L’EURO VAUT BIEN UNE BATAILLE
21 novembre 2011
Malmenée par la crise des dettes d’Etat et critiquée par les souverainistes, la monnaie unique mérite qu’on se batte pour l’empêcher de sombrer.
Avons-nous vraiment intérêt à garder l’euro ?
Répondre par l’évidence n’est pas satisfaisant. Et même si nous nous sommes habitués à voyager en Europe en appréciant la commodité de ne plus avoir de change, ce n’est pas suffisant pour justifier de son existence. Le fait qu’il n’existe aucun plaidoyer documenté pour argumenter ne rend pas la tâche facile.
Pourtant, il existe au moins trois raisons de garder notre monnaie européenne.
Les grandes puissances, qu’il s’agisse de l’Amérique ou de la Chine, souhaitent son maintien parce que la devise européenne leur apparaît comme un pilier essentiel d’une Europe économique dont l’équilibre de la planète a besoin. A moyen terme, c’est même géostratégique : l’euro empêchera que se constitue un dangereux face-à-face entre la Chine et les Etats-unis.
Malgré tout, depuis 12 ans, les résultats de l’Euro sont plutôt flatteurs. La monnaie unique a permis de contenir l’inflation, de développer l’emploi qui s’est accru de 15 millions de postes depuis 1999 (contre 5 millions dans la décennie précédente), de faire progresser le PIB par tête de 12% (la même chose que les Etats-Unis), et la balance commerciale de la zone est équilibrée en dépit du déficit de certains pays. Bref, l’Euro a consolidé le marché et évité que n’éclate une guerre des monnaies qui n’aurait pas manqué d’arriver en ces temps tourmentés.
Enfin, l’Euro est devenu une monnaie de réserve. Il représente 1/3 des réserves détenues par les banques centrales. C’est un grand marché concurrent du dollar qui a vu le jour, qui permet des effets d’échelle, apporte des liquidités à coût plus bas et donne du travail aux banquiers européens, ne serait-ce que par la mobilité interne de l’épargne…
L'impossible sortie.
Il faut évidemment ajouter que sortir de l’euro est quasiment impossible, hors de prix et cela conduirait à une déflagration bien pire que la crise actuelle. Une étude de chez Natixis estime à 10 000 euros par européen la première année, puis 3500 euros les années suivantes, le coût de l’éclatement de la zone euro. Avec un effet de domino instantané : désastre pour les banques, guerre des changes, taux d’intérêts et inflation élevés. En comparaison, l’abandon total de la dette grecque coûterait 1 000 euros par personne.
Une crise politique.
D’ailleurs, la crise que nous traversons n’est pas une crise de la monnaie. C’est une crise de la gouvernance de la monnaie. Faute d’avoir adopté la constitution qui donnait les outils de cette gouvernance, c’est le laxisme et les égoïsmes nationaux qui ont prévalu : trop d’états, à commencer par la France, n’ont pas respecté les critères de Maastricht sur l’endettement. Les pays ont stimulé la consommation pour maintenir leur croissance en creusant les déficits. Voilà pourquoi le retour à l’orthodoxie et des progrès de gouvernance sont absolument nécessaires. Il n’est pas utile, pour cela, d’utiliser les « grands mots » de fédéralisme ou d’intégration. Il suffit d’être pragmatique et de se doter des règles communes nécessaires (elles existent en grande partie) et des moyens de les faire respecter.
L’Euro reste notre destin. Le chemin de sortie de la crise est d’abord politique.
Commentaires