HISTOIRE
PETIT CARNET DE L’ECONOMIE.
C’EST QUOI « ETRE DE GAUCHE » ?

BIPOLARITE, CENTRISME ET RADICALITE

Assemblee (intérieur)  

                                                                

 

Depuis la mise en place de la Vème République et du scrutin majoritaire, le rôle principal revient au parti majoritaire de chaque camp. C’est un sorte de bipolarisme à la française, où au 2ème tour, bon gré, mal gré, il faut choisir son camp. On est évidemment loin de l’émiettement que provoquait la proportionnelle sous la IVème. Elle permettait tous les accommodements, avec les inconvénients que l’on doit garder en mémoire : certains gouvernements n’ont duré qu’une journée. Depuis, le bipolarisme a fait des progrès mais a connu des avatars : par exemple quand l’UDF damait le pion au RPR, à jeu presqu’égal. Evidemment, c’est la gauche qui a fini par en tirer les marrons du feu, quand Mitterrand a réussi à la fédérer sous son égide.

La bipolarité de la vie politique française a toujours eu du mal à s’affirmer. Elle rencontre depuis toujours deux obstacles : le centrisme et la radicalité. Le centrisme c’est le vieux rêve de la 3ème voie entre la gauche et la droite, incarné par le MRP après la guerre alors que les communistes dominaient la gauche, et par l’UDF de Giscard qui rêvait de rassembler deux Français sur Trois. La radicalité, c’est la propension que nous avons dans notre pays à avoir des extrêmes, à droite comme à gauche, dont la vocation est d’abord la contestation. Il arrive que les uns et les autres grappillent suffisamment de voix pour bloquer la machine majoritaire de la bipolarité. L‘exemple le plus emblématique en est la présidentielle de 2002.

Dans ce décor, le centre existe-t-il vraiment ? Essentiellement incarné par les démocrates chrétiens rebaptisés « sociaux » dans notre pays, il a connu ses heures de gloire avec le MRP, puis sous Giscard avec l’UDF, rassemblant les rescapés de la démocratie chrétienne, les libéraux et indépendants et quelques radicaux valoisiens. Pour moi, qui en ait fait partie activement, c’était une autre manière de nommer la droite. Le centre, c’était un centre droit qui se différenciait du RPR au profil jugé plus bonapartiste. Mais par sa doctrine, ses propositions, ses repères, son projet de société, il s’opposait nettement aux solutions collectivistes incarnées par la gauche.

Le Modem, essaie depuis sa création, avec un leader esseulé et presque sans élus de relever le défi de faire exister un centre autonome et puissant. On observera que son positionnement d’opposant systématique à la majorité actuelle a d’abord conduit à l’émiettement du centre entre plusieurs partis, tant l’ancrage de son électorat au centre droit est vivace. Il tente aujourd’hui un retour spectaculaire sur la scène politique, avec les déclarations presqu’attendues de François BAYROU, et c’est pour se tourner vers la gauche. L’objectif est probablement de se replacer au coeur du débat, après le ratage monumental des Européennes. Il s’agit encore une fois de mettre la pagaille au PS, qui est le seul moyen pour lui d’espérer exister dans une présidentielle. Quand BAYROU tend la main, il faut savoir qu’elle tient une urne ! Mais son espace politique est de plus en plus étroit, surtout si le PS est durablement remis en selle. Cela va devenir très compliqué pour le Modem. C’est que « le centre » est un mythe politique. Il n’existe que s’il penche d’un côté ou de l’autre. Il est condamné à servir de béquille à l’un ou l’autre des partis de gouvernement.

La radicalité s’exprime essentiellement par la persistance de partis d’extrême gauche : Lutte Ouvrière, NPA, mais aussi la Gauche de MELANCHON et encore, a bien des égards, le PC. Elle existe à droite avec le Front National que Mitterrand avait su faire prospérer pour empêcher la droite républicaine de gagner. Le point commun à tous ces partis, c’est qu’ils n’ont aucune chance de gouverner un jour. Soit qu’ils ne le recherche pas, préférant la contestation pure et dure aux alliances amollissantes ou compromettantes, soit qu’ils soient rejetés massivement comme cela a été le cas de Jean-Marie LE PEN, parvenu au 2ème tour de la présidentielle grâce à la multiplication des candidats sur les deux bords. La radicalité n’en est pas moins une complication. Nicolas SARKOZY a réussi à capter suffisamment de voix au Front National pour le marginaliser. Par contre, la résurgence de l’extrême gauche et l’éclatement à la marge du PS, rend la tâche difficile à Martine AUBRY obligée de faire le grand écart entre son extrême gauche, sa gauche dure, les verts qui ne sont pas pressés, et le centre : pour le PS, le choix de l’alliance est primordial et c’est un jeu de bascule imprévisible.

La réforme constitutionnelle renforce le bipolarisme. La droite a un Président, un projet, et comme elle est au pouvoir, elle est suffisamment forte pour s’ouvrir et s’élargir. On le sent bien, c’est primordial. A gauche, pour l’instant il n’y a pas de leader (il faudra des primaires ouvertes pour le désigner), le projet est flou, et l’on hésite sur la stratégie… Il y a un potentiel d’électeurs en jachère. Qui saura les séduire ?


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