FRANCOIS QUI RIT, MARIANNE QUI PLEURE !
12 février 2015
Pour réussir dans la vie, il faut du talent, du travail et de la chance.
Notre pingouin de président est bien placé pour le savoir. Pour devenir président de la République, il est évidemment passé par l’ENA, parcours obligé, et a exercé ses talents d’embrouilleur à la tête du PS durant dix ans. Mais il n’aurait jamais eu le poste suprême qu’avait tenté de lui souffler son ex-compagne en 2007, sans un coup de chance extraordinaire, de celle qui console de toutes les infortunes, qui se résume en trois lettres : DSK. Alors que celui-ci semblait le mieux placé pour porter les couleurs de la gauche en 2012, sa chute dans un scandale sexuel a brusquement rouvert le jeu et François Hollande, qui était parmi les barons du PS l’un des plus proches de ses positions économiques, a ramassé la mise.
Pourtant depuis deux ans et demi, la chance lui avait tourné le dos : conjoncture médiocre, Europe figée, élections cinglantes, vie de couple étalée dans la presse, casque à l’appui, suivie d’un roman délétère et ravageur… et sur le plan politique ses choix désastreux n’ont rien arrangé : ministre du budget fraudeur, matraquage fiscal meurtrier pour la santé économique du pays, taxation des hauts revenus à 75 % retoquée… Le quinquennat est devenu un catalogue de décisions malheureuses. Sa volonté de rebattre les cartes avec un nouveau Premier ministre tonique et autoritaire, une équipe plus homogène (avec l’arrivée tonitruante de l’ancienne compagne), une ligne cohérente, n’aurait sans doute pas changé grand-chose dans la lise où semblait s’enfoncer la vie politique nationale, avec des députés de gauche doctrinaires à souhait, impatients de faire n’importe quoi.
Mais voilà, l’environnement a changé. Politique d’abord.
Il y a d’abord eu l’horreur du massacre de « Charlie Hebdo», d’une policière assassinée parce qu’elle était un « uniforme », de juifs assassinés parce qu’ils étaient… juifs. Pour une fois, le Président a eu les bons réflexes, les décisions adaptées, les mots justes, ce qui n’est pas rien, même si les institutions de la Vème sont taillées pour ça. Une nouvelle dynamique politique s’est alors enclenchée. La victoire de la gauche dans la législative partielle du Doubs, la première pour le PS depuis 2012, en est peut-être un signe, même si on sait que ce genre d’éclaircie retombe comme un soufflé. La vie politique française semble s’y mettre aussi en lui accordant un répit. A l’UMP, Depuis son arrivée à la tête du parti, Nicolas Sarkozy doit composer. Lors de la première décision importante à prendre par le bureau national du parti, la consigne de vote dans le Doubs, il n’a pas réussi à faire adopter la recommandation qui avait sa préférence. L’hôte de l’Elysée espère donc que l’ancien président pourrait donc comme en 2012, devenir une chance pour lui, soit en constituant face à lui une alternative décrédibilisée, soit en empêchant l’émergence d’une autre figure. Pour la première fois depuis son arrivée à l’Elysée, François Hollande voit donc un coin de ciel bleu, un scénario encore improbable où il pourrait être réélu. Après la chance de 2011, il pourrait tenir là sa seconde chance.
Economique ensuite. L’alignement tant espéré des « planètes » s’est produit.
Là, le chef de l’exécutif n’y est vraiment pour rien. Quatre vents favorables se sont levés : la chute des cours du pétrole, la dévaluation de l’euro, le plan Juncker de relance de l’investissement, l’injection massive de liquidités décidée par la Banque centrale européenne. A voir tout cet air soufflé dans les poumons de l’économie européenne, on pourrait presque s’étonner de la mollesse de l’accélération anticipée par les technocrates européens. C’est Riyad qui a provoqué l’effondrement des cours du pétrole en annonçant, fin novembre, sa décision de maintenir la production saoudienne. C’est Mario Draghi, le président de la Banque centrale européenne, qui a fait chuter l’euro actionnant une politique monétaire non conventionnelle. C’est le même Draghi encore qui a fait refluer les taux d’intérêt, à des niveaux jamais vus dans l’histoire financière. Ces baisses majeures de prix, les « trois astres », vont à coup sûr donner de l’air à l’économie, même s’il faut des mois et des mois avant que les acteurs changent de comportement. Un peu d’air qui se traduira par un (faible) redémarrage de la croissance : un acompte en 2015, l’essentiel en 2016, qui permettrait enfin le début réel du recul du chômage et repousserait les offensives bruxelloises sur les finances publiques françaises. Pour François Hollande, c’est le meilleur des scénarios. Avec un peu de culot, il pourra même expliquer que c’est son action qui a redressé l’économie, comme il l’avait prédit. La chance de Hollande est à la fois politique et économique.
