HISTOIRE
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LE MAITRE DE L’ILLUSION

 

Hollande doigt pointé

« Je suis le vagabond,  je suis le marchand de bonheur, … vous me verrez passer chacun à votre tour… ». Il était dimanche au Bourget où il avait rameuté le gratin de ses soutiens et 25 000 fans. Quand j’évoque le vagabond, il ne s’agit pas de Yannick Noah, quoique… Non, évidemment c’est de François Hollande qu’il s’agit et de l’étape capitale de son tour de France, pour laquelle il avait annoncé un discours « fondateur » de sa campagne.

Le « coup d’envoi » permanent.

Encore un nouveau départ, me direz-vous. François Hollande pestait au départ contre le calendrier de la primaire, qu'il jugeait trop tardif. il plaidait pour une désignation du candidat avant l'été, estimant qu'un an n'était pas de trop pour défendre devant les Français une offre alternative à celle de Nicolas Sarkozy. Et plus le scrutin approche, plus la « mise en cohérence » des propositions du candidat socialiste semble retardée. L'« adresse aux Français », curieusement réservée au seul quotidien « Libération », a prouvé que la parole de François Hollande porte. Que les mots restent une arme dont il sait se servir avec talent. Depuis neuf mois, François Hollande a multiplié les coups d'envoi de sa campagne : déclaration de candidature le 31 mars, discours au soir de sa victoire à la primaire, le 16 octobre, discours d'investiture à la Halle Freyssinet, le 22 octobre. Sans compter ses passages au « 20 Heures » censés marquer à chaque fois une nouvelle étape. Celui qui rêve de succéder à François Mitterrand pratique le coup d'envoi permanent, une manière de ne pas laisser Nicolas Sarkozy dans le confort protecteur de la fonction présidentielle.

Conscient qu'une élection ne se gagne jamais sur un programme - même en 1981, ce ne sont pas les « 110 propositions » qui ont fait gagner Mitterrand -, François Hollande procède par  étapes. Le discours au Bourget est celle de la « vision personnelle ». A en croire les médias, l’exercice a été réussi. Mais faut-il les croire, eux qui sont prêts à « lécher » avant de « lâcher » puis de « lyncher »… ?  Effectivement tout a été soigneusement mis en scène pour  créer l’événement et faciliter l’illusion, rassurer les modérés et mobiliser la gauche.

Pendant une heure trente il n’a pas prononcé une seule fois le nom de Sarkozy, mais la fascination est là et le meeting de janvier 2007 à la porte de Versailles dans la tête. Sans avoir réuni 100 000 personnes, le mimétisme est palpable : fini le décor rouge, cher à la gauche, la salle est drapée de bleu à tel point qu’on se croirait à un meeting de l’UMP. Le rouge fait peur au bourgeois.  Pour mobiliser à gauche, ce sera la part du discours, lyrique à souhait, avec les références choisies et les confidences personnelles soigneusement égrenées pour émouvoir la salle. La gestuelle mitterrandienne jusqu’à la voix cassée complète le numéro. Le magicien a opéré. Dans ce registre, pas de doute, François Hollande est bon. Il est lui-même.

Que faut-il retenir des déclarations du candidat du PS ?

Peu importe que le contenu manque de précision, surtout quand il s’agit de l’économie. Pas un mot sur l’Europe et la crise, les défis du monde. On est dans une campagne franco-française, et il faut dire au bon peuple ce qu’il a envie d’entendre, même si les affirmations sont mensongères comme lorsqu’il affirme avec véhémence : « La crise qui sévit depuis le 15 septembre 2008, loin de l'affaiblir, l'a encore renforcé.... Les promesses de régulation, les incantations du +plus jamais ça+ sont restées lettre morte », pendant que les banques doivent faire face au processus « Bâle III » qui leur impose de lourdes contraintes.  C’est facile de déclarer la guerre à la « finance ».

Il a marqué sa volonté de se poser en « président de la fin des privilèges ». Sur les mesures, François Hollande promet une loi pour séparer banques de dépôts et banques d’investissements, pour interdire aux banques françaises d’être présentes dans les paradis fiscaux, pour supprimer les stock-options, la création d’une tranche d’imposition à 45 %… L’objectif est clair : être entendu à gauche, y compris auprès des électeurs populaires tentés par Marine Le Pen. Les réformes de structures, ce sera pour tout de suite ; la redistribution, ce sera pour plus tard, dans un deuxième temps, si la croissance revient. « Nous ne redistribuerons que ce que nous aurons fabriqué », en indiquant aussi que les effectifs de la fonction publique n’augmenteraient pas. Il a d’ailleurs redit son engagement à rétablir les finances publiques. Il ne faut tout de même pas fâcher les marchés !

Ce n’est pas un hasard : le seul homme politique dont il ait cité les mots est Pierre Mendès-France, emblème de la gauche morale et réaliste sur le plan économique. Sous les accents du tribun, sans doute faut-il aussi entendre ce message. Un élément étonnant est à relever cependant : l’absence totale dans ce discours du contexte international, de l’évolution de l’état des forces dans le monde, de l’Asie, du Brésil, des nouvelles technologies. Ce discours aurait-il pu être prononcé il y a cinq, dix, vingt ans ? Peut-être...

Donc, au total, François Hollande aurait marqué un point politique : tout ce que les militants rêvaient d'entendre aura été dit par un François Hollande, qui s'est gardé, en revanche, de parler des sujets qui fâchent. Un point économique, c’est à voir.

Incontestablement il a redonné du souffle à sa campagne, au moins pour ses convaincus qui désormais peuvent chanter : « Quand je pense à Hollande… ». Mais s’il a réussi son décollage de campagne au Bourget, n’oublions pas que c’est un aéroport confidentiel réservé aux courts courriers !

 

 

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