et entendent profiter de l’explosion de  la demande due à la reprise.

Les prix du gaz et de l’électricité flambent depuis le début du mois sur les marchés « spot ». A cause d’un goulot d’étranglement nous dit-on, dont Poutine serait l’auteur pour faire du chantage  sur l’achèvement du gazoduc Nord Stream 2, que Biden veut empêcher.  Peut-être ! Surprenant ? Pas  vraiment, en fait les cours du gaz ont commencé à flamber au début de l’année avec une multiplication par trois du prix et idem pour  l’électricité avec une multiplication par deux ! Depuis  la hausse du cours du gaz s'accélère sur les marchés internationaux : 300% de hausse depuis le début d'année. À l'approche de l'hiver, les stocks des pays européens sont à leurs niveaux les plus bas avec  pour conséquence directe que le prix du gaz qui va augmenter de 12,6% en France le 1er octobre. Sur l'année 2021, la hausse est de 58,9%.

Les cours du bois ont aussi flambé, puis ceux du café, puis ceux du blé (mauvaise récolte), puis ceux du sucre… La faute à trop d’eau ou pas  assez. Et surtout la Chine achète tout à tour de bras pour faire d’immenses stocks !

Shipping (comprenez : transport maritime).

Les  prix du transport ont augmenté de 20% pour le mois d’août sur un marché complètement déstructuré. Non seulement les coûts augmentent, mais les bateaux manquent au point que l’on craint pour les livraisons de jouets et de meubles. Mais ce sont des augmentations qui se répercuteront inévitablement sur les prix.  Et ne parlons pas des semi-conducteurs dont le « goulot d’étranglement » freine toujours les usines  d’automobiles du monde entier et donnent un coup de frein à la croissance. Une 2008 commandée aujourd’hui vous sera livrée  au mieux en février. On se bat pour  avoir des puces.  Alors forcément ça « gratt »e du côté des gouvernants.

C’est « provisoire » » !

Ce serait une poussée provisoire due à la pandémie qui a contingenté les productions et permit d’accumuler de l’épargne qui se  libère partout  en même temps. Des facteurs conjoncturels incontestables, sauf que partout les changements structurels sont à l’œuvre, faisant augmenter l’inflation « sous-jacente » partout. Elle est à 4% aux Etats-Unis. Elle galope au sein  du G20  au rythme de 4,5%  (3ème trimestre). Inévitablement les revendications salariales commencent pour maintenir le pouvoir d’achat. La catastrophe serait de tomber dans la spirale prix-salaires.  La France s’illustre d’ailleurs avec un feu d’artifice de décisions et de propositions de hausses de rémunération des fonctionnaires et des salaires, sans parler de  la revalorisation du smic au 1er octobre.

Non, le mouvement ne sera pas éphémère en raison des impératifs fondamentaux : la nécessité de mieux payer les producteurs notamment alimentaires, celle d’investir massivement dans les technologies et dans la transition climatique. Le relèvement des prix de l’énergie n’est qu’au début du  mouvement  qui s’est enclenché. Il faut des hausses substantielles pour que les producteurs, ici et dans les pays pauvres soient mieux rémunérés et investissent dans la qualité durable… Les anticipations inflationnistes s’ajustent sur le niveau de la hausse des prix parmi tous les acteurs de l’économie, consommateurs, producteurs, distributeurs, décideurs publics, parce qu’elles prennent en compte les transformations profondes du système et des politiques économiques : exemple de la Chine qui n’est plus un  pays à bas coût, qui se ferme et cherche à conforter les revenus de sa classe moyenne.

Les banques centrales sur le fil.

Les banques centrales continuent à mettre de l'huile sur le feu avec des injections massives de liquidités et le maintien de taux artificiellement bas. Certains  pensent que les facteurs structurels d’avant crise poussant à la  déflation continueront de jouer une fois le « pic » de surchauffe passé. Il faut en effet éviter à tout prix que les  banques centrales serrent la vis et remontent les taux. Mais les taux longs commencent à remonter. Les taux d'emprunt américain à 10 ans ont atteint les 1,5% et les taux d'emprunt français à 10 ans ne sont plus négatifs. Cependant, les torrents de liquidités déversés dans les pays développés, par les banques et les budgets publics, avec lesquels, par exemple,  M. Macron fait sa campagne électorale à coups de centaines de millions chaque jour, face à une production stagnante ne peuvent trouver tôt ou tard d’autre débouché qu’une forte hausse des prix. La  résurgence  de l’inflation aidera à gérer le surendettement mais ne peut ni générer des gains de productivité ni réduire les inégalités. Il faut craindre que les marchés réagissent aux anticipations avec d’autant plus de vigueur que leur réveil sera tardif. Le risque c’est qu’à partir de 2023 on ait un effet de ciseau entre l’inflation et la baisse de la croissance sur fond de hausse des taux. Le scénario qu’il faudrait éviter car il conduirait tout droit au défaut en chaîne des Etats et des entreprises surendettés. Or  la France ne parvient même plus à équilibrer ses comptes extérieurs : le déficit de  notre balance des  paiements, même en 2020, constitue une dégradation historique, avec  un décuplement du déficit des échanges de biens industriels.  La  France dépense plus qu’elle ne produit et s’avère incapable de pourvoir à ses propres  besoins et notre  indépendance nationale est infiniment  plus critique, avec un endettement à 120% du PIB que celle du Japon  avec son ratio de dette à 266% du PIB, laquelle est exclusivement détenue par des  acteurs nippons, ce qui est loin d’être notre situation. La  monnaie de la BCE qui facilite la  vie des  Etats impécunieux n’est qu’un prêt temporaire qui devra  être remboursé ! Bref, l’inflation va s’installer durablement. Elle est un déséquilibre supplémentaire, en aucun cas une solution.

Ni surprenante, ni éphémère, l’inflation.  Nos gouvernants seraient bien inspirés de dire cette vérité aux ménages  et les  candidats d’en tenir compte dans leurs promesses !

En marge :

La Grande-Bretagne n'était pas prête au Brexit, loin de là. Elle avait notamment oublié qu'elle avait besoin des chauffeurs routiers étrangers. Le transport des marchandises n'est plus assuré et les pénuries se multiplient. Plus de routier pour approvisionner le pays en essence ce qui a déclenché une ruée des consommateurs vers des stations essence. Boris Johnson a donc dû accorder en panique 10  500 visas de travail...provisoires. Il va devoir réquisitionner l'armée.

 

 

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