MANU LE BARATINEUR
01 novembre 2021
France 2030.
Il n’a pas son pareil pour enfoncer les portes ouvertes, asséner les vérités toutes faites, dire à son auditoire ce qu’il a envie d’entendre, commenter l’actualité pour faire croire qu’il la maîtrise. Ainsi va Manu en campagne sans faire campagne tout en distribuant les chèques au nom de « l’action ». Le Prince a condescendu à dévoiler son plan « France 2030 » qui prévoit d’investir 30 milliards d’euros sur cinq ans dans quinze secteurs prioritaires afin de relancer l’industrie et l’innovation dans notre pauvre pays. On se prend à imaginer le cauchemar s’il avait concocté un plan 2050… et 50 milliards.
Une annonce politique.
Voilà un plan de plus qui s’inscrit dans la longue liste des plans portés par l’Etat « stratège », un bien grand mot au vu des résultats obtenus par les plans successifs, du programme des « investissements d’avenir » au plan de 57 milliards de 2017… qui ont tous échoué sans qu’on en tire la moindre leçon et malgré le Commissaire Bayrou.
Il ne fait guère de doute que le redressement de la France passe par sa réindustrialisation et par un énorme effort de recherche. En effet, Le décrochage du pays s’est accéléré depuis les années 2 000, avec un recul de la 4ème à la 7ème place des économies mondiales, à cause notamment du déclin industriel dont le poids dans le PIB a chuté de 24% à 10%. On le voit avec l’Allemagne, l’industrie joue un rôle déterminant dans la qualité et le volume de l’emploi, dans l’innovation et l’exportation. De fait, si notre commerce extérieur est si gravement déficitaire c’est bien parce que nous n’avons plus grand-chose à vendre.
Mais le plan proposé n’est pas à la hauteur des enjeux. Il présente deux défauts qui le disqualifient : d’abord son montant est sous-calibré et ne permettra pas de combler le retard d’investissement et d’innovation accumulé par la France, ensuite il s’annonce évidemment trop coûteux car financé en totalité par la dette publique qui atteint près de 120% du PIB (116), et non par la réorientation de dépenses courantes qui vont encore grossir de 11 milliards d’euros l’année prochaine.
Le plan n’est que le support des bavardages de campagne électorale pour président sortant en mal de bilan. Ni sérieux, ni responsable !
Le mur des réalités.
L’économie française, malgré les cocoricos du coq Le Maire, présente tous les caractères d’une entreprise au bord de la faillite. Elle possède des actifs et des activités de grande valeur. Encore faut-il remplir les conditions qui permettraient de relancer leur exploitation. On en compte au moins trois : traiter les problèmes de coûts, assainir la structure financière sur laquelle elle est assise, transformer sa gouvernance en changeant les hommes et les structures qui sont à l’origine des problèmes. Sinon, réinvestir ne servira qu’à dilapider un peu plus d’argent public comme précédemment, et les 30 milliards seront dépensés mais les 45 milliards de gains attendus comme les emplois escomptés resteront virtuels.
D’autant plus qu’il repose sur un postulat énoncé par le Président lui-même : il est indispensable pour financer le modèle social français. Autant financer un gouffre. On sait, et le Covid n’a fait que le confirmer, que le fameux modèle social est « insoutenable ». Il explique notamment l’effondrement de la croissance depuis trente ans et la majeure partie de la dette publique. Il conduira notre pays irrémédiablement au « défaut » quand les taux d’intérêt remonteront.
Enfin dernier défaut et non des moindres de ce plan : le choix des 15 secteurs prioritaires n’a été précédé d’aucun diagnostic partagé avec les entreprises, d’aucune cartographie des opérateurs, d’aucune expertise sur les compétences requises. Comme on peut s’y attendre, on assistera à un saupoudrage et à une distribution selon un inventaire à la Prévert. Un exemple : 6 milliards pour les semi-conducteurs ! Génial direz-vous. Le taïwanais TSMC s’apprête à investir 100 milliards dans ses usines d’ici 2024 : ça remet les pendules à l’heure !
Passons à autre chose.
Cet aimable plan de communication pour candidat à la présidentielle en campagne sans le dire n’est donc qu’un prétexte. Sa marque : saupoudrage et amateurisme. L’argent est tombé de l’Europe, mais il faudra bien le rembourser.
L’Etat ferait mieux de se consacrer à solder son inefficacité chronique, de se moderniser en diminuant ses coûts de fonctionnement, et de mettre fin aux logiques destructrices qu’il a mises en œuvre avec la santé ou le nucléaire, par exemple. Il devrait se consacrer en priorité à rétablir des conditions viables pour les entrepreneurs de tout poil au lieu de les euthanasier avec l’enfer des taxes, des impôts et des réglementations. Car l’Etat stratège qui se prend pour l’Etat entrepreneur, c’est comme le capitalisme sans capital : ça ne peut pas marcher.
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