SOUTENIR LA DEMANDE : UNE ERREUR ECONOMIQUE
20 avril 2018
Le gouvernement actuel a repris tous les « standards » de la politique suivie depuis 2012 : prélèvement massif par les impôts (hausse de la CSG, multiplication des prélèvements par les taxes) pour financer par redistribution et transferts divers de cotisations la demande, ce qu’on appelle une « relance par la consommation ». Ce n’est pas cette politique qu’il aurait fallu mettre en œuvre. L’idée de la nécessité du soutien de la demande de biens et services et du risque qu'il y aurait à réduire les déficits publics hante nos technocrates. Notre politique économique reste imprégnée par le keynésianisme comme l’a souligné Patrick Artus dans une récente tribune dans les Echos. Et dans son livre « Osons l’Europe » Christian Saint-Etienne fait un constat qui va dans le même sens. Cette option a besoin d’une politique monétaire avec des taux d'intérêt très bas pour la poursuite d'une politique budgétaire expansionniste (augmentation des dépenses) que l'on préfère à la réduction du déficit public.
Plusieurs facteurs font douter de la pertinence du soutien de la demande aujourd'hui en France.
Tous les signes montrent d'abord que le taux de chômage est proche de son niveau structurel, celui que la seule reprise conjoncturelle ne peut faire disparaître, et on observe que les difficultés d'embauche des entreprises sont très importantes. Ces dernières se plaignent par conséquent davantage de problèmes d'offre que de problèmes de demande. Par ailleurs le commerce extérieur de la France se dégrade rapidement, conséquence logique d’une demande qui amplifie les importations, signe que l'appareil productif n'est pas en état de répondre à la progression de celle-ci. Dans cette situation, il est donc inutile de stimuler la demande de biens et services sauf à aggraver la dégradation du commerce extérieur et l'inflation salariale. Précisons que contrairement aux idées reçues de nos technocrates, les travaux de recherche montrent que la réduction du déficit public par la baisse des dépenses publiques a peu d'effets négatifs sur l'activité, à la différence de la pression fiscale qui est le vrai frein.
Vers une hausse des taux.
On ne peut enfin pas supposer que la BCE va maintenir perpétuellement des taux d'intérêt bas. C’est pourtant le pari que font Les « keynésiens ». Pourtant les taux d'intérêt à long terme commencent à remonter dans la zone euro (pour la France de 0,6 % en décembre 2017 à 0,9 % en mars 2018 pour le taux d'intérêt à 10 ans). Il serait donc nécessaire de commencer à réduire le taux d'endettement public, mais ce n'est pas le cas : le déficit public de la France est toujours 1 point de PIB supérieur à celui qui stabiliserait le taux d'endettement public. C’est donc un pari dangereux. Comme le souligne Patrick Artus : « Même si les prévisions faites par les organisations internationales, par les gouvernements, par la Banque centrale européenne, montrent toutes la poursuite d'une croissance forte dans la zone euro pendant plusieurs années, il faut se rendre à l'évidence : le pic de croissance qu'elle a atteint à la fin de 2017 est désormais derrière nous. La zone euro a en effet dépassé son point de retournement cyclique et la croissance va y diminuer progressivement. »
S’adapter rapidement.
L'urgence en termes de politique économique devient la réduction du chômage structurel, par des politiques de formation, de requalification et par la baisse des impôts qui accroissent le coût du travail. Par ailleurs, le ralentissement de la croissance va rendre plus difficile la réduction promise des déficits publics dans les pays où ils sont encore excessifs, comme la France. De son côté Christian Saint-Etienne énumère les quatre problèmes clés que notre pays doit corriger. D’abord arrêter la dérive de la dette publique en reprenant le contrôle de la dépense publique pour revenir rapidement à 1% du PIB ; réformer le marché du travail en introduisant plus de flexibilité en contrepartie d’un effort accru de formation ; redonner au pays une fiscalité compétitive en Europe ; enfin, augmenter son effort de recherche et d’innovation et rénover/robotiser son appareil de production pour qu’il réussisse dans « l’iconomie entrepreneuriale ». Le moins qu’on puisse dire, c’est que la politique de Macron ne répond que très partiellement à ces urgences.
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