LE BILLET DU DIMANCHE SOIR
01 avril 2012
ILS « TUENT » LA CAMPAGNE
« Ils », ce sont les médias audio-visuels et leurs bataillons de journalistes bobos incapables de faire des comptes-rendus corrects des positions des candidats. Des réunions publiques, ils ne nous montrent que la partie dont on n’a que faire, celle qui ironise ou attaque le ou les adversaires, alors que des choses essentielles ont pu être dites. J’étais à Villepinte, j’étais à Nantes, j’ai suivi quelques retransmissions sur internet de réunions publiques tenues ici ou là : chaque fois, Nicolas Sarkozy a parlé près d’une heure, chaque fois il a fait des annonces et des propositions dont seules quelques-unes ont émergé, simplifiées parfois jusqu’à la caricature en extrayant une phrase de son contexte. Ainsi à Villepinte, ses choix pour l’Europe sont devenus des ultimatums à l’Europe, ainsi à Nantes il a ironisé sur Hollande sans le nommer, pendant trois minutes sur cinquante de discours, sur le mode gentillet, se moquant du ton ou des postures mitterrandiennes… Rien de bien méchant, loin des petites formules assassines qui viennent d’en face, mais bref : c’était cela qu’il fallait retenir ? A Nantes il a, par exemple, proposé la prise en charge dès l’école élémentaire des élèves décrocheurs, une idée de Jean-Louis Borloo, voilà qui doit alimenter le débat sur notre système éducatif !
Les réunions des autres candidats ne sont pas forcément mieux traitées : on ne peut en retenir que les vociférations de Hollande contre Sarkozy, les petites colères de Bayrou, les formules vitriolées de Le Pen, les trouvailles mordantes d’ironie de Mélenchon… Et pourtant, il suffit de lire la presse écrite pour s’apercevoir que les candidats ont des projets, des propositions bien plus riches qu’il n’y parait sur l’écran, que des questions de fond les séparent qui mériteraient qu’on s’y arrête. Encore faut-il avoir le courage de lire… ou tout simplement savoir lire… Oui, la campagne est intéressante, mais c’est à chacun d’aller chercher l’information au lieu d’attendre bêtement devant la lucarne magique, où le temps est si compté, l’audience si importante qu’on ne nous montre finalement que ce que le conformisme ambiant, du moins le croit-on, veut bien laisser passer. On croit amuser la galerie, on dégoûte l’électeur. Et ce n’est pas le temps de la campagne officielle avec ses mises en scène factices pour tenter de valoriser des candidats qui débitent leur programme comme un catéchisme, qui va attirer les foules. Le résultat tient plus de la purge que du plat gastronomique. A l’époque des 49 chaines et de la manette à zapper, je serai curieux de connaître les audiences de ces « passages obligés ».
J’ai la faiblesse de croire que la campagne se fait aux JT de 20H : la campagne présidentielle devrait faire l’objet de toutes les attentions mais on lui consacre en gros 5 mn sur quarante pour évoquer les faits et gestes du jour de tous les candidats : effet réducteur garanti ! Et après on dit que les Français sont déçus de la campagne et affirment majoritairement que les candidats n’ont pas de propositions concernant leur vie quotidienne.
Pourquoi chaque chaîne de grande écoute n’a-t-elle pas mis en place un « journal de campagne » diffusé après le JT, un peu comme il en existe pour rendre compte du Paris-Dakar ou des grands événements sportifs. L’élection présidentielle ne vaut-elle pas un rallye ? Il pourrait y avoir les informations du jour et une partie thématique transversale à tous les candidats… Voilà qui permettrait à tous ceux qui veulent s’intéresser aux élections de se faire une opinion. Et les râleurs n’auraient pas d’excuses.
Une dernière question : pourquoi ne fait-on pas autant que pour la « primaire socialiste » ?
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