LE SENAT POUR LES NULS
13 septembre 2017
Demain, notre sénatrice sortante, Catherine Deroche, reçoit Gérard Larcher, Président du Sénat, venu en Anjou pour soutenir sa liste.
C’est le moment de rappeler à tous quel est le rôle du Sénat, cette assemblée souvent qualifiée d’inutile par les ignorants ou les antiparlementaristes, et qui joue un rôle pourtant essentiel dans les rouages de notre république.
Le Sénat est la seconde assemblée législative.
Tous les projets de loi lui sont soumis et il a le pouvoir de les modifier, amender, rectifier… Un travail très approfondi sur les textes qui, la plupart du temps les améliore, souvent avec un large consensus qui transcende les clivages politiques. Un apport essentiel ignoré parce que peu médiatisé. Mais il n’a pas le dernier mot. Si la plupart du temps la commission mixte Sénat-Assemblée nationale parvient à se mettre d’accord sur le texte final, il arrive que pour les projets très « politiques » un désaccord persiste. En ce cas, la loi repart à l’Assemblée nationale en seconde lecture et le texte est voté définitivement.
Le Président du Sénat est le second personnage de l’Etat.
En cas de vacance présidentielle, c’est lui qui assure l’intérim de l’Elysée et est chargé d’organiser une nouvelle élection. La dernière fois que c’est arrivé, c’est avec la mort de Georges Pompidou avant la fin de son septennat. Ce statut confère à l’Assemblée du palais du Luxembourg un rôle éminent voulu par la Constitution.
Le 24 septembre prochain, auront lieu les élections des 170 sénateurs renouvelables sur 348 dans la moitié des départements, pour un mandat de six ans.
En effet, le Sénat est renouvelable par moitié, ce qui le met à l’abri des variations brutales d’élans politiques que l’Assemblée nationale peut connaitre. C’est un havre de stabilité. Cette année ce sont les départements allant, dans l’ordre minéralogique, de l’Indre-et-Loire aux Pyrénées-Orientales ainsi que les départements d’Île-de-France, et outre-mer, la Guadeloupe, la Martinique, la Réunion, Mayotte, la Nouvelle-Calédonie et Saint-Pierre-et-Miquelon. Les sénateurs ou sénatrices sont élus au suffrage universel indirect par un collège d’environ 160 000 grands électeurs. Dans chaque département, ils sont élus par des élus locaux : députés et sénateurs de la circonscription, conseillers régionaux et départementaux et délégués des conseillers municipaux, au scrutin majoritaire à deux tours dans les départements représentés au maximum par trois sénateurs, et à la représentation proportionnelle dans les départements de quatre sénateurs ou plus. Les partis doivent présenter un binôme titulaire/suppléant paritaire pour les scrutins majoritaires et une liste en alternance homme/femme (ou l’inverse) pour les scrutins proportionnels, sous peine de sanctions financières. Il faut être âgé d’au moins 24 ans pour être candidat aux élections sénatoriales. En Maine-et-Loire, il y a quatre sièges à pourvoir, c’est donc la proportionnelle qui s’applique.
Les enjeux du scrutin.
La droite sénatoriale, qui a reconquis la majorité en 2014, renouvelle moins de la moitié de ses sièges lors de ces élections. Elle devrait être mathématiquement confortée par cette élection, d’autant plus qu’elle a gagné les élections intermédiaires depuis. Mais rien n’est jamais certain bien qu’on puisse penser que les « grands électeurs » soient moins perméables aux intempéries du moment créées par l’élection présidentielle et ses « scories » avec la création de listes LREM pour le moins bigarrées. Certains groupes politiques du Sénat jouent leur avenir avec ce renouvellement. Le groupe écologiste remet en jeu les 10 sièges qu’il détenait depuis 2011 et aura des difficultés à se reconstituer. Même inquiétude du côté du groupe communiste, qui renouvelle 19 de ses 21 sièges en septembre prochain. Les socialistes, dont 64 sièges sur 109 sont renouvelables, amoindri par la sécession de François Patriat qui a créé un groupe LREM, devraient voir leur place diminuer dans la Haute Assemblée. Selon les estimations de certains sénateurs, le groupe devrait perdre entre 10 et 30 sièges. Or, au moins 10 sièges de sénateur sont nécessaires pour former un groupe politique au Sénat. Il importe, pour l’équilibre des pouvoirs, que dans le contexte actuel, la droite garde la majorité au Sénat. D’autant plus que le président et le gouvernement ont raté le rendez-vous de confiance avec les élus locaux.
Le Sénat est l’assemblée représentative des « territoires ».
Une mission très importante. Grâce au Sénat, les territoires ruraux de la République ont un espace de représentation et d’expression pour faire remonter les problématiques qui leur sont propres. L’équilibre des territoires doit être le leit-motiv, dans un pays qui a besoin de retrouver des éléments de confiance, notamment ceux qui se sentent oubliés. On pensait que le nouveau président l’avait compris : la création du Conseil national des territoires au Sénat est une bonne idée. Mais la relation de confiance qui aurait pu s’établir dans ce cadre avec le gouvernement a été immédiatement contrebattue par des décisions assénées sans concertation : suppression brutale des emplois aidés que nombre de collectivités auront du mal à remplacer, 13 milliards de baisse des dotations sur le quinquennat, 300 millions sur le budget 2017… La réalité d’aujourd’hui, c’est que l’autonomie financière des collectivités locales est menacée gravement, aggravée par la suppression à terme de la taxe d’habitation qui, de surcroit, affaiblira un peu plus la relation entre le citoyen-contribuable et la collectivité.
Dans ce contexte, il importe que le Sénat reste une voix différente.
Une voix indépendante et exigeante, avec l’esprit de concertation et la recherche des consensus qui sont dans son ADN. L’équilibre des pouvoirs passe par une façon de faire la loi autrement. Justement le Sénat est le garant de cet équilibre des pouvoirs, en étant un contre-pouvoir parlementaire indispensable au fonctionnement de la démocratie. Le spectacle donné par le groupe parlementaire En Marche à l’Assemblée nationale n’incite pas à lui confier les rênes au Sénat. Quant aux constructifs qu’apporteraient –ils de plus à une assemblée dont la méthode de travail est déjà dans cet esprit-là, sinon un peu plus de confusion ? Au contraire, la Haute Assemblée a besoin d’élus de convictions, fidèles à leurs idéaux et c’est de cette confrontation que sortent les meilleurs textes.
Les Républicains constituent le principal groupe de la majorité sénatoriale actuelle. Le 24 septembre, il doit le rester. C’est le meilleur message que l’on puisse envoyer à l’exécutif.
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