C’est aussi une malchance pour le pays.
Car ce que Hollande nous a déjà montré, c’est une formidable capacité à surfer sur les événements et non une aptitude à changer la donne. Depuis son élection, il a bien réalisé quelques réformes, le plus souvent en dépit du bon sens comme le redécoupage administratif du pays, il a assoupli quelque peu le droit social, fait semblant, après l’assommoir, d’alléger l’impôt et les cotisations sociales sur les entreprises, tenté de déverrouiller quelque marché protégé. On a avancé de quelques petits pas là où il aurait fallu faire des enjambées de géant. Comme il ne se refera pas, il est peu probable qu’un Hollande réélu se lancerait dans des réformes audacieuses à la Schröder. Et la France de continuer à sombrer. La chance de l’un fera le malheur de l’autre.
La tentation du relâchement est là.
On le constate quand le gouvernement français montre qu’il n’est pas mécontent de voir le message porté par Syriza – il faut mettre un terme à la rigueur – gagner du terrain en Europe. Dans l’Hexagone, après une année 2014 marquée par le « tout économique » (pacte de responsabilité, plan d’économies de 50 milliards, loi Macron) avec des résultats toujours décevants, la tentation est grande de se concentrer sur d’autres thématiques, telles que la sécurité, la citoyenneté ou l’environnement. Et de lâcher prise sur le plan des économies budgétaires, alors que l’inflation zéro annihile l’effet d’une partie des mesures. La charge de la dette va par ailleurs encore chuter cette année, en dépit d’un stock d’emprunts historique, ce qui va peut-être faciliter le respect des objectifs de dépenses, mais sans améliorer le désendettement, bien au contraire, puisque la dette va gonfler jusqu’à 100% du PIB en 2017. Grâce à ce nouvel environnement, la Commission européenne a validé les prévisions de croissance de la France pour 2015 et 2016. Le ton a changé aussi à Bruxelles, où la nouvelle Commission revendique une interprétation plus « souple » du Pacte budgétaire. Sauf que l’histoire nous a montré que la grande faiblesse des gouvernements français consiste à relâcher les efforts dès que l’horizon s’éclaircit et que les contraintes extérieures sont moins fortes. Cette faiblesse on peut la craindre encore plus d’un président déjà peu enclin au courage des décisions difficiles.
Pourtant, la France est très loin d’être tirée d’affaire.
Avec un déficit public qui est censé s’établir autour de 4,4 % pour 2014, contre 4,1 % en 2013, et va encore dépasser 4% de PIB en 2015, résultat « incertain » selon la Cour des Comptes, alors qu’il a diminué partout ailleurs en Europe, et un chômage toujours prévu en hausse, la France est, en effet, avec la Croatie, le seul pays encore au-delà de la limite des 3% et dont le déficit a augmenté en 2014. La Cour des Comptes juge d’ailleurs avec sévérité cet exercice 2014, au cours duquel le déficit s’est accru. Bien sûr, il faut consacrer des moyens à la lutte antiterroriste, à la défense, à la politique de la ville. Mais comme les 40 milliards d’euros de baisses de charges pour les entreprises d’ici à 2017 sont gravés dans le marbre, il doit en être de même des 50 milliards d’économies sur trois ans. Ce qui implique une mobilisation continue et sans faille et des réductions de dépenses chaque fois qu’une nouvelle est créée. Il en va de la restauration de la crédibilité de la France. Il en va aussi de sa capacité à mobiliser l’argent public là où il est efficient économiquement et socialement. Et la hausse des prix étant moindre qu’attendu, les économies le seront aussi, ce que Bercy n’a pas anticipé ! La Cour des Comptes estime qu’elles auraient même dû être réduites de 2 milliards d’euros dans les textes budgétaires dès la fin de l’année dernière. Son rapport invite l’exécutif à dégager de nouvelles sources d’économies et à améliorer l’efficience des politiques publiques dont elle dresse la liste. On jette encore beaucoup trop d’argent par les fenêtres. La lecture des travaux de la haute institution montre assez bien qu’en fait d’austérité, la France est surtout victime d’une gabegie financière catastrophique que les projets socialistes comme la généralisation du tiers payant vont aggraver. On imagine ce que serait l’application d’une politique à la grecque !
Mais le pire reste le plus probable.
Si la chance continue de sourire au locataire de la rue Saint-Honoré. Sauf un retournement toujours possible, qui redonnerait alors le sourire à Marianne.
Ce qui reste un mystère pour moi c'est que l'on puisse voter pour un individu pareil. Les gens réfléchissent-ils avant de déposer leur bulletin? Pauvre France dirigé par un groupe de malfaiteurs.
Rédigé par : Serge | 15 novembre 2015 à 14:24