LA POLITIQUE DU PIRE.
05 décembre 2018
Philippe n’est pas à la hauteur.
J’ai encore en tête l’image de ce Premier Ministre désemparé faisant part de son émotion devant le triste spectacle des dégâts commis à l’Arc de Triomphe. Il était « choqué » ! Mais ce n’est pas ce qu’on attendait de lui. Ce sont les décisions pour faire respecter l’Etat qui ont manqué comme elles ont manqué à Notre-Dame des Landes. Il est l’image d’un pouvoir qui tremble et qui ne comprend pas ce qui lui arrive. De même, l’attitude de Darmanin à l’Assemblée nationale faite de mépris et de mauvaise foi quand il répond à l’opposition est insupportable. Ces gens-là ne se rendent pas compte à quel point ils suscitent la colère : celle que je ressens est à l’aune de celle de beaucoup de Français en gilets jaunes ou pas. Édouard Philippe, a enfin annoncé qu’il proposait un moratoire de six mois sur la hausse des taxes liées aux carburants le 1er janvier 2019. Les gilets jaunes traitent évidemment cette décision par le mépris et toutes les formations de l’opposition estiment que le geste est insuffisant. Il ne suffit pas de seriner « c’est un geste fort », un élément de langage auquel tous les ministres et tout ce que compte la macronie sont astreints, pour qu’il le soit. C’est trop peu et trop tard pour reprendre une vieille formule. Seul Daniel Cohn-Bendit regrette que la politique écologique du gouvernement recule. Vit-il seulement en France et y paie-t-il ses impôts ? Ce faisant l’exécutif se rend-il compte qu’il pratique la politique du pire ? Quand il annonce « une vaste concertation qui permettrait de dégager des pistes utiles » avec tous les partenaires et élus locaux, après des mois de mépris, il ne faut pas s’étonner s’il n’est pas pris au sérieux. Surtout que le « nouveau monde » continue de rejeter la responsabilité de la situation sur les représentants de « l’ancien monde » responsables de tout, à commencer par la désindustrialisation du pays. Ce qui est vrai c’est que le ras-le-bol fiscal a bien commencé avec la présidence Hollande, mais le gouvernement actuel, en prolongeant la même politique, l’a amplifié, ce que soulignent les élus « Les Républicains » depuis des mois. L’écrasement des classes moyennes a été pratiqué sciemment et la France périphérique traitée pour négligeable. L’explosion, Macron en porte toute la responsabilité. La liste des erreurs qu’il a ajoutées est longue : arrogance technocratique, amateurisme du groupe parlementaire En Marche et de ministres inconnus, pratique jacobine du pouvoir, excès de puissance de la caste de Bercy…
Macron joue la montre.
Et la ficelle est tellement grosse que même le « gilet jaune » de base, qui filtre son rond-point, l’a comprise : on fait la paix pendant six mois jusqu’aux élections, et on reprend le même chemin après. C’est irresponsable. L’atmosphère nationale est délétère : les pires exactions ont eu lieu et Macron continue de sous-estimer la colère d’un peuple qui n’a rien à perdre. Le « geste d’apaisement » est toujours attendu, mais le pouvoir refuse de voir la réalité. Il prend le risque de redonner l’opportunité aux bandes de casseurs de profiter de la prolongation du mouvement pour continuer à commettre leurs méfaits, tandis que les revendications d’une masse sans organisation vont croître et embellir dans tous les sens, sensiblement prise en main, par en-dessous, par les réseaux gauchistes. Ainsi vient se greffer une révolte lycéenne, poussée par les pédagogistes qui rêvent de faire reculer Blanquer sur ses décisions de bon sens. Il est peut-être encore temps : un changement radical des priorités et de la méthode est possible pour peu que la raison l’emporte sur l’entêtement. On attend que le régalien joue son rôle, et d’abord en faisant respecter l’ordre public, ce que la droite républicaine ne lui reprochera jamais, ensuite en remettant dans le jeu et pleinement, tous les rouages des institutions : coopération avec le Sénat, concertation avec les corps intermédiaires, réseaux d’élus locaux et syndicats. Aucune solution ne peut sortir du cri de colère exprimé par une masse informe. Cela ne veut pas dire qu’elle ne soit ni entendue, ni comprise.
Le RN en embuscade.
A voir la part belle que les médias donnent à la présidente du Rassemblement national, qui contribue à la remettre en selle, on peut se demander si ce n’est pas ce que recherche le pouvoir. Car elle reste la meilleure adversaire de Macron, qui lui garantit de rester au pouvoir. Un calcul machiavélique qui expliquerait que les brigades anti-émeutes de la gendarmerie n’aient pas été utilisées samedi dernier et soient restées l’arme au pied dans leur cantonnement à Versailles. C’est jouer avec le feu. Les concessions faites vont peut-être calmer l’ardeur des « gilets jaunes » modérés, mais il faut craindre qu’en s’étiolant, le mouvement ne se radicalise et devienne encore plus violent. C’est bien ce qu’espère le Rassemblement national. Il ne propose rien, il se contente de surfer sur les mécontentements d’un peuple dopé à l’Etat providence, socialisé comme jamais, où ceux qui bossent paient pour tous les régimes « sous conditions de ressources », pris dans l’enfer de ses contradictions à réclamer toujours plus de services à l’Etat sans se rendre compte que ce dernier ne peut même plus financer correctement ceux qui existent. Si le RN parvient jamais au pouvoir, on aura alors une pleine idée du pire.
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