LA MILITANTE, L’ICONE ET LE PETIT JACOBIN ILLUSTRES
16 novembre 2008
La bouteille de champagne distribuée à tous les participants n’a pas produit d’effet salvateur ni éclairci les consciences. Bien sûr, les uns et les autres s’appliquent à minimiser l’impasse dans laquelle a sombré le congrès de Reims. « Les militants trancheront ». Il n’empêche que ce qui s’est passé est bel et bien un échec retentissant puisque rien n’en est sorti, sinon, le retrait de Bertrand DELANOE. Il reste donc trois prétendants en lice : Benoit HAMON qui avait annoncé sa candidature depuis longtemps et qui, conforté par un score flatteur pour lui, n’en démords et campe sur une ligne qui incarne le socialisme archaïque, jacobin et centralisateur, Ségolène ROYAL qui a dégainé la première en arrivant à Reims et qui continue à se présenter devant les militants avec ce discours décalé et « inspiré » teinté de populisme, et enfin Martine AUBRY qui voulait incarner un front militant au cœur des luttes sociales mais qui est contrainte de le faire sans le soutien des autres motions proches de la sienne.
Nous attendrons donc le résultat du vote des militants. Mais d’ores et déjà, Ségolène ROYAL a remporté une première victoire. En procédant de la sorte, le PS se retrouve dans une situation inédite : ce n’est plus une ligne définie par le congrès à travers une motion de synthèse que l’élu qui sortira vainqueur devra appliquer, mais l’inverse, c’est sur la légitimité de son élection que le futur premier secrétaire imposera au parti sa ligne d’action. Mais avec le risque de voir éclater une crise larvée entre un Conseil National et un bureau exécutif élus à la proportionnelle en désaccord avec son chef élu par les militants. Si Ségolène gagne, c’est une bonne nouvelle pour François BAYROU. N’oublions pas qu’il a fait son score présidentiel sur le rejet d’un certain nombre de socialistes de la candidature de Ségolène ROYAL. Si c’est Martine AUBRY, son positionnement très à gauche offre un boulevard à François BAYROU. Ne parlons pas de Benoit HAMON. Sa désignation est pratiquement impossible. Sa candidature est surtout faite pour maintenir la pression de l’ancrage à gauche et monnayer des places avant le probable second tour.
Parti de masse, présidentialisation, médiatisation du leader contre parti de militants, doctrinaire privilégiant la lutte sur le terrain… Deux thèses s’affrontent qui vont modeler le PS des prochaines années. Deux styles aussi : d’un côté, Ségolène l’icône, dont le langage quasi mystique et compassionnel traduit en fait son mépris des idéologues qui la combattent mais qui montre une technique de conquête du pouvoir impressionnante ; de l’autre, Martine, qu’on ne peut pas taxer d’ambitieuse, et qui est probablement la plus sincère dans son désir de remettre son parti dans le mouvement des luttes sociales et que la vocation « présidentielle » n’obsède pas. Quant à Bertrand, lui qui s’y voyait déjà, son amertume transpire par tous ses pores et explique la position qu’il a prise.
En attendant, le PS reste illisible et inaudible pour le Français moyen, ce qui explique la sévérité des jugements portés à son égard dans les sondages. Finalement, le gagnant du congrès de Reims, c’est François BAYROU. Jamais il n’aura eu autant de « publicité » gratuite, et quel que soit le résultat, il aura la possibilité d’en tirer un profit pour son parti. Incapable de gagner son pari tout seul, ce coup du pouce du PS pourrait bien être décisif pour l’avenir du MODEM.
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