HISTOIRE
SUPPLIQUE POUR LE DEPART DE HOLLANDE AVANT L’HEURE
SAPIN L’APOTHICAIRE

LA BAUDRUCHE LE PEN

Marine Le Pen

Dopé par un scrutin, faussé par la faible participation, celui des Européennes, le Front National est crédité d’une audience artificielle qui, comme les fois précédentes, sera démentie par les élections suivantes. Cela ne veut pas dire qu’il ne soit pas à un niveau plus élevé qu’autrefois. L’action de Marine Le Pen, grâce à son discours caméléon, à droite : regardez l’immigration, à gauche : voyez mon programme social, a réussi à agréger à quelque 10% de transfuges de droite, 10% de mélenchonistes et 12% de transfuges de chez Hollande. Cela lui a donné un avantage certain qui l’a fait monter dans les études d’opinion, d’autant plus qu’elle était face à un double vide : celui du pouvoir actuel et celui créé par l’absence de leadership à droite. Le retour de Nicolas Sarkozy, c’est la fin de la fête pour la Shinzo Abe en jupons.

La baudruche va se dégonfler.

Pour de multiples raisons. Marine Le Pen aura du mal à rester sur la crête actuelle qui la fait surfer, selon les études d’opinion, entre 25% et 30% à un premier tour de présidentielle. Mais on n’est pas encore en 2017. La désespérance actuelle entretenue par la présidence déprimante de François Hollande et les mauvaises performances économiques qui se traduisent par la montée inexorable du chômage y sont pour quelque chose. Le paysage politique est en train de changer et elle a tout à craindre de la réorganisation de la droite et du centre. 2017, c’est demain, mais en vie politique et à la vitesse où se font et se défont les opinions, c’est dans un siècle.

Un discours qui se présente comme un gigantesque bazar.

Son nationalisme incantatoire, qui fait une utilisation électoraliste de la poussée migratoire et de l’angoisse identitaire, se complait dans le registre contestataire. Le Front National soulève plus de difficultés qu’il ne propose de solutions. On reste sur la ligne traditionnelle d’une droite nationaliste incapable de proposer des remèdes crédibles, par manque d’expérience du pouvoir ou par insuffisance de connaissance concrète des dossiers.  Marine Le Pen y ajoute une phraséologie de gauche, démagogue, vaguement laïcarde par son islamophobie, et dont les accents cégétistes sont très proches des rodomontades de M. Mélenchon.

L’illusion de la potion magique.

Il faut lire l’interview  de Marine Le Pen dans Le Figaro : on y découvre des réponses stupéfiantes de facilité et de naïveté, quelques vérités du genre « seul l’emploi fera baisser les déficits et la dette » au milieu d’un océan d’assertions gratuites et de certitudes toutes faites dont on peut douter  du réalisme. Son raisonnement qui consiste à passer par la monnaie reprend le schéma du premier Ministre japonais, Shinzo Abe, ce faucon de droite en matière de politique étrangère et de gauche en matière économique et sociale. Le parallélisme est tentant. Celui-ci a cru qu’en inondant son pays de Yens, il allait relancer son économie. C’est un formidable flop auquel il doit faire face. Une leçon que la patronne du FN devrait méditer et faire étudier par son Philippot de service. Une leçon surtout qu’il faut enseigner à tous les Français séduits par ses arguments. Dévaluer la monnaie, c’est peut-être la facilité, mais ce n’est surtout pas la potion magique.

Des propositions outrancières sur l’Europe

La nouveauté c’est que désormais, elle ne se contente plus d’une sortie ordonnée de l’euro, elle propose de tourner le dos purement et simplement à l’Union européenne, pour restaurer quatre souverainetés qu’elle juge essentielle : territoriale (illusoire si elle croit endiguer par ce moyen l’immigration clandestine), monétaire (avec un retour au Franc et à la planche à billets de triste mémoire pour notre économie), législative (pourtant l’Europe est à l’origine de nombres d’avancées dans notre législation), et économique ( totalement illusoire tant les économies de l’union sont imbriquées les unes dans les autres). Un discours de souveraineté que plus de 2 000 milliards de dette devrait rendre beaucoup plus humble. Les mots ne sont pas suffisants pour changer les réalités.

Un moralisme incantatoire et antiparlementaire qui oscille entre poujadisme et pétainisme.

Le peuple vertueux et les élites corrompues sont des raccourcis faciles qui surfent sur la confusion des registres, la perte des repères, les peurs  et le désespoir. Il est toujours facile d’ironiser sur les « affaires » ou sur les banques qui se gavent. L’actualité, bonne fille, fournit toujours le « bon exemple » qu’on peut mettre en exergue. Le principe de généralisation fait le reste. Encore faudrait-il être exemplaire avant de donner ce genre de leçons.

Un parti qui montre ses biscotos  mais aux pieds d’argile.

Le FN s’est montré sous son vrai jour : la propagande nous vend le « premier parti de France ». Il a soi-disant 80 000 adhérents (quand l’UMP en compte encore 260 000 malgré ses vicissitudes) mais seulement 20 000 votent pour élire une présidente sans concurrents. Cherchez l’erreur. Et en interne, il y a conflit entre la ligne « traditionnelle » marquée « Le Pen » incarnée par Marion Maréchal, et la ligne moderno-gaucho-néo-gaulliste-fourre-tout de Florian Philippot. Croire que l’extrême-droite est monolithique est une billevesée. Elle a toujours été traversée de courants concurrents dont l’agrégation est toujours conjoncturelle. Un peu comme l’extrême gauche.

Le retour de la droite républicaine en première ligne.

Face à la stratégie « passe-muraille » et attrape tout de Marine Le Pen, la droite à une bonne carte à jouer. D’autant plus que l’électorat frontiste n’est pas encore figé. Nombre d’électeurs reviennent déjà dans le giron républicain, effrayés qu’ils sont par la gauchisation des propositions qu’ils savent irréalistes, tant sur le retour de la retraite à soixante ans que sur l’augmentation alléchante du SMIC. Une UMP réorganisée aura beau jeu de dénoncer le tropisme prorusse, le bilan controversé des maires du FN, les dérapages du père, l’ineptie d’un programme économique fourre-tout. 

Les ides de mars constitueront l’épreuve de vérité

Il ne suffit pas d’affirmations péremptoires qui correspondent à des fantasmes pour en faire des réalités. Avec les Français, la méthode Coué a ses limites. En mars, auront lieu les élections cantonales. Des élections qui exigent un enracinement et des réseaux pour présenter des candidats crédibles que le parti frontiste n’a pas, un corps de militants pour faire campagne plus à la mesure des 260 000 adhérents de l’UMP. Ces élections, en outre, à cause du nouveau découpage seront éminemment politiques, à l’inverse des consultations précédentes. Bref, c’est en mars que la baudruche Le Pen, telle la grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le bœuf, va commencer à se dégonfler.

 

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