EN EST-IL CAPABLE ?
25 juin 2022
Sortir de l’impasse.
Cela implique toujours de faire demi-tour. Aujourd’hui le Président de la République est bien dans une impasse politique : il n’a pas de majorité pour gouverner et dans cette situation, l’Assemblée nationale est une pièce maîtresse. Sa consultation des chefs de partis et son discours laconique pour ne pas dire lacunaire de mercredi dernier n’ont apporté ou ne laissent entrevoir aucune solution viable. Il voudrait que la balle soit dans le camp de ses opposants, il ne voit pas qu’elle est toujours à ses pieds. Car c’est sur lui que tout repose. Les institutions de la Vème république le veulent ainsi. Le résultat des élections, présidentielle et législatives, sont d’abord l’échec d’une gouvernance, celle de la technocratie, privilégiée par le chef de l’Etat et fondée sur le principe : les technocrates, incarnés par son principal collaborateur Alexis Kohler, savent mieux faire, ont toutes les réponses techniques parce qu’ils sont diplômés et issus des grandes écoles. Sauf qu’il leur en manque une, fondamentale : l’école de la vie. Certes Emmanuel Macron a été réélu, mais à quel prix : abstentions record, et sur 56% de voix au second tour, plus de moitié ont été obtenues par vote « contraint » ce qui ne constitue en rien une adhésion à son projet, on ne peut plus flou au demeurant. Les législatives, avec une abstention plus forte, en ont tiré les conséquences puisque la majorité présidentielle n’est que relative : il manque 41 voix pour obtenir la majorité de 289 voix nécessaire pour faire passer les textes de loi. L’exécutif sans majorité est dans une impasse.
En est-il capable ?
Emmanuel Macron a annoncé qu’il allait changer de méthode. Les premières annonces ont plutôt montré qu’il retombait dans ses travers notamment avec le projet de Conseil national de la Refondation, nouveau machin improbable de mélange des genres, heureusement abandonné. Il peut sortir de l’impasse. La première condition est qu’il écoute enfin. Il a l’opportunité, avec l’Assemblée nationale élue, de refonder la vie démocratique en l’appuyant sur la culture du compromis. La deuxième condition, qui en est le corollaire, tient dans l’abandon de l’arrogance dont ses partisans ont fait preuve pendant cinq ans à l’égard des propositions qui ne venaient pas d’eux. La troisième condition, peut-être la plus incertaine, c’est que les partis extrémistes désormais dans le système, avec une représentation plus en accord avec ce qu’ils pèsent électoralement, arrêtent de se comporter comme « hors système ». Ils y ont intérêt puisqu’ils pourront acquérir dans l’exercice la crédibilité gouvernementale qui leur manque aux yeux des Français. Ce n’est pas gagné avec Jean-Luc Mélenchon, dont la stratégie lamberto-bolivariste vise plus à créer le chaos qu’à apporter des réponses aux Français. La dernière condition est que les députés des anciens partis de gouvernement, PS et LR, ne restent pas sur le bord et acceptent de jouer le jeu pour peu que les règles en soient clarifiées. Mais voilà, Macron devra faire preuve d’humilité et accepter, sinon de partager le pouvoir, au moins de faire des concessions. En est-il capable ?
Un nouveau premier ministre, vite !
Cette situation inédite permettrait de redonner du poids et de l'importance au poste de premier ministre, que les modifications apportées aux institutions de la Vème avaient tendance à réduire à celui de simple courroie de transmission de l’Elysée. Entre un Palais-Bourbon plus représentatif des opinions politiques et appelé à redevenir autre chose qu'une chambre d'enregistrement et un chef de gouvernement au rôle renforcé, il y aurait là une situation propre à redonner du souffle au fonctionnement de notre démocratie. Encore faut-il que tout le monde, exécutif et parlement, fassent preuve de suffisamment d’esprit de responsabilité afin de s’adapter à nos institutions dont le principal objectif est de garantir la stabilité du pouvoir. Cela implique le remplacement de la Première Ministre actuelle dont le curriculum est inadapté à la situation : trop de gauche, trop techno. Alors qui ? Le Président, qui apparaît fatigué et désabusé, à tout le moins sonné par le désaveu qu’il vient de subir, n’a guère le choix. La Macronie se révèle pauvre en personnalités qui offriraient suffisamment d’expérience tout en apportant des garanties de loyauté au chef de l’Etat. Le gouvernement actuel a besoin lui aussi d’un bon coup de renforcement. Dans la configuration actuelle, l’exécutif n’est pas assez charpenté pour faire face aux éventuelles frondes parlementaires que LFI ou même le RN, peuvent mener. Comme on le voit, c’est le Président qui détient les cartes pour débloquer la situation : ouverture, replâtrage, cap … A lui de donner les signaux. Il n’a pas de temps à perdre, la situation urge.
Alerte à la BdF…
C’est que le temps presse pour trouver le compromis. La dette s’envole. Fermer le robinet de la dépense devient urgent : 90 milliards d’endettement supplémentaire dans les trois premiers mois de 2022 portent la dette à près de 3 000 milliards et 115% du PIB ! L’économie est aussi fragile que la politique. Des semaines de tergiversations sur les sujets économiques auraient un effet désastreux sur la croissance, l'emploi et le moral des chefs d'entreprise. Les prévisions économiques qu’ont rendues les experts de la Banque de France en début de semaine sont sombres : inflation, hausse des taux viennent compliquer considérablement la donne sur fond de crise énergétique.
Plus que jamais, l’imagination est au pouvoir, et tout le monde est concerné, Président, Ministres, parlementaires
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