PARLER POUR NE RIEN DIRE…
07 mai 2014
Des moulinets dans le vide
Français Hollande s’est livré mardi matin, sur BFM-TV et RMC, à un laborieux exercice de communication. Face à Jean-Jacques Bourdin, interlocuteur tyrannique, il a dû répondre à des questions qui portaient toutes sur son sinistre bilan. Impopularité, absence de résultats, sombres perspectives, promesses non tenues, il y a gros à parier que l’on aura retenu les questions plus que les réponses.
Il a voulu donner l’image d’un président « de combat ». On a surtout vu un bateleur prêt à tout pour assurer sa survie politique, comme si des annonces péremptoires pouvaient remplacer ou influencer la réalité. Sans doute n’avait-il pas le choix. Il est difficile de commémorer deux ans d’échecs et de débâcle économique. Aussi le jeu de l’interview est-il périlleux : les questions ont toutes la forme de jugements négatifs sur son immense impopularité, sur l’échec des deux premières années du quinquennat, sur les difficultés énormes qu’il aura dans la recherche de résultats et dans la quête d’un second mandat. Car finalement cette quête apparaît comme son unique préoccupation. Pour cela, il est prêt à toutes les contradictions, à tous les reniements. Et maintenant qu’il a Manuel Valls à la tête du gouvernement à qui il a confié une feuille de route claire et précise, à ce qu’il dit, il espère que ses décisions relativement audacieuses lui profiteront plus qu’à son nouveau Premier ministre. « Je n’ai plus rien à perdre ! » : terrible aveu qui résume tout.
La colère des Français.
Evidemment, il est suffisamment aguerri pour trouver une réponse à n’importe quelle question, si accablante soit-elle ; suffisamment roué pour nous dire qu’un second mandat est moins important que le redressement du pays ; assez expérimenté pour nous faire croire que la gravité de la crise explique la désaffection de l’électorat, et donc qu’il souhaite être jugé non sur 2012 et 2013 mais sur la durée complète du quinquennat. Il reste que la vacuité de ses propos a déclenché une vague médiatique qui déjà se retourne contre lui car la colère du public a atteint un niveau tel que la protection naturelle qui enveloppe normalement la fonction présidentielle a été détruite. Les irrévérencieux s’en donnent à cœur joie : les journalistes assènent au président d’épouvantables vérités et les téléspectateurs lui présentent des cas personnels pour lesquels il ne peut rien. On a connu la même chose avec Nicolas Sarkozy : la télé-réalité est cruelle. Aux gens qui n’ont plus pour vivre que le minimum social, que voulez-vous dire sinon énumérer les recours possibles. Mais la vérité est bien plus brutale : l’état doit faire des économies, il faut donc qu’il raréfie les largesses, alors, allez expliquer à Mme Michu, qui vit avec moins de 700 euros et qui mériterait sûrement bien plus, qu’elle coûte déjà trop cher ! Une sentence inhumaine impossible à prononcer en public pour un président.
Le grand bazar…
L’épreuve aurait pu être l’occasion, pour le président, de mesurer la gravité des erreurs qu’il a commises quand il a lancé une campagne électorale foisonnant de promesses irréalistes et quand, une fois parvenu au pouvoir, il a voulu, par une sorte de coupable honnêteté, les tenir. Il lui a fallu du temps pour constater qu’il ne suffisait pas d’augmenter les impôts pour rétablir les comptes. Il n’y avait pas d’autre voie que celle de la rigueur, de la contraction de la dépense publique, de l’encouragement fiscal aux entreprises. N’ayant plus le choix, il a dû s’y conformer. Ce faisant, il fait poindre, sous la crise économique et sociale dont il est responsable, une crise politique qui va peser sur l’avenir. Car il n’a pas fini d’être confronté aux adeptes d’une vérité révélée qui continue à dicter des rêves idéologiques qui n’ont plus aucun rapport avec la mondialisation que les Français veulent ignorer ou avec l’Europe qu’ils soupçonnent de les appauvrir. Et au passage, il ne manque pas de rappeler qu’il est attaché au vote des étrangers, histoire de faire monter un peu plus le vote Le Pen, dont il se réjouira certainement si sa liste arrive en tête aux européennes.
… Et l’entourloupe !
Il a donné un coup d’accélérateur à son programme, affirme-t-il, et il demande qu’on attende que sa politique fournisse des résultats. Mais encore faut-il que les propositions soient crédibles. Que penser d’une réforme territoriale subitement précipitée, annoncée sans aucune précision sur la réforme de l’état qui devrait l’accompagner, sans dire ce qu’on fera des dettes des départements supprimés, des préfectures et sous-préfectures, de tous les fonctionnaires … sinon à retenir qu’elle donne le prétexte pour reculer les élections régionales et cantonales d’un an, que d’ici là le Sénat sera probablement repassé à droite et que la nécessaire réforme constitutionnelle deviendrait alors très aléatoire. Du tripatouillage politicien digne de la IVème République et la France ravalée au rang de république bananière ! Quant au désendettement on a déjà tout dit sur les fameux 50 milliards.
Mais dès l’instant où les institutions ne nous laissent pas le loisir de changer de président à volonté, il a raison d’exiger qu’on le juge sur la totalité du quinquennat, mais ça changera quoi ? On voulait de la clarté, on a toujours la confusion, les annonces d’aujourd’hui contredisant les précédentes.
Nous ne sommes donc pas au bout de nos surprises avec un revirement par trimestre ! On ne s'étonnera pas qu'il n'ait convaincu personne !
Il aurait été mieux inspiré de se taire !
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