BIPOLARITE, CENTRISME ET RADICALITE
08 septembre 2009
Depuis la
mise en place de la Vème République et du scrutin majoritaire, le rôle
principal revient au parti majoritaire de chaque camp. C’est un sorte de
bipolarisme à la française, où au 2ème tour, bon gré, mal gré, il
faut choisir son camp. On est évidemment loin de l’émiettement que provoquait
la proportionnelle sous la IVème. Elle permettait tous les accommodements, avec
les inconvénients que l’on doit garder en mémoire : certains gouvernements
n’ont duré qu’une journée. Depuis, le bipolarisme a fait des progrès mais a
connu des avatars : par exemple quand l’UDF damait le pion au RPR, à jeu
presqu’égal. Evidemment, c’est la gauche qui a fini par en tirer les marrons du
feu, quand Mitterrand a réussi à la fédérer sous son égide.
La
bipolarité de la vie politique française a toujours eu du mal à s’affirmer.
Elle rencontre depuis toujours deux obstacles : le centrisme et la
radicalité. Le centrisme c’est le vieux rêve de la 3ème voie entre
la gauche et la droite, incarné par le MRP après la guerre alors que les
communistes dominaient la gauche, et par l’UDF de Giscard qui rêvait de
rassembler deux Français sur Trois. La radicalité, c’est la propension que nous
avons dans notre pays à avoir des extrêmes, à droite comme à gauche, dont la
vocation est d’abord la contestation. Il arrive que les uns et les autres
grappillent suffisamment de voix pour bloquer la machine majoritaire de la
bipolarité. L‘exemple le plus emblématique en est la présidentielle de 2002.
Dans ce
décor, le centre existe-t-il vraiment ? Essentiellement incarné par les
démocrates chrétiens rebaptisés « sociaux » dans notre pays, il a
connu ses heures de gloire avec le MRP, puis sous Giscard avec l’UDF,
rassemblant les rescapés de la démocratie chrétienne, les libéraux et
indépendants et quelques radicaux valoisiens. Pour moi, qui en ait fait partie
activement, c’était une autre manière de nommer la droite. Le centre, c’était
un centre droit qui se différenciait du RPR au profil jugé plus bonapartiste.
Mais par sa doctrine, ses propositions, ses repères, son projet de société, il
s’opposait nettement aux solutions collectivistes incarnées par la gauche.
Le Modem,
essaie depuis sa création, avec un leader esseulé et presque sans élus de
relever le défi de faire exister un centre autonome et puissant. On observera
que son positionnement d’opposant systématique à la majorité actuelle a d’abord
conduit à l’émiettement du centre entre plusieurs partis, tant l’ancrage de son
électorat au centre droit est vivace. Il tente aujourd’hui un retour
spectaculaire sur la scène politique, avec les déclarations presqu’attendues de
François BAYROU, et c’est pour se tourner vers la gauche. L’objectif est probablement
de se replacer au coeur du débat, après le ratage monumental des Européennes. Il
s’agit encore une fois de mettre la pagaille au PS, qui est le seul moyen pour
lui d’espérer exister dans une présidentielle. Quand BAYROU tend la main, il
faut savoir qu’elle tient une urne ! Mais son espace politique est de plus
en plus étroit, surtout si le PS est durablement remis en selle. Cela va
devenir très compliqué pour le Modem. C’est que « le centre » est un
mythe politique. Il n’existe que s’il penche d’un côté ou de l’autre. Il est
condamné à servir de béquille à l’un ou l’autre des partis de gouvernement.
La
radicalité s’exprime essentiellement par la persistance de partis d’extrême
gauche : Lutte Ouvrière, NPA, mais aussi la Gauche de MELANCHON et encore,
a bien des égards, le PC. Elle existe à droite avec le Front National que
Mitterrand avait su faire prospérer pour empêcher la droite républicaine de
gagner. Le point commun à tous ces partis, c’est qu’ils n’ont aucune chance de
gouverner un jour. Soit qu’ils ne le recherche pas, préférant la contestation
pure et dure aux alliances amollissantes ou compromettantes, soit qu’ils soient
rejetés massivement comme cela a été le cas de Jean-Marie LE PEN, parvenu au 2ème
tour de la présidentielle grâce à la multiplication des candidats sur les deux
bords. La radicalité n’en est pas moins une complication. Nicolas SARKOZY a
réussi à capter suffisamment de voix au Front National pour le marginaliser.
Par contre, la résurgence de l’extrême gauche et l’éclatement à la marge du PS,
rend la tâche difficile à Martine AUBRY obligée de faire le grand écart entre
son extrême gauche, sa gauche dure, les verts qui ne sont pas pressés, et le
centre : pour le PS, le choix de l’alliance est primordial et c’est un jeu
de bascule imprévisible.
La réforme constitutionnelle renforce le bipolarisme. La droite a un Président, un projet, et comme elle est au pouvoir, elle est suffisamment forte pour s’ouvrir et s’élargir. On le sent bien, c’est primordial. A gauche, pour l’instant il n’y a pas de leader (il faudra des primaires ouvertes pour le désigner), le projet est flou, et l’on hésite sur la stratégie… Il y a un potentiel d’électeurs en jachère. Qui saura les séduire ?
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