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FILLON : LE COURAGE SANS L’AUDACE

 

François-Fillon-Des-paroles-et-des-actes-6-juin-2013

L'ancien Premier ministre était l'invité de l'émission « Des paroles et des actes » sur France 2, rendez-vous majeur auquel assistaient nombre de ses soutiens au premier rang desquels Jérôme Chartier, François Baroin, Christian Estrosi, Eric Ciotti... mais pas Laurent Wauquiez qui a décidé de voler de ses propres ailes, déçu par l’accord intervenu avec Jean-François Copé.

François Fillon est toujours déterminé à être candidat à l'Elysée, « par devoir» et non par envie, et il a détaillé une série de remèdes vigoureux pour sortir la France du marasme, quitte à braver l'impopularité, au nom de la vérité due aux Français.

Calme et déterminé, comme à son habitude, celui qui a dirigé le gouvernement, pendant tout le quinquennat Sarkozy, est revenu sur sa volonté de se présenter à la primaire de l'UMP en 2016, dans la perspective de l'élection présidentielle l'année suivante.

Il avait un exercice difficile à résoudre au cours de cette émission qui n’a pas fait le plein d’audience : comment justifier sa candidature alors que plane toujours l’hypothèque Sarkozy, et comment expliquer l’accord intervenu à l’UMP après les sentences très dures qu’il avait prononcées à l’automne dernier sur les conditions du scrutin. Deux sujets sur lesquels il n’était visiblement pas complètement à l’aise.

« M. Sarkozy, je l'ai suivi loyalement comme Premier ministre, on a un caractère différent, une vision différente de l'avenir… Aujourd'hui, je veux conduire mon projet politique. Nicolas Sarkozy a dit qu'il voulait se retirer de la vie politique, je ne l'ai jamais entendu dire le contraire », a-t-il argumenté, « S'il voulait revenir, les Français choisiront », a-t-il ajouté. Ce qui sous-entend une hypothétique concurrence à laquelle on peine à croire encore aujourd’hui. Il prend grand soin, néanmoins, de ne pas indisposer les sarkozystes, encore très majoritaires dans la sphère de l’UMP.

La paix intervenue à l’UMP est évidemment la bienvenue. Malgré tout, il ne peut s’empêcher de continuer à contester en filigrane l’élection à la présidence de Jean-François Copé, continue de parler des fraudes en restant imprécis sur les origines, alors qu’elles ont été marginales et partagées, et s’emploie à faire accréditer l’idée d’une direction collégiale. C’est la partie de la soirée où il aura été le moins convaincant. De même que sur le « ni-ni », question rituelle qui revient comme une antienne à chaque fois qu’un responsable UMP se trouve sur un plateau. C’est pourtant clair à chaque fois : pas d’accord avec le FN. Pour le front républicain, en cas de 2ème tour, il est plus confus. Il a oublié que Copé lui avait arraché le « ni-ni » lors de leur débat. De même qu’il commet une bévue sur le mode d’élection des municipales à deux tours et pas un comme il l’affirme d’abord, et s’en sort par une pirouette : « j’ai toujours été élu au 1er tour ! ».

Confronté, dans un dialogue correct et policé (trop ?), au ministre du Budget Bernard Cazeneuve, il a martelé le mot « vérité » face au mensonge de la campagne de François Hollande. « Ce n'est pas facile, ce n'est pas gagné d'avance, mais il faut la dire », a-t-il lancé. Face à un ministre campé dans ses certitudes idéologiques et très technocrate dans l’utilisation de ses chiffres, il ne s’en laisse pas conter (ou compter) et le renvoie aux erreurs magistrales commises depuis un an et aux 30 milliards qui vont manquer dans les caisses d’ici la fin de l’année, de quoi laisser sans voix son interlocuteur, soudain perdu.

François Fillon, qui a entamé cet hiver un tour de France pour préparer un projet d'alternance, a affirmé que les Français n'ont pas besoin d'hommes politiques qui soient des bateleurs.

Au chapitre des propositions, c’est l’expert qui connait parfaitement la situation du pays qui s’exprime. Et les remèdes seront douloureux, quoi qu’il arrive.

Il faut accepter de faire des efforts, proposant à nouveau de repousser l'âge de la retraite à 65 ans. A ses yeux, une bonne reforme égaliserait les régimes, public comme privé. Il faut progressivement ramener tous les régimes sur les mêmes conditions : même durée de cotisations, même âge de départ et, surtout, même mode de calcul de cotisations. « Je suis prêt à voter une réforme même si elle était proposée par François Hollande si elle allait dans ce sens ». Engagement sans grand risque, il est vrai, tant il a peu de chance d’être tenu.

Autre proposition : suppression de la durée légale du travail avec obligation de négociation dans les entreprises sur cette durée. Mais comme il faut, de façon urgente, un choc de compétitivité, il propose d'augmenter le temps de travail, entre 35 et 39 heures, et de répartir les gains de cet accroissement entre les salariés et l'entreprise.

« Nous allons devoir baisser de façon beaucoup plus importante les dépenses publiques et la seule manière est de baisser le nombre des emplois dans toutes les fonctions publiques, quitte à aller plus loin que le un sur deux » (non remplacement de un fonctionnaire sur deux partant à la retraite). C’est en effet le seul moyen de baisser durablement les dépenses publiques.

Il souhaite réduire la durée d'indemnisation du chômage et la lier à la formation professionnelle, idée remarquable du candidat Sarkozy en 2012 qu'il reprend à son compte.

Il a préconisé aussi une disparition de l'ISF, cet impôt imbécile mais que nul n'a osé gommer depuis sa création en 1982, en le remplaçant par une tranche d’imposition.

En conclusion il s’est évertué à convaincre de sa volonté d’aller de l’avant, face à une France qui est un pays qui a peur de tout : nucléaire, OGM, gaz de schiste, banquiers, Europe, « tout ce qui bouge, change, est nouveau. On a peur du progrès, on a perdu le sens, le culte du progrès, or un pays qui a perdu le culte du progrès est un pays condamné au déclin » de même que sans sursaut, l'Europe sera « le Titanic ».

Le courage de dire la vérité, on le lui reconnait volontiers. Pourtant il lui manque encore ce supplément de vivacité que son phrasé régulier, que son mode d’expression qui exclut la virulence, cantonnent dans le registre du devoir alors qu’on aimerait sentir l’envie. Cela viendra probablement.

 

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