MOMENTS DE VERITE..
09 mai 2012
Pour Nicolas Sarkozy.
Alors Nicolas Sarkozy ne serait pas ce vilain canard que les médias nous ont décrit abondamment. « On » semble le découvrir depuis son discours de la Mutualité dimanche soir dernier, et surtout depuis le geste de « continuité républicaine » qu’il est le seul président à avoir fait en invitant celui qui n’est pas encore officiellement son successeur à participer à ses côtés à la commémoration du 8 mai. Les Français découvrent aussi l’hommage appuyé de Barak Obama et surtout celui d’Angela Merkel qui « tient à remercier Nicolas Sarkozy, jugeant que les réponses que l’Europe à trouvées face aux épreuves portent sa signature ». Si on ajoute pour terminer le tableau la confidence d’Alain Juppé qui avoue avoir été bluffé par « la force de conviction et d’entraînement dont il est capable dans les négociations ». Autrement dit, la France vient de se séparer d’un « grand bonhomme ». C’est le genre de peine qu’elle est capable de s’infliger. L’histoire peut en témoigner. Bien qu’il ne soit pas mort, je ne serais pas surpris de voir que dans quelques mois, sa cote de popularité soit au zénith. C’est l’un des paradoxes français. Il n’est pas certain que celui qui va le remplacer soit de la même trempe.
Pour la gauche.
Naturellement, le retour de la gauche sur la plus haute marche du pouvoir en France, dix-sept ans après la fin lugubre du second septennat de François Mitterrand, constitue un événement, non seulement pour notre pays, mais pour l’Europe entière. C’est l’annonce d’un changement de stratégie économique, avec l’impératif du rétablissement de la compétitivité par les coûts qui est en partie abandonné au profit d’une politique d’inspiration sociale-démocrate qui privilégie une action volontariste de l’Etat associée à de plus forts prélèvements : 14 milliards sur les ménages et 28 milliards sur les entreprises dès le mois de juillet si une majorité le permet. La semaine dernière, le Trésor français a pu financer facilement un emprunt à 10 ans de 7 milliards d’euros sur les marchés. Preuve que le nouveau président, dont la victoire était déjà largement pronostiquée par les sondages, bénéficie de la part de l’ensemble des investisseurs de la planète du bénéfice du doute. Ce qui ne devrait pas durer longtemps comme en témoigne la nervosité observée sur les marchés boursiers. Le contexte international est éminemment inflammable et ne permet pas le moindre faux pas. Tout concourt à ce que ce répit soit de courte durée. A commencer par la crise grecque qui connait un rebondissement inquiétant avec une crise politique quasi insoluble.
Pour François Hollande .
La constitution du gouvernement français sera un autre moment de vérité : dans un pays pratiquement coupé en deux, le nouveau président va-t-il faire la même erreur que Chirac en 2002, en choisissant des ministres « monocolores ». Et ses premières décisions seront disséquées au microscope par les observateurs de tout poil. Trop de dépenses, et c’en serait fini de l’attentisme. Le choix du Premier Ministre influera tout autant que les annonces. Si la logique institutionnelle est respectée, et lui donne une majorité législative, la gauche détiendra pratiquement tous les leviers du pouvoir, dans une France qui a pourtant voté plutôt globalement à droite lors du premier tour de cette présidentielle. A François Hollande de ne pas oublier ce que ce moment a, sur tous les plans, d’exceptionnel et au nouveau chef de l’Etat de savoir agir en conséquence, sans rester prisonnier de l’habile candidat qu’il a été. Parallèle au vote des Français, celui des Grecs confirme la difficulté à laquelle se heurte la mise en place du pacte fiscal approuvé en janvier par 25 sur 27 pays membres de l’Union européenne. C’est la digue qui protège la zone euro de ce qui pourrait vite devenir un tsunami spéculatif, dont les premières victimes seraient sans doute l’Espagne, l’Italie et… la France. Mais François Hollande, parmi d’autres en Europe, l’accuse en même temps d’assécher la croissance et se fait fort d’obtenir un feu vert allemand à un assouplissement. L’espace pour un compromis autre que de façade, est d’autant plus étroit que la Chancelière a déjà annoncé la couleur : c’est « nein », et donc l’impact d’un constat persistant de désaccord s’avérerait énorme. Une fois éteints les lampions de la Bastille, va se jouer dans les semaines qui viennent, la marque que le deuxième président socialiste de la Ve République pourrait laisser dans l’Histoire. C’est dire si l’exercice est périlleux pour un homme qui n’a jamais mis les pieds dans un ministère et qui ne connait rien des arcanes des instances internationales. Le manque d’expérience pourrait s’avérer dramatique, en dépit de l’habileté et de l’intelligence du bonhomme.
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