HOMO CYBERNATUS
31 août 2009
Depuis Homo
Erectus, c’est-à-dire « l’homme debout », il y a 2 000 000 d’années,
l’homme n’a cessé d’évoluer. Il a
commencé par fabriquer des outils, ce qui le différenciait des animaux proches
de son espèce. Il est devenu, il a 200 000 ans « Homo Sapiens »,
soit « l’Homme Sage », expression à prendre avec le sens grec de sage
= savant. Homo sapiens, c’est l’Homme moderne : c’est nous. Nous avons
perfectionné les outils, notre dimension artistique, notre aptitude à
conceptualiser, mais l’intelligence est restée la même. D’ailleurs le volume du
cerveau n’a pas varié.
Pourtant,
depuis la fin du XXème siècle, Homo Sapiens a inventé un nouvel outil qui
change la donne. Jusque là, l’Homme inventait des « prolongements »
de ses membres. Il remplaçait ses bras par des machines, des « machines-outils »
effectivement. Cela a débouché progressivement sur un prodigieux développement
de l’industrie, car il utilisait en même temps son intelligence pour capter l’énergie
et la domestiquer.
Le nouvel
outil qui change la donne c’est l’ordinateur. Au départ, simple machine à
compter, il n’était qu’un appendice du meilleur de nos muscles : le
cerveau. Blaise Pascal avait déjà tenté l’aventure. Mais aujourd’hui, avec le
développement de la cybernétique, l’outil devient de plus en plus intelligent
et de plus en plus autonome. Homo Cybernatus est né. C’est un Homo Sapiens doté
d’une capacité intellectuelle décuplée par ce prolongement de sa pensée qui lui
permet d’effectuer des calculs complexes en des temps records, de s’informer de
ce qui se passe partout sur la Terre en temps réel, de stocker des capacités de
savoir immenses à l’extérieur de son cerveau auxquelles il peut accéder en
quelques instants, de communiquer avec d’autres humains à la vitesse de la
lumière jusqu’à l’autre bout de la planète….
Homo Cybernatus
existe. Vous le croisez tous les jours : c’est votre gamin qui joue avec
sa « console » et se crée un monde virtuel, c’est le trader qui
invente un logiciel ultra-rapide de comparaison des prix des actions et qui lui
permet en quelques minutes d’acheter et de revendre en réalisant un bénéfice
substantiel, c’est le consommateur qui achète 7 jours sur 7 sur internet ce qu’il
a besoin, sans se soucier des jours d’ouverture, dimanche compris, et ne
parlons pas de la vie des entreprises avec les « courriels », la
bureautique qui a révolutionné la conception des services tertiaires quand ce n’est
pas la production avec les robots…Même notre rythme circadien est en train de
se modifier. Presque partout, il y a désormais un ordinateur allumé du matin au
soir dans un coin de la maison. Les magasins ouverts le dimanche, c’est un
épiphénomène né des modifications de nos habitudes consuméristes, dans
lesquelles la part d’Homo Cybernatus joue son rôle.
Qui
pourrait croire que notre vie sociale en sorte indemne ? Déjà le droit
court après certains comportements d’Homo Cybernatus : piratage des
musiques, déviances sexuelles, espionnage industriel…Et jusqu’à la crise financière qui est
bien née d’un abus de cybernétique par des banquiers irresponsables, non ?
Notre société est déjà modelée dans les aspects quotidiens de notre vie :
sites de rencontres, multiplication des espaces où l’on se met en scène comme
Facebook, les multiples blogs…Même les modes
de pensée évoluent, au contact de la cyber planète. Homo Cybernatus est un
homme planétaire. Les régimes politiques doivent en tenir compte. Regardez ce
qui se passe en Iran : les aspirations de la jeunesse à plus de démocratie
sont alimentées par la sphère internet très difficile à contrôler. Dans nos
sociétés démocratiques, c’est une nouvelle dimension qu’il faut prendre en
compte et qui nécessite des adaptations dans tous les domaines y
compris législatifs et judiciaires. Cela implique évidemment que certaines
décisions soient « planétaires » : on le voit bien avec la gestion de la crise économique
mondiale et l’exemple des paradis fiscaux.
Dans ce contexte, les prises de position de certains acteurs de notre petit monde politique apparaissent bien désuètes et étriquées…
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