SCHISME AU PS ?
26 février 2016
Les socialistes attendent le retour de Hollande, comme on attend le Messie. « Rain Man », qui profite peut-être, entre deux averses, de ses derniers mois de mandat pour faire à nos frais tous les voyages qu'il rêvait de faire, va devoir arbitrer entre Valls et Aubry. Nous saurons donc si la loi « El Khomri » va suivre le chemin de la loi Macron, ou si on va avoir, enfin, un début de réforme.
« Pas ça, pas nous, pas la gauche ! »
Le cri du coeur : Martine Aubry charge sabre au clair! Pas étonnant que la femme qui a légalisé la paresse en France s'offusque de la nouvelle loi sur le travail proposée par Valls, mais c’est surtout un prétexte. L’heure de la grande explication a sonné : la charge de l’ancienne Première Secrétaire et de quelques-uns de ses amis contre l’exécutif est d’une telle violence qu’elle ne peut pas rester sans réponse et ne sera pas sans conséquence. D’ailleurs les menaces que contient le texte au vitriol publié dans le Monde (contre le vote sur la déchéance de nationalité, contre la loi El Khomri, et pour la censure éventuellement… ) sont suffisamment précises pour qu’il soit impossible au gouvernement d’esquiver. Tout le texte est violent : il évoque le quinquennat comme un échec qui conduit à l’ « affaiblissement durable de la France ». Il fait le compte des quatre consultations électorales perdues par la gauche, du pacte passé avec le patronat, le CICE, qui n’a pas créé d’emplois, à quoi il faut ajouter la déchéance de nationalité et, enfin et surtout, la réforme du travail telle qu’elle est exposée dans le projet de loi. La charge contient toute la hargne de l’amère de Lille traduite dans un un aveu inquiétant : « Que le patronat institutionnel porte ces revendications, pourquoi pas ? Mais qu’elles deviennent les lois de la République, sûrement pas ! Pas ça, pas nous, pas la gauche ! ». Tout est dit. Le socialisme archaïque de la lutte des classes vient de parler.
Les masques tombent.
A l'approche des élections de 2017, la gauche entre en guerre avec elle-même : d'un côté le camp des historiques passéistes, de l'autre Les « chevau-légers » du camp des sociaux-démocrates réformistes. C’est un combat historique qui se déroule sous nos yeux éberlués. Il était inévitable depuis que l’axe Valls-Macron tente d’imposer sa logique. Il n’est pas certain qu’à l’issue on sache ce que sera la ligne du parti dans les prochaines années. Mais si c’était une bataille pour trancher entre le socialisme historique et celui du réel, ce serait une bonne nouvelle. Ce qui se joue une fois de plus, c’est un nouveau round dans l’affrontement déjà vécu lors des primaires de 2011-2012, quand s’étaient affrontées les idées des Montebourg, Aubry, Valls et Hollande. Doit-on déduire de cette offensive menée en l’absence du principal intéressé, que la coexistence plus ou moins pacifique, seulement troublée par quelques frondeurs velléitaires, plus bruyants que méchants, est terminée ? En résumé, on peut penser que ce qui se joue à propos de l’épisode « El Khomry », c’est une sorte de premier tour des primaires de 2016-2017. Personne ne peut certifier aujourd’hui qu’une telle consultation aura vraiment lieu. Il est possible que les diverses composantes de la gauche aillent en ordre dispersé à l’élection présidentielle. Mais avec les désaccords qui minent les nombreuses tendances du Parti, cette querelle ne sera vidée au moment de l’échéance présidentielle. Mais ce serait un choix périlleux pour le PS.
La gauche de la régression en action.
Calcul ou déclaration de guerre : un peu les deux. Nous assistons à un épisode qui n’est pas que picrocholien. C’est la gauche aveugle qui se réveille, celle qui campe sur ses vieilles lunes, à l’idéologie inoxydable, celle qui pourrit toute velléïté de réforme dans notre pays, celle qui a raison même contre les faits, celle qui intimide la droite quand elle est au pouvoir en organisant le blocage du pays. On lui doit en grande partie l’état de nos finances, de la dette et du chômage. Je demande d’imaginer ce qui se serait passé si Nicolas Sarkozy avait été réélu de justesse, quel pouvoir de nuisance elle aurait mis en branle pour l’empêcher de faire les réformes promises. Cette gauche est capable aujourd’hui de mettre le pays à feu et à sang pour une loi qui n’est que le dixième de ce qu’il faudrait faire pour relancer l’économie. C’est à cause d’elle que la parole publique a perdu son crédit, à force de promettre plus de beurre que de pain, pour n’avoir à la fin, ni l’un ni l’autre ! Tant que cette gauche aura du pouvoir sur les âmes crédules, la réforme sera toujours un exercice de haute voltige et ceux qui nous promettent, à droite, monts et merveilles, feraient bien de s’armer en conséquence pour en tenir compte et surtout nous dire comme ils lui régleront son compte. Peu importe que la tribune de Mme Aubry ne contienne d’ailleurs aucune proposition concrète, elle se veut avant tout un pavé dans la mare. Mais à quoi donc peut-elle servir alors que celui qui est visé est éloigné de la France ? Un coup de poignard dans le dos pour placer l’Elysée et Matignon sur la défensive, car elle oblige le pouvoir à réagir dans un sens ou dans l’autre. Elle casse le parti socialiste et donne des ailes à la gauche de la gauche. Elle divise la gauche à treize mois de l’élection présidentielle et la prive de sa dernière chance de gagner. Bref, elle fait ce qu’il faut pour que 2017 ne soit qu’une explication entre la droite et l’extrême droite.
Au fond, c’est peut-être là la chance pour la droite républicaine de s’emparer de la réforme pour de bon !
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