PUISQU’IL EST HEU-REUX !
20 novembre 2017
« Heu-reux ! »... comme le cantonnier de Fernand Reynaud
C’est la une du magazine Les Echos en parlant d’Edouard Philippe. Il est bien le premier à occuper Matignon avec un tel sentiment. Difficile de juger pourquoi. D’habitude, on en parle plutôt comme d’un enfer. Peut-être de l’inconscience, comme celle qui le conduit à ne pas mesurer les dégâts que sa nomination a provoquée dans notre famille politique et nos électeurs. Au moins a-t-il la lucidité de penser que ce poste, il ne l’aurait jamais eu, même en cas de victoire de son mentor Alain Juppé. Et pour cause : si on l’aurait bien vu comme Secrétaire d’Etat aux Affaires maritimes, un poste fait pour le Maire du Havre, tout le monde peut constater qu’il flotte dans un costume un peu trop grand pour lui. S’il se voit en chef d’orchestre, alors c’est celui de l’harmonie municipale, parce qu’il n’a rien d’un Karajan. Enfin, puisqu’il se dit « heu-reux », laissons-le à ses béatitudes. N’est-ce pas « mon poulet » !
Deux options, et alors ?
Plus intéressantes sont les informations que l’article nous livre sur les dessous de sa nomination à Matignon. Tout serait venu d’un bureau politique mouvementé chez Les Républicains où les participants n’avaient pas pu se mettre d’accord pour un appel unanime pour le second tour après l’élimination de François Fillon. Deux lignes s’affrontaient : les partisans d’un appel en faveur de Macron, et ceux qui souhaitaient prôner l’abstention ou le simple appel à faire barrage à Marine Le Pen. A ce moment-là, le risque de l’élection de cette dernière était faible, mais réel. Risque qui s’amenuisa considérablement après le « face-à-face ». Fallait-il pour autant, comme Edouard Philippe l’a fait, se précipiter en compagnie de Thierry Solère, et le soir même, chez Macron, qui, tel un renard tapis sous les branchages, n’attendait que ça. Un coup de tête sous l’effet de la colère. On connait la suite, même les conseils de prudence d’Alain Juppé n’y firent rien. A aucun instant, les deux protagonistes ne se sont posé la question de savoir ce que souhaitaient les électeurs de la droite. Or, ils étaient très partagés. Autrement dit, les deux options qui s’affrontaient avaient des arguments recevables. A aucun moment il n’y a eu de volonté de quiconque de favoriser l’élection de Marine Le Pen. Ils auraient dû le prendre en compte, mais non. D’ailleurs, c’est une querelle sans intérêt parce que les électeurs n’en ont fait qu’à leur tête. C’est donc un faux débat devenu un prétexte pour valider une démarche d’ambition personnelle. Ce qui fait qu’elle constitue bien une trahison puisqu’elle plantait un coup de couteau dans le dos à leurs propres amis à la veille des Législatives. Elle serait intervenue après eût été différent. Sauf qu’elle perdait tout intérêt pour l’hôte de l’Elysée qui aurait alors négocié avec une représentation de la droite beaucoup plus fournie. Et donc la nomination d’un premier ministre différent.
Le piège du vote par défaut.
J’ai voté Macron. Non par adhésion à un programme que je n’approuvais pas, mais pour être certain que l’extrême droite ne prendrait pas le pouvoir. Ce n’est pas sans avoir beaucoup hésité, persuadé que cette éventualité avait pris beaucoup de plomb dans l’aile après le débat. Mes amis Républicains autour de moi se sont abstenus ou ont voté blanc. Personne n’en a voulu à personne. Chacun a choisi ce qui lui paraissait le mieux à faire. Et certains de nos leaders nationaux qui continuent de faire le reproche à ceux qui ont refusé d’appeler à voter Macron feraient bien d’adopter la même attitude de respect et de bienveillance. Sauf qu’aujourd’hui, quand je vois le petit chef à la manœuvre, je regrette de lui avoir apporté ma voix d’autant plus que je dois subir une politique que je n’approuve pas. Et je ne devrais même pas m’en plaindre ! Le fait qu’il ait nommé un Ministre de l’Education qui fait du bon boulot met un peu de baume sur la plaie, mais n’empêche pas de voir le reste. Les petites manœuvres pour diviser la droite, les demi-mesures, la saignée fiscale à nouveau… sans qu’on touche aux fondamentaux de l’excès de dépenses et de gonflement de la dette. Cela fait beaucoup à supporter. Par conséquent, pour moi les « Constructifs » continuent d’être dans l’erreur et je les juge sévèrement. Quant à tout faire pour que Macron réussisse, ce sera sans moi, persuadé que sa politique mène à une impasse. Cela n’empêche pas de souhaiter le meilleur possible pour la France puisqu’on a un premier ministre heu-reux !
Plus que jamais, nous avons besoin d'une droite solide.
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