NOTRE SOUVERAINETE HUMILIEE
27 octobre 2014
L’Elysée a beau tenter de minimiser l’affaire, pratiquer à son habitude l’art de l’enfumage, présenter le dos rond, faire comme si… le budget 2015 pose bel et bien problème et la Commission, chargée de faire appliquer les règles, s’en est émue suffisamment pour écrire au Président de la République ses griefs et demander à notre pays de faire les ajustements nécessaires.
Il n’y a pas lieu de crier à la violation de souveraineté. C’est la France qui en l’occurrence ne respecte pas sa signature, en tentant de s’affranchir de règles qu’elle a elle-même souhaitées, oubliant qu’elle doit assumer sa part de la « souveraineté partagée » avec nos partenaires européens dans la maison commune, la zone euro. Le pouvoir actuel doit assumer la continuité de l’Etat, en assumant les clauses du « Pacte de Stabilité » voulu par l’Allemagne et la France en 1998 pour encadrer le « laxisme » économique de certains petits partenaires qui pouvait affaiblir la monnaie commune. Par son comportement irresponsable la France la met en danger au moment où elle sort d’une crise qui a failli provoquer sa disparition. D’autant plus que les partenaires visés lors sont ceux qui ont fait les plus gros efforts ces deux dernières années pour entrer « dans les clous ».
Oui, un comportement irresponsable.
Pourquoi vouloir cacher la réalité puisqu’elle est rendue publique par l’incontournable Mediapart. La Commission fait trois reproches au gouvernement français : non seulement il ne respecte pas son engagement de revenir aux 3% de déficit mais les 4,3% de prévision révèlent des efforts insuffisants de réduction des dépenses, le manque de documentation pour les 21 milliards d’euros d’économies annoncés dont seulement 8 milliards sont identifiés, la faiblesse des réformes structurelles qui annonceraient à terme une consolidation de la diminution des dépenses.
De même la réponse que Bercy a fait parvenir à Bruxelles et que le Ministre aurait voulue « discrète » n’est pas restée longtemps confidentielle. Les arguments avancés restent fumeux et légers : si les objectifs ne sont pas atteints c’est à cause de la conjoncture européenne atone et de la faible inflation. Première explication en clair : on espérait vous mener en bateau avec de la monnaie de singe. Ensuite, on s’amuse à jouer sur les statistiques en arguant le changement de méthode comptable de Bruxelles pour expliquer le dérapage sur le déficit structurel en oubliant que même avec ce raisonnement, il manque au moins 4 milliards avec ce que la Commission peut tolérer et encore en acceptant une prévision de croissance surestimée… Enfin vient l’argument politique : on ne peut pas faire plus parce qu’on n’a pas la majorité pour voter les décisions, avec un chantage sous-entendu de la menace du FN esquissé sous la forme : « le risque de rejet de l’Europe ». Et les 3,6 milliards d'euros trouvés inopinément par Sapin-les-socquettes-roses font tellement bricolage de dernière minute que la manoeuvre sensée satisfaire la Commission achève de ridiculiser la France.
C’est lâche et démagogique.
Car, l’exécutif ment aux Français sur les causes réelles de la situation dans laquelle nous nous trouvons, ce dont le gouvernement ne peut s’exonérer, il minimise l’importance de nos engagements auprès de nos partenaires, ce qui disqualifie la France, il cherche à faire constamment porter le chapeau à l’Allemagne, ce qui rend un mauvais service à la fois à notre pays et à l’Europe.
La vérité, c’est que le Président n’a plus aucune marge de manœuvre, alors que son Premier Ministre a déjà consommé tout son crédit et s’est ridiculisé à courir les capitales pour aller clamer haut et fort une volonté politique démentie aussitôt par les chiffres et les faits, que n’ayant plus le soutien ni de sa majorité-peau-de-chagrin, ni du peuple, il tente la stratégie du hérisson. Sauf qu’il n’a pas de piquants. L’un peut appeler au « rassemblement », l’autre tendre la main au « Centre » : ils prêchent dans le désert. Plus personne ne les croit ni n’a confiance en eux.
Le comble c’est que non contents de créer en France les conditions d’une crise politique majeure, par immobilisme et incompétence, ils sont en train de semer les germes d’une nouvelle crise européenne.
Le Président, qui est le garant de nos Institutions, ne remplit pas son rôle quand il ne fait pas en sorte que la souveraineté (surtout si elle est partagée) de notre pays n’est plus assumée. Jamais la France ne s’est trouvée dans une situation aussi humiliante.
Commentaires