BORIS SANS FOI, NI LOI !
29 octobre 2021
Celui qui parle le mieux du Brexit, c’est Julian Barnes, l’écrivain anglais.
Dans une interview au Figaro Littéraire, il livre son point de vue et il n’est pas tendre avec le gouvernement conservateur. Déjà en janvier 2020, il avait exprimé sa colère et confié au Figaro : « Amis européens, nous reviendrons un jour, si vous voulez bien encore de nous ! » Depuis, sa colère a empiré : « Je suis furieux du mélange d’arrogance et d’ignorance affiché par l’establishment conservateur britannique envers l’Europe. Je me souviens qu’au début du processus du Brexit, notre gouvernement a envoyé des émissaires dans plusieurs pays européens supposés favorables à la Grande-Bretagne, dans l’espoir qu’ils puissent soutenir notre cause et avoir une influence sur les négociations. Ils sont repartis les mains vides. Et puis, vers la fin des négociations, nous apprenons dans le journal de Michel Barnier que l’équipe britannique lui a semblé faire semblant de négocier parce qu’elle croyait qu’à la dernière minute Boris Johnson appellerait Angela Merkel et que tous deux allaient tout régler. Mais ils ont totalement sous-estimé la solidarité européenne et la confiance accordée à M. Barnier et à son équipe. La Grande-Bretagne a donc été totalement dépassée et s’est retrouvée avec un terrible gâchis sur les bras avec la question irlandaise. Et maintenant, elle essaie de se soustraire à ce qu’elle a solennellement signé, ce qui porte un coup terrible à notre réputation internationale (qui signerait un traité avec nous maintenant et s’attendrait à ce qu’il soit respecté?) Je dois dire que j’ai une grande admiration pour Michel Barnier…. ». On ne peut pas faire constat plus cinglant de la mauvaise foi de Boris Johnson et de ses acolytes, et on notera au passage le bel hommage à Michel Barnier qui prend toute sa valeur dans le contexte actuel.
Le non respect du traité.
Le Royaume-Uni n’en finit pas de traîner les pieds pour appliquer ce que Boris Johnson et ses ministres ont eux-mêmes rédigé et signé à savoir l’accord sur la pêche et sur l’Irlande du Nord. L’Union européenne a fait preuve de beaucoup de patience jusqu’à maintenant, mais le refus d’accorder leur licence de pêche à 150 bateaux français a déclenché les hostilités. Si la situation n’évolue pas, dès le 2 novembre, la France prendra des mesures de rétorsion : six ports fermés aux bateaux anglais , durcissement des contrôles sanitaires, douaniers et de sécurité des navires britanniques, contrôle plus serré des camions entrant et sortant notamment à Calais… Une deuxième salve pourrait suivre avec une hausse des tarifs de fourniture d’électricité aux îles anglo normandes… C’est que le Royaume-Uni est très dépendant de l’Europe, quoi qu’il en dise. Bien entendu, ces mesures sont jugées « disproportionnées », ben voyons ! Il est pourtant bien normal que la France défende ses pêcheurs et que les Anglais commencent par appliquer le traité qu’ils ont signé. Bojo n’a pas envie de perdre la face mais sa marge de manoeuvre est mince face à la colère des pêcheurs anglais qui se sont sentis trahis par l’accord signé et qui doivent faire face maintenant à l’impossibilité d’écouler le produit de leur travail sur le continent. Ce bras de fer intervient alors que se poursuivent à Londres des discussions tendues sur le protocole nord-irlandais.
Le mensonge permanent.
Le Covid a le dos large. Les turbulences que traverse le royaume seraient dues à la pandémie. Un gros mensonge de plus de Boris. Pendant toutes les négociations il n’a cessé de mentir aux Anglais et maintenant il est obligé de continuer pour minimiser les dégâts. Les sujets de sa « gracieuse majesté » découvrent aujourd’hui les conséquences d’avoir quitté le marché unique. Le pays subit pénuries d’essence, problèmes d’approvisionnement dans les supermarchés et manque de main d’œuvre, dont la principale cause est l’impréparation et l’improvisation permanente du gouvernement Johnson. La pénurie d’essence a été déclenchée par un gros déficit en chauffeurs routier pour acheminer le carburant, ce qui augmente les perturbations des chaines logistiques, elles-mêmes en pénurie de main d’œuvre causée par les nouvelles lois sur l’immigration : déficit de 100 000 chauffeurs, obligeant le gouvernement à ouvrir les vannes des visas de travail. Selon une étude, plus de 200 000 salariés originaires de l’UE seraient partis. Mêmes ceux qui ont le statut de résidents hésitent à revenir. Les secteurs les plus touchés sont le bâtiment, l’industrie, la logistique, l’hôtellerie et la restauration, l’agroalimentaire… Les abattoirs et les boucheries sont frappés par un manque crucial de main d’œuvre. Les tensions sont visibles sur les biens alimentaires avec des pénuries sur certains produits et des hausses de prix liées au renchérissement des matières premières et des coûts de fret. Les exportations britanniques vers l’UE ont chuté de près de 20% sur les six premiers mois de l’année et 1,1 million d’emplois restent vacants. On nous vantait une économie qui tournait à plein régime avec un marché du travail en quasi plein emploi.
En reprenant le contrôle des frontières, le gars Boris promettait le meilleur pour le royaume : il attirerait les meilleurs et les plus brillants chercheurs, ingénieurs, traders. Las, il manque de chauffeurs, d’agriculteurs, de vendeurs, de serveurs et d’aides-soignants que les conditions offertes n’attirent pas. La vérité qu’il ne veut pas voir c’est que la Grande-Bretagne ne peut, seule, isolée, mener une politique économique autarcique face aux réalités d’une économie mondialisée avec ses tensions conjoncturelles sur lesquelles il ne peut rien. Il en est donc réduit à continuer de mentir en promettant monts et merveilles aux anglais, et à tenter d’exister en s’associant à tous les coups tordus comme dans l’affaire des sous-marins australiens. Comme le dit si diplomatiquement Michel Barnier qui a eu affaire avec cet individu : « il se comporte en flibustier ! ». Le dividende du Brexit se présente de plus en plus comme un mirage. Le « Global Britain » reste un slogan creux pour populiste gogo.
On ne tourne pas impunément le dos à un marché de 350 millions de consommateurs, qui plus est à sa porte.
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