DE QUOI LE BITCOIN EST-IL LE SYMPTOME ?
24 février 2021
Coke monétaire.
Le prix du bitcoin vient de subir une correction sans que cela remette en cause sa folle course vers les sommets. Une trajectoire stupéfiante, qui tient en partie au potentiel supposé de la reine des cryptomonnaies, mais surtout à la frénésie actuelle des marchés financiers. Le bitcoin à 58 335 $ au plus haut a chuté à 45 000 $ avant de rebondir à 50 000 $. En 3 jours. Même chose pour Tesla : 900 $ au plus haut, chute à 619 $, Rebond à 698. Le patron de la Banque centrale américaine, dealer en chef de la coke monétaire, a voulu rassurer tous les accros aux liquidités des banques centrales qui craignaient qu'on réduise leurs doses : Jay Powell a confirmé qu'il maintiendrait son « soutien à l'économie » car le retour à la normale n'était pas proche. On va pouvoir racheter du bitcoin et Tesla... Vive la coke monétaire.
Le bitcoin à 50 000 $ pièce.
Depuis le début de l'année, la valeur de la reine des cryptomonnaies n'est pas loin d'avoir doublé, et sur un an, elle a été multipliée par cinq. Résultat, les « tokens » s'échangent désormais à prix d'or, au sens propre, puisque chacun des quelque dix-huit millions de bitcoins en circulation vaut ces jours-ci pas loin de l'équivalent d'un kilogramme de métal jaune ! Un engouement incompréhensible quand on sait qu’il s’agit d’un actif virtuel qui n'offre aucun rendement et n'a de devise que le nom , dans la mesure où il ne permet pas d'acheter grand-chose. Il faut pourtant expliquer l’inexplicable. En finances, il y a toujours une ou plusieurs raisons, rien ne se fait au hasard.
Le bitcoin est d’abord un thermomètre de la spéculation.
Depuis des mois maintenant, Wall Street vole de record en record, alimentée par les liquidités fournies par la banque centrale. Cela crée un environnement dans lequel la valeur économique n'est plus forcément le critère principal pour déterminer la valeur d'un actif . Cette financiarisation alimente la spéculation, mais les phénomènes « Robins des bois » de petits porteurs qui se rassemblent sur des plates-formes internet comme « Reddit », viennent troubler le jeu en infligeant de lourdes pertes à des fonds experts. C’est ce qui s’est passé avec « Gamestop » fournisseur de jeux vidéo, propriétaire de « Micromania » que ces derniers jouaient à la baisse : ces petits porteurs ont décidé d’acheter massivement et de façon concertée les actions de cette entreprise ciblée, et comme ils sont des millions, même avec des petites sommes, ils ont fait monter le cours de cette entreprise de 1 000 % en un rien de temps. Leur motivation était d’abord le jeu. L’argent, car la montée des cours leur a bien sûr profité, mais, à voir les messages postés sur les groupes d’échanges, un vague objectif politique aussi, comme faire payer la finance et la punir des désordres de la crise d’il y a douze ans. La persistance de ces raids boursiers a été suffisante pour inquiéter des investisseurs à la recherche d’opportunités plus fortes. Le bitcoin a été providentiel.
Une double révolution à venir.
La monnaie cryptée annonce pourtant d’autres évolutions. Pour beaucoup d'observateurs, les politiques monétaires ultra-accommodantes menées par les banques centrales conduiront fatalement à un regain d'inflation et à une fuite devant la monnaie. Par ailleurs, conjuguée à la digitalisation des usages, la technologie qui sous-tend le bitcoin, la » blockchain », devrait tôt ou tard révolutionner le monde des paiements et plus largement le secteur financier. Cette envolée reposerait donc sur de solides fondamentaux. Elle refléterait le rôle économique clé que le bitcoin est appelé à jouer, comme disrupteur, d'abord, comme valeur refuge, ensuite. L’inflation et la dévaluation monétaire sont les deux fléaux contre lesquels la devise électronique née il y a douze ans à peine offrirait une protection efficace. D'où son nouveau statut d'or digital, dont il ne faut pas s'étonner. C'est ce qui explique que les unes après les autres les grandes maisons de Wall Street en proposent désormais à leurs investisseurs à la recherche d'actifs à fort rendement , augmentant ainsi le nombre des acheteurs et donc la fièvre spéculative. En clair, le bitcoin est en train de devenir le subprime des années 2020. Cependant son marché limité aujourd'hui à 1.000 milliards de dollars est loin d'avoir le potentiel systémique de celui des crédits subprimes en 2007, mais la dynamique, elle, est quand même très préoccupante.
Dans l'euphorie actuelle, il offre donc des perspectives de gains élevés et rapides. Ou de pertes importantes en cas de retournement, comme on vient de le voir… Car son gros inconvénient, c’est qu’il n’y a pas d’amortisseur et ses mouvements sont largement imprévisibles. On estime que la volatilité du bitcoin est dix fois supérieure à celle du marché des actions. Avis aux amateurs de sensations fortes ! C’est bien pourquoi Janet Yellen, la secrétaire du Trésor, ex-patronne de la Fed, n'en est pas fan : « Je ne pense pas que le bitcoin soit largement utilisé comme mécanisme de transaction dans la mesure où il est utilisé, je le crains, souvent pour le financement illicite »…« Le bitcoin est un moyen extrêmement inefficace de mener des transactions et la quantité d'énergie consommée pour traiter ces transactions est stupéfiante ». Cela n’a pas empêché la cryptomonnaie de gagner 300% sur 6 mois. Bulle ???
Le bitcoin est un indicateur de plus de la folie du monde dans lequel nous vivons.
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