LOI TRAVAIL, PAS UNE RÉVOLUTION MAIS ON AVANCE…
03 septembre 2017
Une réforme encore incomplète, mais une réforme !
Et c'est déjà appréciable. Dans les cinq ordonnances modifiant le Code du Travail, une quarantaine de mesures devraient simplifier la vie des entreprises et en particulier celles des TPE et des PME. C'est ça la bonne nouvelle.
Ce qu’il faut retenir.
En deux mots voici les grands axes : fusion des instances représentatives du personnel en un « comité social et économique » pour les entreprises de plus de 50 salariés ; négociation directe dans les entreprises de moins de 50 personnes avec un délégué du personnel, dans les entreprises de moins de 20 personnes, négociation directe avec les salariés avec referendum au deux tiers ; plancher mais surtout plafond des indemnités pour licenciement abusif avec en contrepartie une augmentation de 25% des indemnités légales de licenciement ; pour une entreprise multinationale, la justification d'un licenciement économique se fera sur la base des résultats en France. Ce n’est pas la « révolution copernicienne » promise par Emmanuel Macron, mais c’est une rénovation utile du droit du travail. Jusque-là ultraprotecteur pour le salarié, le marché du travail, en France, ne va donc pas subitement devenir une jungle livrée à la loi du chef d’entreprise… Vouloir plafonner le montant des indemnités prud’homales à des niveaux conformes à la jurisprudence, autoriser les petites entreprises à négocier avec leurs salariés en l’absence de représentant du personnel, permettre des ruptures conventionnelles collectives, voilà qui ne suffit pas à casser le modèle social français, d’autant qu’il sera toujours possible d’aller devant le juge en cas d’atteinte aux droits fondamentaux. Cette réinitialisation du Code du travail est d’une tout autre ampleur que les petites « mises à jour » qu’avaient été la loi Bertrand de 2008 et la loi El Khomri de 2016, lesquelles, rappelons-le, avaient donné plus de pouvoir à l’entreprise pour renégocier l’organisation du travail.
On est encore loin d’une réforme libérale.
Mais on commence à décorseter vraiment les entreprises de l’économie administrée. Notre Code anti-travail devient enfin plus neutre. Assouplir la réglementation sociale, rééquilibrer les droits en faveur du chef d’entreprise et alléger le livre rouge à l’obésité légendaire : voilà trois conditions favorables à la création d’emplois qui sont réunies dans cette réforme. En ramenant la négociation des primes collectives au niveau de l’entreprise, en délimitant à l’échelle nationale les difficultés pouvant motiver un licenciement économique dans une multinationale, le gouvernement apporte une flexibilité qui pourrait être payante à moyen terme pour la relocalisation de l’emploi en France. On y trouve aussi des mesures de bon sens comme la fusion des instances représentatives du personnel, ou de simple justice comme ce ticket modérateur que les comités d’entreprise devront maintenant débourser lorsqu’ils engagent des expertises jusqu’à présent payées par l’entreprise. Le balancier revient dans le camp de l’entreprise, timidement, mais sans réduire les droits des salariés. Là est probablement toute l’habileté de cette réforme menée par l’ancienne DRH qu’est Muriel Pénicaud. La principale barrière à l’emploi qu’est le Code du Travail est en train de tomber. Il en faudra plus pour qu’elle ait des répercussions sur le chômage. On reste encore largement dans une économie « administrée » tant que les niveaux de prélèvements et les textes plus contraignants que chez nos voisins seront en vigueur, comme ceux sur la « pénibilité ». Et il faudra aussi agir sur les autres plaies qui pèsent sur l’emploi : le manque de main d’œuvre qualifiée et le niveau des charges. C’est aussi le carnet de commandes rempli qui fait le résultat.
Des réactions modérées.
La CGT grogne comme d’habitude et va sortir son arme ultime : les cheminots. La CFDT dit qu'elle est un peu déçue : il faut bien se démarquer du politique. Curieusement, FO semble satisfaite, ce qui n'est pas rien ; mais curieusement aussi, au même moment Stéphane Lardy, chargé de l’emploi et de la formation professionnelle à FO pendant neuf ans, devient directeur adjoint du cabinet de Muriel Pénicaud. Corrélation ? Décrit comme « un réformiste convaincu », membre du Parti socialiste, il sera en charge de la formation professionnelle, grand chantier que souhaite ouvrir Emmanuel Macron, et de la pénibilité. Quant à elle, la France Insoumise dénonce une agression contre le Code du Travail, et continue à vouloir utiliser la rue… Ce qui reste du Parti Socialiste veut se battre (no comment). La droite en toute logique reconnaît que cette réforme est une avancée même si elle émet quelques critiques, ce qui est normal. Au pouvoir, elle aurait certainement fait différemment et serait allée plus loin, notamment sur les fameux « seuils ». Les "constructifs" n'ont rien dit de plus : preuve qu'ils ne servent à rien.
Il faut maintenant attendre la dernière étape : rendez-vous le 22 septembre.
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