LA CLASSE MOYENNE, ENJEU ELECTORAL.
02 novembre 2017
Voici le dernier volet de ma série : "La France sous conditions de ressources".
Le retour de la croissance
Ne nous leurrons pas. Si le retour de la croissance est une bonne chose, il n’est qu’à la marge le résultat des assouplissements des gouvernements actuel et précédents. C’est l’Europe qui nous tire et la croissance mondiale. Mais si cette embellie doit durer un an ou dix-huit mois, il faudrait en profiter pour prendre quelques mesures courageuses d’assainissement de nos comptes publics. Ce qui n’est pas le cas ! Je dis cela, parce que c’est la classe moyenne qui serait la première concernée par les allègements de charges qui en découleraient. Mais ce n’est pas le chemin que le gouvernement actuel compte suivre. Il est frappant de constater combien les choix qui sont faits concentrent l’impôt sur la classe moyenne et sont peu favorables aux entreprises. Rien n’est prévu pour alléger leur fiscalité et les impôts qui pèsent sur les charges de production. Le budget 2018 alourdit même le coût du travail de plus de 3 milliards d’€ en raison de la réduction du taux du CICE, principalement au détriment des salaires médians. De plus, aucune mesure n’est prévue sur le quinquennat en faveur de la compétitivité des entreprises françaises. Pourtant la baisse global du coût du travail y compris sur les salaires industriels médians qui sont les plus exposés à la concurrence internationale est un enjeu essentiel. On nous parle beaucoup de l’économie numérique mais aucune mesure n’est envisagée sur la fiscalité des plateformes collaboratives… Nos partenaires européens ne se contenteront pas des demi-mesures actuelles, au moment où l’AFD perce en Allemagne et après les votes autrichien et tchèque. Le péril populiste est encore devant nous, et si en France il semble avoir subi un revers, il peut réémerger si rien ne change.
Une politique économique vraiment efficace.
Les dernières élections ont montré à la fois une désaffection électorale et un éparpillement, traduisant une désespérance et un désenchantement. Un électeur sur deux s’est comporté en « intermittent du vote ». Seulement 15,6 millions d’électeurs, sur 44 millions, ont eu un vote « systématique » en participant à tous les scrutins : 35,5% du corps électoral ! Il y a bien une crise civique. A l’opposé, 6,1 millions d’inscrits ont boudé les urnes. Ce qui veut dire que pratiquement un électeur sur deux (50,7%) a eu un comportement intermittent. Cette évanescence électorale touche surtout l’électorat des jeunes. Globalement, les électeurs qui s’abstiennent systématiquement en 2017 sont plus souvent sans diplôme, ont un niveau de vie plus faible et sont plus souvent ouvriers ou inactifs, sans être à la retraite. Voilà des données fort utiles pour bâtir un projet.
Redonner confiance et espoir en priorité. Il est donc grand temps de mettre en œuvre une véritable politique économique de rénovation. Au risque de se répéter, elle doit être basée sur une baisse durable et détaillée de la dépense publique, et de la fiscalité sur la classe moyenne et les entreprises. Le redressement de notre balance commerciale et la baisse de la fiscalité sont à ce prix. Cet effort, pour qu’il soit compris et partagé par les Français, doit présenter plusieurs autres dimensions : un volet social qui rassure, un volet identitaire qui protège et un volet européen qui redonne une espérance.
Il faut rétablir le cercle vertueux autour du travail. Cela veut dire qu’il faut mettre le paquet sur les causes concrètes qui entraînent ces comportements : remédier au chômage, lutter contre l’exclusion, traiter vraiment les inégalités, combler les lacunes de l’éducation. Les notions de travail, d’effort, de classe moyenne, le refus du communautarisme et de l’intégrisme islamique qui petit à petit ronge notre société qui impose d’assumer notre histoire et nos racines, sont partagées par 70% des Français. Elles correspondent aux attentes d’une grande partie des électeurs et pas seulement de droite. Cela impose de commencer par une vraie politique de réinvestissement des territoires de la France périphérique, qu’elle soit des villes ou des campagnes, pour rétablir la règle de droit partout et empêcher la contagion de la violence : c’est-à-dire restaurer la sécurité.
Intégration et ascenseur social. Il existe deux moteurs pour mener ces politiques : l’intégration qui s’appuie sur l’égalité des chances, et l’ascenseur social, qui suppose le retour du cercle vertueux du travail : entreprise, emploi, salaire. Ce sont les deux piliers d’une vraie justice sociale. Cela nécessite d’investir massivement dans l’éducation et la formation, soutenir l’innovation, développer massivement l’apprentissage et l’alternance, mettre l’entreprise au coeur du projet. Mais la condition à remplir d’abord, c’est faire regagner la confiance dans le politique et c’est la classe moyenne qui est aujourd’hui la plus disponible.
L’Union européenne, vecteur de paix et de prospérité.
L’union européenne demeure un instrument essentiel pour la paix en Europe et peser dans le monde, et pour notre prospérité. Mais il y a plusieurs conditions à remplir pour la réconcilier avec les peuples qui s’en défient de plus en plus. D’abord, rassurer ceux-ci en mettant fin aux soi-disant négociations avec la dictature turque. Ensuite, terminer la construction monétaire par la création d’un fonds de stabilisation de l’euro et l’achèvement de l’union bancaire pour renforcer la zone euro. Affirmer la souveraineté européenne au plan commercial, fiscal et environnemental, indispensable face à la Chine mais aussi aux Etats-Unis et à la Russie. Et compléter le dispositif par la convergence des droits sociaux. Enfin, l’Europe doit assurer notre sécurité, accepter de réguler l’immigration et le droit d’asile, et sa première mission doit être le contrôle des frontières.
Mobiliser la classe moyenne pour en faire le socle de l’alternance.
Le maintien d’une classe moyenne forte et ambitieuse sera la clé des prochaines échéances électorales, d’autant plus si une force politique devait s’en faire le porte-parole. C’est justement le cheval de bataille de Laurent Wauquiez. C’est bien pourquoi, comme l’analyse fort justement Cécile Cornudet dans les Echos, la « Macronie » voit en lui le principal danger pour 2022 et s’emploie à l’étouffer en le diabolisant avec le traditionnel repoussoir du FN. Curieux comme démarche quand on juge le clivage « gauche-droite » dépassé, mais la contradiction ne vaut pas dans l’univers jupitérien, puisque c’est « en même temps ». Dans ce jeu de dupes, les « constructifs » sont des auxiliaires précieux. Le plus diabolique d’entre eux est Thierry Solère, avec son discours complètement pipé dont il a fait étalage au dernier « Talk » du Figaro. Il prône un « jeu (politique) à la carte ». C’est justement ce que souhaite Macron, parce que ce serait la meilleure façon de détruire complètement l’opposition républicaine qui résiste à sa pression ! L’action de l’opposition doit consister à utiliser tous les moyens pour empêcher la classe moyenne d’être laminée. La bataille contre l’augmentation de la CSG et contre la suppression de la taxe d’habitation pour 80% des foyers fiscaux sont d’excellents moyens de la mobiliser.
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