ECONOMIE : DIX VERITES QU’IL FAUDRAIT PRENDRE EN COMPTE !
28 décembre 2018
Terminons l’année en beauté, avec une leçon d’économie donnée par Jacques de Larosière, histoire de donner de bons conseils à ceux qui auraient, un jour, l’idée géniale de vouloir redresser la situation de notre pauvre pays. Jacques de Larosière, ancien directeur du FMI à Washington, ex-gouverneur de la Banque de France, est aujourd’hui une exception, un homme hors Système qui parle vrai en matière économique. Le titre de son dernier ouvrage est tout un symbole : Les 10 préjugés qui nous mènent au désastre économique et financier.
Spéculation contre production.
Et c’est en citant l’incontournable Georges Maynard Keynes (encore lui) qu’il commence son ouvrage : « Lorsque l’organisation des marchés financiers se développe, l’activité de spéculer l’emporte sur l’activité d’entreprendre. » En bref : il dénonce la financiarisation extrême de l’économie mondiale actuelle et il est convaincu que la politique monétaire très laxiste menée par le président de la Fed, Alan Greenspan, de 1987 à 2006, a conduit à une surabondance de crédits et à la crise des « subprimes » de 2007-2008. Une bien belle vérité si l’on observe le fonctionnement de l’économie planétaire depuis qu’en 2008, la crise des subprimes nous a explosée au nez. Les capitaux n’allant pas à l’économie réelle, la compétitivité en souffre évidemment. En France, les biens d’équipement continuent d’être pénalisés par des prix trop élevés et d’insuffisantes innovations. En ce qui concerne le rapport moyen qualité-prix nous restons dans la moitié inférieure du classement européen.
Le choix de l’endettement.
De même, il s’élève contre l’hyper-endettement des gouvernements, des entreprises et des particuliers et la folie de la politique d’assouplissement quantitatif des banques centrales créant des liquidités monétaires pour mettre fin au krach de 2008. La dette publique française a pratiquement doublé en 10 ans. Dans la même période, 700 000 emplois ont été créés dans les collectivités locales sans que l’augmentation de la population ou l’amélioration des services rendus ne les justifient. Ces dérives sont liées au laxisme financier global. Jacques de Larosière estime, également, que la politique des taux d’intérêt nuls ou négatifs est de la folie pure et simple. L’effet pervers de ces politiques conduit à dérégler le système par la facilité qu’offrent le crédit et l’endettement alors que, par exemple, rien n’a été fait, en France, « pour allonger impérativement l’âge de départ en retraite ». Elles ont empêché les réformes structurelles du monde réel.
La course est engagée entre l’inflation et les taux d’intérêt.
Il est donc impératif de remonter les taux d’intérêt, suite à l’inflation qui devrait atteindre 3,5 % aux États-Unis, bien que Jay Powell, le président de la Fed, commence à fléchir, à douter quant au nombre de hausses de taux d’intérêt en 2019, qui pourraient être ramenées à deux au lieu de quatre. Seule a été confirmée, la majoration de 0,25 % du 19 décembre dernier, suite aux pressions de Trump et de Wall Street. Parallèlement, si on veut éviter la catastrophe, il faudrait assainir les finances publiques et réduire l’endettement. Un chemin que ni les Etats-Unis, ni la France n’ont décidé d’emprunter pour l’instant. Et pour cause : la Bank of America Merrill Lynch a déjà averti officiellement que la hausse des taux d’intérêt aux États-Unis pourrait déclencher une nouvelle crise. Le renoncement à la hausse des taux d’intérêts, qui ne peut être que provisoire, aura pour effet de prolonger la vie des « entreprises-zombies ». General Electric, par exemple, est présentement fragilisée par la hausse des taux d’intérêt. Ses ratios financiers se sont détériorés et sa capitalisation boursière est descendue en dessous de sa dette de 110 milliards de dollars.
Le système bancaire et la bourse.
Les banques ne sont pas en reste : elles maquillent leurs ratios financiers pour rassurer la galerie et mentent sur la réalité de leurs capitaux propres, ce qui permet aux médias d’affirmer qu’elles sont plus solides, en passant également sous silence le problème de l’hyper-endettement qui mènera à l’explosion. Des traders londoniens estiment que le système est redevenu très fragile et n’hésitent pas à dater le prochain krach à mars ou avril 2019, au moment du Brexit et des élections européennes. D’autres paramètres sont inquiétants : l’indice du Dow Jones rapporté au prix de l’once d’or tourne autour de 20, ce qui est phénoménal et dépasse le niveau de 2008. L’indice Wilshire 5.000, qui compare la valeur boursière des actions américaines au PIB américain, est à 1,4, soit au même niveau très élevé qu’en 2000, et supérieur, même à 2007. Ce qui semble n’émouvoir personne ! Un système monétaire international n’est qu’une manière de coordonner les politiques économiques des grands acteurs. Mais les données politiques actuelles ne semblent guère compatibles avec cette conception de l’intérêt collectif, car toute coordination implique une certaine limitation de la souveraineté si on veut maximiser le « bien commun ».
Un krach, c’est comme la mort.
L’événement est certain, mais personne ne connaît l’heure fatidique. Dans l’attente, le Système et les médias passent leur temps à mentir et à rassurer. On voit venir la catastrophe mais comme on ne sait pas comment arrêter le mécanisme, on ferme les yeux. C’est l’un des paradoxes les plus étranges de notre temps : « Abondance de savoir et pauvreté du savoir, on ne veut pas tirer les bonnes leçons », constate Jacques de Larosière. Et il précise : « il me semble que c’est une erreur d’attendre des économistes qu’ils prédisent avec précision les ruptures et les crises ».
Jacques de Larosière, les 10 préjugés qui nous mènent au désastre économique et financier. Odile Jacob.
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