COULIS D’ETE
03 août 2018
SUDOKU OU MOTS FLECHES ?
Sur la plage, la guerre fait rage.
Hormis les ados courbés sur leurs petits écrans, les autres tuent le temps, stylo en main, étalés sur leur serviette de plage, assis en tailleur ou affalés sur un pliant. Ils se partagent en deux camps : les « sudokistes » et les « mots-fléchistes ». Quelques « cruciverbistes » font encore de la résistance, mais ils sont nettement minoritaires et font clairement partie d’un autre âge, généralement vénérable.
La source d’approvisionnement.
Comme les cahiers de devoirs de vacances, ils fleurissent à l’étal du marchand de journaux du coin. Une sorte d’armistice a conduit à un partage égal du présentoir : d’un côté les recueils de grilles à neuf chiffres, classées par difficulté de 1 à 10 puis assortis d’épithètes plus ou moins terrifiants, « expert », « diabolique » et autre ; de l’autre, en carrés plus imposants, les recueils de grilles à définitions, eux aussi en ordre gradué par difficulté. Le marché hésite, bien que le jeu japonais, comme son nom l’indique, semble prendre l’avantage. Est-ce la perte du vocabulaire par l’usage abusif des textos qui décourage les quidams en mal de passe-temps ?
Il n’y a pas que les recueils du libraire.
Les vacanciers ont à leur disposition de nombreuses autres sources d’approvisionnement : le journal quotidien, les hebdomadaires, proposent généralement des grilles. Et comme tout le monde doit s’y retrouver, ils offrent la plupart du temps le choix, y compris des grilles de mots croisés, signe peut-être d’un lectorat vieillissant. Je n’ai, en effet, pas encore vu un jeune s’attaquer à un problème posé par Michel Laclos ou Claude Abitbol… Certains hebdos proposent des jeux gagnants avec des primes de 50 ou 100 € et même des lots allant jusqu’à 500 € ! Et je remarque que ce sont la plupart du temps les sudokus qui sont ainsi mis en exergue, preuve tangible d’un engouement. Mais les accros préfèrent les recueils qui permettent d’enchainer les problèmes, les uns après les autres.
Comme la pâte à crêpes.
Adepte de l’activité cérébrale, je préfère alterner les plaisirs. D’abord un bon bouquin sous le coude pour toile de fond. Dans ma panoplie de plage, un stylo à encre effaçable accompagne des grilles des deux types. Après la lecture, la grille de mots fléchés, au moins de force 3, garde ma prédilection : une bonne grosse et large grille. Parfois une série de définitions me résiste. C’est qu’il faut l’inspiration. Dans ce cas-là, comme pour le sudoku, il faut faire une pause, passer à une autre activité. Voilà pourquoi il faut avoir sous la main tout le nécessaire. C’est comme les positions sur le sable, au bout d’un moment, il faut en changer pour éviter les courbatures. Eh bien, les grilles c’est comme la pâte à crêpes, il faut laisser reposer. Après, c’est meilleur : souvent la solution qui ne voulait pas sortir, saute aux yeux subitement, le croisement de deux lignes dégage une case qui permet de placer le chiffre décisif, le mot qui ne prenait pas forme jaillit dans un éclair de lucidité.
Choix des stratégies.
D’une personne à l’autre, la manière de procéder diffère. Pour le sudoku, j’ai observé deux types d’approche. Il y a ceux qui procèdent par tâtonnement une fois épuisées les évidences. Il s’agit d’essais successifs au crayon qui remplissent les cases de petits chiffres pouvant convenir, jusqu’à la solution qui fonctionne, au risque de s’empaler sur une erreur dans la dernière ligne droite. Cela m’a toujours paru laborieux. La procédure par la logique pure me convient mieux. Il faut de la perspicacité, jouer sur les colonnes ou les lignes rendues obligatoires pour un chiffre, sans connaître son positionnement exact dans un casier, pour l’inscrire par déduction avec certitude dans le casier où il manque. Parfois, il faut faire la manipulation sur deux « tiroirs » successivement : c’est là qu’il faut rester concentré. Là encore, il faut multiplier les démarches en les associant : par élimination, par cumul, par énumération … Une astuce : je commence toujours une grille par les trois casiers du côté droit. J’ai constaté que c’était un bon moyen de démarrer. C’est peut-être parce que le concepteur l’a terminée par ce côté-là. Pour les mots fléchés, c’est moins complexe. En général un premier balayage de la grille permet de trouver une première série de mots correspondants aux définitions. Ensuite, si on hésite, les lettres posées peuvent orienter la recherche. Il faut compter avec l’humour du concepteur qui donne parfois des définitions « tirées par les cheveux », mais ça fait partie du plaisir. Tiens, par exemple, « pour la coiffure » ou « en hiver », en trois lettres : « gel » évidemment ! Bon, il y a plus subtil, j’en conviens.
Sur ce, bonne plage !
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