UN PEU DE GEOGRAPHIE ELECTORALE
17 avril 2007
Les ouvriers constituent, avec près d'un quart de la population active, un électorat important pour les candidats à la présidentielle, qui attend des réponses sociales à la persistance du chômage et à la dégradation de ses conditions de travail.
Malgré la disparition de près de 500.000 emplois industriels en France entre 2001 et 2006, les ouvriers représentent encore 6 millions de travailleurs et 24% de la population active, selon l'Insee.
Au premier tour de la présidentielle de 2002, 31% des ouvriers inscrits sur les listes électorales se sont abstenus ou ont voté blanc ou nul, 29% ont voté pour un candidat de gauche ou d'extrême gauche, 22% pour un candidat de droite et 18% pour un candidat d'extrême droite, selon le Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof).
"Dans les années 80, la disparition de "bases ouvrières" comme la sidérurgie, les mines et les chantiers navals, ainsi que la montée du chômage de masse, ont fait s'effondrer le sentiment des ouvriers qu'ils appartenaient à un groupe commun", ajoute M. Michelat. S'ensuit un repli sur la sphère privée et une réduction des anciennes solidarités - manifestée aussi par la chute du taux de syndicalisation. Une tendance de fond qui, combinée à l'échec des gouvernements socialistes face au chômage et à la précarité, entraîne un effondrement du vote ouvrier pour la gauche.
Le désintérêt pour la politique a augmenté: seuls 39% des ouvriers s'y intéressent, selon le Cevipof. Une tendance plus forte chez les ouvriers agricoles et peu qualifiés que chez les ouvriers qualifiés, davantage politisés.
Sensibles au discours anti-immigration de Jean-Marie Le Pen, une proportion croissante d'ouvriers vote pour l'extrême droite à partir de la fin des années 80.
Les ouvriers sont à la recherche d'une "respectabilité" perdue, d'autant que la fin des années 90 a vu la dégradation de leurs conditions d'emploi s'ajouter à la menace persistante du chômage. Plus d'un ouvrier sur quatre voit désormais son rythme de travail imposé par une cadence automatique, 11% d'entre eux travaillent à la chaîne et plus de la moitié subissent quatre types conjugués de pénibilités au travail (postures pénibles, charges lourdes, mouvements douloureux, secousses ou vibrations), selon le ministère de l'Emploi.
"Les candidats sont cette fois obligés de se positionner sur les questions sociales, escamotées en 2002, avec le résultat qu'on connaît", souligne le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault.
De quoi susciter peut-être un nouvel intérêt chez les ouvriers, dont 34% placent l'emploi en tête des problèmes à résoudre.
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