ESSOUFLEMENT DE LA CROISSANCE CHINOISE
24 mai 2013
Cela avait commencé par l’abaissement de la note de la dette chinoise par Fitch puis Moody’s de « stable » à « négative ». c’est que depuis quelques temps, la croissance chinoise inspirait une inquiétude grandissante à cause de sa dépendance au crédit bancaire. Pour comprendre, il faut remonter à la crise des subprimes : le gouvernement chinois avait adopté un plan de relance massif largement assis sur la hausse des investissements, financée par les banques chinoises. Depuis, malgré tout, le PIB est en déclin : le taux de croissance est passé de 10,4% en 2010 à 9,3% en 2011 et 7,8% en 2012. Et cette décélération devrait se poursuivre.
Pour plusieurs raisons. D’abord la moindre demande en provenance d’Europe et des Etats-Unis. Mais surtout, la Chine tient un rôle d’assembleur pour le compte de ses voisins asiatiques, si bien que les produits qu’elle exporte incluent une part grandissante de composants venant de ses voisins. Et comme la valeur ajoutée des travailleurs chinois a tendance à diminuer, ceux-ci pourraient revoir leur politique. Inversement, si le pouvoir d’achat des chinois n’augmente pas, toute relance par la consommation est vouée à l’échec. Cette stratégie de développement lancée en 2011 tarde à donner ses fruits : la consommation ne décolle pas car l’épargne continue d’être privilégiée en raison de la faible couverture sociale.
De plus, le pays se trouve confronté à des surcapacités de production. Selon le FMI, le taux des capacités de production est passé de 80% en 2005 à 60ù actuellement, et la productivité des investissements diminue année après année. Il faut donc de plus en plus d’investissements pour assurer des taux de croissance de plus en plus faibles. Les conditions de financement de la croissance font peser un double risque sur l’économie chinoise : un risque de liquidité lié au mode de financement des collectivités locales avec une explosion des crédits bancaires, et un risque né de l’apparition d’un « shadow banking system » qui propose des investissements alternatifs assez opaques. Le montant des actifs accumulés entre 2008 et 2011 équivaut au montant total des actifs détenus par les banques commerciales américaines, avec une accélération vertigineuse de plus 1 000 milliards de dollars d’encours en 2013… Le total de l’encours crédit aurait atteint 198% du PIB fin 2012 !
La dette abyssale des collectivités locales est très lourde de dangers, avec des conditions qui s’apparentent à celles des « subprimes ». Elle pourrait déclencher une crise financière plus importante encore que celle qui s’était déclenchée aux Etats-Unis en 2007-2008. D’autant plus que de nombreux produits sont adossés à des projets immobiliers et ont eux aussi alimentés une « bulle » !
D’autres éléments viennent s’ajouter et ne contribuent pas à éclaircir cette situation périlleuse. Depuis le mois d’avril, le salaire minimum à Shangai a augmenté d’environ 12%. En quatre ans, il a progressé de 70% ! Les autorités locales ont de plus en plus de mal à résister aux demandes pressantes des salariés chinois qui veulent voir améliorer leurs conditions de vie. La compétitvité de la Chine diminue d’autant, mouvement aggravé par le renchérissement du yuan de 11% depuis 2008, ce qui renforce l’effet négatif des augmentations de salaires lorsqu’elles sont converties dans la devise américaine.
La chine ne sera bientôt plus l’usine du monde. Cela se traduit par une contraction de l’activité industrielle et une baisse des exportations. En conséquence, trouver du travail devient problématique pour les jeunes diplômés chinois qui prennent tout ce qui se présente, contribuant à déséquilibré le marché du travail.
Un malheur n’arrivant jamais seul, l’Europe s’est réveillée et a décidé enfin de lutter contre le dumping des produits chinois. C’est ce qui vient d’arriver, un peu tardivement, pour les panneaux solaires. Mais cela complique évidemment la tâche du nouveau gouvernement de la Chine.
Ce coup de froid sur l’économie chinoise a fait tousser les marchés qui ont plongé lourdement hier, le Japon en tête. Il faut dire aussi que les annonces du gouverneur de la Fed y ont participé. La politique monétaire des Etats-Unis pose un autre problème que j’évoquerai prochainement.
L’avenir n’est pas triste ! Enfin, façon de parler !
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